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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 3
ARRET DU 23 MARS 2023
(n° , pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/22849 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CBFHX
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Octobre 2019 -Tribunal d’Instance de PARIS – RG n° 11-18-2175
APPELANTS
Intimés à titre incident
Monsieur [H] [S]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Madame [R] [X] ÉPOUSE [S]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentés par Me Christophe PACHALIS de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K148
Assistés par Me Sandrine AGUTTES
INTIMEE
Appelante à titre incident
S.A.R.L. AS INVESTISSEMENTS venant aux droits de la SARL [Adresse 4]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée et assistée par Me Blaise GUICHON de la SELEURL HORES AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D0573
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
François LEPLAT, président
Anne-Laure MEANO, président
Aurore DOCQUINCOURT, conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE
ARRET :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par François LEPLAT, Président de chambre et par Joëlle COULMANCE, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
*****
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 19 mai 1959, à effet au 1er juillet 1959, M. [O] a consenti à M. [H] [S] un bail d’habitation, portant sur des locaux situés à [Adresse 4], au 6ème étage sur cour (local n°28), moyennant un loyer annuel de 60.000 francs, les lieux étant décrits comme « 3 petites pièces, débarras, cuisine, WC ».
Par acte sous seing privé du 4 janvier 1969 à effet du 1er avril 1969, Mme [P] [U], gérante de la société civile Toubor, a consenti à M. [H] [S] un bail d’habitation portant sur des locaux situés à [Adresse 4], 6ème étage à droite sur cour, porte au fond du couloir, moyennant le versement d’un loyer mensuel d’un montant de 40,85 francs, avec augmentations légales les lieux étant décrits comme «Entrée, chambre et débarras avec droit aux WC communs situés dans le couloir ».
Ces deux logements sont reliés par un couloir qui n’est pas compris dans ces baux mais est occupé privativement par les locataires depuis des années.
Par acte d’huissier en date du 21 mai 1987, la SCI Toubor a fait signifier à M. [H] [S] et Mme [R] [S] un congé prévu à l’article 4 de la loi du 1er septembre 1948 conférant le droit au maintien dans les lieux aux occupants de bonne foi.
Par acte authentique en date du 15 mars 2016, la SARL [Adresse 4] a acquis l’immeuble dans lequel sont situés les locaux loués susvisés.
Par acte du 17 juillet 2018, la SARL [Adresse 4] a fait assigner devant le tribunal d’instance de Paris M. [H] [S] et Mme [R] [S] pour obtenir en substance, le débouté de M. [H] [S] et Mme [R] [S] de l’ensemble de leurs demandes, le prononcé de la résiliation judiciaire des contrats de bail consentis les 19 mai 1959 et 4 janvier 1969 au visa des articles 1728-1° et 1729 du code civil et l’expulsion des intéressés du couloir et des deux logements, le paiement d’une indemnité d’occupation et de dommages-intérêts
Par jugement contradictoire entrepris du 22 janvier 2019, le tribunal d’instance de Paris a ainsi statué:
-Déboute la SARL [Adresse 4] de ses demandes de prononcé de la résiliation judiciaire des baux consentis les 19 mai et 4 janvier 1959, d’expulsion de M. [H] [S] et Mme [R] [S] et de tous occupants de leur chef, de séquestration de mobilier et de condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation ;
-Condamne solidairement M. [H] [S] et Mme [R] [S] à payer à la SARL [Adresse 4] la somme de 3.500 euros à titre de dommages et intérêts ;
-Rejette la demande de M. [H] [S] et Mme [R] [S] de condamnation de la SARL [Adresse 4] à lui payer des dommages et intérêts pour préjudice moral ainsi que leur demande au titre des frais irrépétibles ;
-Condamne M. [H] [S] et Mme [R] [S] à payer à la SARL [Adresse 4] la somme de 1.000 euros au titre du fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Condamne M. [H] [S] et Mme [R] [S] aux dépens de l’instance.
L’appel de ce jugement est l’objet de la présente instance.
Par acte authentique en date du 29 novembre 2019 la société A. S investissements, SARL, a acquis l’immeuble dans lequel sont situés les locaux loués susvisés.
Parallèlement, par acte introductif d’instance en date du 5 juin 2020, la SARL AS Investissement, venant aux droits de la SARL [Adresse 4] a assigné les locataires devant le Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Paris afin d’obtenir la restitution de l’accès au couloir commun séparant les locaux loués objet des deux baux distincts précités.
Par jugement du 21 mai 2021, le juge des contentieux de la protection a notamment rejeté le moyen tiré de la litispendance et déclaré irrecevables les demandes formées par la SARL AS Investissement.
Ce jugement a fait l’objet de deux appels de la société AS Investissements respectivement du 9 juin 2021 (Pôle 4 chambre 9 A de la cour, RG 21/10849) et du 29 juin 2021 (Pôle 4 chambre 3, RG 21/12177 (par suite d’un changement d’avocat) actuellement pendant.
Par ordonnance sur incident du 30 juin 2022, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de la société AS Investissements en jonction de la présente instance d’appel avec celle numérotée 21/10849.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l’appel interjeté le 10 décembre 2019 par M. [H] [S] et Mme [R] [S] ;
Vu les dernières écritures remises au greffe le 11 janvier 2023 par lesquelles M. et Mme [S] demandent à la cour de :
DIRE Monsieur et Madame [S] bien fondés en leur appel et les déclarer recevables,
Y faisant droit,
Sur l’appel incident de la société AS INVESTISSEMENT,
– DEBOUTER la société AS INVESTISSEMENT de sa demande en résiliation judiciaire des baux consentis les 19 mai 1959 et 4 janvier 1969 ainsi que de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Sur l’appel principal,
– INFIRMER le jugement du 3 octobre 2019 en ce qu’il a condamné Monsieur et Madame [S] à verser à la SARL [Adresse 4] la somme de 3500 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à son droit de propriété,
– [et] en ce qu’il a débouté les époux [S] de leur demande en indemnisation de leur préjudice moral,
Statuant à nouveau,
– CONDAMNER la société bailleresse à leur verser la somme de 10.000 euros en indemnisation de leur préjudice moral sur le fondement de l’article 1240 du Code civil,
– CONDAMNER la société bailleresse à verser à Monsieur et Madame [S] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du CPC,
– LA CONDAMNER aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction dans les conditions de l’article 699 du CPC.
Vu les dernières écritures remises au greffe le 6 avril 2022 au terme desquelles la société A. S investissements, venant aux droits de la SARL [Adresse 4], forme appel incident et demande à la cour de :
– PRONONCER la jonction des procédures pendantes devant le Pôle 4 chambre 3 sous le n° de RG 21/12177 et devant le Pôle 4 chambre 3 sous le n° de RG 21/10849 avec la présente instance inscrite sous le n° RG : 19 / 22849.
– DECLARER, la société AS INVESTISSEMENTS venant aux droits de la société [Adresse 4]) bien fondée en sa constitution, son appel incident et ses demandes, l’y recevoir et y faire droit,
– DEBOUTER Madame [R] [X] épouse [S] et Monsieur [T] [S] de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires,
Ce faisant :
– INFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté la société [Adresse 4] aux droits de laquelle vient la société AS INVESTISSEMENTS, de ses demandes de résiliation des deux baux des époux [S], de leur expulsion et paiement d’une indemnité d’occupation, et en ce qu’il ne lui a octroyé que la somme de 3.500 € de dommages et intérêts sur celle de 5.000 € demandée au titre des articles 544 et 1240 du code civil, et celle de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile sur les 4 000 € demandés,
– CONFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté les époux [S] de leurs demandes de dommages et intérêts pour préjudice moral, au titre des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau :
– DIRE ET JUGER que l’emprise et l’appropriation illicite par les époux [S], du couloir commun séparant leurs deux lots et leur refus de restituer l’accès et l’usage de ce couloir, constituent une cause grave, justifiant la résiliation judiciaire des deux baux séparés consentis les 19 mai 1959 et 4 janvier 1969 à Monsieur [T] [S], et ordonner la résiliation desdits baux, sous le visa des articles 1728 – 1° et 1729 du code civil,
– ORDONNER l’expulsion de Madame [R] [Z] [X] épouse [S] et de Monsieur [H] [S], ainsi que de tous occupants de leur chef, du couloir et des deux logements de part et d’autre, qu’ils occupent, au 6ème étage droite de l’immeuble sis [Adresse 4]), objets des baux consentis à Monsieur [H] [S] les 19 mai 1959 et 4 janvier 1969, avec l’assistance du Commissaire de Police et de la Force Publique si besoin est,
– DIRE qu’en ce qui concerne le mobilier, il sera fait application des articles L433-1, R433-1, L433-2, R433-2 et R433-3 du code des procédures civiles d’exécution,
– CONDAMNER solidairement Madame [R] [Z] [X] épouse [S] et Monsieur [H] [S] à verser à la société AS INVESTISSEMENTS venant aux droits de la société [Adresse 4]) mensuellement à compter de l’arrêt d’appel et jusqu’à la libération des locaux à une somme égale au montant des loyers dus par mois sur les deux baux pour 180,69 € majorée de 20%, soit 216,83 € à titre d’indemnité d’occupation outre la provision mensuelle sur charges de 81 €.
– CONDAMNER solidairement Madame [R] [Z] [X] épouse [S] et Monsieur [H] [S] à verser à la société AS INVESTISSEMENTS venant aux droits de la société [Adresse 4]) Madame et Monsieur [S] la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts sur le fondement des articles 544 et 1240 du code civil.
En tout état de cause :
– CONDAMNER solidairement Madame [R] [Z] [X] épouse [S] et Monsieur [H] [S] aux entiers dépens de première instance et d’appel sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile, et à verser à la société AS INVESTISSEMENTS venant aux droits de la société [Adresse 4]), la somme de 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et la même somme de 4 000 € au même titre pour la procédure en cause d’appel.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu’elles ont remises au greffe et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application de l’article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’est pas tenue de statuer sur les demandes tendant à ” constater “, ” donner acte “, ” dire et juger ” en ce qu’elles ne sont pas, exception faite des cas prévus par la loi, des prétentions, mais uniquement des moyens, comme c’est le cas en l’espèce.
Sur la demande de jonction de la présente instance avec celles enregistrées sous le RG 21/12177 et RG 21/10849
Aux termes des articles 367 et 368 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. Les décisions de jonction ou disjonction d’instances sont des mesures d’administration judiciaire.
Pour mémoire, les mesures d’administration judiciaire ne sont susceptibles d’aucun recours et n’ont pas à faire l’objet d’une motivation spéciale, par application de l’article 499 du code de procédure civile; la décision rendue sur la même demande par le conseiller de la mise en état, qui a rejeté la demande, ne lie pas à la cour.
En l’espèce, il n’est pas de l’intérêt d’une bonne justice de faire juger ensemble ces affaires qui, notamment, n’ont pas le même objet, ne relèvent pas des mêmes critères d’appréciation juridique et de fait (la faute susceptible d’entraîner la résiliation judiciaire du bail d’une part, l’atteinte à la propriété et restitution de celle-ci d’autre part) et peuvent être jugées indépendamment l’un de l’autre sans risque de contrariété, peu important à cet égard qu’il s’agisse des mêmes parties et du même immeuble.
La demande sera donc rejetée.
Sur la demande de résiliation judiciaire du bail
La société A. S investissements demande l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de résiliation judiciaire des baux.
Elle invoque comme devant le premier juge, la faute grave des locataires résultant de leur appropriation d’un couloir séparant leurs deux appartements et dont ils bloquent l’accès puisqu’ils ont posé sur la porte palière un verrou, sans autorisation contrairement à ce qu’il prétendent.
Elle souligne que les locataires se sont opposés aux demandes du bailleur de laisser l’accès au couloir en retirant le verrou de la porte.
De plus, la bailleresse fait valoir que des travaux sur la toiture, le grenier et les souches de cheminée n’ont pu être effectués compte tenu de l’impossibilité d’accès par l’entreprise depuis le couloir litigieux.
M. et Mme [S] soutiennent en substance qu’ils n’ont commis aucune faute et a fortiori aucune faute grave, qu’ils ont été autorisés verbalement par le bailleur à poser un verrou sur la porte palière (déjà existante), en 1969 comme c’était d’ailleurs déjà le cas sur la porte palière donnant sur le côté gauche du même étage; ils affirment avoir toujours laissé l’accès au couloir lorsque les gérants de l’immeuble le leur demandaient.
Le juge peut prononcer la résiliation du bail dès lors qu’il est établi qu’une des parties a gravement manqué à ses obligations contractuelles et il convient , le cas échéant, de tenir compte de toutes les circonstances de la cause intervenues jusqu’au jour de la décision ; la bonne foi dans l’exécution du contrat peut être prise en compte.
C’est par des motifs exacts et pertinents, qui ne sont pas utilement contredits par la société A. S investissements, laquelle ne produit en cause d’appel aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l’appréciation faite par le tribunal, et que la cour adopte, que le premier juge, après avoir exactement rappelé les dispositions des articles 1728 1° et 1729 du code civil, a retenu en substance :
– qu’il est constant et qu’il résulte en outre des pièces produites que les époux [S] occupent, en application de deux baux distincts, des locaux qui sont séparés par un couloir qui n’est pas compris dans leurs baux et qu’ils ont fait poser un verrou sur la porte palière déjà existante, donnant accès à ce couloir commun;
– que les locataires ne justifient pas avoir obtenu l’accord exprès du bailleur actuel ou d’un ancien bailleur pour poser ce verrou alors que les contrats de bail litigieux stipulent expressément l’interdiction faite au preneur de déposer ou d’embarrasser les lieux non compris dans la location « notamment … les couloirs… de la copropriété » ; que cependant, il résulte des pièces produites que le verrou a été posé en 1969 sur la porte palière déjà existante et qu’aucune preuve n’est rapportée de ce que ces circonstances auraient donné lieu à des protestations des bailleurs antérieurs pendant près de 50 ans ;
– qu’en outre la bailleresse ne produit pas d’éléments de nature à établir la réalité et l’ampleur des travaux de toiture qu’elle soutient vouloir effectuer et n’a d’ailleurs pas saisi la justice afin d’enjoindre en urgence les défendeurs de faire déposer le verrou litigieux.
La cour ajoute que par acte d’huissier du 2 janvier 2018, la société A. S investissements a certes mis en demeure M. et Mme [S] de rétablir l’accès au couloir commun par la dépose du verrou installé sur la porte palière, afin de libérer l’accès au grenier et la toiture de l’immeuble, où elle a exposé souhaiter entreprendre des travaux qu’il fallait auparavant faire chiffrer, et que par, procès-verbal du 2 mai 2018, il a été constaté par huissier de justice que la porte était toujours fermée par un verrou empêchant l’accès au couloir desservant les 2 lots donnés en location et l’accès à la toiture de l’immeuble.
Mais en premier lieu il n’est pas établi que les locataires aient fait obstruction à tout accès au couloir et au vasistas s’y trouvant et permettant d’accéder au toit puisqu’au contraire, dans un courrier du 2 juin 2017, M. [S] a proposé au gestionnaire de l’immeuble de laisser accéder au couloir , sur rendez vous, toute personne devant accéder au toit, et même de remettre une clé au gérant, indiquant avoir toujours procédé comme cela auparavant.
De plus, par courrier du12 avril 2017, M. [S] a indiqué au gestionnaire de l’immeuble que l’accès sur le toit pouvait aussi se faire par l’appartement situé au 6ème étage, mais côté gauche, lequel est entièrement vide et comprend un vasistas permettant un accès aussi aisé au toit.
Aucun élément ne contredit utilement ces déclarations, aucune réponse précise du bailleur n’est avérée sur ces points.
En outre, si le bailleur allègue vouloir faire des travaux de rénovation de la charpente et de la toiture, il ne justifie pas que de tels travaux pourraient effectivement être réalisés en utilisant le couloir litigieux ni, par conséquent, que la réalisation de tels travaux est bloquée du fait de la réticence des locataires à déposer le verrou; en effet, il résulte du procès-verbal de constat d’huissier de justice du 14 octobre 2020, établi à la demande des époux [S], que le couloir litigieux est d’une largeur d’un mètre seulement, que sa longueur totale d’”environ 3,90 mètres” comprend une partie rétrécie de 73,5 cm de large ; il résulte d’ailleurs de la description faite par l’huissier de justice que ce couloir traverse en pratique, de part en part, ce qui constitue de fait le logement de M. et Mme [S] et qu’il en dessert directement certaines pièces (wc, cuisine, salle d’eau, une chambre et un séjour), et ce depuis des dizaines d’années.
Enfin, dans les courriers précités, M. [S] explique au gestionnaire avoir placé le verrou sur la porte palière pour des raisons de sécurité afin de limiter l’accès aux deux biens loués depuis le palier de l’étage, ce que la configuration des lieux décrits par huissier de justice permet de concevoir, sans mauvaise foi de la part des locataires.
Au vu de ces éléments, il n’est pas démontré que M. et Mme [S] aient commis en l’état une faute contractuelle d’une gravité de nature à justifier la résiliation de baux conclus respectivement en 1959 et 1969.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point ainsi que sur le rejet des demandes subséquentes relatives notamment à l’expulsion.
Sur les dommages-intérêts octroyés au bailleur
M. et Mme [S] demandent l’infirmation du jugement en ce qu’il les a condamnés à payer la somme de 3.500 euros à titre de dommages-intérêts pour atteinte au droit de propriété de la société A. S investissements; ils font valoir qu’aucune preuve du préjudice allégué n’est rapportée.
La société A. S investissements demande à la cour de lui octroyer la somme de 5.000 euros à ce titre ; elle invoque l’atteinte à son droit de propriété et l’impossibilité de faire chiffrer les travaux de toiture projetés faute d’accès depuis le couloir litigieux.
Toutefois, au vu des motifs précités, la société A. S investissements ne démontre pas avoir subi, par la faute de M. et Mme [S], un préjudice justifiant l’octroi de dommages-intérêts, étant observé au surplus qu’elle ne demande pas, dans le cadre de la présente instance, la restitution du couloir litigieux ni le rétablissement de son droit de propriété sur celui-ci, sur lequel au demeurant le présent arrêt ne statue pas.
Le jugement sera donc infirmé sur ce point et la demande de dommages-intérêts de la société A. S investissements sera rejetée.
Sur la demande de dommages intérêts de M. et Mme [S]
M. et Mme [S] demandent l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté leur demande de réparation de leur préjudice moral ; ils font valoir notamment leur grand âge, ayant plus de 80 ans, et la mauvaise foi de la bailleresse au visa de l’article 1240 du code civil alors qu’ils n’ont jamais eu de difficulté avec les précédents bailleurs .
Toutefois ils ne justifient pas d’un préjudice imputable au comportement de la bailleresse ni d’une mauvaise foi de cette dernière leur ayant causé un préjudice particulier.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur l’article 700 du code de procédure civile :
Le sens de la présente décision ne justifie pas d’infirmer le jugement en ce qui concerne les dépens et l’indemnité au titre de l’article 700 au titre de la première instance.
Au titre de l’instance d’appel, il est équitable d’allouer à M. et Mme [S] une indemnité de procédure de 2.000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Rejette la demande de jonction des procédures RG 21/10849 et RG 21/12177 avec la présente instance, numérotée RG 19/22849 ;
Confirme, en ses dispositions frappées d’appel, le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a condamné solidairement M. [H] [S] et Mme [R] [S] à payer à la SARL [Adresse 4], aux droits de laquelle vient la société A. S investissements, la somme de 3.500 euros à titre de dommages et intérêts;
Et statuant à nouveau,
Rejette la demande de la société A. S investissements en condamnation de M. [H] [S] et Mme [R] [S] à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts;
Rejette toutes demandes plus amples ou contraires,
Et y ajoutant,
Condamne la société A. S investissements à payer à M. [H] [S] et Mme [R] [S] la somme globale de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société A. S investissements aux dépens d’appel,
Rejette toutes autres demandes.
La Greffière Le Président