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VCF/LL
[G] [V]
C/
COMMUNE DE [Localité 5]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 11 AVRIL 2023
N° RG 21/01250 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FZEI
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : jugement du 30 juillet 2021,
rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chaumont
RG : 11-18-000419
APPELANT :
Monsieur [G] [V]
né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 4] (90)
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Florent SOULARD, membre de la SCP SOULARD- RAIMBAULT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 127
INTIMÉE :
LA COMMUNE DE [Localité 5], représentée par son Maire en exercice, domicilié es qualités :
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Anne GESLAIN, membre de la SELARL DU PARC – CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 91
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 07 février 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre, ayant fait le rapport,
Sophie DUMURGIER, Conseiller,
Sophie BAILLY, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT,
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 11 Avril 2023,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon bail d’habitation sous seing privé du 1er octobre 2014, la commune de [Localité 5] a loué à M. [G] [V] le bâtiment constituant l’ancien presbytère du village, en contrepartie d’un loyer mensuel de 700 euros, payable d’avance, révisable au 1er janvier de chaque année, pour la première fois en 2016, outre charges.
L’état des lieux d’entrée a été contradictoirement établi le 3 octobre 2014.
Par ailleurs, le 11 octobre 2014, une liste des travaux à réaliser a été contradictoirement dressée et co-signée.
Par acte du 26 juillet 2018, la commune de [Localité 5] a fait délivrer à M. [V] un commandement de payer la somme principale de 7 250,78 euros, soit 6 954,17 euros au titre des loyers échus au 31 mai 2018 et 296,61 euros au titre de l’eau et de l’assainissement. Ce commandement visait la clause résolutoire du bail et reproduisait les dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.
Par acte du 4 octobre 2018, la commune de [Localité 5] a fait citer M. [V] en résiliation de bail, libération des lieux et expulsion, et condamnation au paiement de l’arriéré locatif et d’une indemnité d’occupation.
M. [V] s’est opposé à la résiliation et a demandé la révision du loyer et des dommages-intérêts.
Par jugement du 12 avril 2019, le tribunal d’instance de Chaumont a :
– déclaré recevable la demande de la commune
– constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail à la date du 26 septembre 2018,
– condamné M. [V] à payer à la commune, en deniers ou quittances, la somme arrêtée provisoirement à 5 000 euros,
– autorisé M. [V] à s’acquitter de sa dette par 35 mensualités de 210 euros, le 15 de chaque mois et pour la première fois le 15 du mois suivant la signification du jugement, en sus des loyers courants, étant rappelé que la dernière mensualité doit impérativement apurer le solde de la dette,
– suspendu les effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais, laquelle sera réputée ne jamais avoir joué si M. [V] se libère dans les délais et modalités fixés, en sus du paiement du loyer courant,
– dit qu’à défaut de paiement de l’arriéré ou du loyer courant :
. la totalité de la somme provisoire restant due deviendra immédiatement exigible,
. la clause résolutoire reprendra son plein effet,
. faute de départ volontaire des lieux loués, il pourra être procédé à l’expulsion de M. [V] et de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique et d’un serrurier passé le délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, conformément aux articles L. 412-1 et suivants, R. 411-1 et suivants et R. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
. le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d’exécution,
. M. [V] sera tenu au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi,
– ordonné avant dire droit sur les autres demandes dont il était saisi, une expertise quant à la révision du loyer, l’expert ayant essentiellement pour mission de décrire les désordres affectant le logement donné en location, de dire s’il est conforme aux caractéristiques d’un logement décent, de donner son avis sur son caractère habitable, de décrire les travaux à entreprendre et de donner son avis sur les réductions de loyer suggérées par le locataire,
– réservé les dépens.
L’expertise a été réalisée par M. [P] qui a déposé son rapport le 29 octobre 2019 en concluant notamment de la manière suivante :
– le logement est d’une exceptionnelle qualité architecturale, mais il est ancien et vétuste,
– il répond aux normes minimales d’habitabilité,
– le loyer de 711,82 euros est globalement conséquent mais ramené à la superficie de l’espace habitable de 180 m², il est extrêmement bas, le ratio étant de moins de 4 euros le m²,
– il a été relevé 5 non-conformités aux caractéristiques d’un logement décent :
. le logement génère un risque pour la santé du fait du développement d’un champignon et d’un taux d’humidité élevé, causés par des fuites provenant du bac à douche installé sur un plancher en bois, selon une technique inadaptée à l’habitat ancien ayant d’ailleurs provoqué la fissuration d’une poutre ; d’autre part, l’évacuation de l’humidité de l’air n’est pas assurée car la VMC ne fonctionne pas,
. les protections aux infiltrations d’eau météorite ne sont pas garanties: les souches de cheminées en toiture sont protégées par des mitres en terre cuite qui devraient être remplacées par des capotages en zinc et les cheminées ne sont pas équipées de trappes,
. la sécurité physique n’est pas complètement garantie en raison d’une part d’absence de garde-corps aux fenêtres du premier étage et d’autre part d’absence de ventilation de l’espace cuisine alors que la cuisinière est alimentée par du gaz,
. les menuiseries extérieures ne suffisent pas à garantir l’étanchéité à l’air du logement,
– il a été préconisé en sus de la réalisation des travaux destinés à supprimer ces non-conformités, la réalisation de travaux d’amélioration de l’installation électrique et la révision du bon fonctionnement de la ventilation primaire de la plomberie ; en outre, il a été suggéré de réviser la couverture du garage, de refaire les plafonds du séjour et de l’étage, et de traiter les joints de parquet du séjour, sauf à refaire ce sol.
Par jugement du 30 juillet 2021, le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Chaumont a :
– constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 1er octobre 2014 entre les parties sont réunies à la date du 26 septembre 2018,
– ordonné en conséquence à M. [G] [V] de libérer les lieux et d’en restituer les clés dès la signification du jugement,
– dit qu’à défaut pour M. [G] [V] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés, la commune de [Localité 5] pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique,
– condamné M. [G] [V] à verser à la commune de [Localité 5] la somme de 8 109,07 euros avec les intérêts à compter du jugement,
– condamné M. [G] [V] à verser à la commune de [Localité 5] une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu’il aurait été si le contrat s’était poursuivi, soit 570,05 euros, à compter du 29 mai 2020 et jusqu’a la date de la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la restitution des clés,
– débouté les parties de leur demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [G] [V] aux entiers dépens,
– dit qu’il n’y a pas lieu de prononcer l’exécution provisoire.
M. [V] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 27 septembre 2021.
Aux termes du dispositif de ses conclusions n°4 notifiées le 11 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens développés au soutien des prétentions, M. [V] demande à la cour de :
‘ infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :
– lui a ordonné de libérer les lieux et de restituer les clés dès la signification du jugement,
– a dit qu’à défaut pour lui d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés, la commune de [Localité 5] pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique,
– l’a condamné à verser à la commune de [Localité 5] :
. la somme de 8 109,07 euros avec les intérêts à compter du jugement,
. une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu’il aurait été si le contrat s’était poursuivi, soit 570,05 euros, à compter du 29 mai 2020 et jusqu’a la date de la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la restitution des clés,
– a débouté les parties de leur demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– l’a condamné aux entiers dépens,
‘ statuant à nouveau,
– déclarer irrecevables les demandes nouvelles contenues dans les conclusions n°3 de la commune de [Localité 5] par application de l’article 910-4 du code de procédure civile,
– débouter la commune de [Localité 5] de son appel incident et de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– condamner la commune de [Localité 5] à lui payer la somme de 6 750 euros à titre de réduction de loyers ou indemnité pour préjudice de jouissance pour la période allant du mois de janvier 2015 à fin septembre 2018,
– fixer le montant de l’indemnité d’occupation due à compter du mois d’octobre 2018 à la somme mensuelle de 1 euro ou à tout le moins la réduire dans les plus larges proportions,
– condamner la commune de [Localité 5] à lui payer :
. la somme de 1 442,11 euros au titre du trop perçu arrêté au mois de novembre 2019,
. la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts,
– condamner la commune de [Localité 5] :
. aux entiers dépens de première instance et d’appel qui comprendront notamment les frais d’expertise,
. à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes du dispositif de ses conclusions n° 4 notifiées le 24 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens développés au soutien des prétentions, la commune de [Localité 5] demande à la cour, au visa de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et des articles 848 et suivants du code de procédure civile, de :
‘ déclarer l’appel de M. [V] mal fondé et l’en débouter,
‘ la recevoir en son appel incident,
En conséquence,
‘ réformer le jugement déféré en ce qu’il a condamné M. [V] à lui verser :
– la somme de 8 109,07 euros avec les intérêts à compter du jugement,
– une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu’il aurait été si le contrat s’était poursuivi, soit 570,05 euros, à compter du 29 mai 2020 et jusqu’a la date de la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la restitution des clés,
‘ pour le surplus, confirmer le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
‘ déclarer les demandes de M. [V] mal fondées et l’en débouter,
‘ débouter M. [V] de sa demande tendant à déclarer ses conclusions n°3 irrecevables,
‘ condamner M. [V] à lui verser la somme de 32 456,25 euros arrêtée provisoirement au 22 décembre 2022, et la somme mensuelle de 723,37 euros à compter du 1er janvier 2023 jusqu’à parfaite libération des lieux,
‘ condamner M. [V] à lui verser la somme de 893,27 euros arrêtée provisoirement au 22 décembre 2022 correspondant aux rôles d’eau dus directement à la commune,
‘ fixer le montant de l’indemnité d’occupation due par M. [V] postérieurement au 22 décembre 2022 à la somme mensuelle de 723,37 euros, outre indexation, jusqu’à parfaite libération des lieux,
‘ condamner M. [V] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance,
En tout état de cause,
– condamner M. [V] aux entiers dépens, en ce compris le montant des frais d’expertise qu’elle a avancés, soit 915,96 euros,
– condamner M. [V] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La clôture a été prononcée le 26 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
‘ A titre liminaire, la cour constate que le jugement déféré n’est pas critiqué en ce qu’il a constaté à effet du 26 septembre 2018 la résiliation du bail liant les parties.
Consécutivement, la cour ne peut que confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
– ordonné à M. [V] de libérer les lieux loués et d’en restituer les clefs à la commune de [Localité 5]
– à défaut d’exécution volontaire, ordonné l’expulsion de M. [V] et de tous occupants de son chef,
étant précisé que si M. [V] a demandé la réformation de ces dispositions du jugement dont appel, il n’a développé aucun moyen au soutien de cette prétention.
‘ Sur la recevabilité des demandes de la commune de [Localité 5] tendant à la condamnation de M. [V] au paiement des sommes de 32 456,25 euros et de 893,27 euros, arrêtées provisoirement au 22 décembre 2022
Il résulte du premier alinéa de l’article 910-4 du code de procédure civile que l’intimé doit, à peine d’irrecevabilité, présenter, dès ses premières conclusions notifiées dans le délai prescrit par l’article 909 du même code, l’ensemble de ses prétentions sur le fond.
Le deuxième alinéa de l’article 910-4 précise :
– d’une part que demeurent néanmoins recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait,
– d’autre part que conformément à l’alinéa 2 de l’article 802 du même code, demeurent également recevables notamment les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu’à l’ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l’objet d’aucune contestation sérieuse.
En l’espèce, dans ses premières conclusions notifiées le 22 mars 2022 (ainsi que dans ses conclusions n°2 notifiées le 20 septembre 2022) la commune de [Localité 5] demandait à la cour de condamner M. [V] au paiement des sommes suivantes :
– 8 550,07 euros arrêtée provisoirement au 7 mars 2022,
– 723,37 euros par mois, postérieurement à cette date, à titre d’indemnité d’occupation,
– 244,33 euros arrêtée provisoirement au 7 mars 2022 au titre des charges d’eau.
Or, dans ses conclusions n°3 notifiées le 9 janvier 2023 (ainsi que dans ses conclusions n°4 notifiées le 23 janvier 2023), elle a porté ses demandes aux sommes suivantes :
– 32 456,25 euros arrêtée provisoirement au 22 décembre 2022,
– 723,37 euros par mois, postérieurement à cette date, à titre d’indemnité d’occupation,
– 893,27 euros arrêtée provisoirement au 22 décembre 2022 au titre des charges d’eau.
La commune n’a fait
– d’une part qu’actualiser les sommes réclamées au titre des loyers, indemnités d’occupation et charges, étant précisé que l’obligation de M. [V] au paiement des loyers convenus jusqu’au 26 septembre 2018, date de résiliation du bail, d’indemnités d’occupation à compter de cette date, et des charges notamment d’eau consommée ne fait l’objet d’une contestation ni dans son principe, ni même dans son montant, M. [V] discutant seulement de certains paiements non considérés et de sa propre créance indemnitaire : cf notamment page 4 de ses dernières conclusions,
– d’autre part que tirer conséquence du jugement rendu le 16 août 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Chaumont qui a notamment ordonné la restitution à M.[V] de la somme de 22 500 euros, saisie en vertu de mesures d’exécution annulées, et réimputée au débit de son compte locatif.
Dans ces circonstances, la fin de non-recevoir soulevée par M. [V] ne peut pas prospérer, toutes les demandes de la commune devant être déclarées recevables.
‘ Sur la période d’octobre 2014 à septembre 2018 compris
Sur cette période, M. [V] devait régler le loyer contractuellement convenu.
Il résulte des décomptes produits aux débats par la commune et des propres écritures de M. [V] qu’à la date du 30 septembre 2018, il était débiteur de la somme de 5 626,20 euros au titre des loyers échus jusqu’en septembre 2018 compris.
M. [V] soutient avoir subi des troubles de jouissance en raison de l’état des lieux loués et en page 11 de ses dernières conclusions, il indique que la somme de 150 euros par mois retenue par le premier juge le satisfait.
C’est la commune de [Localité 5] qui critique ce chef du jugement déféré.
Selon l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version en vigueur au 1er octobre 2014, le bailleur était tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.
Les caractéristiques d’un logement décent sont précisées par le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 ; dans sa version applicable au 1er octobre 2014, l’article 2 de ce décret prescrivait notamment que :
– le clos et le couvert doivent être assurés, le logement devant être protégé contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau.
Or, l’expert a constaté que les mitres en terre cuite sur les souches de cheminée en toiture ne protégeaient pas des infiltrations d’eau météorite, ce que la commune ne conteste pas. Par ailleurs, elle n’ignorait pas la présence d’infiltrations d’eau, puisque la liste des travaux à effectuer dressée le 11 avril 2014 mentionnait ceci : ‘Salon – soucher la cheminée – problème infiltration eau’ ; et il n’est ni allégué, ni a fortiori justifié de la réalisation effective de travaux sur la cheminée du salon.
L’expert a également constaté que les fenêtres n’étaient pas suffisamment étanches à l’air pour garantir le clos, constatation que ne discute pas la commune.
Sur ce point, la commune a donc manqué à ses obligations.
– les dispositifs d’ouverture et de ventilation des logements doivent permettre un renouvellement de l’air adapté aux besoins d’une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements.
Or, l’expert a constaté d’une part que l’espace cuisine n’est pas ventilé comme il se doit alors que la cuisinière est alimenté par du gaz et que l’évacuation de l’humidité de l’air n’est pas assurée en raison du dysfonctionnement de la VMC.
La commune ne discute pas davantage ces constats. Elle fait toutefois observer que la cuisinière à gaz a été installée par M. [V], le logement étant loué avec une cuisine non équipée et non aménagée et qu’il appartenait à M. [V] d’installer un appareil en adéquation avec les caractéristiques du logement. Néanmoins, la cuisine d’un logement doit pouvoir être équipée d’un appareil de cuisson fonctionnant soit au gaz, soit à l’électricité et la photographie n°6 figurant en page 11 du rapport d’expertise démontre qu’il était structurellement prévu a minima la possibilité pour le locataire d’installer une cuisinière à gaz, ce qui supposait la présence des ventilations imposées dans une telle hypothèse.
Sur ce point, également la commune a manqué à ses obligations.
– les dispositifs de retenue des personnes, dans le logement et ses accès, tels que garde-corps des fenêtres, escaliers, loggias et balcons, doivent être dans un état conforme à leur usage.
Il n’est pas contesté que les fenêtres de l’étage ne sont pas équipés de garde-corps.
Mais sur ce point, la commune se référe à la jurisprudence de la Cour de cassation telle qu’elle résulte de l’arrêt rendu le 22 juin 2022, par la troisième chambre civile, sous le n°21-10.512, selon laquelle le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 n’impose pas d’installer des garde-corps dans les immeubles anciens qui en seraient dépourvus. Elle n’a donc pas manqué à son obligation de mise à disposition d’un logement décent en n’équipant pas les fenêtres de l’étage de garde-corps, étant observé en outre que M. [V] ne s’est jamais plaint de l’absence d’un tel équipement.
Indépendamment des deux non-conformités relevées ci-dessus aux critères de décence, il ressort de l’expertise que l’aménagement d’une salle de bains à l’étage a été réalisé de manière inadaptée, ce vice de conception initial étant à l’origine d’une fuite qui ne peut pas être imputée à un manquement du locataire à son obligation d’entretien ou de jouissance paisible des lieux loués.
Or cette fuite génére de l’humidité et le développement d’un champignon qui n’a certes pas été constaté par l’expert mais qui est objectivé sur les photographies, qui lui ont été transmises avec un dire de M. [V] et qu’il a parfaitement analysées, et fragilise certains éléments de la structure de l’immeuble.
Il résulte de ce qui précède que le premier juge a correctement apprécié les troubles de jouissance subis par M. [V] et en assuré la juste réparation à hauteur de 150 euros par mois.
Sur la période de janvier 2015, premier mois au titre duquel M. [V] présente sa demande d’indemnisation, à septembre 2018, il convient donc de déduire de la dette locative de M. [V] la somme de 6 750 euros, soit 45 mois x 150 euros.
En conséquence, sur la période d’octobre 2014 à septembre 2018, le compte locatif entre les parties est finalement créditeur au profit de M. [V] de 1 123,80 euros soit la différence entre sa dette locative de 5 626,20 euros et sa créance indemnitaire de 6 750 euros.
‘ Sur la période d’octobre 2018 jusqu’à la libération effective des lieux :
A compter d’octobre 2018, M. [V] n’est plus débiteur du loyer contractuellement convenu mais d’une indemnité mensuelle d’occupation dont le montant doit être fixé au regard des caractéristiques du logement dans lequel il s’est maintenu sans droit ni titre, créant ainsi un préjudice financier à la commune.
Au regard de ce qui a été précédemment jugé, l’indemnité d’occupation ne peut pas être fixée au montant du loyer comme le demande la commune.
Elle ne peut pas davantage être fixée à un euro symbolique ainsi que le demande M. [V] dans la mesure où le logement n’est nullement insalubre et permet de disposer d’une surface habitable conséquente dans un bâtiment doté d’un cachet architectural et d’un jardin d’agrément, étant observé que les nuisances, dont il affirme souffrir en raison de la présence d’un point de collecte des ordures ménagères situé à proximité, sans autre précision, de ce bâtiment, ne sont objectivées par aucun élément de quelque nature qu’il soit.
En conséquence, l’indemnité d’occupation doit être fixée au montant du loyer convenu, déduction faite de 150 euros par mois, soit en reprenant le décompte locatif établi par la commune, à :
– 553,61 euros d’octobre à décembre 2018,
– 561,52 euros pour 2019,
– 570,05 euros pour 2020,
– 573,37 euros à compter de janvier 2021.
Globalement sur la période d’octobre 2018 à décembre 2022, la commune aurait ainsi dû encaisser la somme de 29 000,55 euros.
Il ressort des pièces produites aux débats par les parties que sur cette même période, il a été versé :
– par la CAF la somme de 3 126 euros au titre d’un rappel d’allocations logement et celle de 1 494,89 euros au titre des allocations logement de juillet 2019 à août 2020,
– par M. [V] :
. 8 x 210 euros = 1 680 euros
. en juin, juillet, octobre et décembre 2019 : 2 812,08 euros
– par virement bdf en mai, juillet et août 2022 : 4 963,16 euros
soit un total de 14 076,13 euros.
En conséquence, sur la période d’octobre 2018 à décembre 2022, le compte locatif entre les parties est créditeur de 14 924,42 euros en faveur de la commune de [Localité 5].
Par ailleurs, il convient de condamner M. [V] à payer une indemnité d’occupation de 573,37 euros par mois à compter de janvier 2023 jusqu’à la date de libération effective des lieux à la commune.
‘ Sur les charges d’eau
Il est justifié par la commune d’une créance résiduelle à ce titre d’un montant global de 893,27 euros au 22 décembre 2022.
Ainsi au titre du solde du compte locatif de M. [V], arrêté au 22 décembre 2022, comprenant les loyers, les indemnités d’occupation et les charges d’eau, il y a lieu de le condamner au paiement de la somme de 14 693,89 euros, soit [(14 924,42 euros + 893,27 euros) – 1 123,80 euros].
‘ M. [V] réclame 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation des préjudices causés par la procédure abusive engagée à son encontre par la commune de [Localité 5].
Or, la solution donnée au présent litige révèle que la commune n’a commis aucun abus dans son droit d’agir en justice pour faire valoir ses droits.
Il convient donc de débouter M. [V] de sa demande indemnitaire, le jugement déféré devant être complété sur ce point.
‘ Sur les frais de procès
Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a mis les dépens de première instance à la charge de M. [V], sauf à prévoir que les frais d’expertise seront partagés par moitié entre les parties.
Les dépens d’appel doivent être supportés par M. [V].
Les conditions d’application de l’article 700 du code de procédure civile ne sont réunies qu’en faveur de la commune de [Localité 5].
S’il convient de confirmer le jugement déféré en sa disposition relative aux frais de première instance non compris dans les dépens, il y a lieu de mettre à la charge de M. [V] une indemnité de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens que l’intimée a été contrainte d’exposer en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant dans les limites de l’appel,
Déclare recevables toutes les demandes présentées en cause d’appel par la commune de [Localité 5],
Confirme le jugement dont appel, sauf :
– en ce qu’il a condamné M. [G] [V] à payer à la commune de [Localité 5]
. 8 109,07 euros outre intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2021,
. une indemnité mensuelle d’occupation de 570,05 euros à compter du 29 mai 2020 jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la restitution des clefs,
– à préciser que la condamnation de M. [G] [V] aux dépens de première instance ne concerne pas les frais de l’expertise judiciaire réalisée par M. [P] qui doivent être partagés par moitié entre les parties,
Statuant à nouveau sur les points infirmés,
Condamne M. [G] [V] à payer à la commune de [Localité 5] :
– la somme de 14 693,89 euros outre intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2021 sur le principal de 8 109,07 euros et à compter du 9 janvier 2023 sur celui de 6 584,82 euros, au titre des loyers et indemnités d’occupation échus au 31 décembre 2022 et des charges d’eau échues au 22 décembre 2022,
– une indemnité mensuelle d’occupation de 573,37 euros à compter du 1er janvier 2023 jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la restitution des clefs,
Ajoutant,
Déboute M. [G] [V] de sa demande indemnitaire pour procédure abusive,
Condamne M. [G] [V] :
– aux dépens d’appel,
– à payer à la commune de [Localité 5] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
Le Greffier, Le Président,