3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N° .
N° RG 21/03350 – N° Portalis DBVL-V-B7F-RV6P
S.A. LOCAL.FR
C/
S.C.S. GOPMJ
S.A.R.L. KAD SERVICES 7
Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :Me Antoine DI PALMA
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 02 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame Morgane LIZEE, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 16 Février 2023
devant Madame Olivia JEORGER-LE GAC, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 02 Mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
S.A. LOCAL.FR, immatriculée au RCS de BOURG-EN-BRESSE sous le n°331 221 150, agissant en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Antoine DI PALMA avocat postulant au barreau de RENNES
Représentée par la SELARL BENOIT-LALLIARD-ROUANET avocat plaidant au barreau de LYON
INTIMEES :
GRAND OUEST PROTECTION MANDATAIRE JUDICIAIRE, prise en lapersonne de Maître [K] [J], en qualité de liquidateur judiciaire de la société KAD SERVICES 7, désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Rennes en date du 06 octobre 2021
assignée en intervention forcée par acte d’huissier de justice en date du 10 décembre 2021
[Adresse 5]
[Localité 4]
n’ayant pas constituée avocat
S.A.R.L. KAD SERVICES 7, immatriculée au RCS de RENNES sous le n°850 775 339, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Jean-Marie BERTHELOT avocat plaidant au barreau de RENNES
****
La société KAD SERVICES 7, dont la gérante est Madame [Z], a été créée le 14/05/2019 et exploite une petite activité de « commerce de textile ». Son chiffre d’affaires est très faible et s’est élevé
– En avril 2020, à la somme de 731 euros ;
– En mai 2020, à la somme de 220 euros ;
– En juin 2020, à la somme de 450 euros.
Le 16 juin 2019, une salariée de la société LOCAL.FR, Madame [D] [W], s’est présentée dans les locaux de la société KAD SERVICES 7 afin de lui vendre une prestation de création de site internet, et un contrat a été signé, prévoyant les prestations suivantes:
– une prestation technique correspondant à la création du site web et sa mise en ligne, facturée à hauteur de 816 € TTC ;
– une prestation intitulée « e-commerce platinum », facturée à hauteur de 11.462,40 € TTC, réglable au moyen de 48 mensualités de 238,80 € s’échelonnant du mois de septembre 2019 au mois d’août 2023.
Compte tenu de la situation financière de l’entreprise et de sa récente création, Madame [Z] aurait finalement décidé le 18 juin 2019, sur le conseil de son comptable, de se rétracter.
Elle aurait effectué la démarche par téléphone.
Par courriers recommandé en date des 23 octobre 2019 et 3 juin 2020, il lui a été adressé des mises en demeure de régler à la société LOCAL.FR la somme de 14.774,08 euros.
Suivant procès-verbal de signification du 19.08.2020, la société LOCAL.FR a délivré à la société KAD SERVICES 7, une ordonnance en date du 29 juillet 2020 portant injonction de payer la somme de 3.442,80 euros en principal, fondée sur une facture émise le 04/07/2019 numérotée FA078362.
Par courrier du 9 septembre 2020, la société KAD SERVICES 7 a formé opposition à l’encontre de cette ordonnance.
Par jugement du 20 mai 2021, le tribunal de commerce de RENNES a:
– jugé recevable l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer,
– prononcé la nullité du contrat de prestations de services,
– débouté la société KAD SERVICES 7 de sa demande de dommages et intérêts,
– condamné la société LOCAL FR à payer à la société KAD SERVICES 7 la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté le surplus des demandes,
– condamné la société LOCAL FR aux dépens comprenant les frais d’injonction de payer.
La société LOCAL FR a fait appel de la décision.
La société KAD SERVICES 7 a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire du 06 octobre 2021 et la société GOPMJ représentée par Me [K] [J] a été désignée liquidateur judiciaire.
Par acte du 10 décembre 2021, la société LOCAL FR a assigné le liquidateur judiciaire en intervention forcée.
Par conclusions du 29 septembre 2021, la société LOCAL FR a demandé que la Cour:
– infirme le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de RENNES le 20 mai 2021,
– juge que le contrat a été régulièrement conclu ;
– juge que la société LOCAL.FR a valablement exécuté ses obligations contractuelles à l’égard de la société KAD SERVICES 7;
– juge que la société KAD SERVICES 7 a manqué à ses obligations contractuelles à l’égard de la société LOCAL.FR ;
– condamne la société KAD SERVICES 7 à payer à la société LOCAL.FR la somme globale de 14 774,08 € ;
– condamne la société KAD SERVICES 7 à payer à la société LOCAL.FR la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– condamne la société KAD SERVICES 7 aux entiers dépens de l’instance ;
– déboute la société KAD SERVICES 7 de l’intégralité de ses prétentions, fins et moyens plus
amples et/ou contraires.
Par conclusions du 15 juillet 2021, la société KAD SERVICES 7 a demandé que la Cour:
– confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts,
– subsidiairement, déclare la créance de la société LOCAL.FR infondée
– en tout état de cause, condamne la société LOCAL.FR à verser à la société KAD SERVICES 7 la somme de 2.000 euros au titre de l’article L.442-1 du Code de commerce
– déboute La société LOCAL.FR, de toutes ses demandes fins et prétentions,
– condamne la société LOCAL.FR, au paiement de la somme de 2.500€ en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamne La société LOCAL.FR aux entiers dépens d’appel.
La société GOPMJ ès-qualités n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 02 février 2023.
Par avis du 10 février 2023, le conseiller de la mise en état a demandé
– à la société LOCAL FR de justifier de sa déclaration de créance au passif de la procédure collective de la société KAD SERVICES 7
– la société KAD SERVICES 7 de présenter toutes observations utiles sur la recevabilité de ses demandes, étant dessaisie de ses droits et le liquidateur n’ayant pas pris de conclusions.
La société KAD SERVICES 7 a présenté ses observations par note du 10 février 2023.
La société LOCAL FR a justifié de sa déclaration de créance par note du 13 février 2023.
MOTIFS DE LA DECISION:
L’ordonnance de clôture du 02 février 2023 est rabattue afin de pouvoir prendre en considération les observations et pièces sollicitées par le conseiller de la mise en état, la clôture étant de nouveau prononcée à l’audience des plaidoiries.
La société LOCAL FR a déclaré une créance de 16.774,08 euros entre les mains de la SELARL GOPMJ ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société KAD SERVICES 7.
La société KAD SERVICES 7 peut défendre seule aux prétentions émises contre elle mais ne peut formuler aucune prétention reconventionnelle, son mandataire judiciaire n’ayant pas conclu.
Ses prétentions indemnitaires sont ainsi irrecevables.
La société KAD SERVICES 7 a signé le 19 juin 2019, en son commerce, un contrat prévoyant la création d’un site internet et la souscription d’un abonnement e-platinum d’une durée de 48 mois destinées à promouvoir son activité, moyennant la somme de 12.278,40 euros TTC payables en deux mensualités de 408 euros (frais techniques) et 48 mensualités de 238,80 euros (abonnement e-platinum).
Aucune mensualité n’a jamais été payée et dès les 14 août 2019, la dirigeant de la société KAD SERVICES 7 a indiqué qu’elle ne paierait rien, renvoyant vers ‘son avocat’.
Il est constant que la société KAD SERVICES 7 n’a pas utilisé la possibilité de rétractation écrite qui lui était offerte dans les quinze jours de la conclusion du contrat;
Elle soutient que sa dirigeante, de nationalité ivoirienne et réfugiée, maîtrise mal le français et n’a pas compris à quoi elle s’engageait; elle conclut à l’existence d’un vice du consentement.
A l’examen des pièces versées aux débats par la société KAD SERVICES 7, ces allégations ne sont soutenues par aucune pièce, tandis que pour sa part, la société LOCAL FR verse aux débats deux courriels rédigés par Mme [Z], gérant de la société KAD SERVICES 7, démontrant qu’elle maîtrise et écrit le français.
En l’absence de démonstration de l’existence d’un vice du consentement, le contrat n’est donc pas nul.
En revanche, la clause imposant le paiement de toutes les mensualités prévues au contrat en cas de défaillance dans les paiements s’analyse comme une clause pénale ayant vocation à contraindre le souscripteur à exécuter le contrat jusqu’à son terme, qu’il soit satisfait ou pas de la prestation offerte.
A cette clause s’ajoute au surplus les demandes suivantes:
– une pénalité contractuelle de 20% des sommes dues,
– une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.
S’agissant de la société KAD SERVICES 7, qui n’a jamais utilisé les prestations offertes, la somme de ces clauses pénales apparaît manifestement excessive et il doit être fait droit à la demande à la seule hauteur de:
– des frais techniques, correspondant à la création du site internet,
– de douze mois de l’abonnement e-platinum, cette durée apparaissant de nature à indemniser la société LOCAL FR des conséquences de la résiliation, en l’absence de toute utilisation effective des prestations qu’elle offrait,
– d’une indemnité de recouvrement de 40 euros.
Par conséquent la créance de la société KAD SERVICES 7 est fixée à la somme de 3.681,60 euros outre 40 euros et la société LOCAL FR est déboutée du surplus de sa demande.
Le jugement est infirmé dans toutes ses dispositions, sauf celle ayant déclaré recevable l’injonction de payer.
La société KAD SERVICES 7, représentée par son liquidateur judiciaire, est condamnée aux dépens de première instance et d’appel comprenant les frais d’injonction de payer.
Les demandes de frais irrépétibles sont rejetées.
PAR CES MOTIFS:
La Cour,
Prononce le rabat de l’ordonnance de clôture du 02 février 2023.
Prononce la clôture de l’instruction de l’affaire.
Infirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a déclaré recevable l’opposition de la société KAD SERVICES 7 à l’ordonnance d’injonction de payer rendue au bénéfice de la société LOCAL.FR.
Statuant à nouveau:
Dit que le contrat de prestations de services liant les parties est valide.
Fixe la créance de la société LOCAL.FR au passif de la liquidation judiciaire de la société KAD SERVICES 7 à la somme de 3.681,60 euros et de 40 euros.
Déboute la société LOCAL.FR du surplus de sa demande.
Déclare irrecevable la demande de dommages et intérêts présentée par la société KAD SERVICES 7.
Condamne la société KAD SERVICES 7 représentée par son liquidateur judiciaire, la société GOPMJ représentée par Me [J] aux dépens de première instance et d’appel, comprenant les frais de la procédure d’injonction de payer.
Rejette les demandes formées sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT