4ème Chambre
ARRÊT N° 320
N° RG 21/03632
N° Portalis DBVL-V-B7F-RXUJ
HR/FB
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,
Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 16 Juin 2022
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 22 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
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APPELANTE :
S.A. MMA IARD
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Martine BELLEC de la SELARL GRUNBERG & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉS :
Madame [Z] [C]
née le 04 Avril 1955 à [Localité 11]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Julie DURAND de la SELARL P & A, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES
Monsieur [B] [Y] exerçant sous l’enseigne LES CHARPENTES ARMORICAINES
[Adresse 9]
[Localité 5]
Représenté par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Eric LECARPENTIER de la SCP A.KALIFA-C.LOMBARD-E.LECARPENTIER, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT
Société MAF – MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentée par Me Edith PEMPTROIT de la SCP YANN NOTHUMB – EDITH PEMPTROIT, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT
Représentée par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES
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FAITS ET PROCÉDURE
Courant 2008, Mme [Z] [C] a fait construire une maison d’habitation à ossature bois à [Localité 10] sous la maîtrise d’oeuvre de la société Maurand Remicourt. Les lots n°3 charpente et n°4 couverture ont été attribués à M. [B] [Y] selon acte d’engagement du 13 septembre 2008 moyennant le prix de 30 743,14 € TTC. La réception des travaux a été prononcée le 23 juillet 2009.
Ayant constaté des infiltrations au plafond de son salon courant 2012, Mme [C] a obtenu de son assureur de protection juridique la désignation de la société Saretec comme expert.
Le 18 janvier 2014, M. [Y] a signé un protocole d’accord avec Mme [C].
Devant la persistance de ceux-ci malgré les travaux de réparation, Mme [C] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Vannes qui a ordonné une expertise le 14 avril 2016. M. [M] a déposé son rapport le 3 mai 2017.
Par actes d’huissier en date des 4 et 10 avril 2018, Mme [C] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Vannes M. [Y], son assureur responsabilité civile professionnelle et décennale la société MMA Iard ainsi que la Mutuelle des Architectes Français (MAF) prise en qualité d’assureur de la société Maurand Remicourt, liquidée, aux fins d’indemnisation de ses préjudices sur le fondement des articles 1792, 1147 et 1240 du code civil.
Par un jugement du 16 mars 2021 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal judiciaire a :
– condamné in solidum M. [Y], la société MMA Iard et la MAF à verser à Mme [C] les sommes de :
– 22 065,34 euros TTC, outre indexation sur l’indice BT01 depuis le 3 mai 2017 jusqu’à parfait paiement, au titre du coût de reprise des désordres ;
– 150 euros par mois au titre du préjudice de jouissance subi et à subir, du mois de mai 2009 jusqu’à achèvement des travaux de reprise ;
– 5 000 euros au titre du préjudice moral subi ;
– 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné in solidum M. [Y], la société MMA et la MAF aux dépens qui comprennent ceux de référé et les honoraires de l’expert judiciaire ;
– condamné in solidum M. [Y] et la société MMA Iard à garantir la MAF à hauteur de 85 % en principal, intérêt, frais et dépens ;
– condamné la MAF à garantir M. [Y] et la société MMA Iard à hauteur de 15 % en principal, intérêts, frais et dépens ;
– condamné la société MMA Iard à garantir M. [Y] de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, sous réserve de la franchise contractuelle ;
– condamné la société MMA Iard à payer à M. [Y] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La société MMA Iard a interjeté appel de cette décision par déclaration du 16 juin 2021.
Mme [C], M. [Y] et la MAF ont relevé appel incident.
L’instruction a été clôturée le 9 juin 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions en date du 19 mai 2022, la société MMA Iard demande à la cour de :
– réformer le jugement dont appel en ce qu’il a retenu sa garantie, en ce qu’il l’a condamnée à garantir M. [Y] de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, sous réserve de l’application de la franchise contractuelle, et la société MAF et à payer une indemnité de 1 500 euros à M. [Y] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouter Mme [C], M. [Y] et la société MAF de toutes leurs demandes à son encontre;
– à titre infiniment subsidiaire, si le jugement était confirmé sur sa garantie due à M. [Y], le réformer en ce qu’il l’a condamnée à prendre en charge les indemnités allouées à Mme [C], in solidum avec M. [Y] et la MAF, au titre du préjudice de jouissance et du préjudice moral, ces préjudices n’entrant pas dans le champ d’application de la garantie d’assurance souscrite par M. [Y] ;
– le réformer au surplus sur la date limite de calcul du préjudice de jouissance, qui sera fixé au jour du jugement ;
– en tout état de cause, débouter Mme [C] de son appel incident ; débouter M. [Y] de sa demande de condamnation à lui verser une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner Mme [C], ou tout autre succombant, à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.
Dans ses dernières conclusions en date du 30 mai 2022, Mme [C] demande à la cour de :
– débouter la société MMA Iard, M. [Y] et la MAF de toutes leurs demandes;
– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :
– condamné in solidum M. [Y], la société MMA Iard et la MAF à verser à Mme [C] les sommes de :
– 18 387,78 euros HT, augmentés du taux de TVA applicable, soit un total de 22065,34 euros TTC, outre indexation sur l’indice BT01 depuis le 3 mai 2017 jusqu’à parfait paiement, au titre du coût de reprise des désordres ;
– 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné in solidum M. [Y], la société MMA et la MAF aux entiers dépens, qui comprennent ceux de référé et les honoraires de l’expert judiciaire ;
– la recevoir en son appel incident ;
– infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :
– condamné in solidum M. [Y], la société MMA Iard et la MAF à verser à Mme [C] les sommes de :
– 150 euros par mois au titre du préjudice de jouissance subi et à subir, du mois de mai 2009 jusqu’à achèvement des travaux de reprise ;
– 5 000 euros au titre du préjudice moral subi ;
– débouté Mme [C] de sa demande d’indemnisation au titre du coût de l’assurance dommages-ouvrage ;
– condamner in solidum M. [Y], la société MMA et la MAF à lui verser les sommes suivantes:
– 882,61 euros TTC au titre du coût de souscription d’une assurance dommages-ouvrage;
– 375 euros par mois à compter du mois de mai 2009 jusqu’à parfaite reprise des désordres au titre du préjudice de jouissance subi ;
– 10 000 euros au titre du préjudice moral subi ;
– y additant, condamner in solidum M. [Y], la société MMA et la MAF à lui verser la somme de 12 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions en date du 24 mai 2022, M. [Y] demande à la cour de :
– débouter la société MMA de toutes ses demandes fins et conclusions ;
– confirmer le jugement frappé d’appel en ce qu’il a condamné la société MMA à le garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;
– le déclarer recevable et bien fondé en son appel incident ;
– réformer le jugement frappé d’appel dans ses rapports avec Mme [C];
– juger que les désordres et non conformités allégués par Mme [C] étaient apparents au moment de la réception ; juger que ladite réception a donc purgé les désordres ; en conséquence, déclarer irrecevable et en tout cas mal fondée Mme [C] en ses demandes dirigées à son encontre ;
– subsidiairement, juger disproportionnée la solution technique n°2 préconisée par l’expert et retenue à dessein par Mme [C] consistant au remplacement complet de la couverture pour remédier à une infiltration ponctuelle en l’absence de tout autres désordres concomitants sur la couverture, alors que la stricte application de la norme NF DTU n°40.35 apporte l’ensemble des solutions pérennes par mise en place d’une pièce métallique préfabriquée ou d’une embase polyester moulé monobloc réalisées à façon ;
– à défaut de retenir la solution proposée dans son dire du 3 avril 2017 et suivant les conseils techniques de la société Joriside consistant à recouvrir partiellement la toiture avec une tôle étanche en acier laqué de même couleur, plane, trois ondes, du faîtage jusqu’à 1 mètre sous l’ensemble Poujoulat-Pipeco, dire satisfactoire la solution technique détaillée par M. [L] dans sa note de synthèse du 21 mai 2022 conforme au DTU n°40.35 et dont le coût est estimé à 2 000 euros plus pose ;
– plus subsidiairement, ordonner un complément d’expertise aux fins de recueillir les observations de l’expert judiciaire sur sa proposition de réparation formulée selon dire en date du 3 avril 2017 auquel il n’a pas été répondu et sur la solution préconisée par M. [L] dans sa note de synthèse du 21 mai 2022 ;
– encore plus subsidiairement, juger satisfactoire et proportionnée la première solution de réparation préconisée par l’expert judiciaire et consistant à modifier le positionnement de la sortie de façon à ce qu’elle ne se retrouve plus au droit de la jonction entre deux panneaux sandwich de couverture, cette disposition amène à déplacer de 20 cm environ l’axe de la sortie vers le centre de la pièce avec obligation ultérieure de mettre en ‘uvre des coudes pour ramener le conduit à l’axe du poêle, pour un montant évalué à 5 097,79 euros HT ;
– débouter Mme [C] de ses autres demandes indemnitaires plus amples non justifiées.
– condamner la société MMA à lui payer une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’appel.
Dans ses dernières conclusions en date du 9 mars 2022, la MAF demande à la cour de :
– à titre principal,confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :
– jugé que la responsabilité de la société Maurand Remicourt ne saurait excéder la proportion de 15 % du montant total des dommages ;
– débouté Mme [C], et toute autre partie, de leurs demandes dirigées contre la société MAF excédant 15 % du montant total des dommages en principal, intérêts, frais et dépens ;
– condamné solidairement et in solidum M. [Y] et la société MMA Iard à relever et garantir la MAF à hauteur de 85 % en principal, intérêts, frais et dépens ;
– débouté Mme [C] de sa demande de prise en charge de l’assurance dommages-ouvrage ;
– réformer le jugement appelé en ce qu’il a :
– condamné les parties défenderesses in solidum à indemniser Mme [C] ;
– fixé le coût des travaux de reprise à la somme de 18 387,78 HT, soit une somme de 22065,34 euros TTC ;
– accordé à Mme [C] une somme de 150 euros par mois au titre du préjudice de jouissance jusqu’à l’achèvement des travaux de reprise et une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral ;
– juger que le coût des travaux de reprise ne saurait excéder la somme de 5097,79 euros HT, sans solidarité, et débouter Mme [C] de toutes ses demandes plus amples ou contraires ; la débouter du surplus de ses demandes indemnitaires (préjudice de jouissance, préjudice moral);
– subsidiairement, confirmer le jugement pour ce qui est du quantum des indemnités allouées à Mme [C] au titre des préjudices de jouissance et moral ;
– en tout état de cause, dire et juger qu’elle est bien fondée à opposer le montant de sa franchise s’agissant des condamnations susceptibles d’intervenir dans le cadre de la responsabilité civile de droit commun ;
– ramener à de plus justes proportions conformément à la jurisprudence habituelle du tribunal l’indemnité susceptible d’être allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile à Mme [C] et débouter les MMA de leur demande de prise en charge de leurs frais irrépétibles.
MOTIFS
Sur les responsabilités de la société Maurand Remicourt et de M. [Y]
M. [Y] conclut à l’irrecevabilité des demandes de Mme [C] au motif que les désordres étaient apparents à la réception laquelle, prononcée sans réserve, les a purgés. Il indique qu’elle avait écrit à l’architecte le 2 mai 2009 pour signaler les fuites dans le conduit de cheminée, désordre identique à celui qui a fait l’objet de l’expertise judiciaire, lequel s’était donc manifesté avant la réception dans toute son ampleur et ses conséquences.
Mme [C] rétorque que le maître de l’ouvrage doit avoir accepté l’ouvrage en connaissance de cause, notamment de l’étendue et de la cause des désordres et qu’en l’espèce, il avait fallu plusieurs réunions d’expertise pour les déterminer, le débat perdurant sur les travaux réparatoires.
Il ressort du dossier que le conduit de fumées, posé dans l’attente de la mise en place d’un poêle à bois, est obturé à sa base, que Mme [C] a signalé à l’architecte ‘une fuite dans le conduit de cheminée’ pour la première fois le 5 mai 2009, avant la réception des travaux intervenue le 23 juillet suivant, qu’un couvreur est intervenu pour étanchéifier le pourtour du conduit le 15 novembre 2011, que Mme [C] a signalé à nouveau la présence d’infiltrations le 6 février 2012, qu’un test d’arrosage pratiqué lors de l’expertise amiable d’avril 2013 a mis en évidence des micro fuites en provenance de la collerette d’étanchéité, que M. [Y] est intervenu en février 2014 pour la réparer, que les fuites ont recommencé. M. [M] indique qu’après avoir découpé le faux-plafond, il a constaté l’origine de l’écoulement d’eau en provenance de la couverture en expliquant comment son cheminement avait pu donner l’impression que l’eau venait du conduit.
C’est à juste titre que le tribunal n’a pas fait droit à l’argumentation de M. [Y], ni la cause ni les conséquences des désordres n’étant connues de Mme [C] lors de la réception des travaux.
Leur caractère décennal n’étant pas discuté, c’est à bon droit que le tribunal a dit que la responsabilité de plein droit de l’architecte et de l’entrepreneur était engagée.
Sur la garantie de la société MMA Iard
L’appelante dénie sa garantie au motif que l’activité couverture n’avait pas été souscrite par M. [Y] alors que les désordres ont pour cause les travaux de couverture défectueux. Elle soutient que, contrairement à ce qui a été jugé, la prestation litigieuse n’est ni un support en bois ni un raccordement de couverture à l’ossature ni un travail accessoire ou complémentaire à la charpente mais un ouvrage à part entière, les activités charpente et couverture faisant appel à des qualifications et des matériaux différents, les termes du marché étant indifférents pour déterminer si une garantie d’assurance s’applique.
Les intimés demandent la confirmation du jugement en faisant plaider pour l’essentiel que :
– les travaux de couverture s’élevaient à 6 897,70 € HT pour un montant total de marché de 25704,97 € HT ; l’assureur ne produisant pas le formulaire de déclaration du risque, il y a lieu de s’en tenir à la nomenclature des activités du BTP selon laquelle l’activité charpente structure bois comprend les travaux complémentaires de couverture lorsqu’ils sont fixés directement à l’ossature, support de couverture ou d’étanchéité ; le bardage est fixé directement à l’ossature en bois et M. [Y] n’a fait que raccorder la couverture avec le conduit de cheminée fixé directement à l’ossature bois;
– les conditions particulières et générales ne sont pas signées et paraphées par M. [Y] ; elles ne sont donc pas opposables aux parties, les garanties étant dès lors mobilisables
– l’attestation d’assurance ne comporte aucune exclusion de garantie claire, formelle et limitée concernant les ouvrages réalisés ; à tout le moins, l’assureur engage sa responsabilité pour ne pas avoir délivré une information claire et précise sur le secteur déclaré ; il appartenait à ce dernier d’exclure les travaux de couverture et d’étanchéité de la garantie ; nul ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude, l’imprécision de l’attestation d’assurance ne saurait profiter à son rédacteur.
Il ressort du rapport d’expertise que l’eau s’écoule au niveau de la trémie de la cheminée, au droit de la jonction entre deux panneaux sandwich, que l’expert conclut à un défaut d’étanchéité causé lors du percement de la toiture pour mettre en place le conduit de cheminée alors que le DTU prohibe la création de trémie au droit des joints des panneaux.
Les conditions particulières DEFI à effet du 6 février 2008 mentionnent au titre des activités déclarées :
‘- Charpente et ossature bois
Réalisation et montage-levage de charpentes, structures et ossatures de bois y compris les travaux accessoires ou complémentaires de :
– supports de couverture ou d’étanchéité à base de bois,
– raccordement de couverture, bardage, châssis divers lorsque ceux-ci sont fixés directement à l’ossature,
– plafonds, faux-plafonds, cloisons,…
– Menuiserie métallique…’.
Le moyen pris de l’inopposabilité des clauses du contrat est infondé puisque les conditions particulières ont été signées par M. [Y].
Le débat qui oppose les parties concerne l’étendue de la garantie et non les exclusions de garantie.
Charpentier et couvreur sont des corps de métier différents et les travaux de couverture ne sont pas l’accessoire ou le complément des travaux de charpente, peu important qu’un même artisan les exécute dans le cadre d’un marché unique comme dans le cas d’espèce. La nomenclature invoquée par les intimés telle qu’elle résulte de la pièce 2 de l’appelante le confirme, l’activité charpente faisant l’objet de la rubrique 13 et l’activité couverture de la rubrique suivante. M. [Y], qui déclare dans ses conclusions exercer la profession d’artisan charpentier, exerce sous l’enseigne Les Charpentes armoricaines et liste ses activités sur son papier à en-tête sans mentionner la couverture, ne peut sérieusement le contester.
Les stipulations contractuelles rappelées plus haut sont claires et précises et ne nécessitent aucune interprétation : l’activité couverture n’a pas été déclarée.
M. [Y] n’a pas procédé à des travaux de raccordement mais a posé la couverture de la maison constituée de panneaux sandwichs dans laquelle il a créé une ouverture pour le conduit de cheminée sans respecter les règles de l’art.
Les travaux de couverture étant le siège des désordres et l’activité couverture n’ayant pas été déclarée, la société MMA est fondée à dénier sa garantie.
L’attestation d’assurance pour la période allant du 12 février au 31 décembre 2008 est libellée en termes identiques à la police quant aux activités garanties, lesquelles sont mises en évidence par des caractères gras. L’appelante n’a donc commis aucune faute dans la rédaction de ce document. Sa responsabilité ne peut être engagée à ce titre.
Le jugement est infirmé, la société MMA Iard étant mise hors de cause et les intimées déboutées de leur demande principale ou en garantie à son égard.
Sur l’indemnisation de Mme [C]
Les travaux de reprise
Selon l’expert judiciaire, il existe deux possibilités pour faire en sorte que la sortie de toiture ne se trouve plus à la jonction de deux panneaux sandwich: modifier le positionnement de la sortie de toiture ou modifier le calepinage de la pose de la couverture en décalant le point de départ en rive afin que l’axe de la sortie de toiture se retrouve au milieu d’une plaque. Il a chiffré les travaux à, respectivement, 5 097,79 € HT et 18 387,78 € HT à partir des devis produits par les parties.
Le tribunal a fait droit à la demande en paiement de Mme [C] à hauteur de 22 065,34 €TTC correspondant à la seconde solution.
M. [Y] et la MAF sollicitent l’infirmation de cette disposition, considérant que le maître de l’ouvrage qui n’a pas installé de poêle est malvenu de s’opposer à la première solution parce qu’un déplacement de 20 cm lui serait préjudiciable.
M. [Y] ajoute que la seconde solution est disproportionnée, rappelant que cette notion a été introduite dans le nouvel article 1221 du code civil. Il reproche à l’expert de ne pas s’être prononcé sur la troisième solution qu’il proposait dans un dire du 3 avril 2017 et qui émane du fabricant des panneaux sandwich qui s’était déplacé au domicile de Mme [C] et qui consiste à recouvrir avec une tôle plane 3 ondes du faîtage jusqu’à 1 mètre sous l’ensemble Poujoulat-Pipeco, travaux s’élevant à 3 247,90 € HT. Il indique avoir fait appel au cabinet d’expertise Arthex qui propose une quatrième solution consistant à faire fabriquer par un chaudronnier une pièce pour pénétrations spéciales, lesquelles sont prévues par le DTU. Il sollicite en tant que de besoin un complément d’expertise.
Mme [C] répond que la première solution amènera à déplacer le conduit de 20 cm vers le centre de la pièce, ce qui réduira considérablement l’espace disponible pour circuler ou installer des meubles, qu’elle ne la remettrait pas dans la situation où elle se serait trouvée si l’ouvrage avait été livré sans vice puisque l’emplacement du conduit ne sera plus le même. Elle fait valoir également que, dans son rapport, le cabinet Arthex critique cette solution car une différence de couleur entre les tôles risque d’apparaître. Elle s’oppose à la troisième solution qui ne mettrait pas fin à la non conformité et qui n’a pas été validée par l’expert et à un complément d’expertise.
Le tribunal doit être approuvé pour avoir écarté la solution suggérée par M. [Y] dans la mesure où elle émane du commercial d’une entreprise qui n’est pas partie au litige et où elle ne répond pas aux préconisations de travaux définies par l’expert judiciaire. L’artisan ne peut sérieusement continuer à la soutenir alors que son propre expert privé la critique de manière argumentée dans son rapport.
La nouvelle solution préconisée par ce cabinet nécessiterait de désigner à nouveau M. [M] pour qu’il donne son avis dans le cadre d’un débat contradictoire, ce qui est inopportun au regard de l’ancienneté du litige et de la réapparition des fuites fin 2019.
Surtout, ce dernier a proposé deux solutions réparatoires qui ne sont pas utilement critiquées. Elles sont approuvées par le cabinet Arthex, contrairement à ce que fait plaider Mme [C].
Il ne résulte pas du dossier que l’emplacement du conduit de la cheminée avait été contractualisé, la demande du maître de l’ouvrage de prévoir une réservation en vue de l’installation d’un poêle ayant été faite en cours de chantier (elle figure dans le compte-rendu de chantier du 4 novembre 2008). Or, si les travaux avaient été exécutés conformément aux règles de l’art, le conduit ne se serait pas trouvé à son emplacement actuel qui correspond à la jonction entre deux panneaux.
Par ailleurs, Mme [C] procède par affirmation concernant les inconvénients qui résulteraient d’un déplacement de 20 cm, ne produisant aucune pièce à l’appui de cette allégation, l’expert ne les ayant pas perçus puisqu’il ne les évoque pas.
En présence de solutions dont l’expert indique qu’elles sont toutes les deux techniquement viables pour mettre fin au désordre, les débitrices sont fondées à soutenir qu’il y a lieu de retenir la moins onéreuse qui répond au principe de la réparation intégrale.
Le jugement sera infirmé sur le quantum de la condamnation qui sera ramené à 5607,57 € TTC.
Il est confirmé sur l’indexation.
L’assurance dommages-ouvrage
Mme [C] rappelle à juste titre que le tribunal ne pouvait rejeter sa prétention à ce titre au motif qu’elle n’avait pas souscrit une telle assurance pour la construction de sa maison, motif inopérant s’agissant d’une assurance obligatoire.
Elle réclame une indemnité sur la base d’un taux de 4 % du montant des travaux de reprise, lequel n’est pas discuté.
Il y a lieu de lui accorder la somme de 225 € à ce titre.
Le préjudice de jouissance
Le tribunal a alloué la somme à Mme [C] de 150 € par mois à compter de mai 2009 jusqu’à l’achèvement des travaux de reprise.
M. [Y] en demande la réduction, la MAF le rejet. Ils font valoir que la maison de [Localité 10] est une résidence secondaire, madame [C] demeurant à [Localité 8] en Vendée où elle travaille, que le désordre consiste en quelques gouttes d’eau sur le carrelage, la bassine étant une simple mesure de sécurité pendant ses absences, qu’en tout état de cause, il y a été mis fin de manière efficace en janvier 2017.
Mme [C] réclame que l’indemnité soit portée à 375 € par mois. Elle expose qu’il y a des flaques d’eau sur le carrelage lors des épisodes pluvieux et ce depuis 12 ans, qu’elle est contrainte de laisser une bassine en permanence dans le salon et de protéger les meubles et le sol par des bâches en plastique, qu’elle ne peut envisager d’achever les travaux d’embellissement aussi longtemps que les travaux de reprise n’auront pas été exécutés. Elle répond que la maison a toujours été sa résidence principale, ajoutant qu’étant en retraite, celle-ci l’est désormais. Elle indique que les fuites ont réapparu en novembre 2019.
Alors que l’expert judiciaire avait reçu mission de donner son avis sur l’ensemble des préjudices, Mme [C] ne lui a pas demandé de fournir un avis circonstancié et de proposer une évaluation de son préjudice de jouissance, comme c’est l’usage.
Il ressort du dossier, et il n’est pas sérieusement contesté par l’intéressée, que la maison était à usage de résidence secondaire jusqu’à son départ en retraite dont elle a refusé de communiquer la date alors que la privation de jouissance n’a pas la même intensité selon que le maître de l’ouvrage subit les désordres au quotidien ou de manière ponctuelle.
La seule pièce décrivant le désordre est la photographie en pièce 31 du dossier de Mme [C] qui montre 4 petites ‘flaques’ d’eau de 1 à 4 cm de diamètre sur le carrelage.
Mme [C] justifie avoir emménagé en avril 2009 mais sa première doléance est de février 2012. Le désordre a cessé entre janvier 2017 et fin 2019.
La somme allouée par le tribunal représente plus de 40 000 € et celle réclamée par Mme [C] 60 000 €, soit respectivement 50 % et 75 % du coût de construction de la maison. Elles sont très excessives au regard des éléments qui viennent d’être exposés.
L’indemnité réparant ce chef de préjudice sera fixée à 3 000 € par voie d’infirmation.
Le préjudice moral
Le tribunal a fixé à 5 000 € l’indemnisation de ce poste de préjudice. M. [Y] demande qu’elle soit ramenée à de plus justes proportions tandis que la MAF conclut au débouté. Mme [C] réclame 10 000 €.
Le préjudice moral est caractérisé par les soucis liés aux démarches et aux deux procédures judiciaires qui ont été nécessaires pour que le maître de l’ouvrage obtienne satisfaction.
La cour possède les éléments suffisants pour évaluer à 3 000 € l’indemnité destinée à le réparer.
Le jugement est également infirmé sur ce point.
Sur les autres demandes
La disposition relative au partage de responsabilité entre M. [Y] et l’architecte n’est pas critiquée.
Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont infirmées, les condamnations étant prononcées uniquement contre M. [Y] et la MAF. M. [Y] est débouté de sa demande d’indemnité de procédure contre la société MMA Iard.
Succombant en l’essentiel de leurs prétentions en cause d’appel, M. [Y] et la MAF sont condamnés aux dépens et à payer à la société MMA et à Mme [C] les sommes mentionnées au dispositif en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement :
INFIRME le jugement déféré, sauf sur l’indexation et le partage de responsabilité entre M. [Y] et la MAF,
Statuant à nouveau,
MET hors de cause la société MMA Iard,
CONDAMNE in solidum M. [B] [Y] et la MAF à payer à Mme [Z] [C] les sommes suivantes :
– 5 607,57 € TTC au titre des travaux de reprise,
– 225 € au titre de l’assurance dommages-ouvrage,
– 3 000 € en réparation du préjudice de jouissance,
– 3 000 € en réparation du préjudice moral,
– 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE Mme [C] du surplus de ses demandes,
CONDAMNE M. [Y] et la MAF à se garantir mutuellement des condamnations prononcées en principal intérêts, frais et accessoires dans les proportions mentionnées dans le jugement,
DEBOUTE M. [Y] et la MAF de leur demande en garantie contre la société MMA Iard,
DEBOUTE M. [Y] de sa demande contre la société MMA Iard en application de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum M. [B] [Y] et la MAF aux dépens,
Y ajoutant,
CONDAMNE in solidum M. [B] [Y] et la MAF à payer en application de l’article 700 du code de procédure civile :
– la somme de 3 000 € à Mme [C],
– la somme de 4 000 € à la société MMA Iard,
CONDAMNE in solidum M. [B] [Y] et la MAF aux dépens d’appel.
Le Greffier, Le Président,