MR/SL
COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
Chambre civile – Première section
Arrêt du Mardi 02 Mai 2023
N° RG 22/01635 – N° Portalis DBVY-V-B7G-HCWV
Décision attaquée : Ordonnance du Juge commissaire de CHAMBERY en date du 16 Août 2022
Appelante
S.E.L.A.R.L. [Y] & GUYONNET, es qualité de Mandataire liquidateur de Monsieur [V] [P], dont le siège social est situé [Adresse 1]
Représentée par Me Florian PRELE, avocat postulant au barreau d’ANNECY
Représentée par la SELAS LEX EDERIM, avocats plaidants au barreau de LYON
Intimée
S.A.S. PPG DISTRIBUTION, dont le siège social est situé [Adresse 2]
Représentée par Me Fabien PERRIER, avocat au barreau de CHAMBERY
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Date de l’ordonnance de clôture : 09 Janvier 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 février 2023
Date de mise à disposition : 02 mai 2023
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Composition de la cour :
– Mme Hélène PIRAT, Présidente,
– Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseillère,
– Mme Myriam REAIDY, Conseillère,
avec l’assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,
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Faits et procédure
Un jugement ouvrant le redressement judiciaire de M. [V] [P], artisan en peinture et vitrerie, immatriculé au registre des métiers sous le numéro 439 477 407 RM 73 a été rendu le 3 novembre 2020 par le tribunal de commerce de Chambéry, et publié au Bodacc le 13 novembre 2020.
Une déclaration de créance pour un montant de 148 072,94 euros à titre chirographaire a été réalisée le 3 décembre 2020 par la société PPG Distribution (sas) et contestée par M. [P] le 14 avril 2021, au motif que ‘le montant déclaré n’est pas fondé compte tenu de l’absence de bons de livraison. La SAS PPG Distribution a sûrement livré des tiers artisans qui ont profité du compte de l’entreprise.’
Un jugement de conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire a été rendu le 23 avril 2021.
Par ordonnance du 16 août 2022, le juge commissaire admettait la créance de lasociété PPG distribution au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [P] à hauteur de la somme de 109 968,36 euros (98 538,36 + 11 230 + 200) à titre chirographaire.
Par déclaration d’appel en date du 13 septembre 2022, la Selarl [Y] et Guyonnet, ès qualités de mandataire liquidateur de M. [V] [P] a interjeté appel en ce que la créance de la société PPG Distribution a été admise à hauteur de la somme de 109 968,36 euros.
Prétentions des parties
Par conclusions régulièrement signifiées le 12 octobre 2022, la Selarl [Y] et Guyonnet, ès qualités de liquidateur judiciaire de M. [V] [P], sollicite :
– la réformation de l’ordonnance entreprise,
– le rejet des créances de la société PPG distribution,
– à titre subsidiaire, qu’il soit jugé que la contestation ne relève pas du juge commissaire et renvoyer devant le tribunal de commerce de Chambéry,
– à titre infiniment subsidiaire, que soit évoqué l’entier litige devant la cour d’appel,
– condamner la société PPG Distribution à payer à M. [Y], ès qualités, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
La Selarl [Y] et Guyonnet, ès qualités, soulève l’existence d’une contestation sérieuse, estimant que la société PPG distribution n’est pas en capacité de faire la démonstration du bien-fondé de sa créance sur le fondement de l’article 1353 du code civil en produisant les bons de commande et bons de livraison conformément à ses propres stipulations contractuelles.
Par conclusions d’intimées régulièrement notifiées par RPVA le 7 novembre 2022, la SAS PPG Distribution prétend :
– à l’infirmation de l’ordonnance du juge commissaire du 16 août 2022, en ce qu’elle a limité le montant de sa créance à 109 968,36 euros,
– au rejet de la contestation de M. [Y], ès qualités,
– à la fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de M. [V] [P] à 148 072,94 euros, correspondant aux factures impayées, intérêts de retard, indemnité forfaitaire de recouvrement et pénalité de retard,
– à la condamnation de la Selarl [Y] et Guyonnet, ès qualité, à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et fixer cette somme au passif de la liquidation judiciaire de M. [P], y compris aux entiers dépens de première instance et d’appel.
La société PPG distribution fait observer en premier lieu que la contestation de la créance par M. [P] a évolué devant le juge commissaire. Elle conteste être défaillante dans l’administration de la preuve et se prévaut que l’article L110-3 du code de commerce. Elle rappelle verser aux débats l’ensemble des factures dont le paiement est demandé, des bons de livraison signés, dont les signatures ne sont pas contestées, même si la totalité des bons de livraison nesont pas signés, et souligne que des paiements partiels ont été réalisés par l’artisan.
Une ordonnance clôture la procédure le 9 janvier 2023.
MOTIFS ET DECISION
L’article L624-2 du code de commerce, dans sa version en vigueur avant le 1er octobre 2021 applicable au litige dispose ‘Au vu des propositions du mandataire, le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence. En l’absence de contestation sérieuse, le juge-commissaire a également compétence, dans les limites de la compétence matérielle de la juridiction qui l’a désigné, pour statuer sur tout ou moyen opposé à la demande d’admission.’
La régularité de la déclaration de créance n’est pas contestée. Le juge-commissaire est compétent pour vérifier le caractère certain, liquide et exigible de la créance, et ne doit renvoyer devant le tribunal que les contestations sérieuses dont l’examen dépasse sa compétence.
En l’espèce, la contestation soulevée a été jugée ‘invraissemblable’ par le juge commissaire, qui a relevé que M. [P] :
– ne conteste pas être titulaire d’un compte auprès de la société PPG distribution,
– n’a jamais émis de réserve sur les factures avant la déclaration de créance au passif de la procédure collective,
– soutient que d’autres artisans profitent de son compte, sans produire aucune pièce,
– s’est muré dans le silence lors de l’audience du 14 avril et du 9 juin 2022, lorsqu’il lui a été demandé des éléments sur sa contestation.
Il y a donc lieu de vérifier les pièces versées aux débats, pour estimer si un renvoi au fond est nécessaire, ou si la créance apparaît liquide, certaine et exigible.
La société PPG distribution fournit la copie des factures dont elle demande paiement, y compris les trois factures du 30 septembre 2018 de 12 345,40 euros, du 28 février 2019 de 7 384,38 euros et du 31 mars 2019 de 1 245,97 euros qui n’avaient pas été produites devant le juge commissaire. Elle produit aussi des bons de livraison, lesquels portent ne comportent pas tous des signatures, mais la majorité présente un paraphe, qui n’est pas dénié par M. [P].
Dans ces conditions, la contestation n’apparaît pas sérieuse et ne nécessite pas le renvoi devant la juridiction pour examen au fond, ainsi que l’a considéré de juge-commissaire. Il y a lieu de confirmer sa décision, et d’admettre au passif de M. [V] [P] la somme de 94 756,80 euros en principal, après déduction des acomptes versés de 9 689,94 euros et 15 067,37 euros qui figurent sur le relevé de compte récapitulatif du 18 novembre 2019.
Seront ensuite retenues la somme de 10 799 euros de pénalités, calculée au prorata du principal, ainsi que 200 euros correspondant aux indemnités de recouvrement des factures.
Les dépens seront pris en frais privilégiés de liquidation.
L’équité commande de rejeter les demandes d’indemnité procédurale des parties.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par décision contradictoire,
Confirme la décision entreprise en ce qu’elle a retenu la compétence du juge commissaire pour statuer sur l’admission de la créance et l’inutilité de renvoi devant le tribunal de commerce, en l’absence de sérieux de la contestation,
L’infirmant partiellement,
Admet la créance de la SAS PPG Distribution au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [P] à hauteur de la somme de 148 072,94 euros (119 514,11 euros en principal, 27 188,75 euros de pénalité, 1 050,08 euros d’intérêts de retard et 320 euros de frais de recouvrement), à titre chirographaire,
Dit que les dépens seront pris en frais privilégiés de liquidation,
Déboute les parties de leurs demandes d’indemnité procédurale.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, La Présidente,
Copie délivrée le 02 mai 2023
à
Me Florian PRELE
Me Fabien PERRIER
Copie exécutoire délivrée le 02 mai 2023
à
Me Fabien PERRIER