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SOC.
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 mai 2016
Rejet
M. FROUIN, président
Arrêt n° 1014 FS-D
Pourvoi n° D 15-13.357
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
1°/ Mme [JA] [D], domiciliée [Adresse 6],
2°/ Mme [VR] [Q], domiciliée [Adresse 28],
3°/ Mme [VD] [Z], domiciliée [Adresse 40],
4°/ Mme [ZE] [V], domiciliée [Adresse 17],
5°/ Mme [GI] [F], domiciliée [Adresse 14],
6°/ M. [HY] [M], domicilié [Adresse 33],
7°/ M. [UW] [B], domicilié [Adresse 8],
8°/ Mme [AD] [K], domiciliée [Adresse 4],
9°/ M. [NW] [R], domicilié [Adresse 21],
10°/ Mme [UB] [T], domiciliée [Adresse 2],
11°/ M. [P] [U], domicilié [Adresse 39],
12°/ M. [J] [O], domicilié [Adresse 22],
13°/ M. [HY] [X], domicilié [Adresse 35],
14°/ Mme [LZ] [PF], domiciliée [Adresse 49],
15°/ Mme [C] [PT], domiciliée [Adresse 33],
16°/ Mme [UP] [WT], domiciliée [Adresse 12],
17°/ Mme [RQ] [QV], domiciliée [Adresse 47],
18°/ M. [A] [NP], domicilié [Adresse 7],
19°/ M. [JH] [TU], domicilié [Adresse 46], pris en qualité d’ayant droit de son père, [E] [TU], décédé,
20°/ Mme [PM] [XV], épouse [TU], domiciliée [Adresse 26], prise en qualité d’ayant droit de la mère de [E] [TU], décédé,
21°/ Mme [TG] [QH], épouse [NI], domiciliée [Adresse 42],
22°/ Mme [OR] [TU], domiciliée [Adresse 38],
23°/ M. [MG] [H], domicilié [Adresse 26],
24°/ M. [JV] [H], domicilié [Adresse 26],
tous quatre pris en qualité d’ayants droit de leur frère [E] [TU], décédé,
25°/ M. [P] [XH], domicilié [Adresse 2],
26°/ M. [Y] [UI], domicilié [Adresse 34],
27°/ Mme [TN] [MN], domiciliée [Adresse 24],
28°/ Mme [JO] [SL], domiciliée [Adresse 36],
29°/ Mme [SS] [RX], domiciliée [Adresse 23],
30°/ M. [I] [SZ], domicilié [Adresse 19],
31°/ M. [KQ] [LL], domicilié [Adresse 10],
32°/ M. [N] [QA], domicilié [Adresse 44],
33°/ M. [HD] [OK], domicilié [Adresse 15],
34°/ Mme [KJ] [LE], domiciliée [Adresse 16],
35°/ M. [XO] [WM], domicilié [Adresse 41],
36°/ M. [ZS] [RJ], domicilié [Adresse 27],
37°/ M. [YC] [KX], domicilié [Adresse 32],
38°/ Mme [HR] [QO], domiciliée [Adresse 20],
39°/ Mme [XA] [ZZ], domiciliée [Adresse 25],
40°/ Mme [OD] [RC], domiciliée [Adresse 48],
41°/ M. [OY] [MU], domicilié [Adresse 45],
42°/ Mme [SE] [BA], domiciliée [Adresse 9],
43°/ M. [VK] [YQ], domicilié [Adresse 5],
44°/ Mme [W] [IT], domiciliée [Adresse 11],
45°/ Mme [KC] [IM], domiciliée [Adresse 31],
46°/ M. [YJ] [LS], domicilié [Adresse 30],
47°/ M. [L] [WF], domicilié [Adresse 1],
48°/ M. [GW] [IF], domicilié [Adresse 37],
49°/ M. [G] [HK], domicilié [Adresse 18],
50°/ Mme [GP], domiciliée [Adresse 43],
51°/ Mme [S] [GB], domiciliée [Adresse 13],
52°/ M. [NB] [FU], domicilié [Adresse 29],
contre l’arrêt rendu le 16 décembre 2014 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige les opposant à la société Euro Disney associés, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 12 avril 2016, où étaient présents : M. Frouin, président, M. Ludet, conseiller rapporteur, M. Chollet, conseiller doyen, M. Mallard, Mmes Goasguen, Vallée, Guyot, Aubert-Monpeyssen, Schmeitzky-Lhuillery, MM. Rinuy, Schamber, Ricour, conseillers, MM. Alt, Flores, Mmes Wurtz, Ducloz, Brinet, MM. David, Silhol, Belfanti, Mme Ala, conseillers référendaires, M. Beau, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Ludet, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [D] et de cinquante et un autres demandeurs, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Euro Disney associés, l’avis de M. Beau, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le moyen ne tend qu’à contester l’appréciation souveraine par la cour d’appel des éléments de fait et de preuve dont il résulte, peu important dès lors le caractère plus favorable d’un autre accord, que les salariés ne remplissaient pas, de par les fonctions exercées, les conditions pour revendiquer le bénéfice des coefficients réservés aux artistes-interprètes au sens de la convention collective nationale des parcs de loisirs et d’attractions ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme [D] et cinquante et un autres demandeurs.
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir débouté Madame [JA] [D] et 50 autres salariés de leurs demandes tendant à les faire bénéficier des dispositions de la Convention collective des parcs de loisirs et d’attractions et obtenir un rappel de salaire sur ce fondement,
Aux motifs que il a été jugé par un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 23 avril 2000 que la convention collective nationale des parcs de loisirs et d’attractions du 5 janvier 1994 était applicable à la société EURODISNEY ; qu’à la suite de cette décision, un accord d’entreprise dit d’adaptation a été conclu le 26 avril 2001 ; que les salariés soutiennent que seule la convention collective nationale des parcs et loisirs et plus particulièrement son annexe « spectacle » leur est applicable, que l’accord d’adaptation doit être écarté en ce qu’il déroge défavorablement à la convention collective nationale, notamment en matière de rémunération et de classifications ; qu’ils invoquent le fait que cet accord, qui a opéré une refonte des classifications conventionnelles, élude la définition claire et précise de l’artiste interprète, qualité dont pourraient se prévaloir les salariés ; que la société EURO DISNEY prétend, au contraire, que l’accord d’entreprise, qui a été négocié afin d’adapter les dispositions conventionnelles aux particularités de l’entreprise DISNEY, s’applique dans la mesure où les dispositions qu’il prévoit sont globalement plus favorables que la convention collective nationale de branche ; que selon l’article L. 132-23 du code du travail, applicable au moment de la conclusion des textes en cause, la convention ou les accords d’entreprise ou d’établissement peuvent adapter les dispositions des conventions de branche ou des accords professionnels ou interprofessionnels applicables dans l’entreprise aux conditions particulières de celle-ci ou des établissements considérés ; que la convention ou les accords peuvent comporter des dispositions nouvelles et des clauses plus favorables aux salariés ; que dans les cas où des conventions de branche ou des accords professionnels ou interprofessionnels viennent à s’appliquer postérieurement à la conclusion de conventions ou accords négociés, les dispositions de ces conventions ou accords sont adaptés en conséquence ; que contrairement à ce que font prévaloir les salariés, la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie qui interdit en matière de salaires minima, de classifications et de garanties collectives, la possibilité pour un accord d’entreprise de comporter des clauses qui dérogent à la convention de branche, n’est pas applicable en l’espèce et ce, conformément à l’article 45 de cette loi, la convention collective nationale des parcs de loisirs et d’attractions ayant été conclue antérieurement à son entrée en vigueur ; que compte tenu de ce qui précède et du principe fondamental en droit du travail selon lequel la situation du salarié doit être régie en cas de conflits de normes par celle qui lui est le plus favorable, il convient de rechercher si les dispositions de l’accord d’adaptation concernant les rémunérations et les classifications sont plus favorables que celles de la convention collective nationale des parcs et loisirs ; que cette appréciation doit être globale, c’est à dire être opérée au regard des intérêts de l’ensemble des salariés, à raison du caractère indivisible de ces régimes ; que la convention collective nationale de branche distingue dans son annexe “spectacle” les artistes dits de complément des artistes interprètes ; que l’accord d’entreprise conclu ultérieurement a adapté des dispositions conventionnelles aux spécificités de la société EURODISNEY, en instaurant des classifications intermédiaires, notamment parmi les artistes interprètes ; que selon l’article 2 du chapitre II de l’annexe “spectacle” de la convention collective nationale, l’artiste interprète, qualité revendiquée au niveau IV échelon 3 (coefficient 280) ou 4 (coefficient 300) par les salariés, se définit comme l’artiste qui porte un costume, interprète une oeuvre, un numéro, présente et/ou anime un spectacle et qui doit avoir passé une audition ; qu’en tout état de cause, à partir du moment où un salarié suit une formation pour participer à un spectacle, il est artiste interprète ; qu’en l’espèce, les salariés de la société EURODISNEY, auxquels il incombe de rapporter la preuve de leur appartenance à une catégorie supérieure, ne démontrent pas, par les pièces versées au dossier, que les tâches effectivement accomplies par eux correspondent à celles d’un artiste interprète ; que s’il est avéré que tous les salariés portent un costume, ces derniers ne sont pas mis en scène au titre de la représentation d’une oeuvre de WALT DISNEY, mais doivent simplement illustrer l’univers et la magie DISNEY en incarnant l’un de ses personnages dans le parc et à l’occasion de défilés appelés “parades” ; que de plus, les “castings” effectués par la société EURODISNEY pour le choix des personnages s’apparentent à un processus de recrutement et non à une audition ; qu’en effet, les qualités attendues des candidats pour décrocher ces rôles ne sont pas d’ordre artistique mais consistent à “être en bonne forme physique”, à “déborder d’énergie et d’enthousiasme”, à mesurer une taille suffisante, ou encore à ressembler aux personnages lorsqu’il s’agit d’incarner des princes et princesses, comme l’attestent les pièces du dossier, en particulier les affichettes de recrutement des personnages DISNEY ; qu’enfin, les formations suivies par les salariés ne les préparent pas à participer à des spectacles, mais simplement à défiler lors des parades ; que les parades ne sont pas de véritables spectacles, dans la mesure où elles n’induisent pas l’interprétation sur scène d’une oeuvre artistique, à la différence d’une pièce de théâtre ou d’un ballet ; qu’il s’ensuit qu’aucun des salariés, quel que soit son niveau de classification actuel, ne peut être considéré comme un artiste interprète, tel que défini par la convention collective nationale des parcs et loisirs ; qu’au regard de cette seule convention, les salariés bénéficiant des classements intermédiaires d’artiste interprète de l’accord d’adaptation ne pourraient être qualifiés que d’artistes de complément ; qu’ainsi, les coefficients qui pourraient leur être appliqués selon la convention collective nationale sont des coefficients inférieurs à ceux applicables conformément à la classification de l’accord d’adaptation ; qu’en conséquence, leur rémunération serait inférieure à celle qu’ils perçoivent actuellement; que quant aux salariés classés à des catégories inférieures (cast members et artistes de complément), ne pouvant accéder à la classification d’artiste interprète, l’application de la convention collective nationale des parcs de loisirs et d’attractions ne viendrait pas modifier leur situation ; que de surcroît, l’accord d’entreprise prévoit le versement d’une prime de 13ème mois qui est un élément du salaire annuel et doit être intégré au salaire mensuel pour déterminer le revenu mensuel du salarié ; qu’en incorporant cette prime à la rémunération mensuelle des salariés, les salariés perçoivent en réalité une rémunération supérieure aux minima conventionnels ; qu’ainsi, force est de constater que le système de classement intermédiaire, mis en place par l’accord d’entreprise afin d’adapter les dispositions conventionnelles aux particularités de la société EURODISNEY, est plus favorable en ce qu’il permet aux salariés de bénéficier de coefficients plus élevés et de la rémunération correspondante incluant au demeurant un 13ème mois ; qu’en conséquence, en prenant en compte l’ensemble des salariés, l’accord d’adaptation est globalement plus favorable que la convention collective nationale des parcs de loisirs et d’attractions en matière de rémunération et de classifications ; que cet accord est donc applicable et les salariés ne peuvent prétendre à se voir appliquer en matière de classifications la convention collective nationale ; qu’en tout état de cause, au vu de la situation de chaque salarié, l’application de cette convention ne permettrait pas à ces salariés d’être reconnus comme des artistes interprètes, quel que soit les niveaux et échelons sollicités ; qu’il convient ainsi de rejeter l’ensemble des demandes de modification de classifications aux indices 280 et 300 de la convention collective nationale des parcs de loisirs et d’attractions et par conséquent, de rejeter les demandes de rappels de salaires, de congés payés afférents ainsi que les demandes tendant au paiement par la société de la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts à chaque demandeur, pour chaque année de non application des dispositions conventionnelles ;
Alors, d’une part, qu’il résulte de l’article L.2221-2 du Code du travail qu’en cas de concours d’instruments conventionnels collectifs, les avantages ayant le même objet ou la même cause ne peuvent, sauf stipulations contraires, se cumuler, le plus favorable d’entre eux pouvant seul être accordé ; que pour rejeter la demande des salariés revendiquant la qualité d’artiste interprète telle qu’elle résulte de la Convention nationale collective des parcs de loisirs et d’attraction, ainsi que l’application des coefficients afférents, la Cour d’appel a retenu qu’en incorporant la prime de 13ème mois prévue par l’accord d’entreprise à la rémunération mensuelle des salariés, les salariés perçoivent en réalité une rémunération supérieure aux minima conventionnels, de sorte que cet accord est plus favorable; qu’en statuant ainsi, alors que le 13ème mois est acquis par les salariés au titre de l’accord d’adaptation et n’a ni la même cause, ni le même objet que leur classification, la Cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Alors, d’autre part, en tout état de cause, que selon l’annexe « spectacle » de la convention collective des parcs de loisirs, reçoit la qualification d’artiste interprète « l’artiste qui porte un costume, interprète une oeuvre, un numéro, présente et/ou anime un spectacle et qui doit avoir passé une audition. En tout état de cause, à partir du moment où un salarié suit une formation pour participer à un spectacle, il est artiste interprète » ; que les salariés produisaient aux débats de nombreux documents, en particulier le Guide des Opérations Parade, l’affiche annonçant l’audition interne, les offres de postes sur le site de Pôle Emploi, l’accord d’adaptation Euro Disney, démontrant qu’ils avaient passé une audition, animaient un spectacle et interprétaient des numéros, et bénéficiaient d’une formation, et dont il ressortait que les salariés de la société EURO DISNEY accomplissaient des prestations relevant effectivement de celles qui incombent aux artistes interprètes ; qu’en énonçant néanmoins « qu’aucun des salariés, quel que soit son niveau de classification actuel, ne peut être considéré comme un artiste interprète, tel que défini par la convention collective nationale des parcs et loisirs », les castings effectués par la société DISNEY pour le choix des personnages s’apparentent « à un processus de recrutement et non à une audition », les qualités attendues des candidats n’étant « pas d’ordre artistique », sans procéder à l’analyse, même sommaire, de ces documents, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.2221-2 du Code du travail ;
Alors, enfin, que selon la Convention collective nationale des entreprises du secteur privé du spectacle vivant du 3 février 2012, « On entend par spectacles dramatiques, lyriques, chorégraphiques et de musique classique, notamment les spectacles : – de théâtre ; – d’opéra ; – de danse ; -de marionnettistes ; – les concerts de musique classique (musique classique, romantique, baroque, contemporaine…) ; – les mimodrames ; – (…) » ; que pour débouter les salariés de leurs demandes, la Cour d’appel a décidé que « les parades ne sont pas de véritables spectacles dans la mesure où elles n’induisent pas l’interprétation sur scène d’une oeuvre artistique, à la différence d’une pièce de théâtre ou d’un ballet » ; qu’en se prononçant en ce sens, sans s’expliquer sur la définition de la Parade DISNEY, qualifiée par la société de « défilé chorégraphié selon un concept donné par le Directeur Artistique », ni exposer en quoi le caractère ambulant de ce défilé privait la Parade de la qualification de spectacle, la Cour d’appel a privé derechef sa décision de base légale au regard de l’article L.2221-2 du Code du travail.