Contrat d’Artiste : 11 janvier 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 15-23.161

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Contrat d’Artiste : 11 janvier 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 15-23.161
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CIV. 1

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 janvier 2017

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 65 F-D

Pourvoi n° K 15-23.161

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Wittersham Inc, dont le siège est [Adresse 1]),

contre l’arrêt rendu le 5 novembre 2014 par la cour d’appel de Paris (pôle 2, chambre 1), dans le litige l’opposant :

1°/ à [B] [Q], ayant été domiciliée [Adresse 2] (États-Unis), décédée,

2°/ à M. [Z] [R], domicilié [Adresse 3],

3°/ à la Fondation [A], dont le siège est [Adresse 2] (États-Unis),

4°/ à la société Galerie Lelong, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

5°/ à M. [S] [I],

6°/ à M. [H] [M],

domiciliés tous deux [Adresse 2] (États-Unis), pris en leur qualité d’héritiers de [B] [Q],

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 29 novembre 2016, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Wittersham Inc, de Me Carbonnier, avocat de M. [R] et de la société Galerie Lelong, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la Fondation [A] et de MM. [S] et [H] [M], et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 5 novembre 2014), que la Fondation [A], créée après le décès de l’artiste [S] [A] par ses héritiers, [B] [Q] et Mme [A] [E], filles de l’artiste, et présidée par M. [S] [M], petit-fils de l’artiste, organise régulièrement des séances permettant aux possesseurs d’oeuvres attribuées à l’artiste de vérifier leur authenticité ; qu’à l’occasion d’une telle réunion organisée le 1er avril 1996 à [Localité 1], dans les locaux de la Galerie Lelong présidée par M. [R], Mme [Y], propriétaire de la galerie d’art contemporain [O], a déposé un mobile intitulé « Noir sur blanc » ; qu’après examen de plusieurs oeuvres par un représentant de la fondation, [B] [Q] a fait procéder à une saisie-contrefaçon de dix-huit oeuvres dont celle déposée par Mme [Y], lesquelles ont été placées sous scellés ; que, le 19 juillet 1996, [B] [Q] a porté plainte avec constitution de partie civile des chefs de contrefaçon et fraude artistique ; que le juge d’instruction a désigné un expert qui a conclu que quinze des dix-huit oeuvres présentées constituaient des faux et que, parmi les trois autres, le mobile « Noir sur blanc » présentait certains défauts de montage mais aucune contradiction flagrante avec les oeuvres authentiques, précisant que la peinture noire s’écaillait facilement, que certaines tiges étaient plus ou moins tordues à l’ouverture du scellé et que deux anneaux ou crochets d’articulation étaient manquants ; qu’une ordonnance de non-lieu a été rendue le 7 mai 1999 et a autorisé la restitution du mobile « Noir sur blanc » ; que, le 3 juillet 2002, Mme [Y] s’est présentée à la préfecture afin de reprendre l’oeuvre, accompagnée d’un huissier de justice pour procéder à une vérification de son état dont le procès-verbal de constat mentionne une peinture écaillée en plusieurs endroits, une désarticulation partielle et trois tiges déformées ; que, les 21 avril et 27 mai 2009, la société Wittersham Inc., prise en la personne de son représentant légal, Mme [Y] domiciliée chez M. [N], avocat, a assigné [B] [Q], M. [S] [M], la Fondation [A], M. [R] et la société Galerie Lelong, en responsabilité et réparation des préjudices subis ; que, [B] [Q] étant décédée en cours de procédure, ses fils, MM. [S] et [B] sont intervenus volontairement à l’instance en qualité d’héritiers ;

Attendu que la société Wittersham Inc. fait grief à l’arrêt de la déclarer irrecevable à agir pour défaut de qualité, alors, selon le moyen :

1°/ que l’existence d’un droit de propriété invoqué par la demanderesse n’est pas une condition de recevabilité de son action mais de son succès ; qu’en affirmant, pour déclarer l’action de la société Wittersham irrecevable faute de qualité à agir, que celle-ci ne démontre ni sa qualité de propriétaire du mobile litigieux ni celle de détentrice de l’oeuvre d’art litigieuse, la cour d’appel a violé l’article 31 du code de procédure civile ;

2°/ qu’en affirmant qu’il n’est fourni aucune pièce attestant d’un mandat confié à Mme [Y], notamment dans le cadre de la procédure pénale, et que seules les pièces 14 et 15 font apparaitre le nom de la société Wittersham, quand les pièces n° 12, 13 et 17, à savoir l’ordonnance de non-lieu du 7 mai 1999 et les arrêts des 13 mars 2000 et 28 mars 2002 ordonnant la restitution de l’oeuvre litigieuse à Mme [Y] attribuent toutes expressément la qualité de partie civile à la société Wittersham, tandis que l’ordonnance de non-lieu du 7 mai 1999 précise que la société Wittersham Inc. est représentée par Mme [Y] [H] [W], la cour d’appel a méconnu les termes du litige, en violation de l’article 4 du code de procédure civile ;

3°/ que les biens placés sous mains de justice ne peuvent être restitués à la victime de l’infraction, partie civile, que si leur propriété n’est pas contestée et n’est pas revendiquée par un tiers ; qu’en affirmant que « seul le nom de Mme [Y] apparaît et reste celui de la personne qui détient le mobile et qui a agi au cours de toute la procédure de restitution », quand l’ordonnance du 7 mai 1999, confirmée ensuite, ayant ordonné la restitution de l’oeuvre attribuait expressément la qualité de partie civile à la société Wittersham Inc. représentée par Mme [W] [Y] [H], ce dont il résultait que la propriété de la société Wittersham n’était pas contestée, la cour d’appel a violé les articles 99 du code de procédure pénale et 2276 du code civil ;

4°/ qu’en affirmant, pour déclarer l’action de la société Wittersham irrecevable faute de qualité à agir, que celle-ci ne démontre ni sa qualité de propriétaire du mobile litigieux ni celle de détentrice de l’oeuvre d’art litigieuse, quand la propriété du mobile n’était pas revendiquée par un tiers, la cour d’appel a violé de plus fort les articles 99 du code de procédure pénale et 2276 du code civil ;

5°/ que la qualité à agir s’apprécie au jour de l’introduction de la demande ; qu’en affirmant que le mandat de représentation de la société Wittersham donné par M. [N] à Mme [Y], le 22 avril 2010, concerne la seule procédure civile en cours et ne vise ni la procédure de saisie intervenue en 1996 ni la procédure pénale antérieure, la cour d’appel a violé les articles 31, 117 et 416 du code de procédure civile ;

6°/ que toute personne peut valablement représenter une société en justice dès lors qu’elle justifie qu’un mandat spécial lui a régulièrement été donné ; qu’en affirmant, pour dénier in fine toute valeur à la procuration régulièrement donnée par M. [N] à Mme [Y] pour représenter la société Wittersham en justice, que la lettre émanant de M. [N], adressée au conseil de la société Wittersham, n’a aucun caractère officiel et n’est accompagnée d’aucune élément démontrant l’identité de son rédacteur, ou encore que le mandat qui aurait été confié à Mme [Y] n’est corroboré par aucune autre pièce et que M. [N] ne justifie pas d’échanges avec Mme [Y], qui n’est en aucun cas le représentant légal de la société, la cour d’appel, qui a statué par des motifs impropres à établir l’absence de mandat spécial conférant à Mme [Y] le pouvoir de représenter la société Wittersham dans la présente procédure, a privé sa décision de base légale au regard des articles 31, 117 et 416 du code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu’ayant, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, estimé que la société Wittersham ne démontrait ni sa qualité de propriétaire du mobile litigieux ni celle de détentrice, la cour d’appel en a exactement déduit qu’elle était irrecevable à agir en indemnisation des préjudices résultant de la saisie du mobile ;

Attendu, en deuxième lieu, que les termes du litige, qui sont déterminés par les prétentions respectives des parties, elles-même fixées par leurs conclusions, ne sauraient résulter des pièces versées aux débats ;

Attendu, en troisième lieu, qu’ayant constaté que la plainte avec constitution de partie civile avait été faite au nom d’une société Wittersham dont le siège se situait à [Localité 2], alors que la société Wittersham demanderesse avait son siège social au Panama, de sorte que la procédure pénale concernait la société italienne, c’est sans violer les articles 99 du code de procédure pénale et 2276 du code civil que la cour d’appel, qui a ainsi fait ressortir que celle-ci était dépourvue d’intérêt à agir, a estimé que la société panaméenne Wittersham ne démontrait pas sa qualité de propriétaire ni de détentrice du mobile litigieux ;

Et attendu, en dernier lieu, qu’ayant constaté que plusieurs pièces faisaient ressortir que le détenteur de l’oeuvre était Mme [Y] depuis 1989 et que la société Wittersham, immatriculée en 1995, ne produisait aucun acte d’acquisition du mobile, la cour d’appel, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve soumis aux débats, en a déduit que la société Wittersham n’établissait pas que Mme [Y] avait agi en son nom et que la détention de l’oeuvre par cette dernière l’avait été en qualité de mandataire ;

D’où il suit que le moyen, inopérant en ses quatrième, cinquième et sixième branches, n’est pas fondé pour le surplus ;

 


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