Contrat d’Artiste : 10 mars 2017 Cour d’appel de Versailles RG n° 15/07483

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Contrat d’Artiste : 10 mars 2017 Cour d’appel de Versailles RG n° 15/07483
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 79A

1ère chambre

1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 MARS 2017

R.G. N° 15/07483

AFFAIRE :

EPIC INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL

C/

[L] [T]

[M] [R]

SOCIETE DE PERCEPTION ET DE DISTRIBUTION DES DROITS DES ARTISTES INTERPRETES ‘SPEDIDAM’

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Janvier 2013 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS

N° Chambre : 03

N° Section : 04

N° RG : 11/15443

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

AARPI JRF AVOCATS

SELARL MINAULT PATRICIA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX MARS DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

EPIC INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL

[Adresse 1]

Représenté par Me Bertrand ROL de l’AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617, et Me Christophe CARON de l’AARPI Cabinet Christophe CARON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

DEMANDEUR devant la cour d’appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d’un arrêt de la Cour de cassation du 14 octobre 2015 cassant et annulant l’arrêt rendu par la cour d’appel de PARIS (chambre 1, section 5) le 11 juin 2014

****************

Monsieur [L] [T]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 1]

[Adresse 2]

Représenté par Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – N° du dossier 20160175, et Me Guillem QUERZOLA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [M] [R]

né le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 1]

[Adresse 3]

Représenté par Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – N° du dossier 20160175, et Me Guillem QUERZOLA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

DEFENDEURS DEVANT LA COUR DE RENVOI

****************

SOCIETE DE PERCEPTION ET DE DISTRIBUTION DES DROITS DES ARTISTES INTERPRETES ‘SPEDIDAM’

N° SIRET : 344 175 153

[Adresse 4]

Représentée par Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – N° du dossier 20160175, et Me Guillem QUERZOLA, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

PARTIE INTERVENANTE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 Janvier 2017 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, président, chargé du rapport, et Madame Nathalie LAUER, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, président,

Madame Anne LELIEVRE, conseiller,

Madame Nathalie LAUER, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,

****************

[S] [U] dit [V] [Z], batteur de jazz de renommée mondiale, est décédé le [Date décès 1] 1985 à [Localité 2], laissant pour lui succéder ses deux fils [M] [R] et [L] [T].

Ceux-ci ont appris que l’Institut National de l’Audiovisuel (INA) commercialisait sur sa boutique en ligne accessible à l’adresse htppp://boutique.ina.fr des vidéogrammes et phonogrammes reproduisant des prestations de leur père.

Ils ont fait établir un procès-verbal de constat et d’achat en ligne par un huissier de justice, les 14 et 15 décembre 2009, faisant apparaître l’offre en vente de 26 vidéogrammes et d’un phonogramme reproduisant des interprétations de [V] [Z], sans autorisation.

Le 28 décembre 2009, [M] [R] et [L] [T] ont fait assigner I’NA devant le tribunal de grande instance de Créteil sur le fondement des articles L211-4 et L212-3 du code de la propriété intellectuelle.

Par une ordonnance du 17 novembre 2010, le juge de la mise en état a déclaré le tribunal de grande instance de Créteil incompétent et a renvoyé l’affaire devant le tribunal de grande instance de Paris.

Par jugement du 24 janvier 2013, le tribunal a’:

– dit que le procès-verbal d’huissier de justice des 14 et 15 décembre 2009 est partiellement nul,

– écarté des débats les téléchargements réalisés dans le cadre de ce procès-verbal,

– dit que les demandeurs sont recevables à agir en leur qualité de titulaires des droits sur les interprétations de [V] [Z],

– dit que la demande tendant à voir interdire l’exploitation des enregistrements est irrecevable,

– condamné I’INA à payer à [M] [R] et [L] [T] la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice subi résultant de l’exploitation non autorisée des interprétations visées dans les dernières écritures des demandeurs à l’exception de celle intitulée [U] [D] Bags Grooves,

– rejeté la demande reconventionnelle en dommages intérêts de I’NA,

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l ‘exécution provisoire,

– condamné I’INA aux dépens.

Par arrêt du 11 juin 2014, la cour d’appel de Paris, saisie par l’INA, a confirmé le jugement sauf en ce qu’il a écarté le droit à réparation au titre de l’interprétation intitulée [U] [D] Bags Grooves.

Statuant à nouveau des chefs infirmés, elle a condamné l’INA à payer à [M] [R] et [L] [T] la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice subi des suites de l’exploitation non autorisée des 27 vidéogrammes et phonogrammes visés dans les écritures des intimés.

Par arrêt du 14 octobre 2015, la Cour de cassation a cassé l’arrêt «’seulement en ce qu’il condamné l’INA à payer à [M] [R] et [L] [T] la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice subi des suites de l’exploitation non autorisée des 27 vidéogrammes et phonogrammes visés dans les écritures des intimés’».

La Cour de cassation a relevé que la cour d’appel a retenu que la dérogation prévue par l’article 44 de la loi du 1er août 2006 ne trouve à s’appliquer que pour autant que l’artiste interprète a autorisé la fixation et la première destination de son interprétation auquel cas l’INA peut s’affranchir de solliciter son autorisation ou celle de ses ayants droit pour une nouvelle utilisation de sa prestation.

Elle a jugé qu’en subordonnant ainsi l’applicabilité du régime dérogatoire institué au profit de l’INA à la preuve de l’autorisation par l’artiste -interprète de la première exploitation de sa prestation, la cour d’appel a ajouté à la loi une condition qu’elle ne comporte pas et donc violé le texte susvisé.

Par acte du 29 octobre 2015, l’INA a saisi la cour d’appel de Versailles, cour de renvoi.

La société de perception et de distribution des droits des artistes interprètes, dite Spedidam, est intervenue volontairement aux côtés de MM [T] et [R].

Dans ses dernières écritures portant le numéro 4 en date du 13 décembre 2016, l’établissement public industriel et commercial INA conclut à l’infirmation du jugement sauf en ce qu’il a dit que la demande tendant à voir interdire l’exploitation des enregistrements est irrecevable.

Il demande à la cour de’:

– dire et juger que la Spedidam n’a ni qualité, ni intérêt à intervenir à la présente instance,

– déclarer la Spedidam irrecevable en son intervention volontaire et la débouter de l’ensemble de ses réclamations,

A titre principal

– dire et juger que l’INA était parfaitement autorisé à exploiter les archives objets du litige,

– débouter les intimés et la Spedidam de l’intégralité de leurs réclamations,

A titre subsidiaire

– débouter les intimés de leur demande de dommages et intérêts,

Sur les demandes de la Spedidam

– dire et juger que ces demandes, nouvelles en appel, sont irrecevables,

– débouter la Spedidam de l’ensemble de ses demandes d’indemnisation et de publications judiciaires,

En tout état de cause

– dire et juger que l’article 49-II de la loi du 30 septembre 1986, tel que modifié par l’article 44 de la loi n° 2006-961 du 1er août 2006, et tel qu’interprété par la Cour de cassation, est conforme au droit de l’Union européenne,

– dire et juger n’y avoir lieu à renvoi préjudiciel et débouter la Spedidam de sa demande subsidiaire de renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l’Union européenne,

En toutes hypothèses

– débouter les intimés et la Spedidam de l’intégralité de leurs réclamations,

– condamner in solidum Messieurs [T] et [R], ainsi que la Spedidam, à payer à l’INA la somme de 30 000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

L’INA expose que l’arrêt prononcé le 14 octobre 2015, publié, est un arrêt de principe. Il estime que le jugement et l’arrêt remettaient en cause sa mission d’intérêt général et de service public. Il rappelle sa mission et le régime dérogatoire au droit d’autoriser et d’interdire des artistes interprètes prévu par l’article 49-II de la loi du 30 septembre 1986 modifié par la loi du 1er août 2006. Il indique que ce régime dérogatoire a pour effet de permettre à l’INA d’exploiter les archives qu’il détient en contrepartie du versement d’une rémunération aux artistes-interprètes, fixée par des accords collectifs conclus avec leurs syndicats représentatifs.

Il expose sa mission d’intérêt général et l’importance de celle-ci. Il indique qu’en matière de droits voisins et afin de lui permettre d’accomplir sa mission, la loi a instauré un régime spécifique lui permettant d’exploiter les archives dès lors qu’est conclu avec les représentants des artistes-interprètes un accord collectif prévoyant le versement d’une rémunération. Il souligne sa difficulté à se prévaloir de l’autorisation d’exploiter prévue par les articles L212-3 et L 212-4 du code de la propriété intellectuelle, CPI, et donc l’impossibilité d’exercer sa mission avant la modification de l’article précité.

Il cite la dérogation prévue par l’article 49-II in fine’:

« Toutefois, par dérogation aux articles L. 212-3 et L. 212-4 du Code de la propriété intellectuelle, les conditions d’exploitation des prestations des artistes-interprètes des archives mentionnées au présent article et les rémunérations auxquelles cette exploitation donne lieu sont régies par des accords conclus entre les artistes-interprètes eux-mêmes ou les organisations de salariés représentatives des artistes-interprètes et l’Institut. Ces accords doivent notamment préciser le barème des rémunérations et les modalités de versement de ces rémunérations’».

Il rappelle que le Conseil constitutionnel a déclaré cet article conforme à la Constitution et indique qu’il a conclu des accords collectifs avec la majorité des organisations représentatives des artistes-interprètes afin d’assurer la rémunération de ceux-ci.

Il précise que c’est dans ce cadre qu’il a exploité les archives litigieuses.

Il considère que le jugement le remet dans la situation antérieure au nouvel article précité. Il rappelle les décisions intervenues.

Il invoque l’irrecevabilité de l’intervention volontaire de la Spedidam.

Il soutient qu’elle n’a pas qualité à agir.

Il fait valoir que son domaine d’intervention n’est ni absolu ni illimité et qu’elle ne peut intervenir dans l’intérêt de non membres.

Il déclare que l’article 3 de ses statuts- qui précise son objet- renvoie à l’article 2 qui concerne les effets de l’adhésion et excipe de l’article 3.5 qui indique qu’elle exerce la défense des «’ayants droit’». Il en infère qu’elle ne peut agir que pour défendre les intérêts de ses adhérents. Il se prévaut également de l’article 1165 du code civil dont il conclut que les statuts de la Spedidam ne produisent des effets qu’entre elles et ses adhérents. Il cite un arrêt de la cour d’appel de Paris du 22 octobre 2010.

Il estime que seule la loi pourrait permettre à cette société de gestion collective de représenter en justice des artistes interprètes qui ne seraient pas ses adhérents et cite le Centre français d’exploitation du droit de copie. Il souligne qu’il n’existe aucune gestion collective obligatoire au profit de la Spedidam et rappelle que l’article L 321-1 du code de la propriété intellectuelle, CPI, permet aux sociétés civiles d’agir «’pour la défense des droits dont elles ont statutairement la charge’».

Il ajoute, citant un arrêt de la cour de cassation du 11 septembre 2013, que la preuve de l’adhésion doit être rapportée au jour de l’assignation et estime que tel n’est pas le cas, M. [Z] étant décédé et la Spedidam ne prouvant pas que ses ayants-droit ont souhaité continuer à y adhérer.

Il estime la solution logique compte tenu de la présence de deux sociétés gérant un répertoire distinct.

Il soutient que la question a été tranchée et se prévaut d’un arrêt, de principe, de la cour de cassation du 19 février 2013, postérieur aux arrêts invoqués par la Spedidam. Il ajoute que, dans ses actions à l’encontre de l’INA, la Spedidam a toujours été déclarée irrecevable à agir dans l’intérêt de ses non membres.

Il affirme que l’adhésion de M. [Z] en 1984 est insuffisante, la preuve de celle-ci ou du souhait de ses ayants droit devant être rapportée au jour de l’assignation.

Il fait également valoir que l’intervention est irrecevable pour représenter l’intérêt collectif de la profession.

Il affirme que la Spedidam n’est pas habilitée à représenter l’intérêt collectif de la profession et cela d’autant moins que le litige ne porte pas sur son champ de compétence soit la gestion collective.

Il déclare que l’article L 321-1 du CPI limite le droit d’ester en justice aux droits dont l’organisme de gestion a statutairement la charge ce qui n’est pas le cas en l’espèce, la gestion collective des droits n’étant pas en cause.

Il soutient qu’elle n’a pas d’intérêt à agir.

Il observe qu’elle formule des demandes qui lui sont propres et en infère que son intervention est principale. Il déclare qu’elle ne justifie pas d’un intérêt qui lui aurait permis d’exercer une action distincte de l’instance initiale alors que le litige concerne les droits d’un artiste interprète décédé qui n’est plus membre de la Spedidam et dont les héritiers ne le sont pas davanatage.

Il estime qu’elle n’a pas davantage d’intérêt à intervenir à titre accessoire, les demandeurs n’étant pas adhérents de la Spedidam.

Il affirme également qu’il n’existe pas de lien suffisant avec les prétentions des parties, les demandeurs n’étant pas membres de la société et celle-ci n’étant pas un syndicat. Il lui reproche d’instrumentaliser le litige pour faire le procès du dispositif légal et se faire reconnaitre comme son interlocuteur alors que, s’agissant du fonds d’archives de l’INA, elle est évincée par l’article 49 II.

Sur le fond, l’INA soutient que la loi l’autorise expressément à exploiter les archives objets du litige.

Il rappelle les termes de l’arrêt de la Cour de cassation et ceux du jugement.

Il expose sa mission confiée par les lois des 7 août 1974, 29 juillet 1982, 30 septembre 1986 et 1er août 2000 et rappelle la modification apportée par la loi du 1er août 2006 à l’article 49.II de la loi du 30 septembre 1986.

Il déclare que les interprétations litigieuses font partie des archives qu’il est en droit d’exploiter car disposant, par ces textes, d’une double propriété, une propriété corporelle sur les archives et la propriété intellectuelle qui leur est attachée. Il souligne que tous les vidéogrammes et le phonogramme ont été produits puis diffusés par l’ORTF et TF1 ce qui n’a pas été contesté.

Il rappelle l’article 49.II de la loi du 30 septembre 1986 et en infère que la décision lui refusant le bénéfice du régime dérogatoire est contraire à la loi.

Il relève que la cour de cassation l’a qualifié «’de régime dérogatoire institué au profit de l’INA’».

Il infère de ce régime qu’il déroge aux articles L 212-3 et L 212-4 du CPI qui imposent la preuve de l’existence d’un contrat écrit ou d’autres éléments de nature à établir les relations contractuelles ayant existé entre le producteur et l’artiste interprète et que les accords collectifs signés concernent l’ensemble du fonds d’archives qui lui est légalement dévolu.

Il rappelle le principe posé par l’article L 212-4 du CPI auquel il déroge qui pose une présomption de cession des artistes-interprètes au producteur de l”uvre audiovisuelle pour laquelle ils sont engagés mais qui ne joue que s’il existe un contrat de travail signé par ces artistes.

Il déclare que l’article 49.II renforce cette présomption en lui permettant de l’invoquer même en l’absence de contrat de travail.

Il en conclut qu’il n’a pas à rapporter la preuve du contrat matérialisant l’accord de M. [Z].

Il soutient que ce schéma est en accord avec les engagements internationaux soit l’article 12 du traité de Beijing adopté le 24 juin 2012 et signé par l’Union européenne qui admet qu’un pays signataire puisse ne pas exiger que le consentement de l’artiste interprète à la fixation de son interprétation soit donné par écrit et rappelle qu’il a été validé par le conseil constitutionnel «’eu égard à l’intérêt général qui s’attache à la conservation et à la mise en valeur du patrimoine audiovisuel national’».

Il ajoute qu’il est conforme au droit de l’Union européenne, la Directive du 22 mai 2001 n’exigeant pas d’écrit pour le consentement de la première fixation. Il souligne que le consentement de [M] [Z] ne peut être contesté car il a participé à ces émissions en présence du présentateur et sur le lieu du tournage aux côtés des musiciens.

L’appelant relève que la loi prévoit deux types d’accords soit entre lui et les artistes interprètes ou entre lui et les organisations de salariés représentatives. Il estime ce recours aux syndicats usuel en la matière, une présomption de salariat pour les artistes interprètes existant.

Il soutient qu’il résulte des termes utilisés que ce régime dérogatoire ne se résume pas aux conditions financières, la première partie, «’Par dérogation’», mettant en place la présomption de cession renforcée et la seconde renvoyant aux accords. Il considère donc qu’il ne résulte pas de cet article que les syndicats exerceraient le droit d’autoriser ou d’interdire de l’artiste-interprète ou que les accords collectifs sont réputés couvrir les autorisations mais que ces accords fixent, sur la base de la cession présumée, les rémunérations des artistes salariés.

Il précise que de nombreux accords collectifs ont été ainsi conclus par l’ORTF puis par les sociétés de programmes.

Il déclare les avoir signés et en dresse la chronologie.

Il soutient que la dérogation est légale même si ces accords sont antérieurs à la loi. Il estime qu’il détient ses droits non des seuls accords passés mais de la loi qui leur a donné une force légale supérieure.

Il cite l’accord du 16 juin 2005 conclu entre lui et les principaux syndicats d’artistes-interprètes représentatifs et en décrit le mécanisme qui permet de favoriser la diffusion des ‘uvres tout en protégeant les droits des artistes interprètes.

Il fait valoir que la loi n’exige pas, pour l’application de ces accords, qu’il détienne le contrat de travail de l’artiste-interprète matérialisant son autorisation en vue de l’exploitation première. Il en conclut que ces accords peuvent s’appliquer en l’absence de détention par lui des contrats de travail. Il estime que décider le contraire reviendrait à appliquer les articles L 212-3 et L212-4 du CPI auxquels il est expressément dérogé.

Il ajoute que ces accords sauvegardent la rémunération des artistes alors même que le cachet initial peut ne pas être connu, décrit le mode de rémunération et souligne l’approbation des syndicats qui représentent l’ensemble de la profession contrairement à la Spedidam qui ne représente que ses adhérents. Il précise que le SNLA FO est le seul syndicat à s’y être opposé.

Il indique que le présent litige est le seul à ce jour concernant ce régime et en conclut que celui-ci n’est pas attentatoire à l’intérêt collectif.

Il affirme que cette exploitation est conforme aux règles de la concurrence et se prévaut de la décision du 10 avril 2003 du conseil de la concurrence saisi par une société de production ayant admis la validité de ses pratiques tarifaires. Il rappelle qu’il est le seul à détenir les archives de son fonds et, donc, seul sur son marché, aucun autre opérateur ne pouvant exploiter les mêmes enregistrements. Il ajoute que les producteurs privés acquérant ces archives auprès de lui bénéficient du système.

A titre subsidiaire, il conteste les demandes d’indemnisation.

Il déclare que le préjudice est inexistant dans la mesure où les vidéogrammes et le phonogramme lui appartiennent et que lui seul peut les exploiter. Il ajoute que les intimés peuvent même percevoir des rémunérations grâce à cette exploitation.

Il estime l’indemnisation attribuée disproportionnée.

En ce qui concerne les demandes de la Spedidam, si celle-ci est jugée recevable en son intervention, ils conclut à leur rejet car non soumises au premier juge.

Il souligne qu’il n’a pas été débattu de l’atteinte à l’intérêt collectif de la profession invoquée et de la demande de publications judiciaires, demandes propres et spécifiques de la Spedidam et ne tendant pas aux mêmes fins que celles des demandeurs. Il estime que l’article 564 du code de procédure civile est réservé aux parties présentes en première instance. Il considère enfin que l’arrêt de la Cour de cassation ne peut constituer la révélation d’un fait nouveau sauf à estimer que tout arrêt de cette cour pourrait justifier des prétentions nouvelles.

Sur le fond, il fait valoir que l’intérêt collectif de la profession n’est pas en jeu, l’arrêt invoqué – obsolète et isolé – n’étant pas transposable et estime injustifiée la demande de publication.

Il s’oppose à la demande de renvoi préjudiciel.

Il soutient que la question soulevée n’est pas pertinente et que l’application correcte du droit communautaire s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable.

Il fait valoir que l’article 49.II n’est pas une exception, toute dérogation n’étant pas une exception.

Il considère qu’il institue une présomption simple et donc réfragable et qu’il permet une négociation de gré à gré avec l’artiste-interprète ce qui démontre que rien ne lui est imposé étant ajouté que l’INA tient compte des restrictions ou limitations particulières. Il estime que s’il s’agissait d’une exception ou même d’une limitation, il pourrait ignorer les éventuelles manifestations initiales de volonté de l’artiste interprète et ne pas négocier de gré à gré, le droit exclusif de l’artiste étant alors exclu.

Il soutient que l’arrêt de la CJUE du 16 novembre 2016 concernant les «’livres indisponibles’» ne peut être utilement invoqué car écartant précisément l’article 5 de la directive 2001/29 consacré aux exceptions et car se prononçant dans une espèce très différente, l’exploitation numérique des livres indisponibles.

Il affirme que la présente espèce ne concerne que des interprétations musicales protégées par le droit voisin de l’artiste-interprète, fortement imprégné du droit du travail, alors que la CJUE s’est intéressée à une question spécifique au droit d’auteur.

Il affirme également que ce dossier ne concerne pas la gestion collective – alors que celle-ci était centrale dans l’arrêt précité – mais un simple mécanisme légal édictant une présomption renforcée de cession des droits dans le droit fil de celle édictée à l’article L 212-4 du CPI.

Il excipe d’autres différences tenant à sa mission légale, à sa faculté de conclure des accords de gré à gré et aux accords collectifs prévus destinés à fixer le barème des rémunérations.

Il fait valoir que le mécanisme respecte les objectifs fondamentaux du droit de l’Union européenne.

Il cite le considérant numéro 3 de la directive 2001/29 et des arrêts de la CJUE aux termes desquels il convient de concilier le droit de la propriété intellectuelle et l’intérêt général. Il excipe également de la liberté d’expression -qui comprend la liberté de communiquer et donc de diffuser- prévue par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Il estime que le mécanisme de l’article 49.II réalise cet équilibre ce qu’a reconnu le conseil constitutionnel.

Il ajoute que la protection du droit voisin de l’artiste interprète est garantie par les accords et parle versement d’une rémunération ce qui respecte même le niveau de «’protection élevé’» rappelé par le considérant n°9 de la directive ainsi qu’il résulte des attestations des syndicats signataires.

Enfin, il indique que ce mécanisme s’inscrit dans les réflexions menées par la Commission européenne

Dans leurs dernières conclusions portant le numéro 4 en date du 20 décembre 2016, MM [T] et [R] et la Spedidam demandent à la cour de’:

– dire la Spedidam recevable et bien fondée en son intervention volontaire ;

– confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 24 janvier 2013 tel que réformé par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 11 juin 2014 en ses dispositions non touchées par l’arrêt de cassation partielle de la Cour de cassation du 14 octobre 2015, sauf en ce qu’il a limité le montant des dommages-intérêts que l’INA a été condamné à payer à Messieurs [M] [R] et [L] [T] en réparation du préjudice subi des suites de l’exploitation non autorisée des 27 phonogramme et vidéogrammes listés dans le procès-verbal de constat de Maître [Z] [O] des 14 et 15 décembre 2009 à la somme de 15 000 euros ;

Réformant la décision sur ce point et statuant à nouveau :

– condamner l’INA à leur payer la somme de 108 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice individuel subi du fait de l’exploitation des 27 phonogramme et vidéogrammes litigieux sans autorisation des ayants droit de l’artiste-interprète [V] [Z] ;

Y ajoutant,

– condamner l’INA à payer à la Spedidam la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice collectif subi par la profession d’artiste interprète ;

– ordonner la publication de la décision à intervenir dans trois journaux ou revues au choix de la Spedidam aux frais avancés de l’INA, sans que le coût total de ces insertions n’excède la somme de 15 000 euros hors taxes ;

– condamner l’INA à payer à Messieurs [M] [R] et [L] [T] et à la Spedidam la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouter l’INA de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

Subsidiairement,

– dire qu’un renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l’Union européenne doit être opéré pour déterminer si la directive 2001/29/CE autorise l’exception ou limitation aux droits de reproduction et de communication au public des artistes-interprètes instaurée par l’article 44 de la loi du 1er août 2006 ;

– saisir en conséquence la Cour de justice de l’Union européenne de la question préjudicielle suivante :

L’article 5 de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, qui dresse une liste exhaustive des exceptions et limitations au droit de reproduction et au droit de communication au public des artistes-interprètes que les Etats membres ont la faculté de prévoir, autorise-t-il un Etat membre à prévoir un régime dérogatoire tel que celui institué au profit de l’INA par l’article 49, II, de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dans sa rédaction issue de l’article 44 de la loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information, permettant à l’INA de se dispenser de l’autorisation des artistes-interprètes imposée par les articles L. 212-3 et L. 212-4 du code de la propriété intellectuelle pour l’exploitation de leurs prestations ‘ ;

– suspendre l’instance jusqu’à ce que la Cour de justice de l’Union européenne ait statué.

Ces parties soutiennent que la décision de la cour de cassation est contraire au droit interne et au droit de l’Union européenne.

Elles soulignent qu’est posée une question de principe sur la portée de la dérogation aux droits d’auteur revendiquée par l’INA et relèvent l’importance des recettes commerciales de l’INA qui représentent 31% de ses ressources.

Elles décrivent le procès-verbal de constat dressé par Maître [O] les 14 et 15 décembre 2009 et rappellent la procédure.

La Spedidam soutient qu’elle est recevable à agir en défense de l’intérêt collectif de la profession d’artiste-interprète.

Elle invoque sa qualité à agir.

Elle rappelle l’article 321-1 alinéa 2 du CPI et cite l’article 3.5 de ses statuts aux termes duquel « à cette fin, la société a qualité pour ester en justice tant dans l’intérêt individuel des artistes-interprètes que dans l’intérêt collectif de la profession pour faire respecter les droits reconnus aux artistes-interprètes’». Elle en conclut qu’elle est habilitée à agir en réparation pour l’ensemble de la profession dès lors que les droits de propriété intellectuelle de membres de cette profession ont été méconnus comme en l’espèce. Elle excipe d’arrêts de la cour d’appel de Paris prononcés en 2010 et 2012 et d’un arrêt de la cour de cassation du 6 mars 2001.

Elle affirme que le litige porte sur une question du droit de la propriété intellectuelle et non du travail et qu’elle a participé à la construction jurisprudentielle du droit des artistes-interprètes.

Elle ajoute qu’elle verse aux débats l’adhésion de [V] [Z]’et, citant l’arrêt invoqué par l’INA, qu’il appartient à l’INA de démontrer qu’au jour de l’assignation, il avait cessé d’appartenir à la Spedidam.

Enfin, elle déclare qu’elle a découvert que 26 autres artistes interprètes qui sont ses membres ont participé aux enregistrements litigieux.

Elle souligne qu’elle n’agit pas dans l’intérêt individuel de l’artiste-interprète.

Elle invoque son intérêt à intervenir.

Elle déclare que son intervention est accessoire en ce qu’elle vise à appuyer la position des demandeurs et principale en ce que les agissements de l’INA portent atteinte aux intérêts matériels et moraux de l’ensemble de la profession pour laquelle elle entend obtenir réparation.

Elle ajoute qu’elle s’explique par l’évolution du litige soit l’arrêt de la Cour de cassation intervenu alors que les ayants droit n’avaient pas constitué avocat.

Elle invoque son bien fondé à agir au titre de l’intérêt collectif de la profession.

Elle invoque les conséquences de l’arrêt pour l’ensemble des artistes-interprètes dont elle défend les intérêts et, donc, un lien suffisant entre son intervention et les prétentions initiales.

Ces parties rappellent le champ de la saisine de la cour de renvoi soit la portée du régime dérogatoire créé par l’article 44 de la loi du 1er août 2006 au regard du droit commun des artistes-interprètes en particulier de l’article L 212-3 du CPI et, si l’autorisation de l’artiste interprète est requise, l’évaluation du préjudice des ayants-droit et de la réparation à l’atteinte à l’intérêt collectif de la profession.

Elles font valoir qu’avant la loi du 1er août 2006, l’INA n’a jamais disposé d’office de l’ensemble des droits d’exploitation des archives audiovisuelles, les lois antérieures n’évoquant pas la titularité des droits de propriété intellectuelle. Elles en concluent qu’il ne disposait pas implicitement de tous les droits d’exploitation nécessaires à l’accomplissement de sa mission, la cession des droits de propriété intellectuelle devant être expresse et ne résultant pas du transfert de la propriété matérielle.

Elles soulignent que la loi du 1er août 2000 a modifié la loi du 30 septembre 1986 ainsi’:

« L’institut exerce les droits d’exploitation mentionnés au présent paragraphe dans le respect des droits moraux et patrimoniaux des titulaires de droits d’auteurs ou de droits voisins du droit d’auteur, et de leurs ayants droit. » et en conclut, citant les débats parlementaires, que le législateur avait alors entendu « garantir le respect des droits intellectuels, moraux et patrimoniaux des auteurs, producteurs et artistes-interprètes ou de leurs ayants droit » au motif que « Même si le respect de ces droits fondamentaux était implicite dans l’article, il [‘] semble utile de le réaffirmer dans la loi’».

Elles indiquent que l’article 49.II dans sa rédaction actuelle comprend la même disposition et en concluent que, nonobstant l’ajout postérieur, sa portée générale doit être confirmée. Elles estiment cela d’autant plus important que l’intention du législateur en 2006 a été d’introduire une «’dérogation, limitée, au régime des droits exclusifs’».

Elles estiment donc justifié le raisonnement du tribunal et de la cour d’appel dont elles citent les motifs. Elles affirment que ces décisions sont conformes à d’autres arrêts et à la pratique de l’INA qui a signé des accords avec les sociétés de gestion collective de droits d’auteur et même, en 1999, avec les ayants droit de [V] [Z].

Elles concluent qu’avant la loi du 1er août 2006, l’INA n’a jamais pu être considéré comme automatiquement titulaire des droits de propriété intellectuelle des artistes-interprètes dont il a recueilli les enregistrements à titre d’archives, qu’il a toujours appartenu à l’INA, au contraire, d’établir de quelle façon il pouvait se prévaloir d’une cession de ces droits en application de l’article L. 212-3 ou de l’article L. 212-4 du CPI pour toute exploitation réalisée postérieurement au 1er janvier 1986 et que la loi du 1er août 2000, dont les dispositions sont toujours en vigueur, a expressément rappelé à l’INA qu’il devait exercer les droits d’exploitation des archives dans le respect des droits moraux et patrimoniaux des titulaires de droits d’auteurs ou de droits voisins du droit d’auteur, et de leurs ayants droit.

Elles soutiennent que la loi du 1er août 2006 ne peut permettre à l’INA de disposer d’office de l’ensemble des droits d’artistes-interprètes d’archives audiovisuelles.

Elles invoquent le contexte de l’adoption de la loi soit essentiellement la transposition de la directive 2001/29/CE. Elles déclarent que l’article 44, ajouté lors du passage au Sénat, a été adopté sans débat approfondi et font état de critiques doctrinales à l’encontre de la décision du Conseil constitutionnel.

Elles déclarent que jusqu’à l’arrêt du 14 octobre 2015, la portée du régime dérogatoire était incertaine, le texte ne visant explicitement que la question de la rémunération des artistes-interprètes et laissant subsister le rappel de principe de la loi de 2000. Elles affirment que ce n’est que dans la présente procédure que l’INA a invoqué l’exception légale dont il disposerait en application de ce texte.

En ce qui concerne les accords syndicaux, elles relèvent qu’ils ont été conclus avant la loi de 2006 et en concluent qu’ils n’ont pu avoir été conclus en application de celle-ci.

Elles ajoutent que seules les organisations de gestion collective, et non les syndicats, sont compétentes pour l’exercice des droits de propriété intellectuelle des artistes interprètes. Elles considèrent qu’il résulte des articles L 2212-1 et L 2221-2 du code du travail que les conventions ou accords collectifs n’ont vocation à traiter que des questions intéressant les « conditions d’emploi, de formation professionnelle et de travail ainsi que de garanties sociales » des salariés.

Elles se prévalent d’un arrêt ayant jugé, en matière d’exploitation des ‘uvres journalistiques, dans le cas où un accord collectif comportait des dispositions imposant à des auteurs salariés de renoncer à certains de leurs droits patrimoniaux pour de nouvelles exploitations et cessions de leurs ‘uvres, qu’une telle clause « ne peut engager que les seules parties à l’accord et ne saurait interdire aux salariés de faire valoir en justice les droits qu’ils ont acquis par application de la loi ».

Elles rappellent que la Spedidam a notifié son opposition à ce que les accords disposent des droits exclusifs des artistes-interprètes qu’elle était seule habilitée à gérer et pour lesquels aucune autorisation d’exploitation ne pouvait être délivrée sous cette forme.

Elles ajoutent que la conclusion d’un contrat de travail par un artiste-interprète n’entraîne pas de cession automatique des droits d’exploitation attachés à sa prestation ce que la loi du 7 juillet 2016 a confirmé.

Elles contestent que l’ensemble de la profession cautionne le régime dérogatoire.

Elles soutiennent que l’arrêt du 14 octobre 2015 consacre une exception aux droits exclusifs des artistes-interprètes en violation du droit communautaire.

Elles déclarent qu’il résulte de cet arrêt que l’INA peut exploiter les enregistrements litigieux sans devoir prouver l’autorisation de l’artiste-interprète concerné.

Elles en concluent que le régime dérogatoire constituerait une véritable exception à leurs droits exclusifs et excipent de commentaires de cet arrêt estimant possible que le droit français contrevienne à la directive de 2001.

Elles reprennent cette directive et déclarent que l’article 5.2 ne prévoit que 5 «’exceptions et limitations’» limitées au seul droit de reproduction et estiment qu’aucune ne correspond au cas d’espèce.

Elles estiment indifférent de savoir si le système constitue une exception ou limitation, l’article 5 envisageant les exceptions et limitations et le dispositif litigieux apportant assurément une limitation à l’exercice des droits exclusifs des artistes-interprètes. Elles soulignent que celles-ci sont d’interprétation stricte et affirment qu’elles ne sont admises qu’à la condition de n’être « applicables que dans certains cas spéciaux qui ne portent pas atteinte à l’exploitation normale de l”uvre ou autre objet protégé ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit ».

Elles contestent que l’INA respecte toujours les éventuelles manifestations de volonté des artistes-interprètes et accepte la négociation de gré à gré, n’ayant jamais cherché à s’assurer de l’accord des ayants droit de [M] [Z]. Elles ajoutent que cette circonstance est indifférente au fait que le régime constitue une exception ou une limitation aux droits instaurés par les articles L 212-3 et L 212-4 du CPI.

Elles soutiennent que les objectifs fondamentaux invoqués sont insuffisamment étayés, l’INA ne se référant à aucun droit fondamental en particulier, et qu’aucune décision de la CJUE n’a pris en compte l’intérêt général en tant que tel pour restreindre l’exercice d’un droit de propriété intellectuelle. Elles affirment que l’arrêt du 8 septembre 2016 ne se fonde pas sur le seul intérêt général et se prévalent de l’arrêt du 16 novembre 2016 qui confirme qu’un objectif d’intérêt général ne peut justifier une dérogation aux droits exclusifs non prévue par la directive 2001/29.

Elles affirment que l’intérêt pécuniaire trouvé par les artistes interprètes dans le régime dérogatoire ne suffit pas à justifier l’atteinte portée au droit lui-même alors, au surplus, que l’INA en tire profit.

Elles ajoutent que l’INA se place en dehors des règles du droit de la concurrence alors même que la directive rappelle l’objectif d’empêcher les distorsions de concurrence.

Elles affirment que l’INA bénéficierait d’un double avantage par rapport à d’autres entreprises concurrentes réalisant une exploitation commerciale d’enregistrements sonores et audiovisuels d’archives grâce au financement public et à la dispense d’autorisation préalable et donc de valorisation réelle des droits des artistes-interprètes. Elles estiment insuffisante la décision du conseil de la concurrence non transposable. Elles affirment en outre que les producteurs audiovisuels du secteur privé sont désavantagés lorsqu’ils acquièrent des archives auprès de l’INA car ils ne bénéficient pas de la dérogation.

En ce qui concerne l’absence d’exigence d’un écrit dans la directive, elles reprochent à l’INA d’assimiler l’exigence d’écrit à celle du consentement en considérant que celui-ci peut être présumé et affirment que le consentement du titulaire doit être exprès et préalable sauf à réduire à néant la portée des droits. Enfin, elles font valoir que la directive constitue, comme toute directive, un minimum de protection et qu’elle renvoie aux dispositions internes qui prévoient en France l’exigence d’un écrit.

Elles estiment que le droit exclusif de l’artiste interprète s’accommode mal d’un prétendu consentement tacite.

En ce qui concerne le traité de Beijing, elles déclarent qu’il n’est pas entré en vigueur, qu’il s’applique aux artistes interprètes étrangers ou résidant à l’étranger et qu’il ne permet pas d’écarter l’exigence de l’écrit. Elles ajoutent que son article 12 ne s’applique pas à l’INA.

Elles concluent qu’aucune disposition ne permet de s’affranchir du respect du droit exclusif des artistes interprètes et estiment vaine la man’uvre tendant à exciper d’une éventuelle autorisation tacite. Elles font valoir que l’article 49 II crée une exception, prohibée, à la nécessité de l’autorisation.

Elles estiment donc que l’arrêt du 14 octobre 2015 consacre une exception aux droits exclusifs des artistes interprètes reconnus par les articles L 212-3 et L 212-4 et est contraire aux dispositions impératives de la directive du 22 mai 2001.

Elles sollicitent en conséquence la confirmation du jugement sauf en ce qui concerne les dommages et intérêts.

Subsidiairement, elles demandent la saisine de la CJUE d’une question préjudicielle.

Elles invoquent l’article 19.3 du Traité sur l’Union européenne et l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Elles estiment la question pertinente, de nature à affecter la solution du litige, portant sur l’interprétation d’un texte en lien avec les éléments de la cause et comportant des éléments de fait et de droit précis.

Elles estiment fondée la demande au regard des articles 5.2 et 5.3 de la directive. Elles se prévalent de l’arrêt de la CJUE du 16 novembre 2016 sur les livres indisponibles qui présente de nombreuses similitudes, le Conseil constitutionnel ayant alors estimé le dispositif régulier au regard de l’objectif d’intérêt général poursuivi et la CJUE, saisie par le Conseil d’Etat, l’ayant jugé irrégulier. Elles relatent la motivation de cette décision qui fait état de l’exercice effectif des droits, du consentement préalable nécessaire, du défaut de pertinence de la notion d’intérêt général et du caractère subsidiaire des droits et bénéfices des exploitants.

Les ayants droit soutiennent que la violation de leurs droits leur cause nécessairement un préjudice et qu’au surplus, aucune rémunération ne leur a été versée. Ils déclarent avoir déjà obtenu la condamnation d’exploitants et, compte tenu des sommes alors allouées, sollicitent le paiement d’une somme de 4.000 euros par enregistrement. Ils ajoutent qu’ils ont déjà accordé, en 1999, des autorisations à l’INA au prix de 100 euros la minute ce qui justifie une somme de 38.800 euros pour 388 minutes. Ils observent qu’il s’agissait alors d’une autorisation amiable et limitée.

La Spedidam soutient que ses demandes sont recevables, lorsque son intervention l’est, dès lors qu’elles n’aboutissent pas à soumettre un litige nouveau ce qui est le cas, ainsi qu’il a été jugé, de l’intervention d’un syndicat qui poursuit la réparation du préjudice causé par le même manquement à la profession. Elle ajoute qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au tribunal et qu’en toute hypothèse, si elles sont considérées comme nouvelles, elles sont recevables au titre de l’article 564 du code de procédure civile car elles soumettent des questions nées de l’intervention d’un tiers et de la survenance d’un fait nouveau, l’arrêt de la cour de cassation qui constitue une jurisprudence nouvelle.

Elle invoque un préjudice porté la profession dans son ensemble dont elle est statutairement chargée de défendre les intérêts et souligne que les enregistrements litigieux reproduisent les prestations d’au moins 27 artistes interprètes qui sont ses adhérents.

Elle excipe de l’importance du préjudice.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 12 janvier 2017.

****************************

Sur l’intervention de la Spedidam

Considérant que la Spedidam doit rapporter la preuve de sa qualité et de son intérêt à intervenir’;

Considérant qu’aux termes de l’article 3 de ses statuts, la Spedidam a pour objet «’l’exercice et l’administration ‘ de tous les droits reconnus aux artistes interprètes ‘ et notamment les droits définis à l’article 2 des présents statuts ‘ et plus généralement la ‘défense des intérêts matériels et moraux des ayants-droit»’; qu’aux termes de l’article 3.5 des statuts, «’à cette fin, elle a qualité pour ester en justice tant dans l’intérêt individuel des artistes-interprètes que dans l’intérêt collectif de la profession pour faire respecter les droits reconnus aux artistes-interprètes’»’;

Considérant que l’article 2 des statuts concerne les effets de l’adhésion et détaille les apports des adhérents’;

Considérant, d’une part, qu’il résulte du renvoi à l’article 2 des statuts – conforme à l’article 1165 du code civil dans sa rédaction alors applicable – que la Spedidam ne peut exercer et administrer les droits que de ses adhérents’;

Considérant, d’autre part, que l’article 3 précise qu’elle exerce la défense des intérêts des «’ayants-droit’»’;

Considérant qu’il s’infère de ses statuts que la Spedidam n’a qualité pour agir que pour la défense de ses adhérents’;

Considérant que cette qualité s’apprécie au jour de son intervention’;

Considérant qu’à cette date, Monsieur [M] [Z] était décédé’; que la Spedidam ne démontre pas que ses ayants-droit ont souhaité continuer à adhérer à la Spedidam’;

Considérant, en conséquence, qu’au regard de ses statuts, la Spedidam n’a pas qualité à agir ;

Considérant que seule une disposition législative ou règlementaire pourrait donc lui donner qualité pour agir’;

Considérant que l’article L 321-1 du CPI ne permet aux sociétés d’agir que «’pour la défense des droits dont elles ont statutairement la charge’»’; qu’il ne permet à la Spedidam d’agir que pour défendre les intérêts de ses membres’qui lui ont fait apport de leurs droits d’auteur ou de leurs droits voisins ; que cette disposition ne lui confère donc pas un monopole sur la défense des droits individuels des artistes-interprètes’;

Considérant qu’aucune autre disposition ou décision ministérielle ne lui a conféré une mission de représenter l’intérêt collectif de la profession’; que, société de gestion collective, elle ne peut agir que lorsque la gestion des droits collectifs dont elle a la charge est concernée’; que tel n’est pas le cas’;

Considérant que la Spedidam n’a donc pas qualité pour représenter un intérêt collectif’et défendre les intérêts matériels et moraux de l’ensemble de la profession ;

Considérant que la Spedidam n’a donc pas qualité à agir’;

Considérant que faute du droit d’agir relativement à sa prétention, son intervention à titre principal est irrecevable’;

Considérant que les ayants-droit de Monsieur [Z] ne sont pas membres de la Spedidam’; que celle-ci ne peut donc autoriser l’exploitation contestée ou demander le versement d’une rémunération’; qu’elle ne justifie donc pas d’un intérêt pour la conservation de ses droits ou de l’intérêt collectif qu’elle aurait la charge de promouvoir à soutenir leur prétention’; que son intervention à titre accessoire est dès lors également irrecevable’;

Considérant que l’intervention de la Spedidam est, en conséquence, irrecevable’;

Sur le droit pour l’INA d’exploiter les vidéogrammes et phonogrammes litigieux

Considérant que l’article L 212-3 du CPI dispose que «’sont soumises à l’autorisation écrite de l’artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l’image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l’image’, cette autorisation et les rémunérations auxquelles elle donne lieu sont régies par les dispositions des articles’L 762-1’et L. 762-2 du code du travail, sous réserve des dispositions de l’article’L. 212-6’du présent code’»’;

Considérant qu’aux termes de l’article L 212-4 du même code, «’la signature du contrat conclu entre un artiste-interprète et un producteur pour la réalisation d’une oeuvre audiovisuelle vaut autorisation de fixer, reproduire et communiquer au public la prestation de l’artiste-interprète. Ce contrat fixe une rémunération distincte pour chaque mode d’exploitation de l”uvre’»’;

Considérant que l’article 44 de la loi du 1er août 2006 a modifié l’article 49 II de la loi du 1er août 2006 qui est ainsi rédigé’:

«’L’Institut national de l’audiovisuel, établissement public de l’Etat à caractère industriel et commercial, est chargé de conserver et de mettre en valeur le patrimoine audiovisuel national.

I. L’institut assure la conservation des archives audiovisuelles des sociétés nationales de programme et contribue à leur exploitation. La nature, les tarifs, les conditions financières des prestations documentaires et les modalités d’exploitation de ces archives sont fixés par convention entre l’institut et chacune des sociétés concernées. Ces conventions sont approuvées par arrêté des ministres chargés du budget et de la communication.

II. L’institut exploite les extraits des archives audiovisuelles des sociétés nationales de programme dans les conditions prévues par les cahiers des charges. A ce titre, il bénéficie des droits d’exploitation de ces extraits à l’expiration d’un délai d’un an à compter de leur première diffusion.

L’institut demeure propriétaire des supports et matériels techniques et détenteur des droits d’exploitation des archives audiovisuelles des sociétés nationales de programme et de la société mentionnée à l’article 58 qui lui ont été transférés avant la publication de la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 précitée. Les sociétés nationales de programme ainsi que la société mentionnée à l’article 58 conservent toutefois, chacune pour ce qui la concerne, un droit d’utilisation prioritaire de ces archives.

L’institut exerce les droits d’exploitation mentionnés au présent paragraphe dans le respect des droits moraux et patrimoniaux des titulaires de droits d’auteurs ou de droits voisins du droit d’auteur, et de leurs ayants droit. Toutefois, par dérogation aux articles L. 212-3 et L. 212-4 du code de la propriété intellectuelle, les conditions d’exploitation des prestations des artistes-interprètes des archives mentionnées au présent article et les rémunérations auxquelles cette exploitation donne lieu sont régies par des accords conclus entre les artistes-interprètes eux-mêmes ou les organisations de salariés représentatives des artistes-interprètes et l’institut. Ces accords doivent notamment préciser le barème des rémunérations et les modalités de versement de ces rémunérations.

”»’;

Considérant que la nouvelle rédaction de l’article 49.II rappelle la règle aux termes de laquelle l’institut exerce ses droits dans le respect des droits moraux et patrimoniaux des titulaires de droits d’auteurs ou de droits voisins du droit d’auteur et de leurs ayants droit et, par l’emploi de la locution «’toutefois’», introduit une dérogation’; qu’elle énonce ainsi expressément qu’elle déroge aux articles L 212-3 et L 212-4 du CPI’;

Considérant qu’elle a donc explicitement affranchi l’exploitation par l’INA de ses archives de la preuve de l’autorisation écrite donnée, ou présumée donnée selon l’article L 212-4, par l’artiste interprète pour la fixation et la première destination de son interprétation figurant sur les supports de ces archives’;

Considérant qu’il résulte donc des termes mêmes de l’article 49 II que l’applicabilité du régime dérogatoire institué au profit de l’INA n’est pas subordonnée à la preuve de l’autorisation par l’artiste interprète de la première exploitation de sa prestation’;

Considérant qu’elle n’est subordonnée qu’à des accords conclus avec les artistes concernés ou avec des organisations de salariés représentatives’;

Considérant que de tels accords ont été conclus avec ces organisations’;

Considérant qu’ils sont intervenus antérieurement à la loi’;

Mais considérant, d’une part, que la loi ne réserve pas l’application du régime à des accords postérieurs’;

Considérant, d’autre part, que l’accord du 16 juin 2005 entre l’INA et les principaux syndicats représentatifs engagés pour des émissions de télévision instaure un système de rémunération régissant les nouvelles utilisations des interprétations archivées «’quelles que soient les informations dont l’INA dispose à leur sujet’»’;

Considérant que cet accord fait partie des accords requis pour l’application du régime dérogatoire’;

Considérant qu’il est constant que les vidéogrammes et phonogrammes concernés dans la présente espèce sont soumis à ce régime dérogatoire’;

Considérant, par conséquent, qu’en application de l’article 49 II précité, l’INA était dispensé de justifier de l’accord écrit de Monsieur [Z] ou de ses ayants-droit’;

Sur la conformité de l’article 49 II à la législation européenne

Considérant qu’il ne résulte pas de sa validation par le Conseil constitutionnel que la disposition querellée est conforme au droit communautaire’;

Considérant que la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 «’porte sur la protection juridique du droit d’auteur et des droits voisins’» ;

Considérant qu’elle énonce que «’les Etats membres prévoient le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la reproduction directe ou indirecte … pour les artistes interprètes ou exécutants des fixations de leurs exécutions … »’ou la communication de celles-ci ;

Considérant qu’elle contient, en son article 5, des «’exceptions et limitations’» au droit de reproduction prévu aux articles précédents’;

Considérant qu’il est constant que le régime prévu par l’article 49 II’ne fait pas partie de ces exceptions et limitations’;

Considérant qu’est donc en cause la conformité de ce régime avec les droits de reproduction ou de communication fixés’;

Considérant que la directive exige un consentement mais ne prescrit pas qu’il soit donné sous forme écrite ;

Considérant que si elle avait estimé cet écrit nécessaire au regard du «’droit exclusif de l’interprète d’autoriser ou d’interdire’», la directive aurait imposé que le consentement de celui-ci soit donné sous cette forme’;

Considérant que, même si elle constitue une protection minimale, la directive ne peut ainsi être utilement opposée à un régime qui déroge à une obligation requise par la seule loi nationale’;

Considérant que la preuve d’un consentement écrit de l’artiste -interprète n’est donc pas requise’par la législation européenne’;

Considérant qu’est nécessaire son autorisation’;

Considérant que l’article 49 II déroge à l’article L 212-3 du CPI qui exige un accord écrit’;

Considérant qu’il déroge également à l’article L 212-4 qui pose, en présence d’un contrat de travail signé par l’artiste-interprète, une présomption de cession au producteur de l”uvre audiovisuelle’;

Considérant que la disposition litigieuse étend au bénéfice de l’INA cette présomption lorsqu’aucun contrat de travail ne figure dans le dossier de production du programme concerné’;

Considérant qu’en exonérant l’INA de prouver par un écrit l’autorisation donnée par l’artiste interprète, l’article 49 II ne supprime pas l’exigence de ce consentement mais instaure une présomption’dont la mise en oeuvre est elle-même soumise à des accords collectifs ; qu’il ne permet pas à l’INA de se «’passer de leur autorisation’» comme le soutiennent les intimés’;

Considérant qu’il ne résulte pas du système mis en place que cette présomption est irréfragable’;

Considérant que l’artiste-interprète- avec lequel des accords peuvent être conclus- peut donc invoquer son absence de consentement ou des stipulations particulières contenues dans son contrat initial’;

Considérant, en outre, que les accords avec les organisations syndicales ne leur confèrent pas le droit «’d’autoriser et d’interdire’» dévolu à l’artiste-interprète’; qu’ils ont pour seul objet de fixer sa rémunération’;

Considérant, par conséquent, que le système n’instaure qu’une présomption de consentement qui peut donc être combattue’;

Considérant qu’il ne remet ainsi pas en cause le droit exclusif de l’artiste-interprète «’d’autoriser ou d’interdire’»’énoncé par la directive; qu’il ne constitue ni une limitation ni une exception à ce droit’;

Considérant que le bénéfice de cette présomption est limité à l’INA’;

Considérant que le considérant numéro 3 de la directive énonce que «’l’harmonisation envisagée contribuera à l’application des quatre libertés du marché intérieur et porte sur le respect des principes fondamentaux du droit et, notamment de la propriété, dont la propriété intellectuelle, et de la liberté d’expression et de l’intérêt général’»’;

Considérant que l’INA a une mission particulière donnée par les lois successives de «’conserver et de mettre en valeur le patrimoine audiovisuel national’»’; que, nonobstant la part des recettes commerciales engendrées par cette exploitation, il a une mission d’intérêt général distincte de celle d’autres organismes ou sociétés concourant à l’archivage de ces oeuvres’;

Considérant que compte tenu de l’ancienneté de certaines ‘uvres, les contrats conclus par les artistes-interprètes ne lui ont pas été transmis’;

Considérant qu’il est dès lors nécessaire à l’exécution de sa mission de le dispenser de fournir la preuve de l’autorisation donnée par les artistes-interprètes’;

Considérant que cette dérogation limitée est donc justifiée afin que’la plus large diffusion soit assurée aux prestations audiovisuelles des artistes-interprètes relevant du fond d’archives de l’INA’;

Considérant que l’accord collectif conclu le 16 juin 2005 a pour objet, selon son préambule, de permettre à ces artistes-interprètes de «’participer au fruit de ce développement’»’;

Considérant que le mécanisme auquel est subordonnée la mise en ‘uvre de la présomption permet donc à l’INA d’exercer sa mission d’intérêt général en favorisant la diffusion des ‘uvres et aux artistes-interprètes de voir leur rémunération préservée’;

Considérant que la diffusion des ‘uvres pour lesquels les contrats de travail n’ont pas été conservés serait impossible en l’absence de la présomption résultant de cette dérogation’; que la liberté d’expression – et donc de communication – garantie par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne serait ainsi entravée’;

Considérant que le régime critiqué instaure donc l’équilibre entre l’intérêt général, la liberté d’expression et le droit de propriété intellectuelle des artistes-interprètes qui est l’objectif de la directive’;

Considérant que l’INA détient seul les archives de son fonds’et est seul titulaire des droits de leur exploitation ; qu’il n’est donc pas en concurrence avec d’autres opérateurs’;

Considérant également que les producteurs audiovisuels privés bénéficient de fait, lorsqu’ils acquièrent et exploitent ces archives, du régime instauré par l’article 49 Ii’;

Considérant que l’exploitation ainsi prévue n’est donc pas contraire au droit de la concurrence’;

Considérant qu’il ressort de l’ensemble de ces développements que le régime dérogatoire instauré par l’article 49 II ne remet pas en cause le droit exclusif de l’artiste-interprète «’d’autoriser ou d’interdire’», répond à l’objectif invoqué dans le troisième considérant de la directive et ne fausse pas les règles de la concurrence’;

Considérant qu’il n’est donc pas contraire à la législation européenne’;

Considérant que, pour ces motifs, la question préjudicielle posée par les intimés n’est pas pertinente étant ajouté que l’arrêt du 16 novembre 2016 prononcé par la CJUE porte sur une question spécifique au droit d’auteur et, surtout, s’oppose à ce que celui-ci soit exercé par une société de gestion collective non choisie par lui ce qui n’est pas le cas en l’espèce’;

Considérant que la demande de renvoi sera donc rejetée’;

Sur les autres demandes

Considérant que le jugement sera donc, dans les limites de la cassation, infirmé ;

Considérant que MM. [T] et [R] et la Spedidam devront payer à l’INA la somme de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile’; que leurs demandes aux mêmes fins seront compte tenu du sens du présent arrêt rejetées’;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

Déclare irrecevable l’intervention de la Spedidam,

Statuant dans les limites de la cassation intervenue’:

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau de ce chef’:

Rejette les demandes de MM. [T] et [R],

Y ajoutant’:

Condamne in solidum MM. [T] et [R] et la Spedidam à payer à l’INA la somme de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne in solidum MM. [T] et [R] et la Spedidam aux dépens,

Autorise Maître Rol AARPI-JRF Avocats à recouvrer directement à leur encontre ceux des dépens qu’il a exposés sans avoir reçu provision.

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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