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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
1ère Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 13 JUIN 2018
DD
N° 2018/ 407
Rôle N° N° RG 16/21140 – N° Portalis DBVB-V-B7A-7TVC
Patrick Hervé X…
C/
Etablissement POLE EMPLOI
Grosse délivrée
le :
à :
Me Brice Y…
Me Yves Z…
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 27 Octobre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 16/10209.
APPELANT
Monsieur Patrick Hervé X…
né le […] à TOULON (83000), demeurant […]
représenté par Me Brice Y… – Avocat au barreau de Marseille –
assisté par Me Nicolas A…, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
plaidant
INTIMEE
POLE EMPLOI PACA – Institution Nationale Publique – sont le siège social est n° […] – pris en la personne de son Directeur Régional domicilié en cette qualité audit siège.
représenté par Me Yves Z… – SCP Z…/C… DE COULANGE – avocat au barreau de Marseille –
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Mai 2018, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Danielle DEMONT, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:
Madame Anne VIDAL, Présidente
Mme Danielle DEMONT, Conseiller
Madame Laetitia VIGNON, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Patricia ADAM.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Juin 2018.
ARRÊT
contradictoirement,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Juin 2018
Signé par Madame Anne VIDAL, Présidente et Madame Patricia ADAM, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
M. Patrick X… a été employé en qualité d’intermittent du spectacle par l’association Artem. Suite à un contrôle le 10 novembre 2015 l’institution nationale publique Pôle emploi a suspendu le versement de l’aide au retour à l’emploi (ARE) qu’il percevait et sollicité la restitution d’un indu de 11’821 € .
Par jugement en date du 27 octobre 2016 le tribunal de grande instance de Marseille a rejeté les prétentions de M. Patrick X…, l’a condamné à payer à Pôle emploi les sommes de 11’821 € à titre de restitution du montant reçu au titre de l’aide au retour à l’emploi du 27 octobre 2013 au 19 juillet 2015, 1000 € à titre de dommages et intérêts et 2000 € titre de l’article 700 du code de procédure civile avec exécution provisoire outre les dépens.
Le 24 novembre 2016 M. Patrick X… a relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 9 octobre 2017 il demande à la cour :
‘ de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
‘ de débouter Pôle emploi de toutes ses demandes ;
à titre subsidiaire,
‘ de dire que Pôle emploi en qualité de solvens a engagé sa responsabilité envers lui par une négligence fautive dans la délivrance de l’allocation chômage indue et de dire que cette négligence a causé un préjudice à M. X…,
‘ de condamner en conséquence Pôle emploi à lui verser la somme de 10’000 € et de dire que cette somme viendra en diminution de celles qui pourraient être mises à sa charge,
‘ et en toute hypothèse de condamner Pôle emploi aux dépens de première instance et d’appel.
L’appelant soutient que lorsque l’activité d’entrepreneur de spectacles est exercée par une personne morale, comme au cas d’espèce par une association, la licence est accordée en application de l’article L7122-5 du code du travail au dirigeant désigné par l’organe délibérant prévu par les statuts ; qu’il est employé en qualité d’intermittent par l’association Artem Hautes-Alpes dont il est l’un des membres fondateurs ; que Pôle emploi lui a demandé le remboursement d’un indu alors que ses droits n’avaient jamais été discutés depuis 20 ans ; qu’en application de l’article L7121-3 du code du travail « Tout contrat par lequel une personne s’assure moyennant rémunération, le concours d’un artiste de spectacle en vue de sa production est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n’exerce pas l’activité qui fait l’objet de ce contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce. » ;que la remise de bulletins de salaire présume de l’existence d’un contrat de travail ; qu’en présence d’un contrat de travail apparent c’est à celui qui invoque son caractère fictif de rapporter la preuve que les conditions d’exercice de l’activité sont telles qu’elles sont exclusives de tout lien de subordination juridique; que l’appelant était titulaire depuis 2003 d’une licence d’entrepreneur de spectacle vivant qui lui a été retirée le 15 janvier 2016 ; mais qu’il n’était ni président ni trésorier de l’association Artem et que le fait de détenir une procuration sur le compte bancaire de l’association ne remet pas en cause l’existence d’un lien de subordination ; que le président d’Artem atteste que l’appelant organise et crée la plupart des spectacles d’Artem en suivant les directives du conseil d’administration ; que du fait de son handicap à la suite d’un accident du travail, le président lui a donné procuration sur le compte bancaire de l’association, ne pouvant pas intervenir tout le temps suite à de multiples opérations ou hospitalisations ; et que si des chèques sur le compte de l’association sont signés de la main de l’appelant, qui est membre du conseil d’administration, c’est durant les hospitalisations du président, M. B…, et sous le contrôle de ces derniers ; que de nombreux témoins attestent de ce que le conseil d’administration de l’association prend des décisions sur la gestion d’Artem sans que la voix de M. Patrick X… ne soit prépondérante.
Par conclusions du 30 août 2017, l’institution nationale publique Pôle emploi demande à la cour, au visa des articles L7122 et des 7122-1 al. 2 et suivants du code du travail, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter l’appelant de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2000 € à titre de dommages intérêts par application de l’article 1382 ancien du code civil et 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Pôle emploi fait valoir que, contrairement au principe de solidarité qui a présidé à la création de ce régime spécial d’indemnisation des salariés intermittents du spectacle vivant et de l’audiovisuel, M. Patrick X… est quant à lui quasi exclusivement le salarié intermittent d’un seul employeur, l’association Artem ;
que sur 93 périodes d’emploi déclarées depuis octobre 2012 à novembre 2015, cette association est apparue ainsi 85 fois comme étant son employeur;
que les déclarations sur l’honneur de l’appelant aux termes desquelles il a affirmé n’être le dirigeant ni d’une société civile commerciale ou d’une association ni le mandataire d’une association ont donné lieu à un contrôle ;
qu’Artem ne peut produire un spectacle sans l’aval de M. X… qui est l’employeur des artistes composant le plateau artistique ;
qu’il ne peut être à la fois employeur et employé, employeur des artistes du plateau artistique et dans le même temps, artiste subordonné à un employeur ; que M. Patrick X… disposait d’une procuration bancaire ;
qu’il est le signataire depuis décembre 2013 des chèques de contribution d’Artem à l’assurance-chômage ;
que ces prérogatives révèlent son autonomie et l’implication dans l’entreprise dépassant largement celle d’un simple artiste ; et que l’inexistence d’un contrat de travail doit donc être surabondamment admise.
MOTIFS
Attendu que l’appelant soutient exactement que la remise de bulletins de salaire présume de l’existence d’un contrat de travail ; et qu’en présence d’un contrat de travail apparent c’est à celui qui invoque son caractère fictif de rapporter la preuve que les conditions d’exercice de l’activité sont telles qu’elles sont exclusives de tout lien de subordination juridique ;
Attendu que si l’appelant est le titulaire de la licence d’entrepreneur de spectacles catégorie 2 (producteur de spectacles) décrite par l’article L7122- 5 du code du travail dont la détention est obligatoire par l’employeur dont les salariés bénéficient du régime spécial des intermittents du spectacle, la détention d’une telle licence attribuée par principe au dirigeant, ne suffit pas à conférer cette qualité ; qu’elle n’exclut pas ipso facto l’existence d’un lien de subordination de son titulaire avec l’association pour la production des spectacles ; que cette situation juridique est insuffisante à démontrer l’autonomie dont M. X… aurait joui au sein de l’association
Attendu que M. X… n’était ni le président ni le trésorier de l’association Artem ; que le bénéfice d’une procuration sur le compte bancaire de l’association peut être imputé à l’état de santé de son président, M. B…, dont il est justifié par les productions qu’il souffre d’une hémiplégie et qu’il est fréquemment hospitalisé ;
Attendu que M. X… prétend ainsi sans être suffisamment contredit qu’il organise et crée la plupart des spectacles d’Artem mais en suivant les directives du conseil d’administration, et qu’il est le responsable artistique de la compagnie Artem sans diriger et gérer l’association ;
Attendu que le jugement qui a dit que M. X… n’exécutait pas un travail dans un état de subordination à un employeur et qu’il ne pouvait pas prétendre au bénéfice du régime d’indemnisation du chômage des intermittents du spectacle doit donc être réformé, et qu’il y a lieu de rejeter les demandes principale et subséquente de Pôle emploi ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déboute l’Institution publique Pôle emploi de toutes ses demandes,
Y ajoutant,
Condamne l’Institution publique Pôle emploi aux dépens, et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT