Contrat d’Artiste : 23 janvier 2019 Cour d’appel de Paris RG n° 16/07714

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Contrat d’Artiste : 23 janvier 2019 Cour d’appel de Paris RG n° 16/07714
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Copies exécutoires

délivrées aux parties le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRÊT DU 23 Janvier 2019

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 16/07714 – N° Portalis 35L7-V-B7A-BY5XW

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Mars 2016 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS section RG n° 15/04905

APPELANTE

SAS NIGHT MANAGEMENT PRODUCTION

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 412 487 589

représentée par Me Gérard MINO, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Grégory NAILLOT, avocat au barreau de TOULON

INTIMÉ

M. [F] [O]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 3]

représenté par Me Johanna BISOR BENICHOU, avocat au barreau de PARIS, toque : A0504

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 27 Novembre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente de chambre

Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère, rédactrice

Aline DELIERE, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffier : Mme Clémence UEHLI, greffier lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, présidente et par Madame Clémence UEHLI, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS CONSTANTS, PROCEDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur [O] a été embauché par la société Night Management Production qui applique la convention collective des espaces de loisirs, d’attractions et culturels, par contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à effet au 18 avril 2014 en qualité de régisseur pour travailler au sein d’un établissement de nuit parisien, moyennant le paiement d’un salaire mensuel de 2 543,99 euros pour 151,67 heures réparties hebdomadairement sur 7 heures pendant 5 jours.

Le 23 avril 2015 il a saisi le conseil de prud’hommes de Paris d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de demandes subséquentes d’indemnités de rupture, de demandes d’annulation de plusieurs avertissements, de rappels de salaire et de dommages et intérêts.

Par jugement du 11 mars 2016 le conseil de prud’hommes de Paris :

‘ a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [O] aux torts de l’employeur,

‘ a condamné la société Night Management Production à payer à Monsieur [O] les sommes suivantes :

* 2 569,94 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 256, 99 euros de congés payés sur préavis,

* 920,92 euros d’indemnité légale de licenciement,

* 3 387,65 euros à titre de solde de congés payés,

* 1 634,71 euros au titre des heures supplémentaires,

* 108 euros de congés payés afférents,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation,

* 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

* 15 419,64 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement,

* 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Night Management production a interjeté appel le 27 mai 2016

Dans ses conclusions du 19 juin 2017 auxquelles la cour fait expressément référence, remises au greffe ce jour et développées oralement à l’audience la société Night Management Production demande à la cour :

‘ de confirmer le jugement rendu le 11 mars 2007 par le conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il a débouté Monsieur [O] du surplus de ses demandes notamment sur sa demande d’annulation des six avertissements notifiés et sur sa demande de réparation du préjudice résultant de l’absence de visite d’embauche et de visites de reprise,

‘ d’infirmer le jugement en ses autres dispositifs et statuant à nouveau :

‘ de constater l’absence de manquements contractuels suffisamment graves pour justifier une résiliation judiciaire aux torts de l’employeur,

‘ de débouter Monsieur [O] de tous ses chefs de demandes y relatifs,

‘ de débouter Monsieur [O] de toutes ses autres demandes,

‘ de le condamner à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En réponse dans ses dernières conclusions remises à l’audience et développées oralement ce jour Monsieur [O] demande à la cour de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et, à titre principal, de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 11 mars 2016, à titre complémentaire de condamner la société Night Management Production à lui payer les sommes suivantes :

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour mise en danger de la santé du salarié,

* 2 000 euros à titre de dommages et intérêts au sens de l’article L3121 ‘ 33 du code du travail,

* 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la réparation de son préjudice moral,

* 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur l’exécution du contrat.

Sur la violation de l’obligation de sécurité.

Il appartient à l’employeur sur le fondement de l’article L 4121-1 du code du travail de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, de veiller à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. Ces mesures comprennent les actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, les actions d’information et de formation, la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

Il résulte de ces dispositions spécifiques aux relations de travail au sein de l’entreprise instaurant une obligation de protection de la santé des salariés au travail que l’employeur ne peut s’exonérer de sa responsabilité dans la dégradation de l’état de santé d’un salarié résultant de ses conditions de travail qu’en démontrant qu’il a pris toutes les mesures préventives adaptées et appropriées à la nature du risque.

Par ailleurs obligatoire dans toutes les entreprises, la surveillance médicale des salariés est prévue par les articles L4622’1 et suivants, et est confiée au médecin du travail qui doit assurer à la demande de l’employeur une visite médicale, à l’embauche en application de l’article R 4624 ‘ 10 à R 4624 ‘ 14 du code du travail, après une absence d’au moins 30 jours, telle que posée par les articles R 4624’22 et R 4624’23 du code du travail selon lesquels, dès qu’il a connaissance de la date de fin de l’arrêt de travail, l’employeur saisit le médecin du travail pour qu’il fasse passer un examen médical à l’intéressé et au plus tard dans un délai de 8 jours à compter de sa réintégration.

Or ni la visite d’embauche ni les 2 visites de reprise après les 2 périodes de plus de 30 jours d’absence, l’une pour accident de travail du 13 octobre 2014 au 2 décembre 2014 ( chute dans les escaliers- pour olongé pour douleurs lombaires, lombalgies, dorsalgies), et l’autre pour rechute, du 2 février 2014 au 10 mars 2015, pour dorsalgies, n’ont été organisées.

Par ailleurs l’employeur n’est pas mesure de justifier qu’il avait mis à disposition du salarié, pendant l’exécution de la prestation de travail, le matériel nécessaire pour assurer sa sécurité compte tenu de son exposition au bruit, au gaz et au rayon laser vert.

Au contraire Monsieur [R] [P] qui a remplacé Monsieur [O] pendant son accident du travail du 5 novembre au 30 novembre 2014, atteste que le dirigeant et son assistant ‘s’amusaient à mettre des coups de laser dans les yeux de leurs employés pour leur demander d’effectuer des tâches, qu’il devait à chaque début de prestations changer des bouteilles de CO2 mains nues et qu’alors que le poste qu’il occupait se trouvait à côté du DJ, près des enceintes et donc dans un volume assez important, on ne lui a jamais fourni de protection sonore’.

En conséquence des violations graves aux obligations de l’employeur d’assurer la sécurité de son salarié sont constatées.

Les manquements de l’employeur ainsi constatés ont occasionné au salarié victime d’une rechute et auquel il a persisté à réclamer le port de charges lourdes ainsi qu’il ressort du contenu des avertissements des 7 janvier et 20 mars 2015, un préjudice que la cour fixe à un montant de 1 000 euros.

Sur les avertissements.

Du 19 septembre 2014.

L’avertissement du 19 septembre 2014 tient à l’absence de nettoyage de sa table de régie et l’employeur y joint des photos.

Cet avertissement a été contesté par le salarié dans son courrier recommandé présenté le 24 novembre. Il y développe que son espace de travail ainsi que sa table de régie sont toujours propres, que les photos jointes à l’avertissement sont celles d’un MacBook ouvert et légèrement poussiéreux et qu’ à aucun moment il ne lui a été demandé d’aller démonter ses ordinateurs.

À défaut d’autres éléments apparaît tout au moins un doute sur le lien existant entre les photos et du matériel dont la responsabilité pesait sur Monsieur [O] en sa qualité de régisseur, qui profite au salarié.

En conséquence cet avertissement sera annulé.

Du 3 octobre 2014.

La société ne développe pas l’organisation du travail en son sein et ne produit pas d’éléments permettant de contredire les allégations du salarié selon lesquelles le matériel était utilisé par des prestataires extérieurs, par des collègues, qu’il y avait beaucoup de passages et qu’il n’était pas présent tous les jours d’ouverture.

En conséquence en ne démontrant pas que Monsieur [O] était le seul ou le dernier utilisateur de cet outil, ou le seul responsable de celui-ci, un manquement lié à l’absence de branchement du limitateur de son constatée, reproché dans son avertissement du 3 octobre 2014, n’est pas établi.

En conséquence cet avertissement n’est pas fondé.

Du 16 décembre 2014.

De même à défaut de donner des éléments à ce titre, son ‘refus de réaliser des effets spéciaux demandés par monsieur [G]’, reproché dans l’avertissement du 16 décembre 2014 sans autre précision quant à la nature et aux nombres d’effets spéciaux réclamés, aux circonstances du refus et à l’existence même de ce refus alors que le salarié explique que l’employeur fait référence à l’absence de lancement d’un effet spécial supplémentaire lors d’une soirée qu’il lui aurait demandé en pointant sur lui un laser vert qu’il n’a pas perçu, n’est pas établi.

En conséquence cet avertissement n’est pas fondé

Du 16 janvier 2015.

Par ailleurs un grief lié à la prise d’une photo avec un artiste de passage pendant ses heures de service justifiant l’avertissement du 16 janvier 2015, suppose tout au moins que soient à minima développés la durée de son absence, la distance de la prise de la photo avec son poste de travail, les conséquences sur la qualité de sa prestation, l’existence de plaintes de l’artiste qui se prête manifestement volontiers à l’opération, ou tout élément permettant de donner à ce fait ponctuel un caractère suffisamment fautif pour justifier une sanction.

En conséquence cet avertissement n’est pas justifié.

Des 7 janvier 2015 et 20 mars 2015.

Monsieur [O] se prévaut de problèmes de dos et sera victime le 2 février 2015 d’une rechute de son accident de travail.

Compte tenu de la violation de l’obligation de sécurité constatée précédemment et de l’impossibilité pour l’employeur de justifier de l’aptitude du salarié à son poste il ne peut dès lors lui reprocher un refus de rangement de matériel lourd.

Aussi l’avertissement du 7 janvier 2015 en tant qu’il vise ‘la négligence du salarié dans l’entretien de sa réserve où des caisses restent en attente et empêchent un libre accès au local technique’, et pour les mêmes raisons, l’avertissement du 20 mars 2015 en ce qu’il vise le défaut de rangement du local technique ‘ parce que sa présence était nécessaire et non facultative parce que certaines pièces peuvent être encombrantes et lourdes’ ne peuvent se fonder sur ces motifs démontrant la nécessité du port de charges lourdes pour répondre aux directives de l’employeur, pour sanctionner le salarié.

Mais ces avertissements visent également la dégradation du matériel de l’entreprise résultant de son nettoyage insuffisant.

Or il ressort de la lecture du courrier de Monsieur [O] du 16 septembre 2014 qu’il s’estimait bien responsable du matériel et du nettoyage du matériel qui se trouvait dans la cabine.

Il écrit ainsi ‘chaque soir je range et nettoie le matériel qui se trouve dans la cabine et celui dont je suis responsable dans le club. Chaque fin de semaine j’opère un nettoyage plus profond car n’étant pas présent pendant plusieurs jours, le matériel peut se dégrader. Une fois par mois je souffle les machines à hauteur nécessitant une attention particulière, c’est-à-dire compresseur ainsi qu’une grande échelle….Le matériel qui est mis à ma disposition est coûteux, il est donc de mon intérêt de l’entretenir et d’en prendre le plus grand soin, afin que les prestations se déroulent sans accroc..’.

Cette responsabilité qui lui incombe est également indiquée, en sa qualité de régisseur par la société ultra vision dans son courrier du 10 janvier 2015 ‘le matériel doit être soufflé chaque semaine c’est obligatoire pour éviter les pannes, c’est aussi la base du métier de régisseur, nous évaluons le temps de cet entretien à trois heures par semaine ce qui est très peu contraignant d’autant plus que cela ne nécessite aucune compétence particulière…’ et dans son courrier du 27 janvier 2015 ‘… Il est du rôle de régisseur de souffler les machines compresseurs en état de marche et de nettoyer l’ensemble des outils techniques permettant le bon fonctionnement de la structure ‘) dans lesquels elle se plaint de manquements constatés. Elle résulte egalement des courriers de deux de ses collègues adressés à la direction, Monsieur [P] [V] le 22 janvier 2015 et Monsieur [E] [H] le 18 mars 2015, qui évoquent les conséquences sur leurs propres prestations de l’insuffisance d’entretien de ses machines par Monsieur [O].

En conséquence la société justifie du bien-fondé des avertissements des 7 janvier 2015 et 20 mars 2015.

En conséquence le jugement du conseil de prud’hommes est confirmé en ce qu’il déboute le salarié de sa demande d’annulation de ces deux avertissements mais infirmé pour le surplus et la cour prononce l’annulation des avertissements des 19 septembre 2014, 3 octobre 2014, 16 décembre 2014 et 16 janvier 2015

Sur la séquestration et la modification des horaires.

Monsieur [O] reproche à l’employeur une séquestration dans un local technique pendant 2 heures le 20 mars 2015 pour laquelle il a déposé plainte le même jour en confirmant ses déclarations aux services de police dans une seconde audition du 15 avril 2015, et une modification de ses horaires dans les jours qui ont suivi, confortant la volonté de l’employeur de se débarrasser de lui.

La cour retient que le salarié a été placé en arrêt maladie le 20 mars 2015, prolongé jusqu’au 25 mai 2015 pour ‘anxiété réactionnelle’, que madame [G] [N], ‘cliente assidue de la boîte de nuit’, atteste qu’elle a vu ce même jour, vers 1 heure du matin, Monsieur [O] en discussion houleuse avec son employeur, qu’en sortant des toilettes il avait disparu alors que son employeur, énervé, était entrain de fermer à clé un local derrière lui, qu’ensuite elle a vainement tenté de trouver Monsieur [O] dans les locaux, de l’appeler de lui envoyer des messages et qu’elle a été très choquée. Et monsieur [R] [P] atteste de l’existence de ‘ critiques et menaces envers Monsieur [O] pour lui faire payer son absence à son retour’ qu’il a entendues. Enfin, dans les jours qui ont suivi l’incident, et sans aucune explication encore à ce jour, l’employeur a notifié au salarié une modification de ses horaires à effet dès le 13 avril, incompatible avec ses fonctions de régisseur d’une boîte de nuit soit du lundi au vendredi de 10h à 12h et de 13h à 18 heures.

Tous ces indices concordants sont suffisants pour retenir la manifestation d’une volonté de l’employeur de pousser le salarié à démissionner.

Sur le préjudice moral.

Monsieur [O] sollicite un montant de 15 000 euros en réparation du préjudice moral subi en raison des conditions de l’exécution de son contrat de travail et des manquements retenus ci dessus.

Les conséquences des manquements de l’employeur à son obligation de sécurité ayant été indemnisés précédemment, la cour fixe le préjudice résultant des autres manquements retenus à la somme de 500 euros et condamne en conséquence l’employeur à payer à Monsieur [O] ce montant.

Sur les heures supplémentaires.

Aux termes de l’article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, la preuve des horaires de travail n’incombe spécialement à aucune des parties et l’employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié lorsque celui-ci a fourni préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Monsieur [O] explique qu’il travaillait essentiellement entre 23 heures et 6 heures du matin mais qu’à plusieurs reprises à compter du mois d’octobre 2014 il s’est vu imposer des journées de plus de 8 heures en violation des dispositions conventionnelles concernant les travailleurs de nuit.
Il en justifie par le contenu d’email qu’il produit pour les journées des, 1er octobre (« 8 heures: arrivée des équipes techniques+ jug, 11 heures arrivée de l’équipe.. 18 heures réunion entre les différentes équipes pour la soirée.. »), 8 octobre 2014, (privatisation « jug ils viennent faire le soundcheck à 18 heures.. ») et de la même manière les  3, 10 et 18 décembre et 14 janvier2015.

Il produit par ailleurs une attestation de Monsieur [R] [P] qui explique qu’il exerce le même métier de régisseur général son et lumière avec pour sa part une spécialité en vidéo, et a travaillé avec Monsieur [O] sur des événements dont les 4 juin, 10 septembre et 3 décembre 2014 et qu’à cette occasion il l’a vu « enchaîner les heures avec un rythme impossible c’est-à-dire être là en début d’après-midi, mettre en place tous les éléments du concours puis les démonter et enchaîner sur la soirée le tout sans repos », que par ailleurs lorsque le salarié a eu son accident du travail l’employeur l’a appelé pour le remplacer du 5 novembre au 30 novembre 2014 et que durant cette période il a vu à quel point « les conditions de travail étaient désastreuses dans cette entreprise. On vous appelle le jour même pour être présent dans l’après-midi, on peut finir à cinq heures du matin et être obligé de revenir le jour même à midi. Et les jour fériés ne donnent lieu à aucune majoration de salaire et les heures supplémentaires ne sont pas payées ni majorées.. ».

Monsieur [O] apporte également au dossier un agenda des événements planifiés dans la boîte de nuit, couplé avec un tableau des horaires hebdomadaires réalisés, indiquant les jours travaillés, les horaires de prise de services et de fin de service, les horaires rallongés les jours d’événements particuliers planifiés.

Il aboutit sur la période du 18 avril 2014 au 20 mars 2015 à 46 heures supplémentaires majorées à 25 % et 26 heures supplémentaires majorées à 50 % et réclame sur la base d’un salaire horaire de 16,94 euros, une somme totale de 1 634,71 euros.

Les prétentions du salarié sont donc étayées par la production d’éléments suffisamment précis, exploitables, fiables et cohérents entre eux quant aux horaires quotidiens de travail effectif réalisés et aux montants réclamés, pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Or l’employeur n’apporte au dossier aucun élément objectif justifiant des horaires réalisés par le salarié et se contente de contester sans pertinence les éléments produits par le salarié.

En effet il n’y a aucune incohérence à prétendre avoir travaillé trois heures supplémentaires une semaine au mois d’octobre 2014 et de noter au cours de cette semaine une journée de travail de 20 heures et 3 journées de 6 heures chacune soit un total de 38 heures. Il n’y a pas plus incohérence à noter exceptionnellement une journée de 20 heures de travail lorsque celle-ci correspond à un événement particulier pour lequel le salarié a été convoqué dès huit heures du matin alors qu’il finit régulièrement son travail tard dans la nuit.

Si la société conteste par ailleurs l’exécution d’un travail effectif entre des réunions programmées, le matin ou à 18 heures, et la prise de fonction le soir, le jour de ces événements particuliers en soutenant qu’elle n’imposait pas au salarié de rester ensuite sur les lieux, elle n’en justifie pas alors que le rythme des interventions programmées au cours de ces journées et indiqué dans les mails, laisse supposer au contraire la disponibilité de tous les techniciens.

En conséquence la cour fait droit à la demande en paiement des heures supplémentaires et confirme le jugement du conseil de prud’hommes condamnant la société à payer au salarié la somme de 1 634,71 euros à ce titre.

Sur les dépassements de la durée du travail.

Le salarié réclame un montant supplémentaire de 2 000 euros en reprochant à l’employeur la violation de la durée quotidienne maximale de travail les jours d’évènements pouvant lui imposer jusqu’à 20 heures de travail continues et l’absence de respect de temps de pause d’une durée minimale de 20 minutes après 6 heures de travail sur le fondement de l’article L3121 ‘ 33 du code du travail.

Considérant d’une part la matérialité de dépassements de la durée quotidienne maximale constatée précédemment et d’autre part l’impossibilité pour l’employeur de démontrer l’existence d’une organisation permettant la prise de pauses, la cour fait droit à la demande de Monsieur [O] et condamner la société Night Management Production à lui payer la somme de 500 euros à défaut de justification d’un préjudice plus important.

Sur le travail dissimulé.

Monsieur [O] demande en application des dispositions combinées des articles L8221’5 et L 8223 ‘1 du code du travail, une indemnité de 15 419,64 euros correspondant à six mois de salaire en reprochant à l’employeur de lui avoir, de manière intentionnelle, délivré des bulletins de salaire mentionnant un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Mais le travail dissimulé suppose la démonstration de l’élément intentionnel qui en l’espèce, compte tenu du faible nombre d’heures supplémentaires effectuées, et de l’absence de réclamation du salarié pendant l’exécution du contrat de travail alertant l’employeur sur sa situation, fait défaut.

En conséquence il est débouté de ses prétentions à ce titre et le jugement du conseil de prud’hommes est infirmé sur ce point.

Sur la résiliation judiciaire.

La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur suppose que le salarié démontre la matérialité de manquements suffisamment graves de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.

En l’espèce Monsieur [O] a démontré que la relation contractuelle s’est progressivement dégradée puisque du 19 septembre 2014 au 20 mars 2015 soit dans une période de moins de 6 mois, la société lui a délivré 6 avertissements dont 4 n’étaient pas justifiés, que le 20 mars 2015 il a déposé plainte pour séquestration contre son employeur et que celui-ci lui a notifié une modification de ses horaires de travail déconnectée de toute possibilité d’exécuter ses fonctions de régisseur d’une boîte de nuit.

Il a par ailleurs démontré la violation de l’employeur à son obligation de sécurité et son refus de régler les heures supplémentaires réalisées développées dans le courrier de la société du 7 mai 2015.

Ces manquements justifient le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Sur les conséquences indemnitaires de la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Lorsque la résiliation judiciaire est prononcée à l’initiative du salarié et aux torts de l’employeur, cette résiliation judiciaire du contrat de travail à durée indéterminée, produit les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et la rupture est fixée au jour du jugement qui la prononce.

En l’espèce la cour confirmant le jugement du conseil de prud’hommes la résiliation est prononcée au jour de la décision de première instance du 11 mars 2016.

La rupture ouvre le droit du salarié au paiement des indemnités légales et conventionnelles de rupture.

A ce titre le salarié sollicite la confirmation du jugement du conseil de prud’hommes.

Les dispositions de l’article L 1234 -1 du code du travail, accordant au salarié le bénéfice d’une indemnité compensatrice de préavis de 1 mois du salaire et l’article L 1234 ‘ 9 du code du travail accordant au salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, une indemnité de licenciement qui, selon l’article R 1234 -2 dudit code ne peut être inférieure à 1/5ème de mois de salaire par année d’ancienneté, les dispositions de l’article L1235-5 du code du travail accordant au salarié une indemnité de rupture réparant le préjudice en ayant résulté et enfin l’absence d’observation par la société Night Management Production quant aux calculs opérés par le conseil de prud’hommes sur ces bases et la nature et l’ampleur du préjudice du salarié résultant de son licenciement, emporte la cour a faire droit la demande de Monsieur [O] et a confirmé les condamnations prononcées par le conseil de prud’hommes.

Sur les frais irrépétibles et les dépens.

C’est à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Night Management Production à payer à Monsieur [O] la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Leur décision sera confirmée à ce titre.

Les parties sont déboutées de leur demande supplémentaire à ce titre.

Partie succombante, la société Night Management Production, est condamné au paiements des entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a condamné la société Night Management Production au titre du travail dissimulé et débouté Monsieur [O] de ses demandes d’annulation de ses avertissements des 19 septembre 2014, 3 octobre 2014, 16 décembre 2014 et 16 janvier 2015 et de ses demandes en réparation de son préjudice moral et du préjudice résultant de la violation de l’employeur à son obligation de sécurité ;

Statuant à nouveau sur ces points et ajoutant,

Déboute Monsieur [O] de sa demande de condamnation de l’employeur à une indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé,

Annule les avertissements des 19 septembre 2014, 3 octobre 2014, 16 décembre 2014 et 16 janvier 2015,

Condamne la société Night Management Production à payer à Monsieur [O] les sommes suivantes :

* 500 euros en réparation du préjudice moral subi pendant l’exécution du contrat de travail,

* 1 000 euros en réparation du préjudice résultant de la violation de son obligation de sécurité,

* 500 euros en réparation du préjudice résultant des violations aux dispositions relatives à la durée maximale du temps de travail quotidien et au temps de pause,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Condamne la société Night Management Production aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

 


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