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CIV. 1
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 29 mai 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10319 F
Pourvoi n° M 18-15.791
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. N… S…, domicilié […] (Irlande),
contre l’arrêt rendu le 26 octobre 2017 par la cour d’appel d’Agen (1re chambre, matrimonial), dans le litige l’opposant à Mme O… B…, épouse S…, domiciliée […] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 16 avril 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Bozzi, conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Alain Bénabent , avocat de M. S…, de Me Balat, avocat de Mme B… ;
Sur le rapport de Mme Bozzi, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. S… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme B… la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. S…
Il est fait grief à l’arrêt attaqué infirmatif de ce chef d’avoir condamné M. S… à payer à Mme B… la somme de 240.000 euros à titre de prestation compensatoire ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de prestation compensatoire
Qu’aux termes des articles 270,271 et 272 du code civil, le divorce met fin au devoir de secours entre les époux prévu par la loi, mais l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; que cette prestation a un caractère forfaitaire ; qu’elle prend la forme d’un capital dont le montant est fixé par le juge ;
Qu’elle est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ;
Que dans la détermination des besoins et des ressources, le juge prend notamment en considération :
– la durée du mariage,
– l’âge et l’état de santé des époux,
– leur qualification et leur situation professionnelle,
– les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,
– le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial,
– leurs droits existants et prévisibles,
– leur situation respective en matière de pensions de retraite ;
Que toutefois le juge peut refuser d’accorder une telle prestation si l’équité le commande, soit en considération des critères prévus par la loi soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l’époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture ;
Qu’enfin, il convient de rappeler que l’objet de la prestation compensatoire ne saurait être de niveler les états de fortune, qui peuvent être antérieurs au mariage, de constituer des rentes de situation ou de remédier aux conséquences du choix d’un régime matrimonial ;
Qu’il est par ailleurs constant que l’intégralité du patrimoine du débiteur doit être pris en compte afin d’apprécier sa faculté à régler une éventuelle prestation compensatoire ;
Qu’il y a donc lieu d’examiner la situation respective des parties au vu des pièces du dossier ;
Que le mariage des époux a duré 21 ans – du mariage au divorce dont le principe n’est pas contesté aujourd’hui – précisions apportées que la décision de séparation de corps rendue, est en date du 1 avril 2009, et que l’arrêt de la cour suivant appel de l’ordonnance de conciliation est du 16 octobre 2014 ;
Qu’au jour du divorce, O… B… et N… L… S… sont âgés de 52 ans révolus ;
Que O… B… justifie avoir été victime d’un accident du travail le 7 avril 2011 qui a nécessité une intervention chirurgicale ; qu’elle bénéfice depuis le 25 février 2015 d’une rente de 64% soit un versement mensuel de 491,19 euros et des soins post consolidation ; que sa situation sera révisée le 22 juillet 2019 ;
Que N… L… S… ne fait pas état de problèmes particuliers de santé ;
Que les époux avaient acquis en indivision de biens immobiliers l’un dans le Gers qui est l’ancien domicile conjugal, un autre à […], des terrains situés dans le Gers ;
Que par jugement du 8 février 2012 et jugement rectificatif d’omission de statuer du 12 décembre 2012, le Tribunal de grande instance d’Auch a prononcé l’exéquatur et a donné force exécutoire aux décisions rendues : le 1 avril 2009 par le tribunal itinérant du Conté de la ville de Dublin statuant en matière de la loi de 1989 sur la séparation de corps et la réforme de la loi sur les familles de 1995, le 18 décembre 2009 par le tribunal itinérant du Conté de la ville de Dublin, le 7 mai 2010 par la Cour d’appel itinérante ;
Que la décision du 1er avril 2009 dont la traduction, non contestée, a été faite, a prononcé la séparation de corps des époux, organisant la vente de la villa de […], par un agent de vente agréé, au meilleur prix possible et par la méthode la plus efficace relatives aux taxes ; que les deux parties devaient prendre l’avis de l’agent de vente pour le prix de vente et par défaut celui-ci étant fixé par le tribunal ; que la somme de 450 000 euros sera alors payée à M. S… en tant que premier chèque du compte joint, le solde des recettes à la demanderesse ;
Que la décision du 7 mai 2010 indique que l’offre de 61 500 euros (l’offre de Kennington) relative à la propriété située au […], France doit être acceptée et les fonds apportés dans cette juridiction et gardés par les avocats O’Connor Bergin afin que l’on ne dispose pas de cet argent ;
Que la propriété n’était cependant pas vendue ; que d’autres propositions d’agents ont été faites à moindre prix, propositions qui n’ont pas abouti ; que le bien était évalué en 2013 à 500 000 euros et en décembre 2014 à 480 000 euros ; qu’il était loué par l’époux, selon l’attestation jointe de Y… et les déclarations de revenus ;
Que s’agissant de la maison familiale et des terres environnantes au ‘‘[…]”, il a été ordonné à M. S… de transférer ses intérêts au seul nom de la demanderesse ; qu’il en est de même s’agissant des terres situées au […] ; que l’avis du notaire E… en date du 11 septembre 2017 mentionne une valeur pour le bien – maison et terrains -, situé à […], de 380 000 euros ;
Que de la pièce 65 émanant de N… L… S…, il ressort que ce dernier a donné un bien lui appartenant en location en Irlande et qu’il en retire des revenus ;
Que chacun des époux possèdent donc des biens immobiliers ;
Situation de O… B…
Que pendant la vie commune avec son époux depuis le mariage, l’épouse n’a pas travaillé selon ses dires ; que cependant il est noté dans l’acte notarié en date de 2006 que l’épouse était artiste et professeur d’équitation ; qu’à compter de 2009, elle a entrepris une activité d’élevage de chevaux ; qu’elle a été victime d’un accident du travail le 7 avril 2011 et bénéficie d’une rente de 490,52 euros par mois pour 64% d’incapacité permanente de travail ;
Que N… L… S… produit des éléments issus d’internet sur la vente de chevaux et de chiots ; Que O… B… réplique par le solde intermédiaire de gestion avec au 31/12/2015, 4 583,33 euros de ventes de chevaux et 0 euros de vente de chiots ; qu’il n’est pas démontré de ressources provenant de la vente de tableau et de cours donnés ;
Que O… B… produit au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2016, l’imprimé 2139 mentionnant un déficit de 15786 euros pour l’année et la déclaration 2016, professions non salariées avec un montant de 2382 euros de revenus de locations meublées ; que sa situation déclarative à l’impôt sur le revenu 2016 implique 7985 euros de pension d’invalidité ;
Qu’actuellement, elle perçoit directement la contribution pour un de ses enfants ; qu’elle justifie de ses charges courantes et pour sa fille qui doit bénéficier d’un suivi, outre d’attestations indiquant qu’elle ne vivait pas avec un compagnon et qu’elle a bénéficié de prêts personnels ;
Qu’elle justifie qu’au 3 octobre 2016, la valeur de son assurance Zurich pension était de 2 243,33 £ et à la date du 11 mai 2033 la valeur de sa pension sera de 24093 euros ;
Situation de N… L… S…
Qu’il est médecin ; qu’il a travaillé en Irlande puis est venu vivre avec sa famille en France où il n’a pas exercé ; Qu’il est reparti et a continué l’exercice de sa profession en Irlande ; qu’il a été salarié du groupe médical Centric ; qu’en juillet 2013, N… L… S… est devenu associé ; qu’il justifie d’un montant de revenus pour la période de 2015 de 161 972 euros, en ce compris le produit de la location en France pour 14400 euros en Irlande pour 7130 euros, soit au total une somme mensuelle de 13497,66 euros ; que de la même pièce, le revenu imposable retenu est de 136743 euros soit la somme mensuelle de 11395,25 euros ;
Que s’agissant des fonds affectés au titre de la retraite, le récapitulatif de performance est établi comme suit : au 1er janvier 2014 : 284 808 avec une évaluation du portefeuille au 24 février 2015 : 355 491 euros ;
Qu’il écrit dans sa dernière déclaration sur l’honneur signée, en date du 4 mai 2017, avoir 63 110 euros de revenus bénéfices industriels et commerciaux et un déficit de 10 800 euros en revenus fonciers ; qu’il ne mentionne pas ses revenus fonciers irlandais ; qu’il reconnaît vivre avec une compagne ; qu’il justifie de charges, du fait qu’il doit payer une contribution pour deux de ses enfants, subvenir à l’intégralité des frais pour un autre et de prêt personnel ;
Que tenant l’ensemble des éléments qui doivent être pris en compte tels que définis par le code civil, et sans qu’il soit besoin d’ordonner une mesure d’expertise, il ressort que contrairement à ce avancé par le premier juge une disparité existe bien au détriment de l’épouse, disparité qui doit être compensée par le paiement d’un capital de 240 000 euros ».
1°/ ALORS QUE pour fixer le montant de la prestation compensatoire le juge doit notamment prendre en considération la durée du mariage entendue comme la durée effective de communauté de vie entre époux ; qu’à cet égard, il doit prendre en compte la séparation de corps intervenue entre les époux antérieurement au divorce, dès lors que cette séparation met fin à la communauté de vie entre époux ; qu’en l’espèce, pour juger que le mariage des époux avait duré vingt et un ans, la Cour d’appel a pris en compte la période « du mariage au divorce dont le principe n’est pas contesté aujourd’hui » (v. arrêt, p. 4§8) ; qu’en statuant ainsi, cependant qu’elle constatait qu’une décision de séparation de corps avait été rendue le 1er avril 2009 par le Tribunal itinérant du comté de la ville de Dublin, la Cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 270, ensemble l’article 271 du code civil ;
2°/ ALORS QUE tout jugement devant être motivé, ne satisfait pas à cette exigence la décision qui statue par des motifs inintelligibles ; qu’en l’espèce, pour évaluer le patrimoine immobilier des époux aux fins de statuer sur la demande de prestation compensatoire formée par Mme B…, la Cour d’appel a, s’agissant de la propriété située à […], retenu que « la décision du 1er avril 2009 dont la traduction, non contestée, a été faite, a prononcé la séparation de corps des époux, organisant la vente de la villa de […], par un agent de vente agréé, au meilleur prix possible et par la méthode la plus efficace relatives aux taxes ; les deux parties devaient prendre l’avis de l’agent de vente pour le prix de vente et par défaut celui-ci étant fixé par le tribunal ; la somme de 450 000 euros sera alors payée à M. S… en tant que premier chèque du compte joint, le solde des recettes à la demanderesse » (v. arrêt, p. 5§2) et, concernant la maison du Gers et des terrains avoisinants, relevé que « il a été ordonné à M. S… de transférer ses intérêts au seul nom de la demanderesse » (v. arrêt, p. 5§5) ; qu’en statuant ainsi, sans procéder à aucune analyse ni explication de l’économie et de la portée des décisions irlandaises sur lesquelles elle s’appuyait pour évaluer le patrimoine immobilier de chacun des époux, la Cour d’appel a statué par voie de motifs inintelligibles, en violation de l’article 455 du code de procédure civile ;
3°/ ALORS QUE, pour fixer le montant de la prestation compensatoire le juge doit notamment prendre en considération le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial et procéder à une évaluation au moins sommaire de leurs biens respectifs ; qu’en l’espèce pour juger que « chacun des époux possèdent [donc] des biens immobiliers » (v. arrêt, p. 5§7), la Cour a notamment relevé que « de la pièce 65 émanant de N… L… S…, il ressort que ce dernier a donné un bien lui appartenant en location en Irlande et qu’il en retire des revenus » (v. arrêt, p. 5§6) ; qu’en statuant ainsi, sans donner aucune précision sur la valeur de ce bien appartenant prétendument à l’exposant, la Cour d’appel, qui n’a pas procédé à une estimation chiffrée du patrimoine immobilier de Monsieur S…, a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;
4°/ ALORS QUE, les juges du fond ne peuvent déclarer un fait établi sans préciser sur quel élément de preuve ils se fondent, ou sans procéder à une analyse sommaire de cet élément ; qu’en l’espèce, dans son appréciation de la situation de Mme B…, la Cour d’appel a relevé que celle-ci justifiait « d’attestations indiquant qu’elle ne vivait pas avec un compagnon » (v. arrêt, p. 6§1) ; qu’en statuant ainsi, sans préciser ni la date, ni la provenance des attestations sur lesquelles elle s’appuyait, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 455 du code de procédure civile.