Contrat d’Artiste : 6 avril 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/00584

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Contrat d’Artiste : 6 avril 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/00584
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JN/SB

Numéro 23/1266

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 06/04/2023

Dossier : N° RG 21/00584 – N° Portalis DBVV-V-B7F-HZCX

Nature affaire :

Contestation d’une décision d’un organisme portant sur l’immatriculation, l’affiliation ou un refus de reconnaissance d’un droit

Affaire :

[G] [F]

C/

MSA SUD AQUITAINE

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 06 Avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 02 Février 2023, devant :

Madame NICOLAS, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame LAUBIE, greffière.

Madame NICOLAS, en application de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame NICOLAS, Présidente

Madame SORONDO, Conseiller

Madame PACTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [G] [F]

[Adresse 2]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représenté par MaîtreVOISIN, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMEE :

MSA SUD AQUITAINE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Maître DUALE de la SELARL DUALE – LIGNEY – BOURDALLE, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 29 JANVIER 2021

rendue par le POLE SOCIAL DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BAYONNE

RG numéro : 19/00359

FAITS ET PROCÉDURE

M. [G] [F] (l’assuré), né le 23 novembre 1953, exploitant agricole, a bénéficié d’une pension d’invalidité pour inaptitude totale, à compter du 1er septembre 2009, selon décision notifiée par la caisse de Mutualité Sociale Agricole Sud Aquitaine (la caisse ou l’organisme social), le 18 janvier 2011.

Le 1er février 2015, l’assuré, âgé de 61 ans et deux mois, a atteint l’âge légal de la retraite.

Par courrier du 1er juin 2017, la caisse, au vu de documents portés à sa connaissance, et considérant que le versement de la pension d’invalidité postérieurement à l’âge légal de la retraite, était nécessairement conditionné à l’exercice d’une activité professionnelle effective procurant un revenu, a :

-notifié à l’assuré une décision de suspension du versement de la pension d’invalidité à compter du 1er janvier 2017,

– demandé à l’assuré de lui retourner après l’avoir complété, un imprimé de demande de retraite,

-réitéré la demande déjà contenue dans ses courriers des 20 février et 18 avril 2017, de produire les justificatifs des revenus perçus de son activité pour les 2e et 4e trimestres 2016.

Nonobstant divers échanges, et envois, la caisse a maintenu sa décision de suspension du versement de la pension d’invalidité à compter du 1er janvier 2017, par courriers des 27 octobre 2017, 7 juin 2018, 2 octobre 2018 et 10 décembre 2018.

L’assuré a contesté la décision de suspension ainsi qu’il suit :

– le 2 août 2019 devant la commission de recours amiable (CRA) de l’organisme social, laquelle n’a pas répondu dans le délai réglementaire, puis au-delà de l’expiration de ce délai, par décision du 17 avril 2020, notifiée le 4 juin 2020, a rejeté la requête,

– le 7 octobre 2019, devant le pôle social du tribunal de grande instance de Bayonne, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Bayonne, au vu de la décision implicite de rejet de la CRA.

Par jugement du 29 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Bayonne a :

– débouté l’assuré de l’intégralité de sa demande,

– jugé qu’il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que les dépens sont à la charge de l’assuré,

– rappelé les modalités de notification de sa décision.

Cette décision a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception, reçue de l’assuré le 30 janvier 2021.

Le 18 février 2021, par lettre recommandée avec avis de réception adressée au greffe de la cour, l’assuré en a régulièrement interjeté appel.

Selon avis de convocation des 20 septembre et 3 octobre 2022, contenant calendrier de procédure, les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience de plaidoiries du 2 février 2023, à laquelle elles ont comparu.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon ses conclusions transmises par RPVA le 18 novembre 2022, reprises oralement à l’audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, l’assuré, M. [G] [F], appelant, conclut à la réformation du jugement déféré en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, demande à la cour :

– d’annuler la décision de suspension du versement de la pension d’invalidité prise par la caisse le 1er juin 2017 ainsi que la décision de rejet rendue par la CRA de la caisse le 17 avril 2020 (expédiée 4 juin 2020 soit 10 mois après sa saisine) et postérieurement au dépôt de la requête,

En conséquence,

– de condamner la caisse à lui payer la somme de 13 069,08 €,

(correspondant aux arriérés de pension d’invalidité dus depuis le 1er janvier 2017 jusqu’au 1er février 2020, date à laquelle il a fait valoir ses droits à la retraite à taux plein),

– de débouter la caisse de toutes ses demandes, et de la condamner à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les entiers dépens de l’instance.

Selon ses conclusions transmises par RPVA le 20 janvier 2023, reprises oralement à l’audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, la Caisse de Mutualité Sociale Agricole Sud Aquitaine, intimée, conclut à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, au débouté de l’assuré de toutes ses demandes, et à la condamnation de celui-ci à lui payer 1000 €sur la base de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à supporter les entiers dépens de première instance comme d’appel, et d’octroyer à la SELARL [5] avocat le bénéficie des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

SUR QUOI LA COUR

Sur la demande de rétablissement de la pension d’invalidité

Les parties s’accordent à reconnaître qu’en application des dispositions de l’article R732-3-1 du code rural et de la pêche maritime, pour qu’un assuré ayant atteint l’âge légal de départ à la retraite, puisse continuer à percevoir une pension d’invalidité, il faut qu’au-delà de cet âge, et dans les conditions prévues par ce texte, il exerce une activité professionnelle, et ne demande pas l’attribution d’une pension de vieillesse qui se substituerait à la pension d’invalidité.

Leur désaccord, porte sur le point de savoir, si l’appelant justifie ou non d’une activité professionnelle effective, notamment pour les 2e et 4e trimestres 2016.

L’appelant au soutien de sa position, fait valoir que :

-en application de l’article R351-12 du code de la sécurité sociale, les périodes de chômage indemnisé sont considérées comme des trimestres d’assurance retraite au régime général de la sécurité sociale dans la limite de quatre trimestres,

– il a toujours continué à travailler et à percevoir des revenus d’activité, pour tous les trimestres allant de janvier 2016, à janvier 2020, ce que la MSA ne peut ignorer, dès lors qu’il a continué à ce titre de cotiser à la retraite comme n’importe quel travailleur actif,

– il n’a fait valoir ses droits à la retraite qu’à compter du 1er février 2020, date à laquelle il a pu bénéficier d’une retraite à taux plein,

-s’il n’a pas avant cette date, fait valoir ses droits à la retraite, et été contraint d’exercer plusieurs activités, c’est précisément parce qu’il n’avait pas la totalité de ses trimestres pour percevoir une retraite à taux plein.

La caisse, pour s’y opposer, fait valoir que le salarié ne justifie pas d’une activité professionnelle effective en contrepartie de laquelle il percevait des ressources professionnelles, qu’il était inscrit comme demandeur d’emploi du 2 mai au 22 décembre 2016, et qu’en cette qualité, conformément à la jurisprudence de la cour suprême, il ne peut s’opposer à la substitution d’une pension de vieillesse à sa pension d’invalidité.

Sur ce,

L’article R732-3-1 alinéa 2 du code rural et de la pêche maritime, en sa version applicable à la cause (en vigueur du 3 juin 2011 22 mai 2020), s’agissant de dispositions reproduites dans ses versions postérieures, dispose que :

« Lorsque l’assuré exerce une activité professionnelle et ne demande pas, à l’âge prévu à l’article L. 732-18 (note de la cour : âge mentionné à l’article L 161-17-2 du code de la sécurité sociale, c’est-à-dire âge légal de la retraite) l’attribution d’une pension de vieillesse substituée à sa pension d’invalidité, il continue à bénéficier de sa pension d’invalidité jusqu’à la date pour laquelle il demande le bénéfice de sa pension de vieillesse allouée au titre de l’invalidité, et au plus tard à l’âge mentionné à l’article L. 732-25. ».

Pour l’application de ces dispositions, l’exercice d’une activité professionnelle doit s’entendre d’une activité effective.

Il est constant que :

– l’appelant, né le 23 novembre 1953, a atteint l’âge légal de départ à la retraite, de 61 ans et deux mois, le 1er février 2015,

-la caisse a continué à lui payer après cette date, une pension d’invalidité, dont elle a suspendu le paiement à compter du 1er janvier 2017, et n’a pas rétabli le paiement à ce titre, faute pour l’assuré, de justifier d’une activité professionnelle pour les 2e et 4e trimestres 2016.

Pour l’instruction de son dossier, et le rétablissement du versement de la pension d’invalidité, la caisse lui a par la suite demandé par courrier du 2 octobre 2018 (pièce numéro 16 de l’intimée) de justifier :

-d’une activité professionnelle au 23 janvier 2015 et des ressources professionnelles perçues « dans les trois mois écoulés »,

-de la perception de ressources professionnelles pour les périodes des 1er trimestre 2015, 2e et 4e trimestres 2016.

Il est constant, ainsi que l’admet la caisse dans son courrier du 2 octobre 2018, que l’appelant a bénéficié d’un contrat de travail en qualité de salarié, ayant pris fin au 31 décembre 2014.

L’appelant produit au soutien de sa demande, au titre des éléments utiles au présent litige :

– une attestation de pôle emploi selon laquelle il était inscrit à pôle emploi en qualité de demandeur d’emploi de longue durée, pour les périodes suivantes :

-du 14 janvier 2014 au 4 avril 2015,

-du 14 avril 2015 au 23 mai 2015,

-du 2 mars 2016 au 22 décembre 2016,

– une déclaration de début d’activité concernant la création d’une entreprise individuelle à compter du 13 février 2015, exploitant l’activité d’ « artiste »,

-son avis d’impôt sur le revenu de 2015, comportant des feuillets relatifs aux revenus des professions non salariées, et qui comporte des revenus salariaux et assimilés déclarés pour la somme de 5141 €, outre des revenus non commerciaux professionnels, déclarés à concurrence de la somme de 767 €,

– diverses factures produites sous sa pièce numéro 14, dont :

– les 12 premières, sont inopérantes car il s’agit de factures dues par l’appelant, sans permettre d’établir de lien avec une éventuelle activité professionnelle, et en outre concernant le premier trimestre 2016, pour lequel la caisse ne lui demande pas de justificatifs,

-six factures supplémentaires, de la même nature, concernant le mois d’avril 2016, pour un total de l’ordre de 86 €,

– pour l’année 2016, l’appelant ne produit pas sa déclaration de revenus, mais produit sous sa pièce numéro 3, la déclaration annuelle de ressources adressée à la caisse le 8 février 2017, et non contestée par cette dernière, par laquelle il fait état notamment :

-de revenus d’activité salariée des 1er et 3e trimestres 2016 (1164 € + 1243 €),

– d’allocations-chômage pour les 3ème et 4ème trimestres 2016 (1620 € +. 1174 €),

-un extrait du journal des recettes et dépenses de l’exploitation de son activité artistique d’auto entrepreneur, mentionnant au poste de « recettes », les ventes suivantes :

-en d’avril 2016, de deux photographies, d’un dessin encadré, et d’un tableau, pour la somme totale de 575 €,

– en mai 2016, d’une photographie au prix de 95 €,

– en novembre 2016, d’une photographie au prix de 70 €,

dont il peut être observé que le total avoisine celui déclaré en 2015, au titre de cette même activité.

– son avis d’impôt 2018 sur le revenu de 2017, comportant des feuillets relatifs aux revenus des professions non salariées, et qui comporte des revenus salariaux et assimilés déclarés pour la somme de 5855 €, outre des revenus déclarés au titre du régime de micro entrepreneur, de 480 €,

– ses bulletins de salaire (établis par le même employeur, que celui visé par la caisse, dans son courrier du 2 octobre 2018), pour les mois de mars 2017 à novembre 2018 inclus, et février 2019 à décembre 2019 inclus.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, il doit être retenu que :

-ainsi que l’admet la caisse dans son courrier du 2 octobre 2018, l’assuré a bénéficié d’un contrat de travail en qualité de salarié jusqu’au 31 décembre 2014,

– en conséquence, la caisse a ainsi admis que jusqu’au 31 décembre 2014, l’assuré bénéficiait d’une activité professionnelle lui procurant des revenus, et ce pendant les trois mois écoulés précédant le 1er février 2015, cette date correspondant à la date de l’âge légal de départ à la retraite de l’assuré,

– il est ensuite établi, au vu du document émanant de pôle emploi, que le salarié a exercé une activité professionnelle à compter du 23 mai 2015, et jusqu’à la fin d’année 2015, pour laquelle il a fiscalement déclaré des revenus salariaux,

– pour l’année 2016, les pièces produites par l’appelant telles que rappelées ci-dessus, démontrent l’exercice d’une activité professionnelle d’auto-entrepreneur lui ayant procuré des revenus professionnels, tant au second trimestre 2016, qu’au quatrième trimestre 2016, même si ces revenus sont modestes,

– pour les trimestres des années suivantes, une activité professionnelle quasi continue, étant rappelé qu’il a sollicité le 10 septembre 2019, le bénéfice de ses droits à la retraite, avec effet au 1er janvier 2020, ainsi que la caisse en justifie par sa pièce numéro 21.

Ainsi, les éléments produits à la présente instance, permettent de retenir que l’appelant peut prétendre au bénéfice des dispositions de l’article R732-3-1 alinéa 2 du code rural et de la pêche maritime, si bien qu’il est fondé à contester la décision par laquelle la caisse a suspendu le versement de sa pension d’invalidité, jusqu’à la date à laquelle il a sollicité l’attribution d’une pension vieillesse, se substituant à la pension d’invalidité ainsi versée.

Il convient en conséquence de le rétablir dans ses droits, en faisant droit à sa demande de paiement de la somme de 13 069,08 €, dont la caisse ne conteste pas qu’elle corresponde aux arriérés de pension d’invalidité réclamés par l’appelant pour une période de 36 mois (36 x 363,03 €), à compter du 1er janvier 2017, jusqu’au 31 décembre 2019.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L’appelant, nonobstant les multiples demandes de la caisse, n’a justifié de sa situation, qu’au cours de la présente instance, si bien que l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à la cause.

Pour les mêmes motifs, chacune des parties supportera les dépens par elle exposés, tant en première instance qu’en appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Bayonne en date du 29 janvier 2021,

Et statuant à nouveau,

Annule la décision par laquelle la caisse de Mutualité Sociale Agricole Sud Aquitaine a, le 1er juin 2017, notifié à M. [G] [F] la suspension, à compter du 1er janvier 2017, du versement de la pension d’invalidité qu’elle lui avait attribuée à compter du 1er septembre 2009,

Condamne la caisse de Mutualité Sociale Agricole Sud Aquitaine, à payer à M. [G] [F], la somme de 13 069,08 € au titre de la pension d’invalidité qui aurait dû lui être versée, du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2019,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne chacune des parties, à supporter les dépens par elle exposés, tant en première instance qu’en appel.

Arrêt signé par Madame NICOLAS, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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