Contrat à durée déterminée d’usage : 8 juillet 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 19-11.378

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Contrat à durée déterminée d’usage : 8 juillet 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 19-11.378
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SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2020

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 610 F-D

Pourvoi n° K 19-11.378

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JUILLET 2020

La société France télévisions, société anonyme, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° K 19-11.378 contre l’arrêt rendu le 28 novembre 2018 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l’opposant à M. S… U…, domicilié […] , défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Mariette, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société France télévisions, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. U…, après débats en l’audience publique du 27 mai 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Mariette, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, Mme Grivel, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 28 novembre 2018), M. U… a été engagé par la société France télévisions (la société), qui vient aux droits de la société France 2, en qualité de réalisateur d’émissions religieuses dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée d’usage, du 3 avril 1986 au 4 août 2013, terme du dernier contrat.

2. Il a saisi la juridiction prud’homale de demandes en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet et en paiement de diverses sommes.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l’arrêt de requalifier la relation de travail entre les parties en un contrat à durée indéterminée à temps complet à effet au 3 avril 1986, et de la condamner à verser au salarié un rappel de salaire et les congés payés afférents pour les périodes dites « inter contrats », calculé pendant la période non prescrite courant à compter du 28 mai 2010, alors « qu’il appartient au salarié sollicitant des rappels de salaire correspondant aux périodes interstitielles séparant les différents contrats faisant l’objet d’une requalification en un contrat à durée indéterminée unique d’établir qu’il s’était tenu à la disposition de l’employeur en vue d’effectuer un travail pendant lesdites périodes interstitielles ; qu’en déduisant que le salarié était resté constamment à la disposition de la société durant les périodes « inter-contrats » de la seule constatation que l’intéressé avait régulièrement eu une durée du travail dépassant la durée légale, même pendant des périodes limitées, la cour d’appel s’est prononcée par des motifs impropres à fonder la condamnation de la société France Télévisions à des rappels de salaire pour les périodes interstitielles, puisqu’ils se rapportaient seulement aux périodes travaillées et aucunement aux périodes d’inactivité, en violation des articles L. 1245-1 et L. 3123-17 du code du travail en leur rédaction alors applicable, ensemble les articles 1134 dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et 1315, devenu 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1245-1, L. 3123-14 et L. 3123-17 en leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et les articles 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1315 devenu 1353 du même code :

4. Le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée à temps complet ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes interstitielles séparant chaque contrat que s’il prouve s’être tenu à la disposition de l’employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail.

5. Pour condamner l’employeur à payer au salarié un rappel de salaire pour les périodes dites “inter contrats” l’arrêt retient que les bulletins de salaire démontrent que la durée légale mensuelle de 151,67 heures a été dépassée plusieurs mois à compter des mois de mai et juin 2010 de même que la durée annuelle de 1607 heures dès 1997, 1998, et 2002, tout comme le nombre de jours travaillés maximum des salariés à durée indéterminée fixé à 204 jours annuels par l’article 2.1.3.2 de l’accord collectif d’entreprise France Télévisions, que le recours par l’employeur à des heures complémentaires ayant eu pour effet de porter, fût-ce pour une période limitée, la durée de travail du salarié au-delà de la durée légale, entraîne la requalification du contrat à temps partiel en un contrat à temps plein, d’autant que la régularité de ces dépassements démontrent que le salarié est resté constamment à la disposition de son employeur dès sa première collaboration. Il en conclut, en conséquence que la requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps plein est fixée dès le 3 avril 1986.

6. En se déterminant ainsi, par des motifs inopérants relatifs la durée de travail pendant les périodes effectivement travaillées, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le salarié établissait s’être effectivement tenu à la disposition de l’employeur durant les périodes non travaillées, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.

Portée et conséquence de la cassation

7. La cassation prononcée sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, de ce pourvoi entraîne par voie de conséquence, en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef du dispositif critiqué par le second moyen relatif aux demandes du salarié tendant à voir fixer le salaire de référence à 4 558,50 euros et au paiement de diverses sommes à titre de rappel de prime d’ancienneté, de prime de fin d’année, de supplément familial, d’indemnité de requalification, d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, d’indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à titre de rappel de salaire et congés payés afférents.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE sauf en ce qu’il requalifie les contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée et requalifie la rupture du contrat du 4 août 2013 en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt rendu le 28 novembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet, sauf sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. U… aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille vingt.

 


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