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ARRET
N°
S.A.S. HOTESECURITE
C/
[A]
copie exécutoire
le 29/06/2022
à
Me PAPPO
Selarl DORE
LDS/IL/BG
COUR D’APPEL D’AMIENS
5EME CHAMBRE PRUD’HOMALE
ARRET DU 29 JUIN 2022
*************************************************************
N° RG 21/04362 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IGTL
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’AMIENS DU 27 JUILLET 2021 (référence dossier N° RG F 20/00177)
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
S.A.S. HOTESECURITE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée, concluant et plaidant par Me Juliette PAPPO, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Pauline PHELIPPEAU, avocat au barreau de PARIS
ET :
INTIMEE
Madame [B] [A]
née le 07 Juin 1987 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée, concluant et plaidant par Me Christophe DORE de la SELARL DORE-TANY-BENITAH, avocat au barreau d’AMIENS substituée par Me Edith DIAS FERNANDES, avocat au barreau d’AMIENS
DEBATS :
A l’audience publique du 25 mai 2022, devant Madame Laurence de SURIREY, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :
– Madame Laurence de SURIREY en son rapport,
– les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives.
Madame Laurence de SURIREY indique que l’arrêt sera prononcé le 29 juin 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Madame Laurence de SURIREY en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :
Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,
Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,
Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,
qui en a délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :
Le 29 juin 2022, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.
*
* *
DECISION :
Mme [A] a été embauchée par la société Hôtesécurité (la société ou l’employeur), par contrats à durée déterminée d’usage à temps partiel, en qualité d’agent de sécurité coefficient 120 ou d’agent SSIAP coefficient 140, selon les demandes du client, entre le mois de novembre 2018 et le mois de mars 2019, aux termes de 19 missions de quelques heures chacune.
La société a pour activité la sécurité événementielle et sportive. Elle employait plus de 10 salariés.
Elle applique la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.
La salariée a saisi le conseil de prud’hommes le 13 mai 2020 afin d’obtenir notamment la requalification de ses contrats de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et en paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.
Par jugement du 27 juillet 2021, le conseil de prud’hommes a :
– dit que la salariée était recevable et bien fondée en ses demandes,
– requalifié le contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée à la date du 23 novembre 2018,
en conséquence,
– condamné la société à payer à la salariée la somme de 1624,11 euros à titre d’indemnité de requalification,
– dit que la rupture du contrat de travail à durée déterminée en date du 20 mars 2019 s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
en conséquence,
– condamné la société à payer à la salariée les sommes suivantes :
– 3 248 euros soit deux mois de salaire, à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 406,02 euros, soit sept jours de salaire à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 40,60 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
– requalifié le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet,
en conséquence,
– condamné la société à payer à la salariée les sommes suivantes :
– 5 483,54 euros à titre de rappel de salaire et 548,35 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire,
– attribué à Mme [A] le coefficient 150 de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité,
– ordonné à la société de remettre à la salariée les documents de rupture conformes à sa décision (attestation pôle emploi, certificat de travail, solde de tout compte et des bulletins de paie) et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 31e jour de la notification du jugement,
– dit que le conseil se réservait le droit de liquider l’astreinte,
– ordonner l’exécution provisoire du jugement au visa des dispositions de l’article 515 du code de procédure civile pour toutes les sommes non prévues par les dispositions de l’article R. 1245-1 et R. 1454- 28 du code du travail,
– dit que l’intégralité des sommes versées à la salariée serait consignée auprès de la caisse des dépôts et consignations, sous 30 jours à compter de la notification du jugement, en application des dispositions de l’article 517 et 519 du code de procédure civile,
– débouté la société de ses demandes,
– condamné la société à payer à Mme [A] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
La société, qui est régulièrement appelante de ce jugement, par conclusions remises le 22 novembre 2021, demande à la cour :
– d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :
– a dit que la salariée était recevable et bien fondée en ses demandes,
– a requalifié le contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée à la date du 23 novembre 2018,
en conséquence,
– l’a condamnée à payer à la salariée la somme de 1 624,11 euros à titre d’indemnité de requalification,
– a dit que la rupture du contrat de travail à durée déterminée en date du 20 mars 2019 s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
en conséquence,
– l’a condamnée à payer à la salariée les sommes suivantes :
– 3 248 euros soit deux mois de salaire, à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 406,02 euros, soit sept jours de salaire à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 40,60 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
– a requalifié le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet,
en conséquence,
– l’a condamnée à payer à la salariée les sommes suivantes :
– 5 483,54 euros à titre de rappel de salaire et 548,35 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire,
– a attribué à Mme [A] le coefficient 150 de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité,
– lui a ordonné de remettre à la salariée les documents de rupture conformes à sa décision (attestation Pôle emploi, certificat de travail, solde de tout compte et des bulletins de paie) et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 31e jour de la notification du jugement,
– a ordonné l’exécution provisoire du jugement au visa des dispositions de l’article 515 du code de procédure civile pour toutes les sommes non prévues par les dispositions de l’article R. 1245-1 et R. 1454- 28 du code du travail,
– a dit que l’intégralité des sommes versées à la salariée serait consignée auprès de la caisse des dépôts et consignations, sous 30 jours à compter de la notification du jugement,
– l’a déboutée de ses demandes,
– l’a condamnée à payer à Mme [A] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,
statuant à nouveau,
– à titre principal, débouter la salariée de l’ensemble de ses demandes,
– à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour faisait droit à la demande de requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée :
– fixer le salaire de référence de la salariée à la somme de 505,42 euros correspondant à la moyenne de sa rémunération réelle calculée sur les trois derniers mois travaillés,
en conséquence,
– la condamner à lui payer les sommes suivantes : 505,42 euros à titre d’indemnité de requalification, 117,93 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 12,28 euros au titre des congés payés afférents, 505,42 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement,
– en tout état de cause, débouter la salariée du surplus de ses demandes, la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 6 janvier 2022, Mme [A] demande à la cour de :
– dire et juger la société Hôtesécurité mal fondée en son appel ;
En conséquence,
– la dire et la juger recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes ;
En conséquence,
– confirmer le jugement en ce qu’il a requalifié ses contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée à la date du 23 novembre 2018 ;
En conséquence,
– requalifier ses contrats de travail en contrat de travail à durée indéterminée à compter de la date du 23 novembre 2018 ;
En conséquence,
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Hôtesécurité à lui payer la somme de 1 624,11 euros, soit 1 mois de salaire, à titre d’indemnité de requalification ;
En conséquence,
– condamner la société Hôtesécurité à lui payer la somme de 1 624,11 euros, soit 1 mois de salaire, à titre d’indemnité de requalification ;
– confirmer également le jugement en ce qu’il a dit et jugé que la rupture du contrat de travail à durée déterminée en date du 20 mars 2019 s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
En conséquence,
– dire et juger que la rupture du contrat de travail à durée déterminée en date du 20 mars 2019 est sans cause réelle et sérieuse ;
En conséquence,
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Hôtesécurité à lui payer les sommes suivantes :
– 3 248,22 euros, soit 2 mois de salaire à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– 406,02 euros, soit 7 jours de salaire à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
– 40,60 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;
En conséquence,
– condamner la société Hôtesécurité à lui payer les sommes suivantes :
– 3 248,22 euros, soit 2 mois de salaire à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– 406,02 euros, soit 7 jours de salaire à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
– 40,60 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;
– confirmer également le jugement en ce qu’il a requalifié son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ;
En conséquence,
– requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ;
En conséquence,
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Hôtesécurité à lui payer les sommes suivantes :
– 5 483,54 euros à titre de rappel de salaire ;
– 548,35 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire ;
En conséquence,
– condamner la société Hôtesécurité à lui payer les sommes suivantes :
– 5 483,54 euros à titre de rappel de salaire ;
– 548,35 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire;
– confirmer le jugement en ce qu’il lui a attribué le coefficient 150 de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité ;
En conséquence,
– lui attribuer le coefficient 150 issu de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité ;
– confirmer enfin le jugement en ce qu’il a ordonné à la société Hôtesécurité d’avoir à lui remettre les documents de rupture conformes ;
En conséquence,
– ordonner à la société Hôtesécurité de lui remettre les attestations Pôle emploi pour chaque contrat de travail à durée déterminée conclu, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la signification à intervenir ;
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Hôtesécurité à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau en cause d’appel,
– condamner la société Hôtesécurité à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– la condamner aux entiers dépens.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.
EXPOSE DES MOTIFS :
1/ Sur la requalification de la relation contractuelle :
– Sur la requalification de CDD en CDI :
Mme [A] soutient que la société ne pouvait avoir recours au contrat à durée déterminée d’usage, ni aux termes du code du travail, ni aux termes de la convention collective, que le fait que le service titre emploi sécurité entreprises (TESE) n’ait pas relevé d’anomalie à propos de ces contrats de travail ne lui conférait aucun droit et que rien ne permet de s’assurer que l’inspecteur du travail ait particulièrement vérifié la légalité des contrats de travail à durée déterminée d’usage.
La société reconnaît que la sécurité ne figure pas à la liste de l’article D. 1242-1 du code du travail mais affirme que la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité a prévu la possibilité d’embauche de salariés en CDD si l’emploi de l’agent est par nature très temporaire, que son activité principale qui est d’assurer la sécurité événementielle est en lien avec certains secteurs figurant au texte précité notamment le spectacle, que les missions qu’elle propose sont nécessairement limitées dans le temps, avec un début et une fin, que le service titre emploi service entreprises n’a jamais relevé d’anomalie concernant le type d’emploi et de contrats qu’elle concluait, pas plus que l’inspecteur du travail qui a pourtant signé les registres des salariés le 21 janvier 2021. Elle en conclut qu’elle était en droit de conclure des CDD d’usage, que la fin du contrat de travail à durée déterminée ne saurait s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que le salarié doit être débouté de ses demandes liées à la rupture du contrat de travail.
Il convient de rappeler qu’aux termes de l’article L.1242-1 du code du travail, un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité permanente de l’entreprise et que, selon l’article L.1242-2 du même code, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans des cas déterminés, notamment pour remplacer un salarié absent, en cas d’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ou dans le cas d’emploi à caractère saisonnier ou pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée déterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
L’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en ‘uvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, qui a pour objet, en ses clauses 1 et 5, de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminés successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.
La détermination par accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au CDD d’usage ne dispense pas le juge de vérifier concrètement l’existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné. Le seul fait que les différents emplois occupés en CDD par un salarié aient été de courte durée ne suffit pas à l’établir.
La charge de la preuve incombe à l’employeur.
L’article 6.01 7 de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité dispose que des contrats à durée déterminée et/ou à temps partiel pourront être conclus en cas de nécessité ou en raison de services limités dans le temps (salons, foires, expositions etc.) et des périodes d’inactivité des établissements surveillés pendant lesquelles les prestations sont nécessairement renforcées, ainsi que pendant les périodes d’aggravation des risques.
Au cas d’espèce, ainsi que le reconnaît la société, le secteur de la sécurité ne figure pas dans la liste de l’article D. 1242-1 et il est indifférent à cet égard qu’elle assure la sécurité de certains événements tels que les spectacles ou les matchs sportifs qui relèvent de secteurs inclus dans la liste.
De plus, la convention collective précitée ne permet pas expressément le recours aux CDD d’usage.
La société insiste également sur le fait qu’elle a pour activité principale la sécurité événementielle et sportive de sorte qu’il entre dans ses missions habituelles d’assurer la sécurité des spectacles et matchs sportifs. Elle ne démontre pas qu’il est d’usage de recourir aux CDD pour pourvoir des postes d’agents de sécurité dans l’événementiel, les petites annonces n’étant pas un gage de légalité des emplois offerts.
Or, de l’analyse des 19 CDD, il ressort qu’ils ont été conclus pour pourvoir les mêmes emplois (agent de sécurité), pour assurer dans la totalité des cas la sécurité d’événements récurrents et, s’agissant plus particulièrement de Chroma, se produisent tous les ans à la même époque pendant plusieurs semaines d’affilée.
Leur surveillance constituait une activité qui, même intermittente, entrait dans les missions qui étaient confiées habituellement à la société or, la cour constate que celle-ci ne produit pas d’élément permettant d’apprécier si Mme [A] était recrutée à l’occasion d’un surcroît d’activité de l’entreprise ou de tout autre motif prévu à l’article L.1242-1 du code du travail.
Compte tenu des tâches occupées successivement par la salariée pendant 5 mois, comme agent de sécurité ou SSIAP, la société ne démontre pas que le recours à des contrats à durée déterminés successifs était justifié par l’existence d’éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de cet emploi.
Par ailleurs, le silence du service TESE délivrant le certificat d’enregistrement et l’attestation de déclaration préalable à l’embauche valant contrat de travail et le visa du registre du personnel par l’inspecteur du travail ne garantissent pas la légalité des contrats conclus avec Mme [A].
Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a requalifié les contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée.
Sur la requalification de contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein :
Mme [A] fait valoir que la société ne respectait aucun délai de prévenance de sorte qu’elle se tenait en permanence à sa disposition et ne pouvait de ce fait envisager de prendre un autre emploi ; qu’en l’absence de délai de prévenance, elle éprouvait de grandes difficultés pour exercer son activité de gendarme réserviste ; que de nombreux contrats ne fixent pas précisément les horaires de travail ; qu’elle n’a jamais demandé à travailler moins de 24 heures par semaine et que par conséquent, ses contrats de travail doivent être requalifiés en contrat de travail à temps plein.
L’employeur répond que l’absence de mention sur les contrats de la répartition des horaires de travail ne fait que présumer que l’emploi était à temps complet ; qu’il renverse cette présomption simple en produisant les registres de temps de travail signés par la salariée ; que cette dernière était parfaitement en mesure de savoir à quel rythme elle allait travailler puisque c’était elle qui donnait ses disponibilités ou ses indisponibilités à l’avance et qu’elle était toujours libre de refuser les missions proposées par voie de SMS ; qu’elle était par ailleurs assistante maternelle à domicile et ne pouvait donc travailler pour lui à temps plein ; qu’elle n’a pas souhaité produire ses déclarations d’impôts sur la période litigieuse ; que les contrats à temps partiel ne sont pas soumis à la durée minimale de 24 heures dès lors qu’ils sont d’une durée inférieure à 7 jours ce qui est le cas de la majorité des contrats, les autres respectant la durée minimale et qu’en tous cas le non-respect de la durée minimale n’entraîne pas la requalification des contrats en temps complet. Il en déduit notamment que le salaire de référence doit être fixé à 505,42 euros correspondant à la moyenne des salaires durant les mois travaillés.
En application de l’article L. 3123-7 du code du travail, le salarié à temps partiel bénéficie d’une durée minimale de travail hebdomadaire fixée à 24 heures sauf notamment dans le cas de contrat d’une durée au plus égale à sept jours. Le non-respect de la durée minimale du travail n’est pas sanctionnée par le code du travail et ne suffit pas à justifier la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet.
Ce moyen sera par conséquent rejeté.
Aux termes de l’article L.3123-6 du code du travail, le contrat de travail doit mentionner obligatoirement :
– la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail convenue,
– la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine (en cas de durée hebdomadaire du travail) ou les semaines du mois (en cas de durée mensuelle du travail),
– les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir, ainsi que la nature de cette modification,
– les modalités selon lesquelles les horaires de travail, pour chaque journée travaillée, seront communiqués par écrit au salarié,
– les limites dans lesquelles le salarié peut effectuer des heures complémentaires.
En l’absence d’indication dans le contrat à temps partiel de la durée exacte de travail convenue et/ou de sa répartition sur la semaine (en cas de durée hebdomadaire du travail) ou le mois (en cas de durée mensuelle du travail) le contrat est présumé avoir été conclu à temps complet.
S’agissant d’une présomption simple, il appartient à l’employeur de rapporter la preuve contraire.
L’employeur qui conteste la présomption de temps plein doit rapporter la preuve :
– d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue,
– d’autre part, de ce que le salarié n’était pas dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’était pas dans l’obligation de se tenir à la disposition de son employeur.
Le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée, ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat que s’il s’est tenu à la disposition de l’employeur pendant ces périodes, pour effectuer un travail.
Dans ce cas, il supporte la charge de la preuve.
En l’espèce, Mme [A] demande un rappel de salaire calculé en reconstituant son salaire par mois par référence au SMIC horaire et en déduisant la somme perçue de sorte qu’elle demande à la fois le paiement des périodes intercalaires et le paiement d’un temps plein au titre de chaque contrat conclu à temps partiel. Or, il convient de distinguer les deux.
A l’examen des contrats, il apparaît que la répartition de la durée du travail n’y est pas précisée.
Les contrats sont donc présumés à temps complet et il incombe à la société de rapporter les preuves précitées.
Celle-ci justifie par la production des copies de registres signées de la salariée de la durée exacte du travail qui était bien inférieure à un temps plein.
Elle produit également les attestations de nombreux salariés et anciens salariés, non utilement critiquées, ainsi que des copies de SMS, d’où il résulte que les horaires de travail étaient systématiquement établis en fonction des disponibilités énoncées préalablement ou non par les agents de sécurité qui étaient sollicités par messages téléphoniques et acceptaient ou non les missions proposées en fonction de leur propre agenda. Cette organisation permettait à Mme [A] de savoir à quel rythme elle allait travailler dans le cadre de l’exécution de ses contrats puisqu’elle en avait préalablement accepté les modalités de sorte qu’elle n’était pas tenue se maintenir à la disposition permanente de l’employeur.
Il n’y a donc pas lieu de faire droit à la demande en paiement du salaire pour un temps plein sur les périodes d’exécution des CDD.
S’agissant des périodes séparant chaque CDD, il incombe à Mme [A] de rapporter la preuve de ce qu’elle était obligée de se tenir à la disposition de l’employeur.
Les contrats étaient pour la plupart conclus pour des soirées ou des nuits s’agissant d’assurer la sécurité de matchs ou de spectacles et pour des durées très courtes de quelques heures seulement.
Mme [A] ne conteste pas exercer le métier d’assistante maternelle et ne produit pas ses déclarations de revenus pour la période considérée. De plus, plusieurs salariés attestent de ce qu’ils étaient libres d’accepter ou de refuser les missions en fonction de leur disponibilité et que cela n’empêchait pas qu’ils soient recontactés ultérieurement pour d’autres propositions d’embauche.
Ainsi Mme [A] échoue à rapporter la preuve qui lui incombe de sorte que, infirmant en cela le jugement, elle sera déboutée de sa demande en paiement de salaire au titre de la requalification du contrat à durée indéterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps plein.
Sur les conséquences de la requalification des CDD en CDI :
– Sur l’indemnité de requalification :
Sur le fondement de l’article L. 1245-2 alinéa 2 du code du travail, la salariée est en droit de réclamer une indemnité ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.
La moyenne des salaires perçus pendant la durée du CDI est de 505,42 euros.
La société sera condamnée à verser à Mme [A] cette somme à titre d’indemnité de requalification.
– Sur la rupture du contrat de travail :
C’est par de justes motifs que la cour adopte que le conseil de prud’hommes a dit que la rupture du CDD requalifié en CDI s’analysait comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Mme [A] est en droit de prétendre, au titre de la rupture du CDI, à une indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, à des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La société devra lui verser la somme de 117,93 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 11,79 euros au titre des congés payés y afférents.
En application de l’article L.1235-3 du code du travail en sa version applicable en l’espèce, au regard du nombre de salariés habituellement employés dans l’entreprise, Mme [A] peut prétendre à une indemnité comprise entre 0 et 1 mois de salaire.
Cette dernière ne s’explique pas sur sa situation professionnelle postérieure à son licenciement.
En considération notamment de son âge et de l’ancienneté de ses services, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer la réparation qui lui est due à la somme mentionnée au dispositif.
2/ Sur la demande au titre du coefficient applicable :
Mme [A] expose qu’elle s’est vue octroyer au cours des relations contractuelles différents coefficients issus de la convention collective alors que les tâches confiées étant toujours similaires, qu’elle aurait dû être placée au coefficient 150 et percevoir la rémunération afférente.
La société répond que les coefficients attribués dépendaient de la demande du client de sorte que le salarié pouvait être embauché en qualité d’agent de sécurité coefficient 120 ou 130 (le plus souvent), soit en qualité d’agent SSIAP coefficient 140 ou 150 et qu’il n’a été embauché que deux fois au coefficient 150 en novembre 2019.
La qualification professionnelle d’un salarié se détermine selon les fonctions réellement et concrètement exercées.
Il appartient au salarié qui se prévaut d’une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu’il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu’il revendique.
En cas de différend sur la classification professionnelle qui doit être attribuée à un salarié, il y a lieu de rechercher la nature de l’emploi effectivement occupé par le salarié et la qualification qu’il requiert au regard de la convention collective applicable.
En l’espèce, Mme [A] a bénéficié de coefficients différents en fonction des emplois occupés et ne produit aucun élément quant aux fonctions effectivement exercées qui justifierait de lui accorder le coefficient le plus élevé de sorte que sa demande ne peut qu’être rejetée, le jugement étant infirmé de ce chef.
3/ Sur les demandes accessoires :
La salarié soutient que l’employeur ne lui a pas remis l’attestation Pôle emploi à l’issue de chaque contrat.
La société le conteste et les produit dans le cadre de l’instance. Cette demande est donc sans objet.
La société devra remettre à Mme [A] les documents de fin de contrat rectifiés pour tenir compte de la solution du présent arrêt. Il n’est pas justifié de la nécessité d’assortir cette obligation d’une astreinte.
Au vu de l’issue du procès en appel, chacune des parties conservera la charge de ses frais et dépens et les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
infirme le jugement en ce qu’il a requalifié le contrat à temps partiel en contrat à temps plein, attribué à Mme [A] le coefficient 150 de la convention collective, condamné la société Hôtesécurité à payer à Mme [A] les sommes de :
1 624,11 euros à titre d’indemnité de requalification,
3 248,02 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
406,02 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents,
5 483,54 euros à tire de rappel de salaire outre les congés payés y afférents,
le confirme pour le surplus,
statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
condamne la société Hôtesécurité à payer à Mme [A] les sommes de :
505,42 euros à titre d’indemnité de requalification,
505,42 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
117,93 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 11,79 euros au titre des congés payés y afférents,
déboute Mme [A] de ses demandes tendant à voir requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et de sa demande de rappel de salaire en découlant, tendant à lui voir attribuer le coefficient 150 de la convention collective et à voir condamner la société à lui remettre ses attestations Pôle emploi sous astreinte,
ordonne à la société de remettre à Mme [A] les documents de fin de contrat rectifiés pour tenir compte de la solution du présent arrêt,
rejette la demande d’astreinte,
rejette les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d’appel.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.