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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-6
ARRÊT AU FOND
DU 23 SEPTEMBRE 2022
N°2022/ 286
Rôle N° RG 18/19162 – N° Portalis DBVB-V-B7C-BDN57
[G] [T] épouse [U]
C/
SARL FORMA VAR
Copie exécutoire délivrée
le :23/09/2022
à :
Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Me Frédéric DELCOURT, avocat au barreau de TOULON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULON en date du 19 Novembre 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00019.
APPELANTE
Madame [G] [T] épouse [U], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Michel IZARD, avocat au barreau de DRAGUIGNAN qui a plaidé et par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
SARL FORMA VAR, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Frédéric DELCOURT, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Juin 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SILVAN, Président de chambre, et Monsieur Thierry CABALE, Conseiller, chargés du rapport.
M. Philippe SILVAN, Président de chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SILVAN, Président de chambre
Monsieur Thierry CABALE, Conseiller
M. Ange FIORITO, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022.
Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Mme [U] a été recrutée en qualité de formatrice par la SARL Format Var selon contrat à durée déterminée du 24 février au 23 octobre 2015, pour une durée contractuelle totale de 500 heures. Un second contrat à durée déterminée a été conclu pour 8 mois à compter du 26 octobre 2015, pour une durée totale de 539 heures. Par avenant du 22 juin 2016, ce contrat à durée déterminée a été prolongé jusqu’au 12 août 2016.
Le 11 janvier 2017, Mme [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulon de diverses demandes portant sur des dommages-intérêts du fait du défaut de mensualisation du salaire, un rappel de salaire sur heures complémentaires, un rappel de salaire correspondant aux heures de préparation et de recherche, l’indemnité d’usage, l’indemnité compensatrice de congés payés, l’indemnité compensatrice pour jours mobiles, la remise des bulletins de salaire rectifiés, la rectification des documents sociaux, des dommages-intérêts ainsi qu’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Selon jugement du 19 novembre 2018, le conseil de prud’hommes a’:
”Dit et jugé qu’il n’y a pas lieu de requalifier les contrats de travail à durée déterminée de Mme [U] en contrat à durée indéterminée
”Débouté Mme [U] de l’ensemble de ses demandes
”Dit et jugé que la SARL Format Var reconnaît devoir la somme de 1’148,92’€ bruts au titre de rappel de salaire sur le premier contrat et la somme de 1’336,89’€ au titre de rappel de salaire sur le 2 ème contrat et doit s’en acquitter auprès de Mme [U].
”Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile
”Condamné Mme [U] et la SARL Format Var aux entiers dépens par moitié
Mme [U] a fait appel de ce jugement le 5 décembre 2018.
A l’issue de ses conclusions du 26 février 2019 auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, Mme [U] demande de’:
”ordonner et juger son appel recevable et bien fondé pour les causes sus énoncées’;
En conséquence’:
”réformer intégralement le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulon le 19 novembre 2018 en ce qu’il a débouté Mme [U] de toutes ses demandes’;
et, statuant à nouveau’:
”ordonner sa reclassification en catégorie E’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 7.611,07’€ bruts au titre de la régularisation du 1er contrat de travail’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 9.681,64’€ bruts au titre de la régularisation du 2nd contrat de travail et de son avenant’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 14.172,78’€ à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 5.000’€ à titre de dommages et intérêts pour défaut de mensualisation’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 10.000’€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des erreurs affectant les fiches de paie et les documents de fin de contrat’;
”requalifier la succession de contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 2.362,13’€ à titre d’indemnité de requalification’;
”requalifier la rupture des relations contractuelles en licenciement irrégulier et sans cause réelle ni sérieuse’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 14.172,78’€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 2.362,13’€ à titre d’indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 2.362,13’€ bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 236,21’€ bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 748’€ bruts à titre d’indemnité légale de licenciement’;
”ordonner la rectification des bulletins de paie et des documents de fin de contrat sous astreinte de 200’€ par jour de retard’;
”condamner la SARL Format Var à lui payer la somme de 4.000’€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile’;
”condamner la SARL Format Var aux entiers dépens de première instance et d’appel’;
”ordonner et juger que les dépens d’appel seront distraits au profit de Maître Aligier conformément à l’article 696 du code de procédure civile.
Au terme de ses conclusions du 20 mai 2019, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, la SARL Format Var demande de’:
”confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulon en date du 19 novembre 2018 (RG F N°17/00019)’;
”ordonner et juger qu’il n’y a pas lieu de requalifier les contrats de travail à durée déterminée de Mme [U] en contrat à durée indéterminée, et a débouté Mme [U] de l’ensemble de ses demandes’;
”ordonner et juger que l’emploi de formateur de Mme [U] relève de la catégorie D des emplois tel que résultant des dispositions de la Convention Collective des Organismes de Formation’;
”Débouter Mme [U] de ses demandes’:;
– De requalification de contrat à temps complet et de ses demandes y afférentes’;
– De reclassification de son emploi au niveau E’;
– De condamnation au titre du travail dissimulé’;
– De ses demandes indemnitaires’;
”Débouter Mme [U] de l’ensemble de ses demandes, moyens, fins et conclusions’;
”Constater et ordonner y avoir lieu à la régularisation des demandes afférentes à l’exécution des contrats de travail aux sommes suivantes’:
– 455,19’€ bruts au titre des heures complémentaires (1er contrat)’;
– 562,73’€ bruts au titre des heures de recherches (1er contrat)’;
– 29,22’€ bruts au titre de l’indemnité d’usage (1er contrat)’;
– 101,78’€ bruts au titre des congés payés y afférents (1er contrat)’;
– 594,57’€ bruts au titre des heures complémentaires (2e contrat)’;
– 554,01’€ bruts au titre des heures de recherches (2e contrat)’;
– 73,46’€ bruts au titre de l’indemnité d’usage (2e contrat)’;
– 114,85’€ bruts au titre des congés payés y afférents (2e contrat)’;
”Condamner Mme [U] à lui payer la somme de 3.500’€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
”En tout état de cause’: sur le fondement de l’article 123 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 relative à l’aide juridique’: la dispenser totalement de tout remboursement au Trésor des sommes avancées par l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle accordée, le cas échéant, à Mme [U].
La clôture de l’instruction a été prononcée le 18 mars 2022. Pour un plus ample exposé de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à la décision déférée et aux dernières conclusions déposées par les parties.
SUR CE’:
sur la reclassification de Mme [U]’:
moyens des parties’:
Mme [U] soutient qu’elle est fondée à solliciter sa reclassification au niveau E de la convention collective applicable aux motifs’:
– que ses contrats de travail font état d’une classification de catégorie C2,
– que selon l’article 20 de la CCN, il n’existe pas de niveau de formateurs inférieur à la catégorie D,
– que l’article 4 de l’accord du 11 juillet 1994 relatif aux carrières et aux classifications prévoit que les compétences pédagogiques associées, selon l’ampleur du champ d’expertise et si celles-ci représentent la plus grande part du contenu de l’emploi, justifieront d’un classement des emplois où elles s’exercent à partir du niveau E
– que compte tenu de son expérience et de ses compétences incontestables et non contestées, elle aurait dû bénéficier de la catégorie E.
La société SARL Format Var s’oppose à la reclassification de Mme [U] à la catégorie E de la CCN aux motifs’:
– qu’il est exact que la classification de Mme [U] prévue par son contrat de travail est erronée puisque la CCN précise qu’il n’y a pas de niveau formateur inférieur à la catégorie D’,
– que, toutefois, la requalification de l’emploi en catégorie D n’emporte aucune régularisation salariale compte tenu du fait que le taux salarial figurant sur les bulletins de paie et mentionné aux contrats de travail est largement supérieur au taux salarial normalement attaché au coefficient correspondant à la catégorie D,
– que la classification en catégorie E requiert l’obtention d’un diplôme d’ingénieur ou de formation de niveaux I et II de l’éducation nationale (licence, maîtrise, master), Outre des connaissances acquises par formation spécifique ou par expérience,
– qu’elle suppose également que la mise en ‘uvre des travaux composant la fonction est laissée à l’initiative du titulaire de l’emploi qui est placé sous la responsabilité d’un supérieur hiérarchique et que le salarié participe à l’amélioration et à l’actualisation des enseignements et qu’il doit prendre en compte, en applications de dispositions préalablement fixées, les incidences financières de la mise en ‘uvre des stages qu’il anime, notamment en veillant au respect du cadre budgétaire prévu,
– que l’expérience et les compétences incontestables et non contestées de Mme [U] font partiellement défaut au regard des éléments classifiant de la convention collective,
– qu’elle ne rapporte pas la preuve de l’obtention de sa licence professionnelle ni qu’elle disposait d’une expérience significative dans son emploi de formatrice en insertion professionnelle, ni ne rapporte la démonstration d’une quelconque autonomie dans son emploi.
réponse de la cour’:
L’article 21 de la convention collective nationale des organismes de formation du 10 juin 1988, dans sa version en vigueur à l’époque de la relation de travail, prévoit que relèvent de la classification de technicien qualifié 2e degré les emplois répondant aux conditions suivantes’:
Emplois exigeant des connaissances générales et techniques qualifiées ainsi qu’une expérience professionnelle permettant au titulaire de prendre des initiatives et des décisions pour adapter, dans les cas particuliers, ses interventions en fonction de l’interprétation des informations.
L’intéressé peut être appelé dans sa spécialité à conseiller d’autres personnes et exercer un contrôle. Il peut assurer l’encadrement d’un groupe composé principalement d’employés des niveaux A et B et, éventuellement, de techniciens qualifiés.
Niveau de connaissances’:
”B.T.S.-D.U.T.-D.E.U.G. (niveau III, éducation nationale).
A titre d’exemples peuvent être classés dans cette catégorie les salariés suivants’:
”secrétaire de direction, secrétaire trilingue’;
”documentaliste, technicien de documentation’;
”assistant commercial, technique ou administratif’;
”comptable de gestion budgétaire (il recueille, enregistre et met en forme les documents permettant le contrôle budgétaire), assistant de gestion’;
”analyste programmeur, réalisateur appelé à réaliser des produits selon des directives précises et sous le contrôle d’un responsable de projet’;
”formateur ayant, dans le cadre tracé de sa spécialité, à adapter l’animation et l’enseignement à son auditoire selon des circonstances qui peuvent être variées.
Le même article énonce que ressortent de la classification de technicien hautement qualifié, niveau E, les fonctions répondant aux conditions suivantes’:
Fonctions exigeant des connaissances acquises par formation spécifique ou par expérience.
Il s’agit de’:
”connaissances générales dans plusieurs domaines (par exemple techniques, économiques et humaines) dans les emplois où la conduite d’un groupe important de personnel est prédominante’;
”ou de connaissances approfondies dans une des disciplines suivantes’:
scientifique, pédagogique, technique, administrative, économique, financière, commerciale, sociale, etc., dans les autres emplois.
La mise en ‘uvre des travaux composant la fonction est laissée à l’initiative du titulaire de l’emploi qui est placé sous la responsabilité d’un supérieur hiérarchique, chargé notamment du contrôle des résultats. Les cadres débutants dans la profession, qui, pour l’exercice de leurs fonctions, doivent être titulaires d’un diplôme d’ingénieur (loi du 10 juillet 1934, décret du 10 octobre 1937) ou de formation de niveaux I et II de l’éducation nationale peuvent être classés dans ce niveau hiérarchique E jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans. Après cet âge, ils sont, selon les exigences de leurs fonctions de cadres, classés en niveau F ou au-dessus.
A titre d’exemples peuvent être classés dans cette catégorie les salariés suivants’:
– assistant de direction exerçant des fonctions correspondant aux caractéristiques du niveau d’emploi ci-dessus défini’;
”comptable (ou premier adjoint au chef comptable)’;
”chargé d’études (participe à des études intéressant les programmes des stages ou à l’analyse des questions pédagogiques ou techniques auxquelles l’organisme doit ou devra répondre)’;
”formateur ayant à sa disposition des programmes et matières à enseigner.
Toutefois, dans ses interventions, l’intéressé peut être appelé, à partir des composantes qui lui sont fournies, à innover et adapter, compte tenu des contraintes constatées ainsi que des besoins exprimés par ceux à qui il apporte des services.
Il participe à l’amélioration et à l’actualisation des enseignements. Il doit prendre en compte, en application de dispositions préalablement fixées, les incidences financières de la mise en ‘uvre des stages qu’il anime, notamment en veillant au respect du cadre budgétaire prévu.
Il peut être appelé également, et en plus de son activité pédagogique, à intervenir commercialement à partir de directives précisant le cadre de ses interventions (notamment’: objectifs à atteindre, moyens à mettre en ‘uvre, règles de gestion à suivre)’:
”programmeur organique, concepteur-réalisateur de programmes, technicien appelé à concevoir des scenarii et à définir les cahiers des charges et éventuellement à réaliser des actions de formation dans leur domaine de compétence’;
”responsable de service documentation.
Les parties s’accordent à reconnaître que, dans son contrat de travail, Mme [U] a été classée à tort au niveau C2 de la convention collective.
A l’appui de sa demande en reclassification au niveau E de la convention collective, Mme [U] se borne à soutenir de manière générale que, compte tenu de son expérience et de ses compétences incontestables et incontestées, elle est fondée à revendiquer ce niveau de classification sans fournir de plus amples explications de nature à démontrer que les conditions requises à ce niveau de classification étaient réunies, ni produire aucune pièce pertinente à l’appui d’une telle demande. Elle ne peut donc prétendre à revendiquer ce niveau de classification et sera classée au niveau D de la convention collective.
L’accord du 18 décembre 2013 relatif aux salaires minima au 1er janvier 2014 prévoit que la classification D1 correspond à un salaire annuel de 20’623,21’€, soit un taux horaire de 11,33’€, et que la classification D2 correspond à un salaire annuel de 22’685,53’€, soit un taux horaire de 12,46’€, alors que, selon l’avenant du 10 mars 2016 relatif aux salaires minima au 1er mars 2016, la classification D1 correspond à un salaire annuel de 20’829,43’€, soit un taux horaire de 11,44’€, et que la classification D2 correspond à un salaire annuel de 22’912,38’€, soit un taux horaire de 12,53’€.
Mme [U] a été rémunérée selon un taux horaire de 18,96’€. Sa reclassification au niveau D est donc sans incidence sur son taux horaire.
sur le rappel de salaire et l’indemnité pour travail dissimulé’:
moyens des parties’:
Mme [U] expose que la CCN prévoit’:
– que, pour les formateurs des niveaux D et E le temps de travail se répartit entre l’acte de formation (AF), les temps de préparation et de recherche liés à l’acte de formation (PR) et les activités connexes (AC),
– que le temps d’AF ne peut excéder 72’% de la totalité de la durée de travail effectif consacrée à l’AF et à la PR, l’AC étant préalablement déduite de la durée de travail effectif’,
– que la durée moyenne hebdomadaire d’AF est de 25,20 heures sur l’année pour un salarié à plein temps,
– que les temps de travail consacrés à l’AF, à la PR et aux AC sont aussi modulables sur l’année,
– qu’ainsi, chaque heure de travail effectif se décompose en 43,20 minutes d’action de formation AF et 16,8 minutes de préparation PR,
– qu’inversement, chaque heure de formation dispensée engendre 23,33 minutes de préparation,
– qu’autrement dit, chaque heure de formation correspond à 83,33 minutes de travail effectif (83,33/60 = 1,389 = coefficient),
– que pour connaître son temps de travail effectif, il suffit donc de multiplier le nombre d’heures de formation dispensées par 1,389.
Elle indique, concernant le premier contrat de travail’:
– que ce dernier a été conclu pour une durée totale de travail de 500 heures, correspondant à 360 heures d’AF et 140 heures de PR,
– qu’au titre de ce premier contrat, elle a dispensé 609 heures de formation,
– que son temps de travail effectif est donc de 609 x 1,389 = 846 heures de travail, soit 346 heures complémentaires dont elle est fondée à demander le paiement.
Elle fait valoir, concernant le second contrat de travail’:
– qu’il a été conclu pour une durée totale de travail de 678 heures correspondant à 488 heures d’AF et 190 heures de PR,
– qu’elle a dispensé 817 heures de formation,
– que son temps de travail effectif au titre de ce contrat est de 817 x 1,389 = 1135 heures de travail, soit 457 heures complémentaires dont elle réclame le paiement.
Au soutien de sa demande en paiement de l’indemnité pour travail dissimulé prévue par l’article L.’8223-1 du code du travail, elle affirme’:
– que ses bulletins de paie ne comportent pas la totalité des heures effectuées, l’employeur ne voulant manifestement pas en déclarer, ni régler, la totalité,
– qu’elle rapporte la preuve de la sous évaluation de ses heures de travail,
– que le fait que la société SARL Format Var reconnaisse a posteriori l’exécution d’heures non comptabilisées, non réglées et ne figurant pas sur les fiches de paie, n’est pas de nature à l’exonérer, bien au contraire,
– qu’elle est donc recevable et fondée à réclamer l’indemnité prévue par le code du travail,
– que, pour le dernier contrat de travail, elle a perçu un salaire mensuel moyen de 2.362,13’€ bruts, qui doit servir de base de calcul aux demandes indemnitaires,
– que la société SARL Format Var sera condamnée à lui payer la somme de 14.172,78’€ à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.
Concernant les heures complémentaires dues au titre du premier contrat de travail, la société SARL Format Var expose’:
– que ce contrat de travail a été conclu pour 500 heures,
– que Mme [U] a accomplies 606 heures de travail,
– qu’il convient de majorer ainsi les heures complémentaires effectuées de 20’% dans la limite de 1/10e de la durée du contrat et 25’% au-delà de cette limite’,
– qu’il lui est dû une somme de 455,19’€ bruts de ce chef.
Concernant les heures de préparation et de recherches dans le cadre de ce premier contrat de travail, la société SARL Format Var affirme’:
– que les 500 heures globales convenues et contractualisées par les parties dans le contrat de travail initial intégraient déjà les temps de recherches selon le ratio de 28’%,
– qu’en revanche, les 106 heures complémentaires de formation effectuées par Mme [U] n’intègrent pas ces temps de recherches,
– qu’elle est en conséquence fondée à solliciter un rappel de salaire pour 106 heures x 28’% = 29,68 heures d’heures de temps de recherches x 18,96’€ (taux horaire), soit 562,73’€ bruts.
Elle estime enfin que, compte tenu des sommes dues à Mme [U], elle reste redevable envers celle-ci d’une somme de 29,22’€ bruts à titre de solde sur indemnité d’usage ainsi que de 101,78’€ à titre de solde sur congés payés.
Concernant les heures complémentaires dues au titre du second contrat de travail, la société SARL Format Var expose’:
que ce contrat de travail a été conclu pour 539 heures,
– que Mme [U] a accomplies 817 heures de travail,
– qu’il convient de majorer ainsi les heures complémentaires effectuées de 20’% dans la limite de 1/10e de la durée du contrat et 25’% au-delà de cette limite’,
– qu’il lui est dû une somme de 594,57’€ bruts de ce chef.
Concernant les heures de préparation et de recherches dans le cadre de ce second contrat de travail, la société SARL Format Var affirme’:
– que les 678 heures globales convenues et contractualisées par les parties dans le contrat de travail initial intégraient déjà les temps de recherches selon le ratio de 28’%,
– qu’en revanche, les 139 heures complémentaires de formation effectuées par Mme [U] n’intègrent pas ces temps de recherches,
– qu’elle est en conséquence fondée à solliciter un rappel de salaire pour 106 heures x 28’% = 29,68 heures d’heures de temps de recherches x 18,96’€ (taux horaire), soit 554,01’€ bruts.
Elle estime enfin que, compte tenu des sommes dues à Mme [U], elle reste redevable envers celle-ci d’une somme de 73,46’€ bruts à titre de solde sur indemnité d’usage ainsi que de 114,85’€ à titre de solde sur congés payés.
La société SARL Format Var s’oppose à la demande de Mme [U] en paiement de l’indemnité pour travail dissimulé aux motifs’:
– qu’elle ne rapporte en aucune manière la preuve d’un travail dissimulé ni l’accomplissement d’heures complémentaires ou complémentaires dissimulées,
– que les rappels de salaires devant lui être payés à l’intéressée ne concerne que la bonification d’heures déjà déclarées ainsi que la régularisation purement administrative des heures de recherches, pendant matérielle des heures accomplies et déclarées,
– que Mme [U] ne rapporte pas la preuve de la matérialité de la dissimulation d’emploi qu’elle lui reproche.
réponse de la cour’:
L’article 10.3 de la convention collective (Durée du travail des formateurs D et E) prévoit que’:
Pour les formateurs des niveaux D et E, titulaires de contrats à durée indéterminée ou de contrats à durée déterminée, à plein temps ou à temps partiel au sens des dispositions légales applicables, les accords d’entreprise ou le contrat de travail doivent apprécier et fixer le temps de travail qui est globalement consacré aux diverses fonctions des formateurs. Des accords d’entreprise ou les contrats individuels peuvent prévoir des dispositions analogues pour les formateurs des niveaux supérieurs.
Le temps de travail se répartit entre l’acte de formation (AF), les temps de préparation et de recherche liés à l’acte de formation (PR) et les activités connexes (AC).
Par acte de formation, il faut entendre toute action à dominante pédagogique, nécessitant un temps de préparation et de recherche, concourant à un transfert de connaissances, à l’animation de séquences de formation en présence, individuelle ou collective, directe ou médiatisée, sur place ou à distance, de stagiaire (s) ou apprenant (s).
Par PR, il faut entendre, à titre d’exemple, les activités de conception, de recherche, de préparation personnelle ou matérielle des stages, les réunions et l’ingénierie, quand ces activités sont directement liées à la mise en ‘uvre de l’AF.
Par activités connexes, il faut entendre, à titre d’exemple non exhaustif, selon les organisations mises en ‘uvre dans l’entreprise, les activités de conception, d’ingénierie, quand elles ne sont pas directement liées à la mise en ‘uvre de l’AF et les activités complémentaires’: information, accueil, orientation, bilan, placement, réponse aux appels d’offres, suivi, relations «’tutorales’», réunion dont l’objet n’est pas directement lié à l’AF, permanence, commercialisation et relation avec les prescripteurs ou partenaires.
Le temps d’AF, selon la définition ci-dessus, ne peut excéder 72’% de la totalité de la durée de travail effectif consacrée à l’AF et à la PR, l’AC étant préalablement déduite de la durée de travail effectif.
Il ressort en conséquence clairement de ces dispositions conventionnelles que le temps de travail effectif prévu au contrat de travail correspond à l’acte de formation (AF) et aux temps de préparation et de recherches liés à l’acte de formation (PR) et que l’acte de formation ne peut excéder 72’% de ce temps de travail.
Les deux contrats à durée déterminée conclus entre la SARL Format Var et Mme [U] prévoient l’embauche de Mme [U] respectivement pour une durée de 500 heures et de 579 heures sans préciser que cette durée correspond uniquement à l’acte de formation. Dès lors, le temps de travail prévu est présumé comprendre les actes de formation réalisés par Mme [U] mais aussi les temps de préparation et de recherches liés à l’acte de formation.
Cependant, cette présomption peut être renversée par la démonstration que la salariée a consacré de manière exclusive cette durée de travail stipulée dans les contrats à durée déterminée initiaux à des actes de formation.
Au terme du premier contrat à durée déterminée, Mme [U] a été recrutée pour une période initialement prévue du 24 février au 23 octobre 2015. Selon le second contrat à durée déterminée, elle a été embauchée par la SARL Format Var pour une période courant du 26 octobre 2015 au 21 juin 2016.
La seule production par Mme [U] de son planning du 5 octobre 2015 au 15 avril 2016 et de son planning de ses disponibilités pour la période courant de février à juillet 2015, qui ne comprennent aucun détail sur la nature de ses activités pendant ces périodes, ne permet pas de démontrer que les durées de 500 heures et 579 heures mentionnées dans ses contrats à durée déterminée ont été uniquement employés à des actions de formation et que Mme [U] est donc fondée à réclamer le paiement de son temps de préparation et de recherches.
Mme [U] sera déboutée de sa demande de ce chef.
Selon avenant du 21 juin 2016, le second contrat à durée déterminée de Mme [U] a été prorogé pour une durée de deux mois, Mme [U] devant réaliser 139 heures de travail. La SARL Format Var admet devoir à Mme [U] le temps de préparation et de recherche afférent à ces 139 heures de formation.
Il ressort de l’article 5 de l’accord du 17 décembre 2014 relatif au temps partiel que, jusqu’à 1/10e de la durée du travail, les heures complémentaires sont majorées de 20’% et que, au-delà de 1/10e et jusqu’à 1/3 de la durée du travail, elles sont majorées de 25’%.
La SARL Format Var reste donc devoir à Mme [U] la somme de 455,19’€ bruts à titre de rappel sur heures complémentaires pour le premier contrat à durée déterminée et celle de 562,73’€ à titre de rappel sur heures complémentaires sur le second contrat à durée déterminée.
Il n’est pas contesté par la SARL Format Var que Mme [U] n’a pu bénéficier des cinq jours de congés mobiles prévus par la convention collective applicable. Il appartient à l’employeur d’organiser le temps de travail pour permettre à sa salariée de prendre ses jours de congés. Mme [U] est en conséquence fondée à en réclamer le paiement, soit, à raison de 2’% sur la rémunération perçue par Mme [U] après réintégration des heures complémentaires dues par la SARL Format Var, la somme de 238,90’€ pour le premier contrat à durée déterminée et 321,70’€ pour le second contrat à durée déterminée.
Enfin, compte tenu des rappels sur heures complémentaires accordées à Mme [U], la SARL Format Var reste lui devoir, à titre de solde sur l’indemnité d’usage prévue par l’article 5.4.3 de la convention collective, la somme de 26,22’€ bruts sur le premier contrat à durée déterminée et celle de 73,46’€ sur le second contrat à durée déterminée.
L’article L’8221-5 du code du travail énonce qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur’:
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche’;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie’;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.
L’article L’8223-1 du même code prévoit qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Le paiement de cette indemnité suppose de rapporter la preuve, outre de la violation des formalités visées à l’article L’8223-1, de la volonté chez l’employeur de se soustraire intentionnellement à leur accomplissement.
Il a été retenu que Mme [U] n’avait pas été intégralement payée des heures complémentaires qu’elle avait accomplies au profit de la SARL Format Var. Cependant, le montant des sommes dues à Mme [U] et les éléments soumis à l’appréciation de la cour ne permettent pas de caractériser chez l’employeur la volonté de se soustraire à ses obligations. Mme [U] sera en conséquence déboutée de sa demande au titre de l’indemnité pour travail dissimulé.
Sur les dommages et intérêts pour défaut de mensualisation et les dommages et intérêts pour préjudice subi du fait des erreurs affectant fiches de paie et documents de fin de contrat’:
moyens des parties’:
A l’appui de sa première demande en dommages-intérêts, Mme [U] expose que ses contrats de travail prévoyaient qu’elle sera mensualisée,
– qu’elle n’a pas fait l’objet d’une telle mesure,
– qu’une telle situation est d’autant plus inexplicable que la durée des formations dispensées par elle était connue à l’avance, ce qui aurait pu facilement permettre la mensualisation, avec régularisation au mois le mois en cas d’heures complémentaires,
– qu’elle s’est trouvée sans aucun revenus au mois de décembre 2015, et n’a perçu que des salaires dérisoires et inférieurs au SMIC aux mois d’août 2015, février et juillet 2016,
– que cette situation lui a causé un évident préjudice, puisque, pour les mois concernés, la salariée a eu le plus grand mal à faire face à ses charges de la vie courante, et notamment à son crédit immobilier,
– qu’elle évalue raisonnablement son préjudice à la somme de 5.000’€.
Au soutient de sa seconde demande en dommages-intérêts, Mme [U] fait valoir’:
– que ses fiches de paie et son attestation Pôle Emploi sont erronées dans la mesure où elles ne mentionnent pas la totalité des heures effectuées, et que le manque à gagner pour la totalité de la période contractuelle est supérieur à 17.000’€,
– que ces 17.000’€ n’ont donc pas été pris en compte par Pole Emploi dans le calcul de ses droits,
– que sur 18 mois de relation contractuelle, il en ressort une différence de plus de 900’€ par mois en moyenne,
– que Pôle Emploi ne lui verser une allocation de retour à l’emploi très inférieure à ce qu’elle aurait dû percevoir, soit en moyenne moins de 600’€,
– qu’elle est fondée à solliciter une somme de 10’000’€ à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice.
La société SARL Format Var expose’:
– que du fait de la répartition particulière de ses horaires telle que prévue par son contrat de travail, la rémunération mensuelle de Mme [U] pouvait être établie sur la base de l’horaire minimum effectué, les heures de travail accomplies au-delà de cet horaire devant être rémunérées en sus du salaire habituel,
– que Mme [U] ne verse aucun document ni pièce permettant d’apprécier tant le principe que le montant des sommes sollicitées notamment en matière de dommages et intérêts,
– que les sommes réclamées par Mme [U], qui équivalent à 15 mois de salaire, sont exorbitantes,
– que du fait de la régularisation qu’elle doit opérer à hauteur de la somme de 2.485,81’€ bruts (toutes causes de régularisations confondues, cf. développements supra), Mme [U] n’a subi aucun préjudice du fait de la rupture de son contrat de travail, dès lors que celle-ci a perçu normalement, depuis la fin de son contrat de travail, des revenus au titre de l’assurance chômage,
– que la régularisation à intervenir devra nécessairement impacter cette indemnisation à la hausse puisque Mme [U] pourra faire valoir un retraitement de ses droits auprès des institutions compétentes.
réponse de la cour’:
L’article L.’3242-1 du code du travail énonce’:
La rémunération des salariés est mensuelle et indépendante, pour un horaire de travail effectif déterminé, du nombre de jours travaillés dans le mois. Le paiement mensuel neutralise les conséquences de la répartition inégale des jours entre les douze mois de l’année.
Pour un horaire équivalent à la durée légale hebdomadaire, la rémunération mensuelle due au salarié se calcule en multipliant la rémunération horaire par les 52/12 de la durée légale hebdomadaire.
Le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois. Un acompte correspondant, pour une quinzaine, à la moitié de la rémunération mensuelle, est versé au salarié qui en fait la demande.
Ces dispositions ne s’appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires.
Il n’est pas contesté par la SARL Format Var que Mme [U] n’a perçu aucune rémunération pour le mois de décembre 2015 alors que cette salariée ne relève pas des catégories de salarié prévues à l’article L. 3242-1 du code du travail permettant de déroger au principe de la mensualisation. Cependant, Mme [U] ne verse aux débats aucun élément de nature à rapporter la preuve des difficultés financières qu’elle aurait rencontré en raison du défaut de mise en ‘uvre de la mensualisation de son salaire par son employeur. Elle sera déboutée de sa demande de ce chef.
Il a été retenu que Mme [U] n’avait pas été intégralement payée de ses heures complémentaires, lesquelles n’ont pas été mentionnées sur les documents qui lui ont été remis à l’issue de ses contrats de travail. Une telle omission a nécessairement influé de manière défavorable sur le montant des allocations chômage qui lui ont été allouées. Il n’est pas démontré par la SARL Format Var que Mme [U] peut faire rectifier ses droits par Pôle Emploi. Compte tenu du montant des sommes omises, le préjudice subi par Mme [U] à raison de cette réduction de ses allocations chômage sera indemnisé en lui allouant la somme de 300’€ à titre de dommages-intérêts.
Sur la requalification de la relation contractuelle à durée déterminée en contrat à durée indéterminée’:
moyens des parties’:
Au soutien de sa demande en requalification de ses contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, Mme [U] expose’:
– que l’article 5.4.1 de la CCN précise que les contrats sont de façon générale conclu pour une durée indéterminée,
– que l’article 5.4.3 de la CCN dispose que les formateurs peuvent être embauchés sous contrat à durée déterminée pour des opérations de formation et d’animation, dès lors qu’il s’agit d’actions limitées dans le temps requérant des intervenants dont les qualifications ne sont pas normalement mises en ‘uvre dans les activités de formation de l’organisme, sans préjudice de l’application de l’article 5.7,
– qu’elle indique, en son article 5.4.4 que les contrats à durée déterminée peuvent en outre être conclus dans le cas d’activités réputées permanentes si la dispersion géographique des stages, leur caractère occasionnel ou l’accumulation de stages sur une même période ne permet pas à l’effectif habituel permanent, à temps plein ou à temps partiel, d’y faire face,
– que l’article l’article L. 1241-1 du code du travail dispose qu’un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise,
– que la société SARL Format Var exerce son activité de formation tout au long de l’année et ne subit aucune variation saisonnière d’activité,
– que son objet social est de dispenser des formations de sorte que l’emploi de formateur est bien lié à l’activité permanente de l’entreprise,
– que la formation au titre professionnel de conseiller en insertion professionnelle, dont elle a été chargée, figure au catalogue permanent de la société SARL Format Var,
– qu’elle existait encore en 2018 et 2019 postérieurement à la fin de son contrat à durée déterminée,
– que la société SARL Format Var diffuse d’ailleurs régulièrement des offres d’emploi pour pourvoir, toujours en contrat à durée déterminée, le poste qu’elle occupait
– que son activité n’était donc pas occasionnelle, mais bien permanente et constante,
– qu’elle a toujours exercé ses fonctions sur la commune de [Localité 2], de sorte que la société SARL Format Var ne peut invoquer la moindre dispersion géographique,
– qu’il ne peut non plus exciper de la moindre difficulté prétendument liée à une accumulation de stages,
– que les tâches qui lui ont été confiées n’étaient par conséquent pas temporaires par nature, et elles étaient au contraire directement liées à l’activité normale et permanente de l’entreprise,
– que le caractère temporaire de l’emploi fait donc défaut, et le recours au contrat à durée déterminée ne se justifiait pas,
– que la relation de travail ne pourra qu’être requalifiée en contrat à durée indéterminée.
Elle s’estime en conséquence fondée à solliciter le paiement par la société SARL Format Var de l’indemnité de requalification prévue par l’article L.’1245-2 du code du travail.
Elle affirme que la rupture du contrat de travail par la société SARL Format Var est constitutive d’un licenciement verbal justifiant la condamnation de la société SARL Format Var au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Enfin, elle soutient que, licenciée sans respect de la procédure de licenciement, elle est en droit de solliciter des dommages-intérêts pour irrégularité de procédure.
La société SARL Format Var s’oppose à la demande de Mme [U] en requalification de ses contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée aux motifs’:
– que la CCN permet le recours à des contrats à durée déterminée pour des actions limitées dans le temps requérant des intervenants dont les qualifications ne sont pas normalement mises en ‘uvre dans les activités de formation de l’organisme ou pour des missions temporaires pour lesquelles on fait appel au contrat à durée déterminée en raison de la dispersion géographique des stages, de leur caractère occasionnel ou de l’accumulation des stages sur une même période ne permettant pas de recourir à l’effectif permanent habituel,
– que s’il est exact que le conseil en insertion professionnelle figure bien au catalogue permanent de la société, il n’en demeure pas moins que cette formation ne peut être dispensée qu’à partir du moment ou un nombre suffisant de stagiaire y a souscrit,
– qu’en d’autres termes, le fait qu’une telle formation figure au catalogue des offres de formation ne suffit pas à caractériser l’existence d’une activité permanente de la société qui demeure toujours sujette à l’inscription de stagiaires souhaitant se voir dispenser un tel enseignement,
– que cette réalité économique s’entend des lois du marché de l’offre et de la demande et ne saurait caractériser, comme le prétend Mme [U], l’affirmation d’une activité exerçait de façon permanente au sein de la société,
– que la circonstance qu’elle diffuse, de manière ponctuelle, des offres d’emploi pour pourvoir le type de poste que peut occuper Mme [U], ne fait qu’accréditer et démontrer le caractère occasionnel du conseil en insertion professionnelle,
– que le fait que cet enseignement soit dispensé sous la forme de sessions justifie le caractère occasionnel d’un tel enseignement.
réponse de la cour’:
L’article L.’1242-1 du code du travail prévoit qu’un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
Selon l’article L.’1242-2, 3°du même code, sous réserve des dispositions de l’article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire en cas d’emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
L’article 5.4.3 de la convention collective (contrat de travail à durée déterminée d’usage pour les formateurs) dispose que’:
En raison de la nature de l’activité des organismes de formation et de l’usage constant dans ce secteur d’activité de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée pour certains emplois ayant un caractère temporaire, il est possible de faire appel au contrat de travail à durée déterminée de l’article L.’1242-2-3 du code du travail’:
”pour des actions limitées dans le temps requérant des intervenants dont les qualifications ne sont pas normalement mises en ‘uvre dans les activités de formation de l’organisme’;
”pour des missions temporaires pour lesquelles il est fait appel au contrat à durée déterminée en raison de la dispersion géographique des stages, de leur caractère occasionnel ou de l’accumulation des stages sur une même période ne permettant pas de recourir à l’effectif permanent habituel.
Les hypothèses visées ci-dessus concernent des emplois temporaires correspondant à une tâche déterminée qui, du fait de leur répétition, ne peuvent avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
En l’espèce, Mme [U] justifie que la SARL Format Var a fait paraître des annonces recherchant en formateur en insertion professionnelle pour une durée de 9 mois en 2015, 8 mois en 2016 et 6 mois en 2017. Par ailleurs, la SARL Format Var a organisé une formation «’conseiller en insertion professionnelle’» du 3 octobre au 25 mai 2018 et du 5 juin 2018 au 25 janvier 2019. Il en ressort en conséquence que ces formations portaient sur plusieurs mois et qu’elles avaient vocation à se succéder, excluant ainsi le caractère limité dans le temps ou temporaire de la mission d’enseignement de Mme [U].
Celle-ci est en conséquence fondée à solliciter la requalification de ses contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.
L’article L’1245-2 du code du travail dispose que, lorsque la juridiction fait droit à la demande en requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, elle accorde au salarié une indemnité à la charge de l’employeur ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.
En considération du salaire moyen perçu par Mme [U] sur la totalité de la relation de travail, la SARL Format Var devra payer à Mme [U] la somme de 1’557,21’€ à titre d’indemnité de requalification.
Il est de principe que la rupture du contrat de travail à durée déterminée en raison de l’arrivée du terme s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse si le contrat est par la suite requalifié à durée indéterminée et que l’employeur n’est pas en mesure de présenter une lettre de rupture valant lettre de licenciement et énonçant des griefs matériellement vérifiables permettant de décider si le licenciement a une cause réelle et sérieuse.
La SARL Format Var n’est pas en mesure de présenter une lettre de rupture valant lettre de licenciement et énonçant des griefs matériellement vérifiables permettant de décider si le licenciement a une cause réelle et sérieuse, privant ainsi la rupture des relations contractuelles de cause réelle et sérieuse.
Selon l’article L.’1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte 8 mois d’ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
Il ressort de l’article R.’1234-2 du même code que cette indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté.
L’article R.’1234-4 du code du travail précise que’:
Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié’:
1° Soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement’;
2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion.
La moyenne des trois derniers salaires perçus par Mme [U], mode de calcul plus favorable pour cette dernière, s’élève à 1’921,28’€ bruts. La SARL Format Var devra donc payer à Mme [U] la somme de 608,40’€ à titre d’indemnité légale de licenciement.
Eu égard à un salaire moyen de 1’557,21’€, la SARL Format Var devra payer à Mme [U] la somme de 1’557,21’€ à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 155,72’€ au titre des congés payés afférents.
Compte tenu de l’ancienneté de Mme [U] et de sa rémunération, le préjudice qu’elle a subi au titre de la rupture de son contrat de travail sera indemnisé en lui allouant la somme de 3’000’€ à titre de dommages-intérêts.
Enfin, Mme [U], qui ne caractérise pas le préjudice qu’elle aurait subi à raison de l’irrégularité de sa procédure de licenciement, sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts de ce chef.
sur le surplus des demandes’:
Il a été partiellement fait droit aux demandes de Mme [U]. La SARL Format Var, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et qui sera déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, devra lui payer la somme de 2’000’€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement,
DECLARE Mme [U] recevable en son appel,
INFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Toulon du 19 novembre 2018,
STATUANT à nouveau,
REQUALIFIE les contrats à durée déterminée de Mme [U] des 24 février 2015 et 26 octobre 2015 en contrat à durée indéterminée,
CONDAMNE la SARL Format Var à payer à Mme [U] les sommes suivantes’:
– 455,19’€ bruts à titre de rappel sur heures complémentaires au titre du contrat à durée déterminée du 24 février 2015,
– 45,52’€ au titre des congés payés afférents,
– 562,73’€ à titre de rappel sur heures complémentaires au titre du contrat à durée déterminée du 26 octobre 2015,
– 56,27’€ au titre des congés payés afférents,
– 238,90’€ au titre des jours mobiles dus sur le contrat à durée déterminée du 24 février 2015,
– 321,70’€ au titre des jours mobiles dus sur le contrat à durée déterminée du 26 octobre 2015,
– 26,22’€ bruts à titre de solde restant dû au titre de l’indemnité d’usage le contrat à durée déterminée du 24 février 2015,
– 73,46’€ bruts à titre de solde restant dû au titre de l’indemnité d’usage le contrat à durée déterminée du 26 octobre 2015,
– 300’€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des erreurs affectant les fiches de paie et les documents de fin de contrat,
– 1’557,21’€ à titre d’indemnité de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
– 1’557,21’€ à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 155,72’€ au titre des congés payés afférents.
– 608,40’€ à titre d’indemnité légale de licenciement
– 3’000’€ à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 2’000’€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
ORDONNE la délivrance par Mme [U] d’un bulletin de paie conforme aux condamnations qui précèdent et de documents de fin de contrat rectifiés,
DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,
CONDAMNE la SARL Format Var aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction de ceux dont il a fait l’avance sans en recevoir provision au profit de Maître Aligier, avocat au barreau d’Aix-en-Provence.
Le Greffier Le Président