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8ème Ch Prud’homale
ARRÊT N°459
N° RG 19/06649 –
N° Portalis DBVL-V-B7D-QE43
M. [J] [W]
C/
SARL TSN
Infirmation partielle
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 28 OCTOBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, Président de chambre,
Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,
Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 24 Juin 2022
devant Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
En présence de Madame [L] [A], Médiatrice judiciaire
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 28 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [J] [W]
né le 11 Mars 1985 à [Localité 4] (74)
demeurant [Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Sylvie BOURJON, Avocat au Barreau de NANTES
(bénéficiaire d’une aide juridictionnelle totale numéro 2019/012654 du 15/11/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de RENNES)
INTIMÉE :
La SARL TSN prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Samir LAABOUKI substituant à l’audience Me Bruno CARRIOU de la SCP IPSO FACTO AVOCATS, Avocats au Barreau de NANTES
M. [J] [W] a été embauché par la SARL TSN qui exerce une activité de gestion de la salle de spectacle Théâtre 100 Noms à compter du second semestre 2013, dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée d’usage, en qualité de Régisseur général de théâtre, technicien, statut cadre.
Les relations contractuelles régies par la Convention collective nationale des entreprises de spectacle du secteur privé, ne se sont pas poursuivies au delà du terme du dernier contrat à durée déterminée le 26 avril 2014 .
Le 27 avril 2016, M. [J] [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Nantes. L’affaire a été radiée le 1er juin 2017 puis réenrôlée le 2 juin 2017.
L’affaire qui a fait l’objet d’un retrait du rôle le 11 octobre 2018 a été réenrôlée le 14 février 2019.
M. [J] [W] a formulé les demandes suivantes :
‘ Dire que la rupture du lien contractuel de travail constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
‘ Condamner la SARL TSN à lui payer les sommes suivantes :
– 1.000 € à titre d’indemnité pour manquement aux obligations en matière de visite médicale,
– 18.210,17 € à titre de rappel de salaires,
– 1.821,01 € au titre des congés payés afférents,
– 500 € à titre de dommages-intérêts pour l’exécution déloyale de son contrat de travail par l’employeur,
– 500 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect des règles relatives au repos journalier,
– 500 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect des règles relatives au repos hebdomadaire,
– 500 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect des règles relatives au temps de pause,
– 500 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect des règles relatives à la durée maximale quotidienne,
– 2.430,41 € au titre de l’indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
– 7.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 2.430,41 € à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
– 7.291,23 € à titre d’indemnité de préavis,
– 729,12 € à titre d’indemnité de congés payés,
– 14.582 € au titre du travail dissimulé,
‘ Fixer la moyenne mensuelle des salaires à la somme de 2.600 €,
‘ Intérêts au taux légal et capitalisation,
‘ Condamner la SARL TSN à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
La cour est saisie de l’appel formé le 6 octobre 2019 par M. [J] [W] contre le jugement du 5 septembre 2019 notifié le 6 septembre 2019 , le conseil de prud’hommes de Nantes a :
‘ Dit qu’il n’y a pas lieu à requalification des contrats à durée déterminée de M. [J] [W] en un contrat à durée indéterminée,
‘ Dit que la rupture de la relation de travail de M. [J] [W] repose bien sur une fin de contrat à durée déterminée,
‘ Débouté M. [J] [W] de l’intégralité de ses demandes,
‘ Débouté la SARL TSN de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Laissé les éventuels dépens à la charge de M. [J] [W].
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 5 janvier 2020, suivant lesquelles M. [W] demande à la cour de :
‘ Infirmer le jugement entrepris,
* Au titre de l’exécution du contrat de travail :
‘ Condamner la SARL TSN à lui payer les sommes suivantes :
– 18.210,17 € à titre de rappel de salaires,
– 1.821,01 € au titre des congés payés afférents,
– 500 € à titre de dommages-intérêts pour l’exécution déloyale de son contrat de travail par l’employeur,
* Au titre de la rupture du contrat de travail :
‘ Dire que la rupture de la relation de travail entre M. [W] et la SARL TSN est intervenue aux torts de celle-ci,
‘ Dire que la rupture du lien contractuel de travail constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
‘ Condamner la SARL TSN à lui payer les sommes suivantes :
– 2.430,41 € au titre de l’indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
– 7.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 2.430,41 € à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
– 7.291,23 € à titre d’indemnité de préavis,
– 729,12 € à titre d’indemnité de congés payés,
* Au titre du travail dissimulé :
‘ Dire que M. [W] était dans une situation de travailleur dissimulé,
‘ Condamner la SARL TSN à lui verser la somme de 14.582 € au titre du travail dissimulé,
En tout état de cause,
‘ Fixer la moyenne mensuelle des salaires à la somme de 2.430,41 €,
‘ Intérêts au taux légal et capitalisation,
Y additant,
‘ Condamner la SARL TSN à lui verser la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 16 mars 2020, suivant lesquelles la SARL TSN demande à la cour de :
‘ Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
‘ Déclarer M. [J] [W] mal fondé en toutes ses demandes, et l’en débouter,
‘ Fixer le salaire de référence à la somme de 852 €,
‘ Condamner M. [J] [W] à verser à la SARL TSN une somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 9 juin 2022.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées via le RPVA.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’exécution du contrat de travail :
– Quant à la requalification de la relation contractuelle :
Pour infirmation et bien fondé de ses prétentions à ce titre, M. [J] [W] fait valoir qu’il a été embauché avant l’inauguration de la salle, que dès le 14 juin 2013, il a été en rendez vous avec les artisans et architectes pour démarrer les travaux, se chargeant de la construction des décors et de l’installation technique, étant désigné comme la personne à contacter, se maintenant à la disposition de l’employeur, mis à part pendant 7 jours sur 75.
La SARL TNS objecte que le théâtre n’a été ouvert qu’au mois de septembre 2013, que si des contacts ont été pris, ils s’inscrivaient dans le cadre de la planification nécessaire sans pour autant être synonyme à ce stade de lien de subordination, que la production d’un bulletin de salaire d’une autre société ne peut caractériser ce lien, a fortiori dès lors que l’intéressé qui a réalisé des prestations pour d’autres sociétés, s’abstient de communiquer ses relevés Pôle emploi du mois d’août 2013.
En application de l’article L.121-1 devenu L 1221-1 du code du travail, le contrat de travail est la convention par laquelle une personne s’engage, moyennant rémunération, à mettre son activité à la disposition d’une autre sous la subordination de laquelle elle se place, c’est à dire à se soumettre, dans l’accomplissement de son travail, aux ordres et directives du mandant, qui a le pouvoir d’en contrôler l’exécution et d’en sanctionner les manquements ou si la personne n’exerce pas son activité au sein d’un service organisé, à se soumettre à des conditions de travail qui sont unilatéralement déterminées par le mandant;
L’existence d’une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont données à leur convention, mais des conditions effectives dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs ;
En l’absence d’écrit ou d’apparence de contrat, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d’en rapporter la preuve.
Pour la période antérieure au 10 septembre 2013, il appartient à M. [J] [W] de rapporter la preuve d’un contrat de travail.
L’article L 1242-1 du Code du travail dispose que ” le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise dans laquelle travaille le salarié intéressé”.
L’article L 1242-2 du même code dispose que les contrats à durée déterminée ne peuvent être conclus que pour l’exécution d’un tâche précise et temporaire et seulement dans les cas prévus par la loi , notamment :
– remplacement d’un salarié en cas d’absence.
– accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise.
– emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
S’il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L.1242-2, L. 1245-1 et D.1242-1 du code du travail, que dans les secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant, peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu’il est d’usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en ‘uvre par la Directive n° 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi;
Selon la clause 8.1 de l’accord-cadre précité, les Etats membres et/ou les partenaires sociaux peuvent maintenir ou introduire des dispositions plus favorables pour les travailleurs que celles prévues dans ledit accord ; toutefois, la détermination par accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au contrat de travail à durée déterminée d’usage ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l’existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné.
En application de l’article L 1245-2 du Code du Travail, lorsque le juge fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l’employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.
A l’appui de ses prétentions, M. [J] [W] produit effectivement le courriel du 12 juin 2013 (pièce 3) adressé par le TNS à un nombre conséquent de destinataires, les informant de la recherche d’un nouveau régisseur général, un courriel du 17 juin 2013 de M. [G] (pièce 23) adressé à M. [J] [W] lui rappelant qu’il détient les clés du théâtre, une liasse de copies d’écrans (pièce 18) des pages de la boîte de réception de sa messagerie où figurent un nombre important de courriels reçus depuis le 13 juin 2013 concernant le TNS, le courriel du 16 août 2013 relatif à un devis concernant la pièce “Folle Amanda” (pièce 19) et un compte rendu d’une réunion du même jour (pièce 28) à laquelle ont notamment participé [J] (le salarié) et [I] ([H] : régisseur de plateau) concernant la préparation du spectacle “Folle Amanda” et l’inauguration, confiant à Raph (M. [J] [W]) la prise en main du décor de “Folle Amanda” et prévoyant l’aide des techniciens, ainsi qu’un décompte des jours travaillés en juin, juillet et août 2013 se rapportant aux référence de courriels échangés (pièce 8).
Les éléments ainsi produits suffisent à établir que M. [J] [W] était de fait, effectivement employé par la SARL TNS depuis le 13 juin 2013 et par conséquent à démontrer l’existence d’une relation de travail salarié entre M. [J] [W] et la SARL TNS antérieurement au 21 août 2013, date de la signature portée sur le premier contrat de travail de l’intéressé, ce qui en soi suffit pour requalifier la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée, les arguments opposés par l’employeur concernant l’absence de justification de sa situation Pôle emploi en août et septembre 2013 ou le fait qu’il ait pu travaillé pour d’autres structures sur la même période, ce que le salarié indique lui-même, étant eux mêmes indifférents quant à l’appréciation de l’existence d’un lien de subordination antérieur au 21 août 2013.
En outre, s’agissant du recours au contrat à durée déterminée d’usage invoqué par l’employeur pour la période postérieure, il est patent que les fonctions de régisseur général dans un théâtre tel que le TNS recouvrent des attributions telles que la responsabilité du budget technique, l’organisation et la coordination des différentes étapes d’un projet de création d’un spectacle, le contrôle des activités techniques, la gestion du personnel technique ainsi que l’élaboration des fiches techniques des spectacles mais aussi la planification des activités techniques, ce que ne manque pas de souligner l’employeur.
Ces attributions correspondent à l’organisation du fonctionnement d’un théâtre, cette circonstance suffisant également à démontrer que même les contrats à durée déterminée signés postérieurement n’étaient pas conclus pour l’exécution d’une tâche temporaire et que le recours aux contrats précités n’était pas justifié par des éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.
Il y a lieu en conséquence d’infirmer le jugement entrepris de ce chef et de requalifier la relation contractuelle liant la SARL TNS à M. [J] [W] en contrat à durée indéterminée à compter du 2 septembre 2013.
===
– Quant au rappel de salaire au titre des heures non rémunérées :
Pour infirmation et condamnation de l’employeur à ce titre, M. [J] [W] fait essentiellement valoir qu’il n’a pas été rémunéré pour la période antérieure à la signature du premier contrat à durée déterminée, qu’au delà il n’a été rémunéré qu’à hauteur de 66 heures par mois au taux horaire de 12,85 € brut, très inférieur à son temps de travail réel compte tenu de l’étendue de ses attributions, que les heures étaient déclarées sans aucun rapport avec la réalité du travail fourni, juste pour déclencher le mécanisme de l’assurance chômage, que le rythme de travail et alors que les plannings produits démontrent que les heures réalisées étaient bien plus nombreuses, qu’il ne peut lui être opposé qu’il ne s’est maintenu à disposition que 18 jours sur la totalité de la période, ni lui être objecté qu’il s’agissait de plannings prévisionnels alors qu’il a été sollicité bien au delà de manière imprévue sans être rémunéré, qu’il ne peut lui être opposé d’avoir lui-même établi les plannings dès lors qu’ils étaient contrôlés par Mme [V] et M. [G] après avoir été établis sur l’ordinateur placé dans leur bureau.
La SARL TNS objecte que les éléments produits par le salarié, sont des plannings prévisionnels qu’il a établis lui-même, qu’ils ne sont pas révélateurs du temps de travail dans la mesure où M. [J] [W] était lui-même en charge de la gestion de son temps de travail et de celui des techniciens, que sa présence ne correspondait pas nécessairement aux indications des plannings, qu’il était maître de son temps, que les plannings ne prennent pas en compte les indisponibilités avérées de l’intéressé et les modifications intervenues, sachant qu’ils ont été modifiés peu de temps avant le départ du salarié dont les demandes ne sont donc pas étayées.
Selon l’article L. 3121-10 du Code du Travail, la durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaines civile ; l’article L. 3121-22 énonce que les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l’article L.3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des huit premières heures supplémentaires, les heures suivantes donnant lieu à une majoration de 50 % ;
Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir un taux de majoration différent qui ne peut être inférieur à 10%.
Le nombre d’heures complémentaires demandées au salarié à temps partiel au cours d’une même semaine ou d’un même mois (ou sur la période prévue par l’accord collectif s’il s’agit d’un temps partiel aménagé sur tout ou partie de l’année) ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue dans le contrat, toutefois, un accord de branche étendu ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut porter ce nombre jusqu’au tiers de la durée stipulée au contrat ; cet accord doit contenir des garanties, notamment en matière de carrière et de période minimale de travail continue ; les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail du salarié au niveau de la durée légale ou conventionnelle.
Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir un taux de majoration différent qui ne peut être inférieur à 10% ;
L’article L 3123-19 du Code du travail précise que lorsque la limite dans laquelle peuvent être accomplies des heures complémentaires est portée au-delà du dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle fixée au contrat de travail, chaque heure complémentaire accomplie au-delà du dixième de cette durée donne lieu à une majoration de salaire de 25%.
En application de l’article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties,dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
En l’espèce, outre le décompte des jours travaillés en juin, juillet et août 2013 déjà évoqué, M. [J] [W] verse au débat les plannings du théâtre de septembre 2013 (pièce 10) mentionnant avec précision chacune des activités réalisées (filage de la pièce Folle Amanda, répétition du spectacle inauguration, extérieur etc…) et la participation de chaque intervenant figuré dans une couleur déterminée, en l’occurrence brun pour M. [J] [W], le courriel de diffusion du semainier de la troupe (pièce 10) à l’ensemble des interlocuteurs et ledit semainier jusqu’au 1er décembre 2013, un courriel de [S] [M] du 11 avril 2016 (pièce 11) transmettant à M. [J] [W] le compte rendu de la réunion du 16 août 2013 à laquelle il participait concernant la préparation du spectacle “Folle Amanda” et l’inauguration, confiant à Raph (M. [J] [W]) la prise en main du décor de “Folle Amanda” et prévoyant l’aide des techniciens, les courriels de Mme [V] (pièce 17) sollicitant des rectifications des plannings précités ainsi que les éléments de décompte des heures (pièce 14 et 16) dont le règlement est réclamé.
L’employeur produit l’attestation de Mme [V] (pièce 3) indiquant que M. [W] tenait lui-même les plannings des heures de présence des techniciens sur la base du planning général des représentations réalisé par elle-même en sa qualité d’administratrice du théâtre, qu’il était libre de sa disponibilité, l’attestation de M. [P] (pièce 2) technicien précisant qu’il travaillait pour différents employeurs, qu’il en était de même pour M. [W] et que les plages horaires ne correspondaient pas forcément à sa présence au théâtre, ajoutant qu’en sa qualité de nouveau régisseur général du théâtre, il conçoit lui-même les plannings en tenant compte des disponibilités de chacun des techniciens et de lui-même.
Ce faisant, l’employeur auquel il incombait d’assurer le contrôle des heures réalisées par le salarié, ne produit aucun planning consolidé et aucun élément permettant de remettre en cause la totalité des heures non payées invoquées par le salarié.
En revanche, ce dernier produit des éléments suffisamment précis pour être discutés par l’employeur, de sorte qu’au regard des éléments produits, il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris de ce chef et de faire partiellement droit aux prétentions de M. [J] [W]. à ce titre et par conséquent de condamner la SARL TNS à lui verser la somme de 8.093,56 € brut à ce titre, outre la somme de 809,35 € brut au titre des congés payés afférents pour la période de juin 2013 à avril 2014.
– Quant à l’exécution déloyale du contrat de travail :
Pour infirmation et condamnation de son employeur à réparer le préjudice subi à ce titre, M. [J] [W] fait essentiellement valoir que le système de permittence mis en place par l’employeur consiste à instaurer un double système de planning pour réduire ses charges à l’égard de l’Urssaf et aux salariés de percevoir les indemnités liées à l’intermittence, ce dont il n’a pas bénéficié en dépit du nombre d’heures consacrées au théâtre.
La SARL TNS réfute l’argumentation du salarié, arguant du fait qu’il procède par affirmation alors qu’elle l’a régulièrement déclaré, qu’en réalité il entend se plaindre de ne pas avoir bénéficier du système de fraude qu’il impute à son employeur.
En application des dispositions de l’article L. 1222-1 du Code du travail, le contrat de travail est présumé exécuté de bonne foi, de sorte que la charge de la preuve de l’exécution de mauvaise foi dudit contrat incombe à celui qui l’invoque.
En l’espèce, il ressort des échanges de courriels du 2 juin 2013 (pièce 2 salarié) et en particulier d’une réponse de M. [W] à 22h38 qu’il avait donné son accord pour n’être payé que 66 heures payées à 10 € net tous les mois, en réponse au courriel de M. [U] [N].
Il s’évince des termes de cet échange que M. [J] [W] n’ignorait pas les conditions dans lesquelles il était engagé, qu’il y a consenti et s’il est fondé à réclamer le paiement des heures non rémunérées par l’employeur, il ne peut sérieusement invoquer sa mauvaise foi à son égard.
Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [J] [W] de la demande formulée à ce titre.
– Quant au travail dissimulé :
Pour infirmation et condamnation de son employeur à ce titre, M. [J] [W] expose qu’il a réalisé 1082 heures qui ne lui ont été ni payées ni déclarées, que pour écarter ses prétentions à ce titre, les premiers juges se sont contentés d’affirmer que la preuve n’était pas rapportée d’une relation de travail avant le 9 septembre 2013.
La SARL TNS entend souligner que la qualification de travail dissimulé suppose la réunion d’un élément matériel et d’un élément intentionnel, que les deux font défaut dès lors que le salarié n’a commencé à travailler que le 10 septembre, que ses bulletins de salaire sont conformes à cette réalité et que les affirmations de M. [J] [W] concernant les heures supplémentaires ne sont corroborées par aucun élément probant.
L’article L.8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l’article L.8221-3 du même code relatif à la dissimulation d’activité ou exercé dans les conditions de l’article L.8221-5 du même code relatif à la dissimulation d’emploi salarié ;
L’article L.8221-5, 2°, du code du travail dispose notamment qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli ; toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle ;
Aux termes de l’article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l’employeur a recours dans les conditions de l’article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ;
L’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé est due quelle que soit la qualification de la rupture ; la demande en paiement d’heures supplémentaires n’a pas pour effet de rendre irrecevable la demande en paiement de l’indemnité forfaitaire ; le montant de l’indemnité forfaitaire doit être calculé en tenant compte des heures supplémentaires accomplies par le salarié au cours des six derniers mois précédant la rupture du contrat de travail ; cette indemnité qui sanctionne la violation de dispositions légales se cumule avec les indemnités de nature différente résultant du licenciement, et notamment avec l’indemnité de licenciement ;
En l’espèce, s’il ressort des développements qui précèdent que la relation contractuelle entre la SARL TNS et M. [J] [W] a commencé dès le 2 juin 2013 et qu’il n’a pas été payé de l’intégralité des heures qu’il avait réalisées dans ce cadre, M. [J] [W] qui souligne pourtant le caractère irrégulier de ce mode de rémunération auquel il avait souscrit, ne propose pas de démontrer le caractère intentionnel de l’omission qu’il impute à son employeur.
Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris à ce titre.
Sur les conséquences de la requalification :
– Quant à l’indemnité de requalification :
En application de l’article L 1245-2 du Code du Travail, lorsque le juge fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l’employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.
Compte tenu des développements qui précèdent, il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris de ce chef, toutefois et nonobstant le fait que le salarié soutient s’être tenu à la disposition
permanente de son employeur pendant sa période d’emploi, il ne formule aucune demande de requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps plein, de sorte qu’il ne peut réclamer une indemnité de requalification de 2.430,41 € correspondant à la rémunération de son emploi à temps plein.
Au vu des éléments produits et calculée sur la base d’un salaire de référence de 2.406,10€ brut après réintégration des heures non rémunérées sur les trois derniers mois, il y a lieu d’allouer à M. [J] [W] la somme de 2.406,10 € net à titre d’indemnité de requalification, le jugement étant infirmé de ce chef.
– Quant à la rupture :
Pour infirmation et condamnation de son employeur à ce titre, M. [J] [W] fait valoir qu’il n’a pas été payé pendant un mois et demi, qu’il n’a été que partiellement payé au delà, tout en étant corvéable à merci, qu’il a donc cessé de travailler à compter du 30 avril 2014.
Ce faisant, s’il invoque des manquements de son employeur, le salarié ne précise pas le principe juridique sur lequel il fonde sa demande.
Toutefois, l’employeur reconnaît que la rupture du contrat n’est intervenue que par la seule échéance de son terme prétendu. Du fait de la requalification des contrats à durée déterminée d’usage de M. [J] [W] en contrat à durée indéterminée, cette rupture ne peut, en l’absence de lettre en énonçant les motifs, qu’être analysée en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Cependant, le salarié tout en rappelant qu’il peut prétendre à une indemnité en fonction du préjudice subi dont l’étendue est souverainement appréciée par les juges du fond, évoque un préjudice nécessairement subi sans en expliciter les éléments constitutifs.
Dans ces conditions, compte tenu de la perte d’une ancienneté de dix mois pour un salarié âgé de 29 ans, la cour ne peut en application de l’article L. 1235-5 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 qu’évaluer le préjudice moral résultant de la perte de son emploi par M. [J] [W] et lui allouer la somme de 2.500 € net à titre de dommages-intérêts de ce chef ;
Aux termes de l’article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l’ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur.
La rupture étant abusive, le salarié peut donc prétendre aux indemnités compensatrice de préavis et de congés afférents tel qu’il est dit au dispositif, pour les montants calculés sur la base d’un salaire de référence de 2.406,10 € et application faite des dispositions de l’article VII-6 de la Convention collective Nationale des entreprises de spectacle du secteur privé, le jugement entrepris étant infirmé dans cette limite.
– Quant à l’irrégularité de la procédure :
Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L.1235-2 et L.1235-5 du code du travail avec celles de l’article L.1235-3 du code du travail que, lorsque le licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté ou opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le salarié peut obtenir, en plus des dommages-intérêts pour rupture abusive, une indemnité distincte pour irrégularité de la procédure, y compris en cas de méconnaissance des dispositions relatives à l’assistance du salarié par un conseiller.
Il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris de ce chef et d’allouer la somme de 2.406,10 € net à M. [I] [H] à ce titre, le jugement entrepris étant infirmé dans cette limite.
Sur la capitalisation des intérêts :
En application de l’article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts est de droit dès lors qu’elle est régulièrement demandée ; il doit être fait droit à cette demande ;
Sur l’article 700 du Code de procédure civile :
Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la société qui succombe en appel, doit être déboutée de la demande formulée à ce titre et condamnée à indemniser le salarié des frais irrépétibles qu’il a pu exposer pour assurer sa défense en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
INFIRME partiellement le jugement entrepris,
et statuant à nouveau,
CONDAMNE la SARL TSN à verser à M. [J] [W] les sommes suivantes :
– 8.093,56 € brut à titre de rappel de salaires pour la période de juin 2013 à avril 2014,
– 809,35 € brut au titre des congés payés afférents,
– 2.406,10 € net au titre de l’indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
– 2.500 € net à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 2.406,10 € net à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
– 7.218,30 € brut à titre d’indemnité de préavis,
– 721,83 € brut à titre d’indemnité de congés payés,
FIXE la moyenne mensuelle des salaires à la somme de 2.406,10 €,
RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes, à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les alloue ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts,
CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus,
et y additant,
CONDAMNE la SARL TSN à verser à M. [J] [W] la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE la SARL TSN aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT.