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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°1273
N° RG 19/03871 – N° Portalis DBVH-V-B7D-HQJX
LD/ID
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES SECTION INDUSTRIE
26 septembre 2019 RG :19/00228
S.A.R.L. DEBELEC
C/
[M]
Grosse délivrée
le
à
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NIMES SECTION INDUSTRIE en date du 26 Septembre 2019, N°19/00228
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Leila DAFRE, Vice-présidente placée, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Leila DAFRE, Vice-présidente placée
M. Michel SORIANO, Conseiller
GREFFIER :
Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 21 Septembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 22 Novembre 2022.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
SARL DEBELEC
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Marie-hélène REGNIER de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de CARCASSONNE
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉ :
Monsieur [B] [M]
né le 02 Juillet 1971 à [Localité 5]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Jean-gabriel MONCIERO de la SELARL PARA FERRI MONCIERO, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 06 Septembre 2022
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 22 Novembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [B] [M] a été engagé à compter du 20 juin 2016, suivant contrat à durée déterminée jusqu’au 23 septembre 2016, en qualité de monteur de lignes avec la qualification d’ouvrier d’exécution, niveau 1, position 1 coefficient 150, par la SARL Debelec.
Par avenant au contrat de travail du 24 septembre 2016, la relation contractuelle s’est poursuivie dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée.
M. [B] [M] a été placé en arrêt maladie par son médecin traitant le 18 décembre 2017.
Cet arrêt maladie a été prolongé à plusieurs reprises jusqu’au 6 mai 2018.
M. [B] [M] a fait l’objet d’une visite médicale de reprise, auprès du médecin du travail, le Dr [D] [Z], le 7 mai 2018. Le médecin du travail a conclu : ‘tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé’.
M. [B] [M] a été licencié le 31 mai 2018, pour inaptitude physique d’origine non-professionnelle.
M. [B] [M] a saisi le conseil de prud’hommes en contestation de l’exécution déloyale de son contrat de travail ainsi que pour rupture abusive de son contrat.
Le conseil de prud’hommes, par jugement contradictoire du 26 septembre 2019, a statué comme suit :
– le conseil requalifie le contrat à durée déterminée de M. [M] [B] du 19 juin 2016 en contrat à durée indéterminée
– condamne la SARL Debelec à payer à M. [M] [B] la somme de 2.007,86 euros à titre d’indemnité de requalification du contrat de travail
– condamne la SARL Debelec à payer à M. [M] [B] la somme de 1.686, 48 euros bruts outre 168, 64 euros bruts de congés payés y afférents du fait du non-paiement des heures supplémentaires
– condamne la SARL Debelec à payer à M. [M] [B] la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, des heures supplémentaires non payées
– condamne la SARL Debelec au paiement de la somme de 12.047, 16 euros de M. [M] [B] au titre du travail dissimulé en application des dispositions de l’article L8223 du code du travail
– condamne la SARL Debelec au paiement de la somme de 1.500 euros à M. [M] [B] à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, à titre de son obligation de sécuroté de résultat
– dit que le licenciement de M. [M] [B] est sans cause réelle et sérieuse
– condamne la société Debelec à délivrer à M. [M] [B] sous astreinte de 50 euros par jours de retard : les bulletins de paie ainsi que des documents sociaux de fin de contrat conforme au jugement intervenu
– condamne la société Debelec à justifier à M. [M] [B] sous astreinte de 50 euros par jours de retard, d’avoir à procéder aux déclarations des sommes à caractère salarial aux organismes sociaux du jugement à intervenir
– ordonne l’exécution provisoire de ce jugement en application de l’article 515 du code de procédure civile
– condamne la société Debelec à payer à M. [M] [B] la somme de 1.800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par acte du 8 octobre 2019, la SARL Debelec a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 26 décembre 2019 la SARL Debelec demande à la cour de :
– Réformer le jugement entrepris,
– Dire et juger que le licenciement de M. [M] repose sur un motif réel et sérieux,
– Débouter M. [M] de l’ensemble de ses demandes,
– Condamner M. [M] [B] à verser à la SARL Debelec la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance
La SARL Debelec soutient que :
– concernant la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée : la société souligne que le salarié aurait dû solliciter une réformation de son contrat de travail dans les deux années, soit avant le 21 juin 2018. Or, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes d’une demande requalification le 26 avril 2019.
– la société argue que le salarié ne s’est jamais manifesté concernant des heures supplémentaires impayées et que les heures supplémentaires connues lui ont été réglées. Elle ajoute que, de facto, les arguments concernant le travail dissimulé et l’absence de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité ne sont pas valides.
En l’état de ses dernières écritures en date du 24 mars 2020 contenant appel incident M. [B] [M] a sollicité la confirmation du jugement et la condamnation de M. [M] au paiement de la somme de 1.800 euros au titre des frais irrépétibles en cause d’appel.
M. [B] [M] fait valoir que :
– concernant la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée : le salarié argue que pour que le contrat reste qualifié de contrat à durée déterminée, il faut que l’employeur apporte la preuve que les différents chantiers correspondent à un accroissement de l’activité de l’entreprise et non à son activité normale et permanente.
– concernant les heures supplémentaires non-déclarées et non payées : le salarié soulève avoir effectué des heures supplémentaires : le salarié déclare avoir effectué plus que les 39 heures hebdomadaires prévues par son contrat de travail, à la demande de son employeur. Il demande réparation sur le fondement d’heures supplémentaires non-déclarées et non-payées, du travail dissimulé et du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 26 avril 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 6 septembre 2022.
MOTIFS
Sur la demande de requalification :
Aux termes de l’article L 1242-1 du code du travail un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, les articles L 1242-2 et suivant du même code énonçant les cas dans lesquels un contrat à durée déterminée peut être conclu, dont notamment le remplacement d’un salarié absent, un accroissement temporaire d’activité de l’entreprise, les emplois à caractère saisonnier ou les contrats à durée déterminée d’usage.
En application de l’article L 1245-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, est réputé contrat à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L 1242-1 à L 1242-4, L 1242-6 à L 1242-8, L 1242-12 alinéa 1, L 1243-11 alinéa 1, L 1243-13, L 1244-3 et L 1244-4 du même code.
En cas de requalification judiciaire du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, l’article L 1245-2 du code du travail prévoit que le salarié a droit à une indemnité, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire, selon le montant perçu avant la saisine du juge, heures supplémentaires inclues, et pouvant se cumuler avec l’indemnité de fin de contrat dite indemnité de précarité, telle que prévue par l’article L 1243-8 du code du travail , égale à 10% de la rémunération totale brute versée au cours de l’exécution du contrat à durée déterminée.
Aux termes de l’article L 1471-1 alinéa 1 du code du travail, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
L’ article L 1471-1 du code du travail est issu de la loi du 14 juin 2013, la nouvelle durée de prescription s’appliquant à compter du 16 juin 2013, date de promulgation de la loi, aux prescriptions en cours d’acquisition sans que la durée totale de la prescription puisse excéder celle prévue par la loi antérieure.
S’agissant de la requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, il est constant que la prescription de deux ans prévue par l’article L 1471-1 du code du travail a son point de départ fixé au jour de la signature du contrat lorsque la demande de requalification se fonde sur une irrégularité touchant aux énonciations du contrat à durée déterminée et a son point de départ fixé au terme du dernier contrat à durée déterminée exécuté lorsque la demande de requalification se fonde sur un contrat à durée déterminée ou une succession de contrats à durée indéterminée ayant pour finalité de pourvoir un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
En l’espèce M. [B] [M] a signé le 19 juin 2016 avec la SARL Debelec un contrat à durée déterminée à temps partiel de 39 heures hebdomadaires.
Par avenant du 26 janvier 2016, les parties convenaient de ce que le contrat à durée déterminée, achevé le 23 septembre 2016, se poursuivait à compter du 24 septembre 2016 sous la forme d’un contrat à durée indéterminée.
Le point de départ du délai biennal de prescription ayant pris effet au 23 septembre 2016, la prescription est acquise depuis le 23 septembre 2018.
M. [B] [M] ayant saisi le conseil de prud’hommes par requête introductive d’instance en date du 6 juin 2019, l’action en requalification du contrat de travail à durée déterminée est prescrite et le jugement déféré sera réformé en ce qu’il a requalifié le contrat en contrat à durée déterminée et accordé à M. [B] [M] une indemnité à ce titre.
Sur la demande de rappel au titre des heures supplémentaires :
Aux termes de l’article L3121-10 du code du travail, la durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine civile.
La semaine civile est entendue au sens des dispositions de l’article L. 3122-1.
Aux termes de l’article L 3121-28 du code du travail, toute heure accomplie au delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.
Aux termes de l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions qu’il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
M. [B] [M] soutient, qu’en plus des 39 heures hebdomadaires prévues par son contrat, il a très régulièrement accompli des heures supplémentaires.
Il produit aux débats :
– un relevé dactylographié, complété de manière manuscrite, détaillant par journée le nombre d’heures supplémentaires réalisées, lequel fait apparaître la réalisation de 64 dépassements journaliers pour la période du 21 juin 2016 au 29 décembre 2016, pour un total de 58h21 supplémentaires, et 89 dépassements journaliers pour la période du 6 janvier 2017 au 1er décembre 2017, soit un montant total de 80,34 heures pour l’année 2017;
– ces données sont reprises sous la forme d’un tableau excel lequel comporte, en outre, le décompte de la totalité des heures supplémentaires effectuées au delà de 35 heures et convenues dans le contrat de travail
– de nombreux courriels adressés à ‘[email protected]’ relatifs quasi exclusivement à la transmission de rapports journaliers de travaux, l’intitulé des pièces jointes, non communiquées, débutant systématiquement par : ‘RETOUR CHANTIER’
– une sommation interpellative délivrée par huissier de justice à M. [C] [P] laquelle comporte six questions posées à l’intéressé et les réponses que celui-ci a données
– les attestations de M. [L] [Y] et de M. [J] [T]
– un courriel émanant de M. [A] [R] indiquant notamment ‘Il faut assurer les retours le vendredi soir tous ensemble au bureau..:
– pour l’indicateur
– pour les 48h d’information des BE de relève..’.
Pour sa part, la SARL Debelec produit aux débats les bulletins de salaire de M. [B] [M] dont il ressort qu’outre les 17,33 heures supplémentaires réalisées mensuellement conformément aux stipulations contractuelles, l’employeur a réglé à son salarié des heures supplémentaires majorées à hauteur de :
9,33 en juin 2016
2,40 en septembre 2016
1 en décembre 2016
4 en avril 2017
3 en septembre 2017
4 en décembre 2017
8 en mars 2018
14 en juin 2018
La SARL Debelec produit également un document dont l’intitulé n’est pas lisible mais qui comporte sur chacune de ses pages le récapitulatif de la semaine de travail, détaillé pour chaque journée de travail en plusieurs colonnes récapitulant : ‘le nombre d’heures travaillées’, ‘les heures supplémentaires réalisées’ outre six colonnes réparties en 5 zones selon des distances allant de ‘0″ à ‘+ de 25 km’. Ce document porte sur la plupart de ses pages la signature de ‘CDTX pour validation zones’ outre celle du salarié. Il est cependant vraisemblable que ce document avait vocation à valider les trajets effectués par le salarié plus que ses heures de travail réelles puisque, contrairement aux indications relatives à la distance qui sont quasi systématiquement complétées, ce document ne fait état que de 6 heures supplémentaires réparties sur les mois de janvier, mars et novembre 2017, en contradiction avec les éléments produits par ailleurs par l’employeur, notamment les bulletins de salaire.
Il y a lieu d’observer que le principe de la réalisation d’heures supplémentaires par M. [B] [M] n’est donc pas contesté par l’employeur et il est constant que des heures supplémentaires ont bien été acquittées par ce dernier en plus de celles réalisées dans un cadre contractuel.
Ainsi les déclarations de M. [C] [P] obtenues dans le cadre de la sommation interpellative et les témoignages de M. [L] [Y] et de M. [J] [T], qui déclarent, dans des termes généraux, qu’ils auraient été amenés à effectuer régulièrement des heures supplémentaires à l’instar de M. [B] [M], ne font que confirmer une réalité qui n’est pas démentie.
S’agissant des courriels produits par M. [B] [M], il n’est nullement démontré que M. [B] [M] aurait été contraint par son employeur de les envoyer en dehors de ses horaires de travail, d’autant qu’il ressort des dates de ces transmissions qu’aucune d’entre elles n’est relative au rapport de la journée échue, toutes transmettant le rapport du jour précédent voire celui d’avant.
Quant au courriel de M. [A] [R], il apparaît trop imprécis et général pour être utilement exploitable.
S’agissant, enfin, du relevé des heures supplémentaires comptabilisées par M. [B] [M], il n’est apporté aucune explication en ce qui concerne les heures supplémentaires qui ont été payées par l’employeur à hauteur de 45,73 heures, ainsi qu’il résulte des bulletins de salaire produits, en sus des 4,33 heures hebdomadaires acquittées. Il est donc manifeste que ces heures n’ont pas été déduites du décompte établi par le salarié.
D’autre part et surtout, M. [B] [M] fait mention dans ce relevé d’un dépassement horaire pour la journée du 6 juin 2017 de 46 minutes, indiquant avoir terminé sa journée à 17h16. Or, il résulte du bulletin de salaire produit pour le mois de juin 2017 que M. [B] [M] était en absence pour congé payé à cette date et qu’il ne pouvait donc effectuer les heures supplémentaires qu’il affirme avoir réalisées.
Au surplus, il est constant que M. [B] [M] a effectué des heures supplémentaires à compter du mois de juin 2016, lesquelles lui ont été réglées par son employeur et qui apparaissent sur ses bulletins de salaire et il est établi que M. [B] [M] était en mesure de pouvoir les comptabiliser puisque ce dernier produit aux débats un décompte précis de ces heures supplémentaires. Or, il n’est ni soutenu ni justifié que M. [B] [M] aurait, d’une quelconque manière, alerté son employeur sur les erreurs ou les omissions – conséquentes – qui étaient commises dans leur calcul et que celui-ci invoque aujourd’hui.
En conséquence, faute pour M. [B] [M] de produire des éléments suffisamment précis et probants de nature à démontrer qu’il a effectué les heures supplémentaires dont il sollicite le paiement, ses demandes seront rejetées et le jugement entrepris sera réformé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé :
La dissimulation d’emploi salarié prévue par le dernier alinéa de l’article L. 8221-5 du Code du travail n’est caractérisée que si l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
Compte tenu de ce qui précède M. [B] [M] ne démontre pas qu’il a effectué des heures supplémentaires non payées susceptibles de caractériser l’infraction de travail dissimulé à l’encontre de son employeur et lui causant un préjudice.
La demande indemnitaire de ce chef sera donc rejetée et le jugement déféré sera réformé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts relative au non-respect par l’employeur de son obligation légale de sécurité :
Aux termes de l’article L4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;
2° Des actions d’information et de formation ;
3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.
M. [B] [M] soutient que la réalisation de nombreuses heures au delà des 39 heures prévues par son contrat et la pression qui lui a été imposée par son employeur ajoutées au fait qu’il lui a été demandé d’effectuer de fausses visites de sécurité et que ses demandes en vue d’une ‘régularisation de sa situation’ sont restées vaines, ont eu des répercussions sur son état de santé. Il affirme que ses arrêts de travail font suite à l’augmentation de son volume de travail et à l’absence de régularisation et qu’ils ont ainsi un lien, au moins partiel, avec les faits qu’il dénonce.
M. [B] [M] a été débouté de sa demande au titre des 138 heures supplémentaires qu’il affirme avoir réalisées. Il ne démontre donc pas en quoi la réalisation des 44 heures supplémentaires qui lui ont été payées pour la période de juin 2016 à juin 2018, soit environ dix huit mois d’activité, caractériserait une charge de travail anormalement importante.
De plus, il ressort des écritures de M. [B] [M] que, dés le début de son engagement, alors qu’il était engagé dans le cadre d’un contrat à durée déterminée, il a réalisé des heures supplémentaires et il ressort de ses bulletins de salaire qu’entre juin et septembre 2016 il avait déjà effectué plus de douze heures supplémentaires outre les 39 heures de son contrat. Or il est constant que M. [B] [M] a accepté un avenant qui l’engageait dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée pour le même volume d’heures.
D’autre part, il n’est produit aucune pièce à l’appui de l’affirmation de l’intimé selon laquelle : ‘A plusieurs reprises, Monsieur [M] avait sollicité la régularisation de sa situation’.
S’agissant, par ailleurs, des pièces médicales produites, s’il est constant que M. [B] [M] a été placé en arrêt maladie à compter du 18 décembre 2017, il n’est nullement justifié que cet arrêt serait en lien avec les agissements fautifs de l’employeur, le docteur [F] [O] qui évoque, dans le certificat qu’il a émis, un ‘état anxio-dépressif réactionnel’ de son patient, ne fait que rapporter les propos de celui-ci quand il indique : ‘d’après ses dires aux conditions de son travail’.
Enfin, à l’appui de l’affirmation selon laquelle il aurait été obligé de réaliser de ‘fausses visites’ de sécurité, M. [B] [M] produit un courriel émanant de M. [U] [V], dont la qualité n’est pas précisée, et adressé à ‘[M] [B] et [P] [C]’ qui indique : ‘Il faudrait vraiment qu’on fasse ces fausse visite de sécurité assez rapidement svp’.
Cependant il est constant que cette préconisation, laquelle est contestée par la SARL Debelec, ne résulte que de cet unique courriel informel, non signé et qui n’a pas été adressé en copie à d’autres destinataires. Elle n’est corroborée par aucun autre élément du dossier et apparaît en totale contradiction avec un document intitulé ‘visite de sécurité’ produit par la SARL Debelec, qui n’est pas daté mais dont la teneur n’est pas contestée par M. [B] [M], dans lequel l’employeur rappelait l’importance de ces visites de sécurité, indiquant notamment : ‘les responsables peuvent désigner une personne pour réaliser les visites mais ils sont responsables de l’atteinte de leur objectif.’ puis : ‘il en va de notre responsabilité de s’assurer que nos agents travaillent correctement dans les règles en vigueurs. Les contrôleurs se doivent d’être impartiaux sur les visites sécurité !’.
Ainsi, non seulement la réalité de cette préconisation n’est pas établie mais il n’est surtout pas démontré en quoi celle-ci aurait été à l’origine de la pression et des répercussions sur son état de santé invoquées par M. [B] [M].
Faute pour ce dernier de démontrer l’existence d’un manquement de la SARL Debelec et d’un préjudice en résultant, le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point.
Sur le licenciement :
M. [B] [M] a été licencié suite à un avis d’inaptitude émis le 7 mai 2018 par le médecin du travail, lequel n’a pas été contesté, et qui mentionne :
‘Inapte
pas de proposition de reclassement
reste apte à travailler dans une autre entreprise
pas de 2ième visite’
M. [B] [M] ne démontre par ailleurs aucun des manquements qu’il impute à son employeur, selon lui, à l’origine de son inaptitude.
La procédure de licenciement apparaît donc régulière, reposant sur un motif réel et sérieux, et M. [B] [M] sera débouté de l’ensemble de ses demandes indemnitaires de ce chef.
Le jugement déféré sera en conséquence réformé en ce qu’il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la SARL Debelec au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, ainsi qu’au paiement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les demandes accessoires :
Il n’apparaît pas inéquitable de rejeter les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.
Enfin, les dépens de l’instance seront mis à la charge de M. [B] [M] qui succombe.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
Réforme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 septembre 2019 par le conseil de prud’hommes de Nîmes,
Statuant à nouveau,
Déclare prescrite l’action visant à voir requalifier le contrat de travail à durée déterminée,
Déboute M. [B] [M] de ses demandes au titre des heures supplémentaires,
Déboute M. [B] [M] de ses demandes au titre du travail dissimulé,
Déboute M. [B] [M] de ses demandes résultant d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité,
Déboute M. [B] [M] de ses demandes visant à voir juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [B] [M] aux dépens de l’instance.
Arrêt signé par le président et par la greffiere.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,