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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 8
ARRÊT DU 30 MARS 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 22/07885 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGLHA
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2013 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS RG n° 12/04592, infirmé partiellement par un arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 12 avril 2018, cassé et annulé partiellement par un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 25 novembre 2020.
DEMANDEUR A LA SAISINE SUR RENVOI APRES CASSATION
Monsieur [P] [H]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Annie DE SAINT RAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0919
DÉFENDEURS A LA SAISINE SUR RENVOI APRES CASSATION
S.C.P. BTSG prise en la personne de [T] [G] ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL QUALITÉ GLOBALE CONSEIL venant aux droits de la SARL FACE TO FACE FORCE
[Adresse 3]
[Localité 4]
Ni comparante, ni représentée, assignée à personne morale le 7 décembre 2022
ASSOCIATION UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST
[Adresse 2]
[Localité 5]
Ni comparante, ni représentée, assignée à personne morale le 7 décembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Nathalie FRENOY, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Nathalie FRENOY, présidente
Madame Nicolette GUILLAUME, présidente
Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée
Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU
ARRÊT :
– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Madame Nathalie FRENOY, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur [P] [H] a été engagé à compter du 1er novembre 2008 par la société Explorer dans le cadre d’une succession de contrats à durée déterminée d’usage, en qualité d’enquêteur.
A partir du mois de janvier 2011, ses bulletins de paie ont été délivrés par la société Face to Face Force, aux droits de laquelle est venue la société Qualité Globale Conseil.
La dernière mission confiée au salarié est arrivée à son terme le 7 février 2012.
Souhaitant obtenir la requalification de sa relation de travail en contrat à durée indéterminée avec la société Face to Face Force, Monsieur [H] a saisi le 23 avril 2012 le conseil de prud’hommes de Paris qui, par jugement rendu le 28 juin 2013, l’a débouté de l’ensemble de ses demandes.
Monsieur [H] a interjeté appel du jugement.
Par arrêt du 12 avril 2018, la Cour d’appel de Paris a :
-infirmé le jugement prononcé par le conseil de prud’hommes de Paris le 28 juin 2013 sauf en ce qu’il a débouté M. [H] de ses demandes de rappel de salaire et congés payés afférents et d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
statuant à nouveau
-prononcé la requalification des contrats de travail à durée déterminée entre Monsieur [H] et la société Face to Face Force, en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 3 janvier 2011 jusqu’au 9 février 2012,
-fixé la créance de Monsieur [H] au passif de la société Qualité Globale Conseil venant aux droits de la société Face to Face Force, aux sommes suivantes :
713,30 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ,
71,33 euros au titre des congés payés y afférents,
142,66 euros de l’indemnité de licenciement,
1 000 euros au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive,
713,30 euros au titre de l’indemnité de requalification,
-dit le Centre de gestion et d’Etude AGS d’Ile de France Ouest, unité déconcentrée de
l’Unedic, tenu de garantir le paiement de ces sommes dans la limite du plafond légal,
-ordonné à Maître [T] [G], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société
Qualité Globale Conseil venant aux droits de la société Face to Face Force, de remettre à Monsieur [H] un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle Emploi conformes aux dispositions de l’arrêt, dans le délai d’un mois à compter de sa notification,
-condamné Maître [T] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Qualité Globale Conseil, venant aux droits de la société Face to Face Force, à payer à Monsieur [H] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991,
-débouté les parties du surplus des demandes,
-condamner Maître [T] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Qualité Globale Conseil venant aux droits de la société Face to Face Force aux dépens de première instance et d’appel.
La Cour de cassation, par arrêt du 25 novembre 2020 (pourvoi n°19-20.097), a cassé et annulé mais seulement en ce qu’il déboute M. [H] de ses demandes de rappels de salaire sur la base d’un temps plein pour la période postérieure au 3 janvier 2011, l’arrêt rendu le 12 avril 2018, entre les parties par la cour d’appel de Paris, remis sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d’appel de Paris autrement composée, a condamné Monsieur [G], ès qualités, aux dépens et à payer à la scp Didier et Pinet la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par acte du 2 septembre 2022, Monsieur [H] a saisi la cour d’appel de Paris.
Dans ses dernières conclusions soutenues oralement à l’audience devant la cour d’appel de Paris autrement composée, Monsieur [H] demande à la cour de :
-constater que la société Face to Face Force a fait l’objet d’une transmission universelle de
patrimoine au profit de la sarl Qualité Globale Conseil (QGC) elle-même mise en liquidation judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 20 juillet 2016, désignant Maître [G] comme mandataire liquidateur,
-recevoir Monsieur [H] en son appel,
-le déclarer ,
y faisant droit,
-infirmer le jugement rendu le 28 juin 2013 par le conseil des prud’hommes de Paris,
-requalifier les contrats de travail à durée déterminée en contrats de travail à durée indéterminée du 3 janvier 2011 au 30 avril 2012,
-constater le caractère abusif de la rupture du contrat de travail de Monsieur [H],
en conséquence,
-fixer les créances de Monsieur [H] au passif de la société Qualité Globale Conseil
aux sommes suivantes :
– 14 373,65 euros à titre de rappel de salaire du 3 janvier 2011 au 30 avril 2012,
– 2 083 euros soit (2 796,74 -713,30) à titre de complément du préavis (2 mois,
1 398,37 x2 = 2 796,74 euros),
– 208,30 euros au titre des congés payés afférents,
– 836,19 euros au titre de complément de l’indemnité de licenciement,
– 685,07 euros soit (1 398,37 – 713,30) au titre de la requalification du contrat de travail,
-ordonner à la société QGC représentée par son mandataire liquidateur, Maître [G], de remettre à Monsieur [H] les documents suivants, conformément à l’arrêt à intervenir :
– un bulletin de paie correspondant aux condamnations,
– un certificat de travail comportant comme date d’entrée le 1er novembre 2008 et comme date de sortie le 29 avril 2012,
– une attestation Pôle Emploi,
– 150 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– 1 500 euros au titre de l’article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.
La déclaration d’appel ainsi que les conclusions d’appelant ont été signifiées à la scp BTSG et l’association Unédic délégation AGS CGEA d’ Ile de France Ouest par actes du 7 décembre 2022.
La société SCP BTSG en la personne de [T] [G], ès qualités de mandataire judiciaire de la sarl Qualité Globale Conseil venant aux droits de la sarl Face to Face Force, dissoute, n’a pas constitué avocat.
Il en a été de même pour le CGEA.
L’audience de plaidoiries a été fixée au 16 février 2023.
Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, ainsi qu’aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.
MOTIFS DE L’ARRET
L’arrêt de la Cour de cassation a remis les parties et l’affaire dans l’état où elles se trouvaient avant l’arrêt du 12 avril 2018 relativement aux demandes de rappels de salaire sur la base d’un temps plein pour la période postérieure au 3 janvier 2011; il en résulte que les demandes présentées au titre de la transmission universelle de patrimoine au profit de la sarl Qualité Globale Conseil (QGC), de la requalification des contrats en contrat à durée indéterminée, du caractère abusif de la rupture du lien contractuel, déjà analysées par l’arrêt du 12 avril 2018, n’entrent pas dans la saisine de la Cour de renvoi.
Sur la requalification à temps complet :
Selon l’article L3123-14 du code du travail dans sa version antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, le contrat du salarié à temps partiel doit être écrit et mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.
Il en résulte que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur.
En l’espèce, aucun contrat de travail écrit n’a été établi entre la société employeur et le salarié.
En l’absence d’éléments faisant la preuve de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue – et alors qu’à la lecture de la pièce 26 de M. [H], intitulée ‘ planning des enquêtes’, il devait pour chaque semaine travaillée ‘donner ses disponibilités’ en début de semaine, avant d’obtenir son ‘ programme’ quelques jours avant son exécution seulement, il convient de constater que la présomption de travail à temps complet n’est pas écartée, l’intéressé ne connaissant ses dates et horaires de mission que très peu de temps avant leur exécution ; la requalification du contrat à temps complet doit donc être prononcée.
Il en résulte que la demande de rappel de salaire correspondant au différentiel entre les salaires perçus et les salaires dus pour un temps plein est conforme aux droits du salarié et doit donc être accueillie pour la période contractuelle retenue, soit du 3 janvier 2011 au 9 février 2012, à savoir à hauteur de 10 914,67 €, déduction faite des rappels de salaires pour la période postérieure réclamée sans que M. [H] ait travaillé après le 9 février 2012 et ce dernier ayant bénéficié d’une indemnité compensatrice de préavis du fait de la rupture de la relation contractuelle.
En l’état de la requalification, il convient en outre d’accueillir la demande de complément d’indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, de complément d’indemnité de licenciement et de complément d’indemnité de requalification, présentées sur la base d’un salaire à temps complet, et dont les montants ne sont pas contestés.
Sur la remise de documents :
La remise d’une attestation Pôle Emploi et d’un bulletin de salaire rectificatif, conformes à la teneur du présent arrêt en l’état de la requalification à temps complet du contrat de travail, s’impose. La demande doit être accueillie.
En revanche, l’arrêt du 12 avril 2018 ayant ordonné la remise d’un certificat de travail, en l’état de la requalification en contrat à durée indéterminée prononcée, la demande présentée à nouveau à ce titre doit être rejetée.
Sur la garantie de l’AGS :
Il convient de rappeler que l’obligation du C.G.E.A, gestionnaire de l’AGS, de procéder à l’avance des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du code du travail se fera dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et L 3253-17 du code du travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d’un relevé de créance par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce dernier de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L3253-20 du code du travail.
Le présent arrêt devra être déclaré opposable à l’AGS- CGEA d’Ile de France Ouest.
Sur les intérêts:
Il convient de rappeler que le jugement d’ouverture de la procédure collective de la société Qualité Globale Conseil, venant aux droits de la société Face to Face Force a opéré arrêt des intérêts légaux et conventionnels (en vertu de l’article L. 622-28 du code de commerce).
Sur les dépens et les frais irréptibles :
La liquidation judiciaire de la société Qualité Globale Conseil devra les dépens de première instance et d’appel.
L’équité commande de confirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles et de rejeter les demandes formulées en cause d’appel, tant sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile qu’au titre des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridique, M. [H] étant bénéficiaire de l’aide juridictionnelle, d’autant qu’au surplus, la garantie du CGEA ne peut porter sur les frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Statuant dans la limite du renvoi ordonné par la Cour de cassation dans son arrêt du 25 novembre 2020,
INFIRME le jugement de première instance en ses dispositions relatives à la requalification à temps plein du contrat de travail,
REQUALIFIE la relation de travail à temps partiel ayant existé entre la société Face to Face Force, aux droits de laquelle vient la société Qualité Globale Conseil, en contrat à temps complet,
FIXE au passif de la société Qualité Globale Conseil, venant aux droits de la société Face to Face Force, la créance de M. [P] [H] à hauteur de :
– 10 914,67 € à titre de rappel de salaire du 3 janvier 2011 au 9 février 2012,
– 2 083 € à titre de complément d’indemnité compensatrice de préavis,
– 208,30 € au titre des congés payés y afférents,
– 836,19 € à titre de complément d’indemnité de licenciement,
– 685,07 € à titre de complément d’indemnité de requalification du contrat de travail,
ORDONNE la remise à M. [P] [H] par la scp BTSG prise en la personne de Me [G], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Qualité Globale Conseil, venant aux droits de la société Face to Face Force, d’une attestation Pôle Emploi et d’un bulletin de salaire rectificatif, conformes à la teneur du présent arrêt, et ce au plus tard dans le mois suivant sa mise à disposition au greffe,
RAPPELLE que le jugement d’ouverture de la procédure collective de la société Qualité Globale Conseil, venant aux droits de la société Face to Face Force, a opéré arrêt des intérêts légaux et conventionnels,
DIT la présente décision opposable au CGEA-AGS d’Ile de France Ouest,
DIT que l’AGS procédera à l’avance des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du code du travail dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L3253-19 et L3253-17 du code du travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L3253-17 et D3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d’un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce dernier de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L3253-20 du code du travail,
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,
LAISSE les dépens d’appel à la charge de la liquidation judiciaire de la société Qualité Globale Conseil, venant aux droits de la société Face to Face Force.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE