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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRÊT DU 28 OCTOBRE 2022
(n°139, 11 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 20/16872 – n° Portalis 35L7-V-B7E-CCV6O
Décision déférée à la Cour : jugement du 12 octobre 2020 – Tribunal de commerce de PARIS – 9ème chambre – RG n°2018059760
APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMEE INCIDENTE
S.A.S. CSP PARIS FASHION GROUP, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
[Adresse 3]
[Localité 1]
Immatriculée au rcs de Saint-Quentin sous le numéro 410 317 267
Représentée par Me Annette SION de l’association HOLLIER-LAROUSSE & ASSOCIÉS, avocate au barreau de PARIS, toque P 362
INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE
S.A.S. DIM FRANCE, anciennement HANES FRANCE, prise en la personne de son président, M. [V] [N], domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 2]
[Localité 4]
Immatriculée au rcs de Nanterre sous le numéro 488 727 298
Représentée par Me Yves BIZOLLON de l’AARPI BIRD & BIRD, avocat au barreau de PARIS, toque R 255
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 31 août 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Agnès MARCADE, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mme Agnès MARCADE a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente
Mme Agnès MARCADE, Conseillère
Mme Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre, désignée pour compléter la Cour
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement contradictoire rendu le 12 octobre 2020 par le tribunal de commerce de Paris.
Vu l’appel interjeté le 23 novembre 2020 par la société Csp Paris Fashion Group.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 23 juillet 2021 par la société Csp Paris Fashion Group, appelante et incidemment intimée.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 25 octobre 2021 par la société Hanes France, intimée et appelante incidente.
Vu l’ordonnance de clôture du 7 avril 2022.
SUR CE, LA COUR,
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
La société Csp Paris Fashion Group (Csp) se présente comme spécialisée dans la création, la fabrication et la commercialisation de collants, chaussettes et sous-vêtements. Elle dit être titulaire des marques « LE BOURGET » et « WELL ».
La société Hanes France, devenue Dim France en suite d’un changement de dénomination sociale, se présente comme l’un des leaders mondiaux dans le domaine des articles de lingerie, collants et sous-vêtements, qu’elle commercialise sous des marques telles que « DIM ».
La société Hanes France expose s’être aperçue dans un premier temps au cours de la saison automne/hiver 2017que la société Csp a lancé une opération marketing qu’elle estime similaire à celle qu’elle avait mise en place un an auparavant pour la saison automne/hiver 2016 pour la promotion des collants « DIM BODY TOUCH » et, dans un second temps, que cette même société a non seulement continué ses agissements fautifs malgré ses engagements à les faire cesser en suite de l’envoi de mises en demeure, mais a également, en 2018, utilisé un emballage qu’elle estime être une imitation de l’un ses conditionnements destiné à des collants « DIM Beauty Resist » ainsi qu’une PLV correspondante.
C’est dans ces circonstances que, par acte en date du 16 octobre 2018, la société Hanes France a fait assigner la société Csp devant le tribunal de commerce de Paris en concurrence déloyale et parasitaire.
Le jugement dont appel a :
– condamné la Sas Csp Paris Fashion Group à verser à la Sas Hanes France la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale et parasitaire concernant ‘DIM BODY TOUCH’ et a débouté pour le surplus,
– débouté la Sas Hanes France de ses demandes de condamnation concernant ‘DIM BEAUTY RESIST’,
– débouté la Sas Hanes France de ses demandes d’interdiction, de destruction et de publication,
– débouté la Sas Csp Paris Fashion Group de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts,
– condamné la Sas Csp Paris Fashion Group à verser à la Sas Hanes France la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
– ordonné l’exécution provisoire,
– condamné la Sas Csp Paris Fashion Group aux dépens.
La société Csp a relevé appel de ce jugement et par ses dernières conclusions, demande à la cour de :
– réformer le jugement du 12 octobre 2020 en ce qu’il :
– l’a condamnée à verser à la Sas Hanes France la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale et parasitaire concernant DIM BODY TOUCH,
– l’a condamnée à payer à la Sas Hanes France la somme de 15.000 euros eu titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,
– confirmer le jugement du 12 octobre 2020 pour le surplus,
En conséquence,
– dire et juger que l’accord conclu entre la société Hanes France et elle constitue une transaction au sens de l’article 2044 du code civil,
– dire et juger que la société Hanes France forme à son encontre des demandes ayant le même objet que celui de la transaction intervenue,
– juger la société Hanes France irrecevable à solliciter sa condamnation en application de l’article 2052 du code civil,
– subsidiairement, débouter la société Hanes France de ses demandes de condamnation au titre de la concurrence déloyale et parasitaire et de l’ensemble de ses demandes,
En tout état de cause,
– dire et juger que la société Hanes France ne justifie d’aucun préjudice, la débouter de ses demandes de dommages et intérêts,
– condamner la société Hanes France à lui verser la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions, la société Hanes France demande à la cour de :
– rejeter comme irrecevable et infondé l’appel principal de la société Csp à l’encontre du jugement du 12 décembre 2020 et en débouter celle-ci ;
– faire droit à son appel incident à l’encontre du jugement dont appel du 12 octobre 2020 ;
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
– condamné la société Csp à verser à la société Hanes France une indemnité en réparation de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale et parasitaire concernant « Dim Body Touch », le montant de l’indemnité faisant en revanche l’objet de l’appel incident ;
– débouté la société Csp de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts ;
– condamné la société Csp à verser à la société Hanes la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– infirmer le jugement entrepris pour le surplus :
Et statuant à nouveau :
– dire et juger qu’en utilisant la PLV détaillée dans les présentes écritures pour la commercialisation de collants « Le Bourget Freedom », la société Csp a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire à son préjudice et a engagé sa responsabilité délictuelle de ce chef ;
– dire et juger que la société Csp s’est engagée à cesser toute utilisation de ladite PLV « Le Bourget Freedom » litigieuse, selon des dates ;
– constater que la société Csp n’a pas respecté lesdits engagements et a engagé sa responsabilité contractuelle, subsidiairement délictuelle, de ce chef ;
– dire et juger qu’en utilisant le packaging et la PLV associée, détaillés dans les présentes conclusions pour la commercialisation de collants « Le Bourget voilance résistant », la société Csp a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire à son préjudice et a engagé sa responsabilité de ce chef ;
En conséquence,
– faire interdiction à la société Csp de détenir, d’utiliser, de fournir, d’exhiber la PLV « Le Bourget Freedom », objet de la présente instance, ou de toute PLV similaire, sous une astreinte définitive de 5 000 euros par jour de retard ou de 500 euros par infraction constatée, et ce à compter de décision à intervenir ;
– faire interdiction à la société Csp de détenir, d’utiliser, de fournir, d’exhiber la PLV et/ou le packaging « Le Bourget voilance résistant » objets de la présente instance, et de tout packaging/PLV similaires, sous astreinte de 5000 euros par jour de retard et 500 euros par infraction constatée, et ce à compter de la décision à intervenir,
– condamner la société Csp à lui verser une indemnité globale définitive de 699.100 euros en réparation de son préjudice résultant de l’ensemble des agissements de la société Csp,
– autoriser la publication du jugement à intervenir par extrait dans trois journaux ou revues de son choix aux frais intégralement avancés de la société Csp, à concurrence de 10.000 euros H.T. par insertion,
– ordonner la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir sur la page d’accueil des sites Internet aux adresses www.lebourget.com et www.cspinternational.it, en haut de page, en police de caractères times new roman, en taille 18 et ce pour une durée de 2 mois passé un délai de 8 jours à compter de la décision, et ce sous astreinte définitive de 2.000 euros par jour de retard ou omis,
– l’autoriser à faire publier le dispositif du jugement, par extraits, sur les sites internet aux adresses www.dim.fr et www.hanes.com, en police de caractères times new roman, en taille 13, accompagné d’une traduction en anglais si bon lui semble, et ce pour une durée de 3 mois à compter de la décision,
– dire et juger que la cour sera compétente pour connaître de la liquidation des astreintes prononcées, conformément aux dispositions de l’article 131-3 du code des procédures civiles d’exécution,
– dire et juger toute demande reconventionnelle de la société Csp irrecevable et à tout le moins infondée ;
– rejeter l’intégralité des demandes, fins et conclusions de la société Csp,
– condamner la société Csp à lui payer une somme de 70.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Csp aux entiers dépens de l’appel avec distraction.
La cour relève que le chef du jugement ayant débouté la société Csp de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts n’est plus critiqué par celle-ci qui n’en sollicite pas l’infirmation dans ses dernières écritures. La société Csp est donc réputée avoir abandonné cette prétention en application de l’article 954 du code de procédure civile.
Sur les actes de concurrence déloyale et parasitaire concernant l’opération promotionnelle ‘ Le Bourget Freedom’
La société Hanes France reproche à la société Csp la reprise déloyale et parasitaire de l’opération promotionnelle des collants ‘Dim Body Touch’ de la saison automne /hiver 2016. Elle fait valoir que la société Csp a mis en oeuvre une opération promotionnelle en tous points identiques à la sienne une fois celle-ci achevée, pour promouvoir ses produits ‘Le Bourget Freedom’.
La société Csp oppose à la société Hanes France une fin de non-recevoir sur le fondement de l’article 2052 du code civil estimant qu’une transaction a été conclue entre elles, la société Csp s’engageant à retirer la promotion sur le lieu de vente (PLV) litigieuse, la société Hanes France renonçant à agir en justice, ce que conteste cette dernière.
La société Csp critique le jugement déféré qui n’a pas accueilli cette fin de non-recevoir faisant valoir que le juge doit interpréter la volonté des parties et qu’elle n’aurait jamais accepté de prendre de tels engagements (cessation des actes incriminés et retrait des supports) sans contrepartie de la société Hanes France et particulièrement celle de renoncer à toute action en concurrence déloyale à son encontre.
Les dispositions de l’article 2044 du code civil dispose que ‘la transaction est un contrat par lequel les parties par des concessions réciproques terminent une contestation née ou à naître’.
Selon les éléments fournis aux débats et les explications des parties, il résulte qu’en suite de la mise en demeure de la société Hanes France en date du 29 septembre 2017 réitérée le 25 octobre suivant, la société Csp répondait le 31 octobre 2017 par l’intermédiaire de son conseil en propriété industrielle que ‘dans un souci de conciliation et afin de ne prendre aucun risque quant à une éventuelle confusion entre les gammes respectives de collants Dim Body Touch et Le Bourget Freedom’, elle s’engage à cesser tout usage de l’opération promotionnelle, de retirer tous les supports mis en circulation ‘dans les meilleurs délais’, de ‘poursuivre les meilleurs efforts pour finaliser au plus tard le 19 novembre 2017 le retrait du stop-rayon …’ et de modifier le PLV litigieux (pièce 7 Hanes). Cette correspondance précise que ‘le bon de réduction restera quant à lui inchangé car il ne porte aucunement atteinte aux droits de votre cliente …’
Le conseil de la société Hanes, par courrier du 6 novembre 2017, indique que sa cliente prend note de ces engagements, se félicite de la décision prise par la société Csp, mais que celle-ci ‘sera naturellement vigilante au strict respect par Csp des engagements précités, et en particulier que le nouveau stop-rayon actuellement en cours de réalisation par Csp ne puisse en aucun cas illustrer une poursuite du comportement que Hanes France considère illicite’ et qu’ ‘à défaut pour Csp de respecter ses engagements ou en cas de récidive et si de nouveaux actes de concurrence déloyale et parasitaire devaient avoir lieu notre cliente se réserve le droit de prendre toutes les mesures qu’elle jugera appropriées afin d’y mettre un terme définitif et obtenir réparation pour le préjudice d’ores et déjà subi’.
Par un nouvel échange de correspondances entre les parties intervenu entre le 1er février 2018 et le 13 mars 2018 (pièces 10, 11, 12 et 13 Hanes) concernant notamment le ‘bon de réduction’, la société Hanes France mettait à nouveau en demeure par lettre du 13 février 2018 la société Csp de retirer la PLV ‘Le Bourget Freedom’ y inclus la partie de mise à disposition du bon de réduction et toute PLV copiant en tout ou partie la PLV ‘Dim Body Touch’ et y ajoutait la demande de retrait d’un autre support promotionnel ‘Le Bourget Voile Résistant’. La société Csp répondait par ‘lettre officielle’ du 22 février suivant s’engager pour la gamme de collants ‘Le Bourget Freedom’ à procéder au retrait du ‘bon de réduction’ au plus tard le 31 mars 2018 dans les différents magasins concernés, remplacer ce bon de réduction par un bon de réduction ‘totalement différent’ et de stopper toute offre promotionnelle incluant un stop-rayon pour ses futures collections. Par lettre avec intitulé ‘officiel’ du 13 mars 2018, la société Hanes France ‘prend acte et accepte ces engagements qu’elle considère donc comme fermes et définitifs’ précisant que ces ‘nouveaux engagements signifient bien qu’au 31 mars 2018 au plus tard, la PLV litigieuse aura, dans son intégralité (parties bon de réduction et stop-rayon), été retirée de la totalité des magasins et définitivement abandonnée et que Csp s’engage de façon plus générale, à ne plus utiliser pour ses futures collections de collants Le Bourget Freedom aucune PLV incluant une partie stop-rayon’, ce courrier concluant ‘si Hanes France devait constater qu’au 1er avril 2018, il reste des exemplaires de la PLV litigieuse, en tout ou en partie, dans le moindre magasin, Hanes France considérera cela comme un grave violation des engagements pris par Csp et n’hésitera pas à prendre toutes les mesures nécessaires, au besoin judiciaires, pour faire pleinement respecter ces engagements, faire cesser tout trouble, sous astreinte, et obtenir réparation pour le préjudice subi (depuis l’origine). De même Hanes veillera scrupuleusement à ce qu’un bon de réduction qui serait utilisé pour les prochaines collections Le Bourget Freedom ne porte pas atteinte à ses droits’.
Il résulte de l’échange de ces correspondances que les engagements de la société Csp sont clairs et ne sont conditionnés à aucun engagement de la part de la société Hanes France. Néanmoins, il résulte des termes clairs des correspondances de la société Hanes France qu’elle ne prendra les mesures nécessaires y compris judiciaires qu’en cas de non-respect par la sociétés Csp de ses engagements, et qu’elle renonce ainsi à engager une action judiciaire en contrepartie du respect des engagements pris par la société Csp qu’elle a expressément acceptés, la société Hanes France précisant dans son dernier courrier qu’elle sollicitera réparation du préjudice subi depuis l’origine dans le cas de constatation de la présence de la PLV litigieuse ‘dans le moindre magasin’ au 1er avril 2018.
Il ressort de ce qui précède que les échanges de lettres précités comportent des concessions réciproques et constituent donc une transaction.
Cependant, la société Csp reconnaît que le 12 avril 2018, soit postérieurement au 31 mars 2018, date à laquelle elle s’était engagée à retirer la PLV ‘Le Bourget Freedom’ en ce compris le bon de réduction, les supports critiqués étaient encore présents dans deux supermarchés, la présence de ces supports étant à nouveau constatée par des préposés de la société Hanes France le 25 mai 2018. A cet égard, la société Csp ne peut faire utilement valoir qu’il s’agit d’usages résiduels et qu’il est compliqué de faire retirer les supports promotionnels de tous les Intermarchés de France, celle-ci ne pouvant ignorer ces difficultés, étant relevé que ce retrait devait initialement intervenir au plus tard au mois de novembre 2017.
Ces manquements doivent être considérés comme des manquements graves ainsi qu’il ressort des termes mêmes des engagements réciproques, la société Hanes renonçant à introduire une procédure judiciaire contre la société Csp si celle-ci respectait son obligation de retirer la PLV litigieuse de la totalité des magasins, le non-respect de cette obligation étant considéré comme une violation grave de ses engagements par la société Csp.
En conséquence, la société Csp qui n’a pas respecté les conditions de la transaction ne peut opposer à la société Hanes France l’irrecevabilité de son action.
En outre, ainsi que le fait valoir la société Hanes France, la société Csp a manqué à ses obligations contractuelles et engagé sa responsabilité de ce chef.
L’action de la société Hanes France doit donc être considérée comme recevable et la fin de non-recevoir opposée par la société Csp sera rejetée par la cour.
Le principe de la liberté du commerce implique qu’un produit qui n’est pas l’objet de droits privatifs peut être librement reproduit et commercialisé à moins que la reproduction ou l’imitation du produit ait pour objet ou pour effet de créer un risque de confusion entre les produits dans l’esprit du public, comportement déloyal constitutif d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil.
Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
La demande en concurrence déloyale et parasitaire présente un fondement délictuel et il incombe en conséquence à la société Hanes France de rapporter la preuve d’un agissement fautif de la société Csp commis à son préjudice par la création d’un risque de confusion et / ou la captation des investissements consentis pour développer un produit phare.
Les campagnes publicitaires en litige se présentent ainsi :
– la campagne Dim Body Touch de la société Hanes France
– la campagne Le BourgetFreedom de la société Csp
Il ressort de la comparaison des deux campagnes promotionnelles lancées à une saison d’écart par la société Hanes France pour les collants Dim Body Touch (automne/hiver 2016) puis par la société Csp pour les collants ‘Le Bourget Freedom’ (automne/hiver 2017) que ces campagnes ont en commun la même combinaison d’une partie du stop-rayon fixée au bord de l’étagère du rayon avec un retour orthogonal dépassant de ce rayon, dans l’angle supérieur droit un logo rectangulaire avec la marque inscrite en blanc sur fond noir, en partie centrale un grand cartouche de couleur jaune avec la même réduction inscrite en bleu, en dessous une phrase quasi identique inscrite en couleur blanche ‘pour l’achat d’un produit’ pour Dim et ‘pour l’achat d’un collant’ pour Le Bourget, en-dessous la référence au nom du produit ‘Body Touch’, d’une part, et ‘Freedom’, d’autre part inscrite au-dessus d’une flèche blanche identique dans laquelle est inscrite la mention ‘servez-vous’ renvoyant à des bons de réduction en libre service accrochés à côté du stop-rayon qui ont une présentation très proche, ayant en commun un gros cartouche jaune sur fond bleu dans lequel est inscrite une réduction identique de 1,50 euros. Figurent sur le stop rayon à gauche du cartouche de couleur jaune et de la flèche, un mannequin portant un collant et un soutien-gorge noir dans une position cambrée les bras levés.
Si la plupart des éléments figurant dans chacune des PLV apparaissent, pris isolément, usités en matière de promotion de produits de consommation courante commercialisés notamment par la grande distribution, il n’en demeure pas moins que leur combinaison à l’identique, qu’il s’agisse de la présentation, des couleurs ou des messages, est susceptible d’engendrer un risque de confusion dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne et normalement informé entre les produits en cause, ce d’autant que les deux campagnes publicitaires ont été initiées à quelques mois d’intervalle. Les quelques différences relevées pas la société Csp (position légèrement différente des mannequins ou la présence ou non de chaussures notamment) ne sont pas de nature à écarter les grandes ressemblances ci-avant relevées.
La faute de la société Csp est ainsi caractérisée et c’est à juste titre que le jugement déféré a retenu les agissements constitutifs de concurrence déloyale de la société Csp. Il sera confirmé de ce chef.
En reprenant une campagne publicitaire quasi-identique dans un temps très rapproché, la société Csp a également commis des agissements parasitaires en profitant sans bourse délier des investissement de la société Hanes France dont celle-ci justife pour la conception et la mise en place de sa campagne publicitaire par une attestation de Mme [T] [I] du 21 mars 2019, directeur financier de la société Hanes France, qui affirme que cette société a dépensé la somme de 157.002 euros au titre des frais de création et de fabrication du stop-rayon Dim Body Touch et de la promotion y afférente.
En conséquence, des agissements fautifs constitutifs de parasitisme seront également retenus par la cour et le jugement confirmé de ce chef également.
Sur les actes de concurrence déloyale et parasitaire concernant la reprise du conditionnement des collants ‘Le Bourget Voilance’ et d’une PLV de ce produit.
La société Hanes France reproche à la société Csp la reprise déloyale et parasitaire d’un conditionnement qu’elle utilise pour les collants ‘Dim Beauty Resist’ et d’une PLV correspondante.
Elle critique le jugement déféré qui n’a pas retenu d’actes fautifs considérant que la reprise par la société Csp de la PLV et du conditionnement caractérise les agissements déloyaux, le tribunal n’ayant pas pris en considération l’emballage des collants.
Selon la société Hanes France les deux packagings et PLV se présentent de la manière suivante :
Il ressort des éléments fournis au débat et des explications des parties que la société Csp a mis en place pour la saison automne/hiver 2017 une opération promotionnelle ‘Le Bourget voilance’.
Dans sa réponse du 22 février 2018 à la lettre de mise en demeure adressée par la société Hanes France concernant l’opération promotionnelle Le Bourget Freedom, la société Csp faisait remarquer que la PLV utilisée par la société Hanes France pour la promotion des collants ‘Dim Beauty Resist’ reproduisait celle qu’elle avait mise en place pour ses collants ‘Le Bourget voilance’ créant ainsi un risque de confusion inévitable entre les collants.
La société Hanes France fait valoir, sans être démentie, qu’elle a conçu et utilise les emballages et la PLV en cause depuis 2013, soit antérieurement à la société Csp dont elle partage toutefois l’opinion quant aux ressemblances relevées et le risque de confusion engendré.
Ainsi que le soutient la société Csp, les termes de son courrier du 22 février 2018 qui constituent un argument de défense en réponse à une mise en demeure, ne peuvent être considérés comme une reconnaissance ou un aveu de sa part de l’existence d’un risque de confusion entre les emballages et PLV en cause, le courrier ne visant par ailleurs que le bon de réduction.
Les ressemblances entre les emballages et les PLV consistent en un fond de couleur jaune et la présence d’un mannequin vêtu d’une robe courte de couleur noire, le haut du corps étant tronqué, l’une des jambes étant levée et le mannequin pinçant le collant pour montrer sa résistance.
Il apparaît toutefois que la jambe relevée et le pincement pour montrer la résistance du collant sont courants dans le domaine de la promotion de ce produit comme l’usage d’un fond jaune, ainsi qu’il ressort des pièces fournies au débat par la société Csp et retenues par le tribunal, cette posture et cette couleur que le consommateur a l’habitude de voir sur ce type de conditionnement et de PLV ne suffisant pas à engendrer un risque de confusion alors que les emballages et PLV en cause présentent d’autres éléments différenciant tels l’emplacement des marques ombrelles ou l’utilisation de typographies différentes pour le nom du produit, de même que l’utilisation de couleurs différentes pour les bons de réduction.
En conséquence, la combinaison de l’ensemble des éléments figurant sur les emballages et PLV font que les ressemblances ci-avant relevées ne sont pas suffisantes à caractériser un risque de confusion dans l’esprit du consommateur moyen normalement informé, et que le comportement fautif de la société Csp n’est pas établi.
Le jugement qui a rejeté les demandes de la société Hanes France à ce titre est confirmé.
Sur les mesures réparatrices
La société Hanes France critique la décision du tribunal qui lui a alloué la somme de 50.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice issu des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis par la société Csp estimant qu’au cours de la période où les agissements fautifs ont été commis, les ventes de la société Csp du collant ‘Le Bourget Freedom’ ont été de 68.400 exemplaires en 2017 contre 35.200 en 2018 alors que les ventes de collants ‘Dim Body Touch’ baissaient de 29.000 exemplaires en 2017. Elle en déduit que l’accroissement des ventes des collants ‘Le Bourget Freedom’ s’est fait au détriment des ventes des produits ‘Dim Body Touch’ et considère alors l’évaluation du préjudice qu’elle a subi doit tenir compte de l’avantage que la société Csp a pu tirer de cette campagne déloyale soit 52.152 pièces vendues.
Il convient de relever que selon une étude du groupe GFK, le marché du collant a connu une baisse importante -5% entre 2016 et 2017 et -15% entre 2017 et 2018, la société Hanes apparaissant mieux résister que ses concurrents face à ce marché baissier. Il sera également retenu que la société Csp a mis en place les PLV litigieux dans 500 magasins Intermarché en septembre 2017 et a commencé à les retirer dès le mois de novembre 2017, la présence au mois d’avril 2018 de ces PLV ne concernant que deux magasins.
Il apparaît de ce qui précède que la baisse du volume des ventes de la société Hanes est estimée à 29.000 exemplaires, et que les ventes réalisées par la société Csp grâce à la promotion litigieuse est de 52.152 pièces, étant relevé qu’en 2018 et sans promotion la société Csp a vendu 35.200 exemplaires.
La marge de 1,90 euros retenue par le tribunal n’est pas discutée,
Il résulte de ce qui précède que la société Hanes France a rencontré au cours de la saison autome/hiver 2017 une baisse de ses ventes de collants, la société Csp ayant quant à elle bénéficié concommitamment d’une hausse significative des ventes de ses produits qui ne s’est pas renouvelée la saison suivante.
Il sera alloué à la société Hanes France, au vu des éléments dont dispose la cour ci-avant rappelés, la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice issu des actes de concurrence déloyale et parsitaire, celle-ci ne justifiant pas d’un préjudice distinct en lien avec la faute contractuelle commise par la société Csp en raison du non-respect de ses engagements.
L’allocation de cette somme qui prend notamment en compte les ventes réalisées par la société Csp grâce aux agissements déloyaux est de nature à réparer l’entier préjudice de la société Hanes France qui n’est pas fondée à réclamer une indemnisation complémentaire au titre de l’avantage indu dont a bénéficié la société Csp.
Les mesures d’interdiction et de destruction sous astreinte sollicitées par la société Hanes France ne sont pas justifiées, celle-ci ne montrant pas que la société Csp continue à utiliser la PLV ‘Le Bourget Freedom’.
De même au regard de l’ancienneté des faits commis en 2017, les mesures de publication judiciaire demandées n’apparaissent pas nécessaires ni proportionnées aux faits de l’espèce.
Le jugement entrepris est ansi également confirmé en sa fixation indemnitaire et en ce qu’il a rejeté les demandes d’interdiction, de destruction et de publication.
Sur les autres demandes
Le sens de l’arrêt conduit à confirmer les dispositions du jugement relatives aux dépens et frais irrépétibles.
L’équité commande de condamner la société Csp à payer à la société Hanes France la somme de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel et de la débouter de sa demande formée à ce même titre.
La société Csp, succombant à l’appel, en supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, dans les limites de l’appel,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Rejette la fin de non-recevoir opposée par la société Csp Paris Fashion Group,
Condamne la société Csp Paris Fashion Group à payer à la société Hanes France devenue Dim France une somme 15.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, et la déboute de sa demande formée à ce même titre,
Condamne la société Csp Paris Fashion Group aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La Greffière La Conseillère, Faisant Fonction de Présidente