COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT AU FOND
DU 02 SEPTEMBRE 2022
N° 2022/184
Rôle N° RG 19/02490 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BDY4J
[C] [F]
C/
Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4]
[B] [I]
Copie exécutoire délivrée
le : 02 septembre 2022
à :
Me Audrey QUIOC, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 376)
Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 349)
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARTIGUES en date du 15 Janvier 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F17/00755.
APPELANT
Monsieur [C] [F], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Audrey QUIOC, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4] Représentée par sa directrice nationale Mme [E] [G], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Maître [B] [I] Es qualitès de liquidateur judiciaire De la SAS EMYTRANS, demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente suppléante, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre
Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre suppléante
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante
Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Juillet 2022, délibéré prorogé au 2 septembre 2022
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 septembre 2022
Signé par Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur [C] [F] a été engagé par la SAS EMYTRANS, selon contrat à durée indéterminée en date du 2 novembre 2015, en qualité de conducteur poids lourds , coeffcicient 138 M, pour une durée de travail de 151,67 heures et une rémunération mensuelle brute de 1 457,55 euros.
Les relations de travail sont régies par la convention collective nationale des transports routiers.
Une convention de rupture conventionnelle a été signée entre les deux parties le 7 octobre 2016, fixant la date de rupture du contrat au 19 novembre 2016, et prévoyant le versement d’un montant brut d’indemnité spécifique de rupture conventionnelle de 400 euros.
M.[F] a saisi le conseil de prud’hommes de Martigues le 21 septembre 2017 pour contester la rupture conventionnelle , la déclarer nulle , requalifier la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et condamner la société EMYTRANS au paiement d’une somme au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre certaines sommes au titre de régularisation de son coefficient, de reliquat d’indemnités de rupture, et des dommages-intérêts pour travail dissimulé, et un rappel d’heures supplémentaires.
Par jugement du 15 janvier 2019, le conseil de prud’hommes a débouté M.[F] de l’ensemble de ses demandes.
M.[F] a interjeté appel de cette décision suivant déclaration d’appel reçue le 12 février 2019.
Par jugement du 20 février 2019, le tribunal de commerce de Marseille a prononcé l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société EMYTRANS et désigné Maître [I] en qualité de Liquidateur.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 22 juillet 2021, M.[F] a demandé à la cour de réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
De dire la rupture conventionnelle nulle et de nul effet, par la non remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié à la signature,
De requalifier la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse
De dire que M.[F] est conducteur longue distance et qu’il convient de régulariser son coefficient à 150 M et donc son taux horaire,
De dire que l’employeur s’est rendu coupable de travail dissimulé par la non déclaration et le non paiement des heures suppélmentaires par le salarié,
et en conséquence, de fixer la créance salariale de M.[F] au passif de la société EMYTRANS aux sommes suivantes:
-13 800 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-3139,56 euros au titre de la régularisation du coefficient 150M
-1776,72 euros au titre des indemnités de congés payés
-45,99 euros au titre de l’indemnité de rupture/ indemnité de licenciement (reliquat)
-1000 euros de dommages-intérêts
-Au titre des heures supplémentaires au coefficient 150 M :
395,85 euros pour la période de mai à novembre 2016,
400 euros pour la période de novembre 2015 à avril 2016,
A titre subsidiaire, au coefficient 138M:
1163,88 euros euros pour la période de mai à novembre 2016,
1200 euros pour la période de novembre 2015 à avril 2016,
-13 800 euros de dommagesintérêts pour travail dissimulé,
Ordonner la délivrerance sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document des documents conformes et régularisés
Dire que le taux d’intérêt légal s’appliquera sur l’ensemble des sommes fixées, de la saisine du CPH au jugement d’ouverture de la liquidation de l’employeur soit jusqu’au 20 février 2019.
-3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Aux termes de ses conclusions notifiées le 23 juillet 2019, Maître [I] , liquidateur , a demandé à la cour de :
– débouter M [F] de ses demandes comme irrecevables
-confirmer le jugement déféré et débouter M.[F] de ses demandes,
Subsidiairement,
Fixer les créances de M.[F] en fonction des justificatifs produits, à défaut le débouter,
Réduire l’indemnisation sollicitée par l’appelant , qui n’est pas justifiée à hauteur de 13 800 euros,
et a rappelé les dispositions légales en matière de garantie de AGS.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 23 juillet 2019, L’UNEDIC-AGS CGEA de [Localité 4] a demandé à la cour de :
– débouter M [F] de ses demandes comme irrecevables
-confirmer le jugement déféré et débouter M.[F] de ses demandes,
Subsidiairement,
Fixer les créances de M.[F] en fonction des justificatifs produits, à défaut le débouter,
Réduire l’indemnisation sollicitée par l’appelant , qui n’est pas justifiée à hauteur de 13 800 euros,
et a rappelé les dispositions légales en matière de garantie de AGS.
1- Sur la demande d’annulation de la convention de rupture conventionnelle
La rupture conventionnelle est nulle et emporte les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse uniquement en cas de fraude ou de vice du consentement.
M.[F] invoque la nullité de la convention de rupture signée par les parties le 7 octobre 2016 au motif qu’il n’a jamais eu un exemplaire de la convention signée, de sorte qu’il n’a pas pu vérifier les montants des indemnités accordées, du règlement des congés ni pu user de son droit à rétractation.
Il résulte des pièces produites par le salarié que :
-M [F] a , par courrier du 16 septembre 2016 remis en main propre à son employeur, sollicité une rupture conventionnelle,
– qu’il a été convoqué à un entretien préalable par courrier du 21 septembre 2016 remis en main propre ,
-qu’à la suite de l’entretien tenu le 30 septembre une convention de rupture a été signée par les parties le 7 octobre 2016, fixant la date de rupture du contrat au 19 novembre 2016,
– que cette convention avait été adressée en RAR à l’inspection du travail le 25 octobre 2016, soit après la fin du délai de rétractation,
-que l’inspection du travail a confimé la réception de la demande d’homologation le 27 octobre 2016, en indiquant que, sauf décision expresse de refus de sa part, cette demande serait réputée acquise le 17 novembre 2016,
– que l’inspection du travail n’a signifié aucune décision de refus d’homologation , donnant ainsi son accord implicite à la demande.
En l’absence de nouveaux éléments, la cour confirmera la décision déférée qui a débouté le salarié de sa demande de nullité ainsi que de ses demandes de fixation de créances au titre de l’indemnité pour licenciement abusif , ce dernier ne démontrant pas l’existence de fraude ou d’un vice du consentement.
2- Sur la demande de rappel de salaire du fait du coefficient
M.[F] fait valoir qu’il a été placé sous le coefficient 138 M correspondant à un poste de conducteur courte distance, soit 151,67 heure + 17,33 heures d’équivalence.
Il expose qu’il est acquis dans le domaine routier qu’un chauffeur découchant plus de 5 nuits hors de son domicile ,conduisant des véhicules de plus de 40 tonnes et opérant 250 km dans le même sens est un conducteur longue distance, et qu’il doit par conséquent bénéficier du coefficient 150 M de la grille de la convention collective.
Il ajoute que l’accord national professionnel du 12 novembre 1998 prévoit le principe d’une garantie minimale de rémunération des conducteurs grands routiers( longue distance) liée à l’amplitude des journées de travail , et qu’un complément de rémunération est prévu si la garantie minimale calculée sur l’amplitude donne un résultat supérieur à celui des heures de temps de service.
Il produit à cet effet des relevés de carte pour les 6 derniers mois(pièces 5 et 8)en rappelant que l’amplitude est définie comme l’intervalle existant entre deux repos journaliers successifs ou un repos hebdomadaire et un repos journalier immédiatement précédent ou suivant.
Toutefois, les relevés de carte produits de mai à novembre 2016 ne permettent pas à la cour , en l’absence de commentaires précis sur ces documents, de confirmer l’analyse de M.[F], non plus que ses bulletins de salaire, alors que son contrat de travail mentionne expressément qu’il a été embauché au coefficient 138 M pour un horaire de 151,67 heures par mois, outre 17,33 heures par mois en heures d’équivalence à 25% de majoration, soit un total mensuel de 169 heures , tel que mentionné sur ses bulletins de paie.
Dès lors, la cour confirmera la décision déférée qui a débouté M.[F] de sa demande de rappel de salaire à ce titre.
3-Sur les congés payés:
M [F] expose qu’il n’a pas pris 31,5 jours de congés payés non réglés qui apparaisent sur son bulletin de salaire de novembre 2016.
Sur la base de 2,5 jours par mois, et du 1/10e du salaire brut mensuel( 2 569,55 euros) , il sollicite la somme de 3 237,57 euros – 1460,85 euros correspondant à l’indemnité compensatrice de congés payés mentionnée sur le bulletin , soit la somme de 1 776,72 euros.
Cependant, compte tenu de la mention figurant au bulletin de paie: ‘solde 20,5 jours de congés pour un total de 31,5 ‘, soit la somme de 2 106,99 euros, le montant restant à payer est de 646,14 euros.
3-Sur la demande au titre des heures supplémentaires et sur le travail dissimulé
M.[F] expose qu’il a travaillé pour le compte de la société EMYTRANS à compter du 1er novembre 2015 par contrat verbal , et qu’il n’a été déclaré par la société en tant que salarié qu’à compter du 2 novembre 2015, alorsq u’il a participé en sa qualité de salarié de la société à une formation sur la période du 26 au 30 octobre 2015( pièce 5)
Cependant, les pièces produites , qui sont les mêmes que celles fournies à l’appui de la précédente demande, et qui concernent la période de mai à novembre 2016, ne constituent pas, en l’absence d’explication sur leur présentation et le calcul retenu par le salarié , d’éléments pouvant étayer la demande et permettre d’évaluer le nombre d’heures supplémentaires effectuées.
S’agissant de la période antérieure( novembre 2015 à avril 2016), M.[F] reconnaît solliciter un montant forfaitaire, en l’absence de relevés des feuilles de route.
Dès lors, il ne fournit pas les éléments permettant à l’employeur de contester utilement ses demandes.
La cour confirmera la décision déférée qui a débouté M.[F] de sa demande d’heures supplémentaires, et, pour les mêmes motifs, de travail dissimulé.
4-Sur la demande de dommages intérêts pour absence de mutuelle
M.[F] fait valoir que l’employeur ne justifie pas avoir souscrit de mutuelle et indique avoir été placé en maladie en janvier 2016 et n’avoir pu bénéficier du remboursement de ses soins.
Il se réfère au bulletin de janvier 2016 lequel mentionne des heures d’absence pour maladie.
Toutefois, M.[F] ne justifie pas de l’absence de remboursement invoquée ni d’une manière générale d’un préjudice en résultant.
La cour confirmera dès lors la décision déférée qui a débouté M.[F] de sa demande.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud’hommes de Martigues du 15 janvier 2019,
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M.[F] aux dépens,
Dit le présent arrêt opposable au CGEA -AGS de [Localité 4] .
Le greffier Le président