Convention de rupture conventionnelle : 17 mars 2023 Cour d’appel de Fort-de-France RG n° 21/00152

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Convention de rupture conventionnelle : 17 mars 2023 Cour d’appel de Fort-de-France RG n° 21/00152

ARRET N° 23/49

R.G : N° RG 21/00152 – N° Portalis DBWA-V-B7F-CHW6

Du 17/03/2023

S.A.R.L. LOCATION AUTO MARTINIQUE

C/

[W]

COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU 17 MARS 2023

Décision déférée à la cour : jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de FORT DE FRANCE, du 18 Mai 2021, enregistrée sous le n°

APPELANTE :

S.A.R.L. LOCATION AUTO MARTINIQUE représentée par son gérant en exercice

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Isabelle OLLIVIER de la SELARL AGORALEX, avocat au barreau de MARTINIQUE

INTIMEE :

Madame [K], [B] [W]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par M. [S] [T] (Délégué syndical ouvrier)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 13 janvier 2023, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Anne FOUSSE, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

– Madame Emmanuelle TRIOL , Présidente

– Madame Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre

– Madame Anne FOUSSE , Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Rose-Colette GERMANY,

DEBATS : A l’audience publique du 13 janvier 2023,

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l’arrêt fixée au 17 mars 2023 par mise à disposition au greffe de la cour.

ARRET : Contradictoire

*************

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Madame [K] [W] a été embauchée par la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE selon contrat à durée indéterminée en date du 1er juin 2018 en qualité d’agent de parc administratif pour une rémunération mensuelle brute de 1650 euros.

Le 1er décembre 2018, l’employeur informait la salariée par message watsap qu’il avait décidé de reprendre l’organisation à zéro, la mettait en arrêt pour le mois de décembre jusqu’au 3 janvier inclus, que le salaire serait assuré pendant cet arrêt et qu’à l’issue une nouvelle organisation serait mise en place dont elle serait informée.

Par messages watsap du 4 et 5 janvier 2019, l’employeur proposait à Madame [K] [W] de signer une convention de rupture conventionnelle et une convention de rupture était signée entre les parties le 14 janvier 2019 prévoyant un délai de rétractation de 15 jours du 15 au 30 janvier 2019 et à l’issue duquel, la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE représentée par son gérant devait se charger de faire parvenir une demande d’homologation à l’inspection du travail, la rupture devant prendre effet au 28 février 2019.

Les parties n’ont pas donné suite à cette rupture conventionnelle et Madame [K] [W] a saisi la formation des référés du Conseil de Prud’hommes de Fort-de-France par requête du 15 mars 2019 pour obtenir la condamnation de l’employeur au paiement du salaire du mois de février 2019.

Par ordonnance de référé en date du 4 juillet 2019, le Conseil de Prud’hommes statuant en sa formation de référé a condamné la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE au paiement du salaire de février 2019 en deniers et quittance.

Par requête enregistrée le 18 septembre 2019, Madame [K] [W] a saisi le Conseil de Prud’hommes de Fort-de-France aux fins d’obtenir la condamnation de l’employeur au paiement des salaires de mars à septembre 2019 outre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur, des indemnités pour non respect de la procédure de licenciement, indemnité légale de licenciement, compensatrice de préavis et de congés payés afférents, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité de fin de contrat de travail des dommages et intérêts pour préjudice moral et financier, la remise sous astreinte de documents de fin de contrat de travail et bulletins de paie de décembre 2018 à septembre 2019.

Par jugement du 18 mai 2021, le Conseil de Prud’hommes de Fort-de-France a :

– dit et jugé les demandes de Madame [K] [W] recevables et bien fondées,

– dit et jugé les manquements de l’employeur suffisamment graves, empêchant la poursuite de la relation de travail,

– fait droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [K] [W],

– condamné la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE à payer les sommes suivantes ;

* 1650 euros à titre d’indemnité pour non respect de la procédure,

* 1680 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1650 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

* 1650euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 165 euros à titre de congés payés afférents au préavis,

* 1650 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

* 10780 euros à titre de rappel de salaire sur la période de mars à septembre 2019,

* 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné l’employeur à la remise sous astreinte journalière de 50 euros par document à partir du 15 ème jour dans la limite de 30 jours :

bulletins de paie rectifiés de décembre 2018 à septembre 2019,

certificat de travail,

attestation Pôle emploi,

– ordonné l’exécution provisoire de la somme de 3000 euros soit l’équivalent de 2 mois de salaires,

– condamné la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE aux entiers dépens.

La SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE a interjeté appel de ce jugement le 28 juin 2021 dans les délais impartis.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

– Aux termes de ses conclusions notifiées le 14 septembre 2022 par lettre RAR et enregistrées au rpva, la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE demande à la Cour de :

– juger recevable l’appel interjeté

– réformer le jugement rendu le 18 mai 2021 par le Conseil de Prud’hommes de Fort-de-France,

– en conséquence,

– juger n’y avoir lieu à résiliation judiciaire du contrat de travail,

– débouter purement et simplement Madame [K] [W] de l’intégralité de ses demandes,

– condamner Madame [K] [W] à rembourser la somme de 3000 euros versée au titre de l’exécution provisoire,

– condamner Madame [K] [W] à restituer le prix de revente du véhicule que lui a cédé la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE puisque le salaire de février 2019 lui a été versé avec la saisie attribution,

– condamner Madame [K] [W] à payer à la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– à titre infiniment subsidiaire,

– juger que l’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ne se cumule pas avec l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– juger que l’indemnité de licenciement ne saurait excéder 512 euros ;

– juger que l’indemnité compensatrice de congés est de 1594 euros,

– débouter Madame [K] [W] de sa demande de rappel de salaires,

– condamner Madame [K] [W] à restituer 894 euros correspondant au trop perçu de l’exécution provisoire.

L’employeur fait valoir qu’en sus de l’indemnité de rupture conventionnelle prévue par le protocole de rupture, il proposait de céder à la salariée le véhicule mis à sa disposition, en compensation du salaire de février 2019 qui ne serait donc pas réglé ; que Madame [K] [W] revenait sur son accord en exigeant le versement du salaire de février en sus de la cession du véhicule et en refusant de finaliser la procédure de rupture conventionnelle.

Il affirme que la salariée est néanmoins restée absente de son poste de travail, tout en continuant à utiliser le véhicule de l’entreprise pour son usage personnel au motif que le salaire de février 2019 ne lui était pas versé et finalement revendait le véhicule Mme [U] le 25 mars 2019, sans préciser le prix de cession du véhicule continuant de soutenir que le véhicule lui aurait été donné par l’employeur.

Il soutient encore qu’il lui demandait de ramener le véhicule par courriel du 3 avril 2019, au motif que s’il était initialement convenu que le véhicule devait être payé à la place du salaire de février, Madame [K] [W] souhaitait désormais percevoir son salaire de février.

Or à ses dires, Madame [K] [W] maintenait son refus de restituer le véhicule et refusait de reprendre le travail.

Sur la demande de résiliation judiciaire, au motif du non paiement du salaire de février 2019 et de l’absence de fourniture de travail depuis décembre 2018, l’employeur maintient que le salaire de février 2019 n’a pas été réglé en exécution d’un accord et parce que la salariée n’a pas restitué le véhicule qu’elle a d’ailleurs cédé sans justifier de son prix de revente. La SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE considère s’être acquittée du salaire de Madame [K] [W] en nature par la cession du véhicule.

Elle fait valoir qu’elle n’a jamais eu l’intention de faire le moindre cadeau à Madame [K] [W]; que si Madame [K] [W] n’entendait plus régulariser la rupture conventionnelle, il lui appartenait de restituer le véhicule et de reprendre son poste; qu’en outre si elle s’est acquittée du salaire de février 2019 après sa condamnation en référé à payer ce salaire alors que Madame [K] [W] n’a pour sa part pas restitué le véhicule, l’ayant même revendu. Elle demande à la Cour d’ordonner la restitution de son prix de vente.

Quant à l’absence de fourniture de travail depuis décembre 2018, la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE fait valoir que la salariée était d’accord avec le principe d’une rupture conventionnelle homologuée avec une date de fin de contrat de travail au 28 février 2019; que faute de signature de l’imprimé CERFA rectifié, la rupture n’a pas abouti et le contrat de travail s’est poursuivi sans que la salariée ne se soucie de reprendre le poste de travail. Elle soutient que Madame [K] [W] ne s’est pas maintenue à la disposition de l’employeur, ni n’a justifié de sa situation au cours de cette période.

Il est renvoyé aux écritures de la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE en application de l’article 455 du code de procédure civile pour un plus ample exposé des moyens au soutien de ses prétentions.

– Aux termes de ses conclusions responsives n° 3 notifiées par lettre RAR puis déposées au greffe le 19 mai 2022, Madame [K] [W] représentée par son défenseur syndical, demande à la Cour de :

– déclarer recevable mais mal fondé l’appel interjeté par la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE,

– à titre principal,

– confirmer le jugement du 18 mai 2021 rendu par le Conseil de Prud’hommes de Fort-de -France en toutes ses dispositions,

– à titre additionnel,

– liquider l’astreinte fixée par le Conseil de Prud’hommes en date du 18 mai 2021, à la somme de 4500 euros au 31 juillet 2021 (remise tardive du certificat de travail, attestation Pôle emploi et reçu pour solde de tout compte), le jugement ayant été notifié contre signature le 15 juin 2021,

– condamner la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE à la somme de 10000 euros de dommages et intérêts pour recours abusif et dilatoire sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile,

– à titre reconventionnel,

– débouter la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE purement et simplement de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions, sauf éventuellement,

– déduire la somme de 3000 euros versée au titre de l »exécution provisoire en cas de confirmation du jugement et des demandes additionnelles,

– condamner la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE à la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile formé devant la Cour d’appel de Fort-de-France,

– rejeter la demande de la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE en ce qu’elle juge que l’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ne se cumule pas avec l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– rejeter la demande de la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE en ce qu’elle juge que l’indemnité légale ne saurait excéder la somme de 512 euros alors que selon le calcul le montant s’élève à 1213,70 euros,

– rejeter la demande de la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE en ce qu’elle sollicite la restitution d’un véhicule qu’elle a cédé de bonne foi,

– laisser à l’appréciation de la Cour, la demande de la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE en ce qu’elle juge que l’indemnité de congés payés serait de 1594 euros,

Elle rappelle que c’est l’employeur qui par message watsap du 1er décembre 2018, l’invitait à rester à son domicile en raison d’une réorganisation et ce jusqu’au 3 janvier inclus; qu’au terme de cette date, il lui proposait une rupture conventionnelle mais les parties ne s’entendaient pas sur les termes de la négociation, l’employeur lui proposant de lui remettre une 208 avec le salaire de janvier 2019, ce qu’elle refusait souhaitant le salaire de février 2019 outre des indemnités de rupture spécifique, déplorant les versements tardifs de salaire, l’absence de remise de fiches de paie de décembre 2018 et janvier 2019 encore réclamées en avril 2019. Elle maintient que le véhicule lui a été donné par l’employeur.

Elle soutient que l’employeur a souhaité se débarrasser d’elle en lui imposant une rupture conventionnelle sans assistance ni entretien préalable ; que c’est de façon mensongère qu’il prétend qu’elle ne voulait pas reprendre son poste, alors que ses messages invoquait un licenciement pour mutation technologique; qu’il ne lui fournissait plus de travail depuis le 4 janvier 2019, ni ne la mettait en demeure de se présenter à son poste, ni ne lui communiquait de planning.

Il est renvoyé aux écritures de Madame [K] [W] pour le surplus des moyens développés au soutien de ses prétentions en application de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le  »’

MOTIVATION

– Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail

Il est admis que le salarié peut demander au Conseil de Prud’hommes la résiliation judiciaire de son contrat de travail lorsqu’il estime que l’employeur manque à ses obligations.

Si les manquements de l’employeur invoqués par le salarié sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, le juge prononce la rupture de celui ci au jour de la décision, sauf si le contrat de travail a déjà été rompu et que le salarié n’est plus au service de son employeur.

Il n’est pas contesté et il ressort des messages watsap entre l’employeur et la salariée, que le ler décembre 2018, cette dernière était invitée à demeurer à son domicile jusqu’au3 janvier inclus au motif d’une réorganisation. L’employeur s’engageait à régler le salaire durant cet arrêt.

Il n’est pas contesté que l’employeur proposait à l’issue de cet arrêt une rupture conventionnelle. Si les parties signaient une convention de rupture le 14 janvier 2019, prévoyant le paiement d’une indemnité égale à 1650 euros, prenant effet au 28 février 2019, il est exact qu’il ne remettait à la salariée aucun formulaire CERFA à signer, ni n’organisait d’entretien préalable à la rupture conventionnelle permettant à Madame [K] [W] d’être assistée.

En toute hypothèse, Madame [K] [W] ne donnait pas suite à cette procédure, se plaignant de ne pas percevoir le salaire de février 2019 comme convenu entre les parties, de ne pas avoir reçu ses fiches de paie de décembre 2018 et janvier 2019 (pièce 2 de l’employeur).

Il s’ensuit qu’en l’absence de rupture conventionnelle, il appartenait à la salariée de reprendre son poste de travail.

La SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE soutient alors que la salariée ne se présentait pas à son poste et ne se maintenait pas à sa disposition.

Elle ne justifie cependant pas de cette affirmation, alors qu’ayant invitée la salariée à demeurer à son domicile, elle ne l’invitait pas à reprendre son poste, ni ne la mettait en demeure de le faire.

Aucun planning ne lui était adressé par ailleurs, l’employeur insistant dans ses différents messages pour que la rupture conventionnelle soit signée, sans qu’à aucun moment il ne lui demande de reprendre son travail.

En conséquence, l’employeur échoue à démontrer que la salariée n’entendait pas reprendre le travail et qu’elle ne s’est pas maintenue à sa disposition, alors qu’il lui incombait soit de la mettre en demeure de ce faire, soit de licencier la salariée en lui remettant ensuite ses documents de fin de contrat.

L’absence de fourniture d’emploi à la salariée est donc imputable à l’employeur.

Par ailleurs La SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE prétend que la voiture a été cédée à Madame [K] [W] en contrepartie du salaire de février 2019.

Elle ne produit néanmoins aucune pièce au soutien de cette argumentation. Aucun accord sur ce point ne découle du dossier. C’est donc à tort que l’employeur refusait de lui payer le salaire de février 2019. Celle-ci saisissait le Conseil de Prud’hommes en référé par requête enregistrée le 15 mars 2019, aux fins d’obtenir le paiement de ce salaire.

Elle demandait encore la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur et des indemnités découlant de la rupture du contrat de travail. Le juge des référés faisait droit à la demande de paiement du salaire de février 2019 et la renvoyait à mieux se pourvoir au fond pour le surplus de ses demandes par ordonnance du 4 juillet 2019.

Il s’ensuit que ces deux manquements de l’employeur sont avérés à la date de la saisine par Madame [K] [W] du bureau d’orientation et de conciliation du Conseil de Prud’hommes le 16 septembre 2019, puisque le salaire de février 2019 n’était obtenu qu’ensuite d’une saisie attribution du 16 juin 2020, de sorte que Madame [K] [W] est jugée bien fondée en sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.

Enfin en l’absence de licenciement de Madame [K] [W], le contrat de travail n’a jamais été rompu et la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE n’établit pas que la salariée ne se trouvait plus à sa disposition.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur, la date étant fixée au 11 mai 2021, date du jugement de première instance.

– Sur la demande de restitution du prix de revente du véhicule cédé par la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE

En application de l’article 6 du code de procédure civile, à l’appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d’alléguer les faits propres à les fonder.

Aux termes de l’article 9 du même code, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

La SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE prétend avoir cédé à Mme [K] [W] une automobile peugeot 208, laquelle l’aurait revendu à Mme [Z] [U] ainsi qu’il résulte d’un certificat de cession entre ces deux dernières en date du 25 mars 2019.

La Cour s’estime insuffisamment renseignée par les parties sur les motifs et les conditions de la remise d’un véhicule à la salariée, ou encore la teneur de leur accord alors que la salariée prétend que le véhicule lui aurait été donné et qu’elle avait donc la possibilité de le céder à un tiers, tandis que l’employeur prétend que la remise d’un véhicule était en compensation des salaires de février et mars 2019.

En toute hypothèse aucune pièce, ne confirme un quelconque accord de la salariée sur la remise d’un véhicule en contrepartie du salaire de février et de mars 2019. Toute compensation sur salaire étant en toute hypothèse illicite.

La demande dont il n’est pas même justifié qu’elle ait été formulée en première instance est rejetée.

– La demande de remboursement des sommes versées au titre de l’exécution provisoire,

La SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE dont les manquements ont justifié la résiliation judiciaire à ses torts du contrat de travail de Madame [K] [W] est mal fondée en cette demande qui est rejetée en appel.

– Sur les demandes indemnitaires de Madame [K] [W]

l’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,

Lorsqu’elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la résiliation judiciaire ouvre droit pour le salarié aux indemnités prévues par le barème prévu à l’article L 1235-3 du code du travail mais elle n’ouvre pas droit à l’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement.

Le jugement est donc infirmé en ce qu’il condamne la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE à payer à Madame [K] [W] la somme de 1650 euros de ce chef à défaut d’avoir respecté une quelconque procédure de licenciement (convocation à un entretien préalable et notification d’une lettre de licenciement).

l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

A la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail (soit la date du jugement du Conseil de Prud’hommes en date du 18 mai 2021, Madame [K] [W] bénéficiait d’une ancienneté de 2 ans et 11 mois.

Le Conseil de Prud’hommes a condamné l’employeur au paiement d’une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à un mois de salaire soit 1650 euros.

Madame [K] [W] demande la confirmation dudit jugement sur ce point.

Nonobstant les termes de l’article L 1235-3 du code du travail,, qui prévoit une indemnité minimale de trois mois de salaire, la Cour ne peut statuer ultra petita et confirme le jugement sur ce point.

l’indemnité légale de licenciement,

Le Conseil de Prud’hommes a condamné l’employeur au paiement de la somme de 1650 euros de ce chef dans son dispositif et à la somme de 512 euros dans ses motifs.

Madame [K] [W] sollicite une somme de 1213,70 euros en appel compte tenu de l’erreur matérielle contenue dans le jugement et de son ancienneté de 2 ans et 11 mois à la date du jugement de résiliation judiciaire.

L’indemnité de licenciement est en application de l’article R 1234-2 du code du travail, de 1650 euros/4 x 2 + 1650/4 x 11/12 = 1203,12 euros.

Le jugement est infirmé sur le seul quantum et la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE condamnée à payer à Madame [K] [W] la somme susdite.

l’indemnité compensatrice de préavis et les congés y afférents

Madame [K] [W] sollicite la confirmation du jugement qui a fixé cette indemnité à la somme de 1650 euros en sus de la somme de 165 euros au titre des congés payés afférents.

La Cour ne pouvant statuer ultra petita nonobstant les termes de l’article L1234-1 du code du travail, qui prévoit un préavis de deux mois de salaire, si le salarié justifie chez l’employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans, il sera fait droit à cette demande et le jugement confirmé de ce chef.

l’indemnité de congés payés,

Madame [K] [W] bénéficiait de 18 jours de congés non pris au 31 décembre 2018 et en a pris 8 au mois de décembre 2018. Son solde de congés était donc de 10 jours ouvrables.

Le Conseil de Prud’hommes a relevé que devaient s’ajouter un cumul de 7 mois supplémentaires à la date de sa saisine du 16 septembre 2019, soit 7 x 2, 5 jours de congés =18 soit un total de 28 jours de congés.

En cause d’appel la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE soutient qu’à la date de la saisine du Conseil de Prud’hommes le reliquat de congés non pris était de 24 jours et non 28.

Il ressort du bulletin de paie du mois de décembre 2018, que le reliquat de congés s’élevait à 9,5 jours. La salariée demande la prise en compte de 7 mois de congés supplémentaires de janvier à septembre 2019 date de la saisine du Conseil de Prud’hommes , ce que l’employeur ne conteste pas.

Il reste donc du à Madame [K] [W] :

9,5 jours et 17, 5 jours = 27 jours de congés payés, soit la somme de :

1650x 27 jours ouvrables non pris /26= 1713,46 euros.

Madame [X] [F] demande la confirmation du jugement qui lui a alloué la somme de 1650 euros. Le jugement est donc confirmé sur ce point.

les demandes de rappels de salaires,

Il a été rappelé que le juge prononce la rupture du contrat de travail au jour de la décision, sauf si le contrat de travail a déjà été rompu et que le salarié n’est plus au service de son employeur; En l’espèce, la salariée est demeurée au service de l’employeur du 4 janvier 2019 et au moins jusqu’au 16 septembre 2019, date à laquelle elle a saisi le Conseil de Prud’hommes de Fort-de-France de sa demande de résiliation judiciaire. Elle ne prétend pas être demeurée au service de l’employeur au delà de cette date.

Aussi c’est à bon droit que le Conseil de Prud’hommes a alloué à Madame [K] [W] la somme de 10780 euros correspondant aux salaires non perçus de mars au 16 septembre 2019, le juge des référés ayant déjà ordonné le paiement du salaire du mois de février 2019.

la demande de liquidation de l’astreinte provisoire,

Aux termes de l’article L 131-3 du code des procédures civiles d’exécution, l’astreinte, même définitive est liquidée par le juge de l’exécution, sauf si le juge qui l’a ordonnée reste saisi de l’affaire ou s’en est expressément réservé le pouvoir.

Il est admis que l’astreinte pourra être liquidée par le juge prud’homal qui l’aura prononcée dans deux cas :

– s’il reste saisi de l’affaire,

– si par une disposition expresse de son jugement il s’est réservé le droit de la liquider par lui même.

Tel n’est pas le cas en l’espèce, puisque le Conseil de Prud’hommes a non seulement vidé sa saisine et qu’il ne s’est pas réservé le droit de liquider l’astreinte.

La demande est donc rejetée.

*la demande de dommages et intérêts pour recours abusif et dilatoire sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile,

Mme [K] [W] demande la condamnation de la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE à lui payer la somme de 10000 euros pour recours abusif et dilatoire.

Elle ne justifie pour autant pas d’un abus par l’employeur de son droit d’ester en justice et d’interjeter appel du jugement.

La demande est rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement en ce qu’il condamne la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE à payer à Mme [K] [W] la somme de 1650 euros à titre d’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ainsi que la somme de 1650 euros à titre d’indemnité légale de licenciement ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE à payer à Mme [K] [W] la somme de 1203,12 euros, à titre d’indemnité légale de licenciement,

Déboute Mme [K] [W] de sa demande d’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,

Ajoutant au jugement,

Déboute la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE de sa demande de restitution du prix de revente du véhicule cédé Mme [K] [W] à Mme [Z] [U],

Déboute la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE de sa demande de remboursement des sommes versées au titre de l’exécution provisoire,

Déboute Mme [K] [W] de sa demande de liquidation d’astreinte provisoire prononcée par le Conseil de Prud’hommes de Fort-de -France,

Déboute Mme [K] [W] de sa demande d’indemnité au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile,

Confirme le surplus,

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL LOCATION AUTO MARTINIQUE aux dépens d’appel,

Et ont signé le présent arrêt Mme Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Rose-Colette GERMANY, Greffier

La greffière La présidente

 


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