Contrat de pigiste : 19 mai 2011 Cour d’appel de Pau RG n° 09/02436

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Contrat de pigiste : 19 mai 2011 Cour d’appel de Pau RG n° 09/02436
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CP/MS

Numéro 2376/11

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 19 mai 2011

Dossier : 09/02436

Nature affaire :

Autres demandes d’un salarié protégé

Affaire :

[H] [J]

C/

SOCIÉTÉ NATIONALE DE TÉLÉVISION FRANCE 3

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 19 mai 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 17 mars 2011, devant :

Monsieur PUJO-SAUSSET, Président

Madame PAGE, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [H] [J]

[Adresse 6]

[Localité 1]

Comparant

Assisté de Me MENDIBOURE, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMÉE :

SOCIÉTÉ NATIONALE DE TÉLÉVISION FRANCE 3

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me DUPRAT, avocat au barreau de BORDEAUX

sur appel de la décision

en date du 12 JUIN 2009

rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE BAYONNE

FAITS PROCÉDURE

Monsieur [H] [J] est entré en fonction à l’Office de Radiodiffusion de Télévision Française de [Localité 5] le 1er janvier 1970 en qualité de pigiste. En janvier 1974, il intègre ANTENNE 2 puis le 1er janvier 1978 la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 en qualité de journaliste reporter d’images. Il obtiendra le 1er janvier 1984 la qualité de grand reporter et le 1er février 1985, il sera affecté au poste de grand reporter de la rédaction de [Localité 5] décentralisé à [Localité 4]. Il sera nommé le 1er novembre grand reporter palier-1 puis le 1er avril 2003, grand reporter palier-2 jusqu’à la rupture des relations conventionnelles le 21 mai 2010.

Il a saisi le Conseil des Prud’hommes le 24 juin 2008 afin d’obtenir la somme de 350 000 € pour discrimination salariale.

Le Conseil des Prud’hommes de BAYONNE, section encadrement, par jugement contradictoire du 12 juin 2009, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, des moyens et de la procédure, a considéré que Monsieur [H] [J] ne rapportait pas la preuve des éléments probants d’une discrimination à son encontre, ni la non-exécution du contrat de travail de bonne foi par l’employeur. Il a débouté les parties de leurs demandes et a condamné Monsieur [H] [J] aux dépens de l’instance.

Monsieur [H] [J] a interjeté appel de ce jugement le 6 juillet 2009.

Après avoir été convoqué à un entretien préalable au licenciement, Monsieur [H] [J] a été licencié par lettre du 21 mai 2010 pour inaptitude d’origine professionnelle.

Les parties ont comparu à l’audience par représentation de leur conseil respectif.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions développées à l’audience, Monsieur [H] [J] demande à la Cour de déclarer l’appel recevable, de réformer le jugement, de dire qu’il a subi une discrimination salariale et de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, de condamner la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 à payer les sommes de :

– 350 000 € au titre de la discrimination,

– 200 000 € au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 12 514,19 € à titre de rappel de salaire en application de l’article L1226-11 du Code du Travail et 33-3 de l’avenant audiovisuel de la convention collective des journalistes,

– 37 641 € en application de l’article 40-3 de l’avenant audiovisuel de la Convention Collective des journalistes,

– 3 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

De condamner la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Monsieur [H] [J] précise qu’il a saisi la commission arbitrale conformément à l’article L 7112-4 du Code du Travail pour fixer l’indemnité de licenciement qui doit lui être attribuée. Il fait valoir que dès son entrée à FR3 il a éprouvé des difficultés pour faire reconnaître son ancienneté dans la profession et également en 1984 pour son reclassement professionnel. Il précise qu’il s’est vu proposer un départ à la retraite en décembre 2007 après avoir subi plusieurs arrêts maladie consécutifs à des maladies professionnelles qu’il a refusé, qu’il a fait l’objet d’une première procédure d’inaptitude au travail et qu’à la suite des deux visites règlementaires les 9 et 26 octobre 2009, il n’a pas été licencié et a été payé dans le cadre d’une maladie non professionnelle au vu de l’arrêt maladie simple du 7 octobre 2009. La Société Nationale de Télévision FRANCE 3 estimant que le contrat de travail était suspendu et que les constatations du médecin du travail relatives à l’inaptitude n’avaient pas à s’appliquer, et qu’à compter du 1er janvier 2010, il a perçu une indemnité de la mutuelle de France Télévision qui sera soustraite de son salaire de mai 2010 réduisant sa rémunération à néant pour cette période sans recevoir d’indemnités journalières, que lors de la reprise le 28 février 2010, il lui a été imposé une visite de reprise et qu’aux termes de la seconde visite du 16 mars 2010, il a été déclaré inapte à son poste et apte à ‘un poste sans port de charges, sans station debout ou marche prolongée, sans conduite automobile prolongée…’

Il fait valoir que la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 avait refusé sa demande de paiement du salaire depuis le 26 octobre 2009, qu’il lui a été proposé le 30 mars 2010 au titre du reclassement, un poste de journaliste rédacteur ou multimédia qu’il a refusé au regard de l’absence d’adéquation avec sa qualification et il a été licencié pour inaptitude physique d’origine professionnelle le 21 mai 2010. Il relève que le défaut de reclassement et de licenciement à l’issue de la première procédure d’inaptitude physique, le régime de maladie simple imposé après le 7 octobre et les pressions exercées sur lui pour obtenir son départ à la retraite, constituent des man’uvres dolosives et que le licenciement du 21 mai 2010 est abusif dans la mesure où le défaut de reprise du paiement des salaires postérieurement au 26 octobre 2009 constitue une cause de rupture du contrat de travail qui s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la discrimination fondée sur l’adage ‘à travail égal salaire égal’, il indique qu’elle résulte d’un long processus amorcé dès son entrée en fonction fondée, sur d’une part, une évolution de carrière ralentie et d’autre part, sur la non-attribution de la prime BAV (Borne Audiovisuelle) représentant 110 points indiciaires qui était destinée à tous les journalistes exerçant leur fonction sur un poste excentré dont celui de [Localité 4], qu’il lui a été demandé de remplir un formulaire non prévu par l’accord collectif où il devait choisir entre l’attribution de la prime et son affectation dans le Pays Basque conformément à l’avenant 1 du 6 novembre 1986 qu’il a choisi, qu’il a sollicité à diverses reprises l’attribution de cette prime puisqu’il remplissait toutes les conditions d’attribution prévue à l’article III du protocole d’accord qui lui a toujours été refusée, au motif qu’aucun changement géographique n’était intervenu depuis son embauche et qu’ultérieurement, il lui avait été indiqué que cette prime avait été compensée par le passage au palier-2 de la fonction grand reporter en 2003 après une réunion à laquelle il n’avait pas assisté pour être en vacances et qu’en fait, il ne devait jamais percevoir cette prime ce qui constitue une inégalité flagrante en considération des autres salariés dans une situation comparable dans l’entreprise, que plus de vingt journalistes en bénéficient (Madame [S], Monsieur [T] [X]) sans avoir eu besoin de signer le document optionnel qui lui a été soumis, ce qui constitue une deuxième inégalité flagrante, inégalités pour lesquelles aucun justificatif n’est fourni. Sur le ralentissement de sa carrière, il indique que l’indice de sa rémunération n’a pas varié depuis 1997 nonobstant les dispositions de l’article 23 de la Convention Collective applicable, que Madame [S] entrée en fonction en 1990 a atteint en six années un coefficient supérieur au sien puisqu’elle obtient en 1996 le coefficient 1994 alors qu’à la même date il ne bénéficie que de 1990, qu’il n’a pas bénéficié de l’application des accords collectifs, de celui du 3 juin 1992 concernant l’évolution de carrière des journalistes qui prévoit une évolution de carrière automatique comme Messieurs [V], [D] [N], [W] [U] qu’il n’a pas bénéficié des entretiens d”évaluation annuels prévus par l’accord du 24 décembre 1990, que l’évolution de carrière s’apprécie sur la durée et non à l’instant T qui ne tient pas compte de la vitesse d’évolution, il produit l’accord d’évolution des carrières du 11 septembre 2003 qui démontre qu’il est en deçà de l’évolution de carrière de salariés comparables.

*******

La Société Nationale de Télévision FRANCE 3, intimée, par conclusions développées à l’audience demande à la Cour de confirmer le jugement sur le débouté de la discrimination syndicale, de le débouter de sa demande pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– à titre subsidiaire, faire application de l’article 1226-4 du Code du Travail,

– de condamner Monsieur [H] [J] à payer la somme de 3 000 € par application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle fait valoir que le groupe France Télévision dont fait partie France 3 a mis en place un plan d’aide aux départs à la retraite qui a été proposé à plusieurs salariés dont Monsieur [H] [J] qui voulait obtenir la somme de 200 000 €. Elle précise que la mise en ‘uvre de la prime de BAV (Borne Audiovisuelle) résulte d’un accord d’entreprise signé le 1er mars 1986, qui avait pour but de compenser un éloignement choisi par l’employeur, que Monsieur [H] [J] exerçait déjà son activité dans un poste excentré à la date de la signature de l’accord. Il devait donc choisir d’accepter d’être éventuellement muté dans les deux ans pour bénéficier de la prime, en n’acceptant pas cette éventualité, il ne pouvait pas en bénéficier en vertu des conditions énumérées à l’article III, que tous les journalistes dans sa situation ont été interrogés, qu’il n’a jamais fait l’objet de mutations et qu’elle ne lui a jamais accordé le palier-2 en compensation de cette prime comme il tente de le faire croire, qu’il y a lieu de se reporter à cet égard à la lettre du 28 juin 2004, qu’il n’a jamais fait l’objet d’une discrimination salariale qu’il ne démontre pas, car à titre d’exemple Madame [S] n’était pas dans la même situation que lui pour avoir accepté la prime BAV (Borne Audiovisuelle) de plus celle-ci n’avait pas la même ancienneté, ni le même poste et pour passer outre à la prescription quinquennale, il réclame au terme d’un calcul d’ailleurs faussé l’équivalent de la prime sous forme de dommages et intérêts.

Au niveau de son évolution de carrière, il se contente d’indiquer que son évolution aurait été ralentie. Il convient de constater qu’il n’a jamais été lésé, qu’il a toujours été le premier au niveau de la rémunération avec une promotion continue à quelque époque que ce soit, et qu’il est défaillant dans l’administration de la preuve, que les tableaux produits sont manifestement établis pour les besoins de la cause (pièces numéro 43 et 45) et ne peuvent servir de preuve dans la mesure où les données sont totalement invérifiables puisque les salariés figurant en comparaison ne sont pas nommés et ne sont pas identifiables, et que l’affirmation selon laquelle il est nécessaire pour apprécier l’évolution de prendre en considération la vitesse d’évolution qui est le ratio du coefficient sur le nombre d’années passées dans l’entreprise ne vaut pas démonstration.

Sur le licenciement, il ne peut lui être reproché de n’avoir pas licencié le salarié en octobre 2009, qu’il ne peut lui être reproché de ne pas l’avoir fait alors qu’il était déjà destinataire d’un arrêt de travail pour la période du 7 au 31 octobre 2009, que dès lors, la visite de reprise du 9 octobre était dépourvue de toute efficacité puisqu’elle était située en période de suspension du contrat de travail, que de plus ces visites ont été effectuées à l’initiative du salarié sans avertir l’employeur et ne peuvent donc être qualifiées de visites de reprise, qu’elle a à juste titre repris la procédure à compter du 1er mars 2010, qu’il ne pourrait tout au plus demander à titre de sanction que le paiement des salaires courus à compter de l’expiration du délai de un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise du travail et la date de son licenciement effectif.

La Cour se réfère expressément aux conclusions visées plus haut pour l’exposé des moyens de fait et de droit.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La Cour examinera successivement les points litigieux au vu du dossier de la procédure, des éléments des débats et des pièces régulièrement produites au dossier.

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel formalisé dans les délais et formes requis est recevable.

Au fond

Sur la discrimination salariale ou la non exécution du contrat de bonne foi née de la non attribution de la prime BAV (Borne Audiovisuelle) et d’une évolution de carrière ralentie,

En l’espèce, Monsieur [H] [J] se réfère à la règle : ‘à travail égal salaire égal’ qui impose à l’employeur d’assurer l’égalité de rémunération entre tous les salariés, pour autant que les salariés en cause soient placés dans une situation identique et effectuent un travail de valeur égale défini par l’article L3222-4 du Code du Travail de la façon suivante : ‘sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, ces deux capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilité et de charge physique ou nerveuse.’

Le salarié qui allègue une discrimination née d’une différence de rémunération n’a pas à rapporter la preuve de cette discrimination, mais doit présenter devant la juridiction des éléments, de fait laissant présumer l’existence de la discrimination alléguée. Au vu de ces éléments, il appartient à l’employeur de justifier par des raisons objectives et matériellement vérifiables la différence de rémunération entre les salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale. Il doit donc prouver que les faits laissant présumer l’existence d’une différence de traitement entre deux salariés sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Monsieur [H] [J] qui invoque une discrimination salariale fondée sur le principe ‘à travail égal, salaire égal’ ne se prévaut pas d’une différence de rémunération en sa défaveur puisqu’il accepte de reconnaître ainsi que l’a précisé le Conseil des Prud’hommes, qu’il a toujours été en situation de l’une des plus fortes rémunérations parmi les journalistes grands reporters au niveau de l’entreprise à quelque époque que ce soit. Il argue de la privation de la prime BAV (Borne Audiovisuel) et d’une carrière ralentie et fait valoir que l’évolution de carrière s’apprécie sur la durée et non à l’instant T qui ne tient pas compte de la vitesse d’évolution, il produit l’accord d’évolution des carrières du 11 septembre 2003 qui démontrerait qu’il est en deçà de l’évolution de carrière de salariés comparables.

En premier lieu, la mise en ‘uvre de la prime de BAV résulte d’un accord d’entreprise signé le 1er mars 1986, elle est destinée à améliorer et étendre la couverture du territoire national en matière de recueil d’informations télévisées et de développer une politique de détachement temporaire des journalistes confirmés. Elle suppose pour être versée aux termes de l’article III du protocole d’accord que les journalistes concernés soient placés dans une situation de détachement et acceptent les conditions suivantes :

– ‘exercer leur fonction sous l’autorité du rédacteur en chef du bureau régional d’information auquel ils sont rattachés dans la zone géographique recouvrant le poste excentré,

– être placé en résidence dans le poste excentré considéré pour une durée minimale de deux ans. Au terme de ce délai, ils peuvent demander leur retour sur leur lieu d’affectation d’origine. Si cette demande ne peut être satisfaite par la direction pour des nécessités de service, le journaliste concerné est maintenu sur place pour une nouvelle durée maximale de deux ans et bénéficie du maintien de l’indemnité,

– au terme des deux ans initiaux, la société peut à tout moment ré-affecter l’intéressé sur son lieu d’origine moyennant un préavis de trois mois, préavis qui peut être négocié en fonction des obligations scolaires des enfants.’

L’article IV de ce même accord mentionne : ‘les journalistes qui exercent déjà leur activité dans les postes excentrés à la date de la signature de l’accord doivent accepter, pour bénéficier de cette indemnité les conditions énumérées à l’article III.’

Au terme de la procédure d’option telle que prévue par le protocole pour les journalistes exerçant leur fonction dans un poste excentré, Monsieur [H] [J] a renoncé au bénéfice du protocole et du versement de la prime et optera pour l’option B entendant conserver son affectation ainsi qu’il en est justifié aux débats et il est mal fondé à prétendre qu’il s’agirait d’une mesure discriminatoire puisque cette option a été offerte à tous ceux qui se trouvaient dans cette position et se trouvait contenue dans l’article IV de l’accord.

Le protocole d’accord du 3 mars 1995 relatif à cette prime précise que les journalistes actuellement régis par le protocole de 1986 lui demeurent soumis pendant toute la durée de leur maintien dans le BAV dans lequel ils se trouvent affectés, en cas d’affectation dans un autre BAV le présent protocole se substituera au protocole du 1er mars 1986. Madame [S] affectée sur [Localité 7] en 1990, puis [Localité 4] en 1992, à laquelle il se compare, sera soumise à la procédure d’option en 1995 de la même façon que lui et optera pour l’option A aux termes de laquelle elle s’engage d’ores et déjà à demeurer au minimum deux ans dans son poste et accepter les conditions d’affectation et de résidence prévues à l’article III, ce que l’appelant n’a jamais fait.

L’accord d’harmonisation des BAV et locales excentrées de 2002 prévoit d’intégrer dans le salaire la prime versée qui a été fixée à 170 points d’indice pour les journalistes la percevant depuis au moins trois ans. Il y est précisé que les cas particuliers qui subsisteraient seront recensés par la direction afin d’y apporter une solution s’inscrivant dans le cadre des dits principes.

Il est constant que le versement de cette prime correspondait à une politique de détachement temporaire, la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 entendant exercer la maîtrise de la ré-affectation sur le bureau d’origine que Monsieur [H] [J] n’a jamais accepté de telle sorte que le non-versement de la prime BAV est justifiée.

En deuxième lieu, l’accord d’évolution des carrières de 2003 ne saurait être invoqué pour analyser la période antérieure, il est conclu pour l’avenir, de plus l’affirmation selon laquelle pour apprécier l’évolution de la carrière il conviendrait de prendre en considération la vitesse d’évolution qui est le ratio du coefficient sur le nombre d’années passées dans l’entreprise, que Monsieur [H] [J] ne calcule d’ailleurs pas, ne vaut pas démonstration car les politiques d’évolution de carrière ont nécessairement connu des modifications significatives lors de la signature des différents protocoles qui ont pu, à un moment donné, entraîner des accélérations.

Par ailleurs, les deux tableaux comparatifs qu’il produit ne démontrent aucune évolution de carrière ralentie, en effet, le premier qui compare sa carrière avec Madame [L] [Y] et Monsieur [Z] [F], démontre que ce dernier a acquis la qualité de grand reporter après quinze ans d’ancienneté alors que Madame [L] [Y] a acquis cette qualité après vingt ans d’ancienneté et Monsieur [Z] [F] après vingt-quatre ans d’ancienneté, qu’il a obtenu la qualification de grand reporter paliers-1 et 2 avant eux-même si leur passage au palier-1 a été plus rapide pour eux que pour lui dans la mesure où l’employeur a effectué un rattrapage et l’on ignore qu’elle a été leur formation initiale, les formations intermédiaires, leur mobilité.

Le deuxième tableau compare l’évolution de son coefficient avec celui de Madame [S] de 1995 à 1997. En 1995, il bénéficie d’un indice de 1900, Madame [S] 1959, en 1997 il bénéficie d’un indice de 1990, Madame [S] 1994, cette différence minime de 59 puis 4 points d’indice s’explique par le fait que cette dernière a opté pour la prime BAV (Borne Audiovisuelle) et bénéficie donc de 170 points d’indice supplémentaires, qu’il a bénéficié en outre comme tous les autres salariés de l’augmentation du niveau de rémunération avec la réévaluation régulière des point d’indice et ne peut pas prétendre que la rémunération n’a jamais évolué.

Le protocole d’accord du 3 juin 1992 prévoit l’organisation d’un entretien annuel et crée des paliers pour les journalistes et grands reporters : pour accéder au palier, les journalistes devront suivre une formation sous forme de stage qui en précise le détail et un journaliste ne pourra se voir opposer qu’un refus d’inscription à un même stage. Monsieur [H] [J] prétend avoir été privé des évaluations sauf en 2008, or la lettre du Directeur Régional à l’ensemble des confrères du 14 novembre 1992, indique que les entretiens qui doivent permettre de gérer l’évolution de carrière auront lieu avec les journalistes qui le souhaitent et l’accord d’évolution des carrières de 2003 prévoit que tout journaliste n’ayant pas bénéficié de l’entretien individuel annuel brut peut saisir le service des ressources humaines de la rédaction concernée ou le Directeur des Ressources Humaines de la société ce que Monsieur [H] [J] n’a fait à aucun moment, il ne prétend pas avoir postulé à des stages qui lui auraient été refusés.

Il y a donc lieu de constater que Monsieur [H] [J] n’étaye pas ses demandes qui seront rejetées.

Sur la rupture du contrat de travail :

Il résulte des éléments du débat que Monsieur [H] [J] a fait l’objet d’une visite de pré-reprise à sa demande le 28 septembre 2009, puis d’une visite de reprise le 9 octobre 2009 et d’une deuxième visite le 26 octobre 2009 concluant à l’inaptitude de Monsieur [H] [J] au poste précédemment occupé, et une aptitude à un poste sédentaire, activités de bureau, administratif, montage vidéo, que la maladie pour laquelle il a été en arrêt de travail depuis le mois de mai 2008, a été reconnue au titre du tableau 57 épicondylite de la législation professionnelle le 24 juillet 2008, qu’il a été déclaré consolidé par le médecin traitant le 7 octobre 2009, qui a délivré à Monsieur [H] [J] le même jour, un arrêt maladie simple jusqu’au 31 octobre qui a été renouvelé jusqu’au 28 février 2010.

La Société Nationale de Télévision FRANCE 3 ne peut pas avoir ignoré la procédure d’inaptitude des deux visites des 9 et 26 octobre 2009, puisque le médecin du travail dans la relation écrite de la deuxième visite nommément visée du 26 octobre 2009, indique qu’une étude de poste a été faite le 22 octobre 2009 avec Monsieur [B], responsable d’antenne et un journaliste reporter d’image, qui lui a présenté le matériel utilisé, que la fiche d’aptitude a été faxée à la Direction des Ressources Humaines à [Localité 5] et qu’il a eu un contact téléphonique avec Monsieur [P] qui l’a appelé pour faire le point.

Mais, la Société Nationale de Télévision FRANCE 3, contrairement à ce que soutient Monsieur [H] [J], n’avait pas l’obligation de le licencier, la seule obligation qui lui est faite résulte de l’article L. 1226 – 11 du Code du Travail qui dispose ‘lorsque à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n’est pas reclassé dans l’entreprise ou s’il n’est pas licencié, l’employeur lui verse dès l’expiration de ce délai le salaire correspondant à l’emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.’

Concomitamment à la déclaration d’inaptitude, Monsieur [H] [J] a justifié d’un arrêt maladie simple dès le 7 octobre 2009, or, l’envoi par le salarié d’un nouvel arrêt de travail ne peut pas avoir pour conséquence juridique d’ouvrir une nouvelle période de suspension du contrat de travail et de tenir en échec le régime juridique applicable à l’inaptitude, le contrat n’était donc pas suspendu comme le soutient la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 qui aurait dû reprendre le versement des salaires.

Ce n’est qu’à l’issue des prolongations d’arrêt de travail jusqu’au 28 février 2010, que Monsieur [H] [J] avertit par lettre l’employeur, qu’il se présentera sur son lieu de travail le 1er mars 2010 et la procédure d’inaptitude sera reprise avec double visite les 1er et 16 mars 2010, avis d’inaptitude à son poste de travail, aptitude à un poste sédentaire, recherches de reclassement, consultation des délégués du personnel et comité d’entreprise.

La lettre de licenciement qui été adressée le 21 mai 2010 pour inaptitude n’a pas fait l’objet d’observations et Monsieur [H] [J] ne peut pas se prévaloir du défaut de licenciement à l’issue de la première procédure d’inaptitude pour conclure au caractère abusif de la seconde procédure puisqu’il n’y a pas d’obligation de licencier, l’argument sera rejeté.

Par ailleurs, l’argument selon lequel la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 aurait profité de ce temps pour faire des pressions sur lui n’est pas démontré, le seul envoi de propositions de mise à la retraite alors qu’il a déjà atteint ses quarante ans de cotisations dans l’entreprise, ne saurait en faire la preuve alors même que des plans de pré-retraites ont été mis en place, que des discussions ont déjà eu lieu et qu’aucune pression n’est démontrée.

Enfin, Monsieur [H] [J] a été licencié pour inaptitude sans qu’il ait pris acte de la rupture des relations contractuelles par l’employeur du fait de la non-reprise du paiement des salaires. Il n’a demandé que l’application de l’article 33-3 de l’avenant relatif à la maladie par lettre du 13 mars 2010 soit le paiement des compléments de salaires dûs aux termes de la convention collective déduction faite des indemnités journalières.

Monsieur [H] [J] n’est donc pas fondé à se prévaloir du non-paiement des salaires pour voir requalifier le licenciement en licenciement abusif, dès lors que le licenciement pour inaptitude était déjà intervenu et que cette demande ne résulte que des conclusions responsives déposées le 3 février 2011 postérieurement au licenciement.

Sur le rappel de salaire :

Il convient de faire droit ainsi, qu’il a été précédemment exposé, à la demande de paiement des salaires relatifs à la période postérieure à la première procédure d’inaptitude d’octobre 2009 à février 2010 et de condamner la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 à payer la somme de 12 514,19 € à titre de rappel de salaire.

Sur l’indemnité conventionnelle de l’article 40.3 de la Convention Collective :

Cet article précise que lorsque le licenciement n’est pas prononcé pour motif disciplinaire, tout journaliste licencié percevra outre l’indemnité calculée conformément à l’article 761.5 du Code du Travail une indemnité complémentaire ainsi calculée à 7/12 de sa rémunération annuelle s’il a plus de quinze ans d’ancienneté, et l’article 761.5 devenu L 7112-4 pour les salariés ayant plus de quinze ans d’ancienneté prévoit ‘qu’une commission arbitrale est saisie pour déterminer l’indemnité due, … la décision de la commission arbitrale est obligatoire et ne peut être frappée d’appel.’

Monsieur [H] [J] précise avoir saisi la commission arbitrale qui doit statuer sur le montant de l’indemnité légale de l’article L7112-4 spécifique aux journalistes.

La Société Nationale de Télévision FRANCE 3 a d’ores et déjà versé, comme elle le précise dans la lettre de licenciement au titre de l’indemnité de licenciement, la somme de 129 057,12 € ‘soit le double de l’indemnité légale de licenciement’ par application de l’article L 1234-9, celle-ci étant plus favorable que l’indemnité conventionnelle de l’article L 7112-3.

En fait, la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 a réglé l’indemnité de licenciement sur la base de l’article L 1226-14 du Code du Travail qui précise que la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au 2ème alinéa de l’article L 1226-12, (inaptitude d’origine professionnelle assortie d’une impossibilité de reclassement ou refus du salarié du reclassement proposé dûment justifiés) ouvre droit pour le salarié à une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité prévue à l’article L 1234-5 (préavis) ainsi qu’à une indemnité spéciale de licenciement qui sauf dispositions conventionnelles plus favorables est égale au double de l’indemnité prévue par l’article L 1234-9.

Monsieur [H] [J] peut donc demander outre l’indemnité légale qui sera définitivement arrêtée par la commission arbitrale et sur laquelle la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 a versé la somme de 129 057,12 € le paiement de l’indemnité complémentaire calculée sur la base de 7/12 de sa rémunération annuelle dans la mesure où l’article 40 -3 n’exclue que les licenciements disciplinaires soit la somme de 37 641 € telle que résultant de la division 7/12 du total des relevés de salaires et primes bruts figurant sur l’attestation ASSEDIC.

Sur l’article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens

Chacune des parties succombant pour partie, il est équitable de ne pas faire application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Chacune des parties conservera ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en matière sociale et en dernier ressort,

Déclare l’appel recevable.

Confirme le jugement .

Y ajoutant,

Dit que le licenciement pour inaptitude est fondé,

Condamne la Société Nationale de Télévision FRANCE 3 à payer à Monsieur [H] [J] les sommes de :

– 12 514,19 € à titre de rappel de salaire pour la période d’octobre 2009 à février 2010,

– 37 641 € au titre de l’indemnité complémentaire de l’article 40-3 de la convention collective,

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Dit que chacune des parties conservera ses propres dépens.

Arrêt signé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, et par Madame HAUGUEL, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LE PRÉSIDENT,

 


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