Clause de non-sollicitation : 15 septembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/17644

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Clause de non-sollicitation : 15 septembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/17644
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5

ARRÊT AU FOND

DU 15 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/

MS

Rôle N° RG 19/17644 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFFSH

[X] [J]

C/

SA COMASUD

Copie exécutoire délivrée

le : 15/09/22

à :

– Me Sandrine COHEN-SCALI, avocat au barreau de GRASSE

– Me Denis FERRE, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 11 Octobre 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/00724.

APPELANT

Monsieur [X] [J], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Sandrine COHEN-SCALI, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

SA COMASUD, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Denis FERRE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Madame Mariane ALVARADE, Conseiller

Monsieur Antoine LEPERCHEY, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Karen VANNUCCI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2022.

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Karen VANNUCCI, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [X] [J] a été engagé par la société Comasud, exploitant sous l’enseigne Weldom, suivant un contrat de travail à durée indéterminée à effet du 14 septembre 2015, en qualité de vendeur, coefficient 170, niveau II, échelon A. Il était affecté au rayon jardinerie et percevait en dernier lieu un salaire brut de 1654,64 € par mois.

A compter du 13 novembre 2012, M. [J] a été reconnu travailleur handicapé.

Le 15 juin 2017, le médecin du travail a déclaré M. [J] apte en précisant : « pas de mouvements répétitifs du poignet. À revoir étude de poste ».

Le salarié été en arrêt de travail à compter du 4 octobre 2017.

Au terme de deux visites les 13 novembre 2017 et 27 novembre 2017, il a été déclaré :

« Inapte définitif à son poste. Suite à l’analyse du poste du travail du 16 novembre 2017 et

suite aux échanges avec l’employeur et le salarié. Restrictions médicales pour le

reclassement dans l’entreprise : éviter le port de charges lourdes, les mouvements répétitifs

du poignet droit. Le salarié peut bénéficier d’une formation compatible avec ses capacités

susmentionnées ‘ »

Le 12 mars 2018 M. [J] a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement suite à son refus des postes proposés et à l’impossibilité de lui proposer d’autres postes compatibles avec les restrictions du médecin du travail.

Saisi par M. [J], le conseil de prud’hommes de Nice par jugement du 11 octobre 2019 l’a débouté de toutes ses demandes et l’a condamné aux dépens.

M. [J] a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et délais qui ne sont pas critiquées.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 7 février 2022, M. [J] sollicite l’infirmation du jugement et demande principalement, après avoir écarté des débats la pièce adverse n° 24 non conforme aux prescriptions de l’article 202 du code de procédure civile de condamner l’employeur à payer au salarié les sommes de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et de 4.963,92 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 496,39 € au titre des congés payés y afférents.

Le salarié expose avoir travaillé sans que son poste de travail ne soit aménagé sur la période continue du 15 juin 2017 au 4 octobre 2017, date de son arrêt de travail

Il fait valoir :

– que, la société Comasud, sur laquelle pèse la charge de la preuve, ne justifie pas avoir pris toutes les mesures de prévention et d’action prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail alors que le salarié avait été déclaré apte avec des réserves,

– qu’il été discriminé en raison de son handicap, la société ayant refusé d’adapter son poste alors qu’il est travailleur handicapé, que le licenciement est nul car discriminatoire,

– qu’il n’a eu que deux semaines de congés payés du 7 novembre 2016 au 20 novembre 2016 alors qu’il aurait dû bénéficier de 12 jours de congés payés du 1er mai au 31 octobre, que ce soit en 2016 ou en 2017,

– que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse car la société a manqué à son obligation de reclassement tant à l’intérieur de l’entreprise que du groupe.

En conséquence, il demande de condamner la société Comasud à lui payer les sommes de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, de 4.963,92 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 496,39 € au titre des congés payés y afférents.

Subsidiairement, il demande de dire et juger que la société Comasud a manqué à son obligation de reclassement et qu’elle a manqué à son obligation de sécurité et de condamner la société au paiement de la somme de 6.618,56 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre les mêmes indemnités de préavis et congés payés y afférents,

En tout état de cause, il demande de condamner la société Comasud au paiement des sommes suivantes :

20.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité

5.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions d’ordre public relatives aux congés payés.

5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 2021, la société Comasud réplique :

– que le salarié est champion mondial de jeux de sport en ligne ce qui sollicite les mouvements des poignets,

– que son handicap est en lien avec un diabète et non avec une pathologie du poignet,

– que la médecine du travail avait prohibé les mouvements répétitifs du poignet et non le port de charges lourdes, que de toute façon, l’employeur a pris des mesures pour éviter ce port de charges lourdes comme en atteste Mme [G].

– que le salarié a été licencié en raison de son inaptitude et de l’impossibilité de le reclasser tant au sein de l’entreprise que du groupe, tout poste dans l’entreprise supposant des manutentions et le salarié ayant refusé trois propositions sérieuses de reclassement.

En conséquence, la société Comasud, demande de confirmer le jugement, de débouter M. [J] de ses demandes et de le condamner au paiement d’une somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail

1- sur la demande tendant à voir dire et juger que la société Comasud a manqué à son obligation de sécurité

Il est soutenu par le salarié appelant qu’en dépit de l’avis du médecin du travail, M. [J] était contraint de continuer à solliciter en permanence son poignet droit dès lors que son poste de travail de vendeur n’était pas aménagé. Il est précisé que l’essence même des fonctions de vendeur rayon jardinerie est la manipulation de charges lourdes : par exemple, les sacs de terre étaient livrés dans la cour du magasin, «puis acheminées à bras par les vendeurs», les transpalettes ne pouvant rentrer dans le magasin.

Il est souligné que la société est incapable de produire aux débats le moindre échange de mails avec les responsables de M. [J] les alertant de la nécessité de voir limiter pour lui les mouvements répétitifs de son poignet droit.

Dans son avis d’aptitude avec des réserves émis le 15 juin 2017 le médecin du travail n’a pas mentionné l’interdiction du port de charges lourdes mais seulement la non sollicitation du poignet par des mouvements répétititifs.

En ce qui concerne ces réserves, Mme [Z] [G] responsable de rayon déclare :

« [X] était un collaborateur de mon équipe ; lorsqu’il s’est blessé au poignet droit, il portait une orthèse, je lui ai demandé de solliciter ses collègues en cas de port de charge nécessitant les deux bras. J’ai modifié au maximum ses fonctions en fonction de son « handicap » en le positionnant sur des tâches ne sollicitant pas son poignet (conseil clients, facing de produits légers, soin des plantes) ‘ »

Les dispositions de l’article 202 ne sont pas prescrites à titre de nullité et cette attestation précise ne peut être considérée comme étant faite par complaisance au seul motif qu’elle émane d’une personne ayant des liens avec l’employeur, sans élément objectif de nature à pouvoir suspecter sa sincérité.

Ainsi, c’est sans être utilement contredit que l’employeur justifie avoir pris des mesures pour éviter au salarié des mouvements répétititifs du poignet après le premier avis d’aptitude avec réserves émis par la médecine du travail.

La décision entreprise sera confirmée en ce qu’elle déboute M. [J] de sa demande tendant à voir dire et juger que la société Comasud a manqué à son obligation de sécurité.

Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail

1- sur la demande de nullité du licenciement pour discrimination en raison du handicap

Il est soutenu que le salarié a été examiné le 15 juin 2017 par la médecine du travail, qui l’a déclaré apte avec des réserves en proscrivant les mouvements répétitifs du poignet, que son poste de travail n’a cependant jamais été aménagé ce qui a conduit à son arrêt de travail, qu’en refusant d’aménager son poste son employeur l’a discriminé.

Les éléments médicaux figurant au dossier font apparaître que M. [J], reconnu travailleur handicapé en 2012 présentait « une impotence fonctionnelle sur ténosynovite du poignet droit chez patient diabétique.»

Aucun élément n’est produit au dossier laissant supposer une discrimination de la part de l’employeur en lien avec ce handicap, le salarié procédant par voie d’affirmation sans fournir aucun élément matériel au soutien de celle-ci.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il déboute M. [J] de sa demande en nullité du licenciement

2- sur la demande tendant à voir dire et juger que la société Comasud a manqué à son obligation de sécurité à l’origine de l’inaptitude

Il est constant qu’un licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsque l’inaptitude est consécutive à un manquement préalable de l’employeur à son obligation de sécurité (Soc., 3 mai 2018, pourvoi n° 16-26.306, P + B et Soc., 3 mai 2018, pourvoi n° 17-10.306, P + B).

En l’espèce, il vient d’ être démontré que l’employeur n’a pas manqué à son obligation de sécurité d’où il suit que la demande n’est pas fondée.

3- sur la demande tendant à voir dire et juger que la société Comasud a manqué à son obligation de reclassement

Il est soutenu que la société Comasud n’a entrepris en interne aucune démarche sérieuse au sein de l’entreprise en vue de parvenir au reclassement du salarié, qu’en tous cas il n’est pas justifié des démarches accomplies et qu’aucune tentative de transformation ou d’aménagement du poste de travail de l’intéressé n’a été effectuée.

En externe, il est soutenu que la société exploite son activité sous l’enseigne «Weldom» laquelle appartient au groupe Adeo, composé, entre autres, des sociétés «Leroy Merlin» et «Bricoman», qui regroupe 33 entreprises en France et plus de 110.000 collaborateurs ; et que, pourtant, dans la pièces adverse 12 intitulée « recherches de reclassement » il ne figure aucune correspondance échangée avec les entreprises «Leroy Merlin» et «Bricoman».

Il est fait état par l’appelant de la déloyauté de la société dans l’envoi tardif de trois propositions de reclassement faites après l’entretien préalable au licenciement au moment où le salarié a fait valoir ses droits. Il est également fait état de la déloyauté des réponses des entreprises du groupe qui ont été interrogées.

La cour constate que la société a proposé sans enfreindre la procédure de licenciement à M. [J] :

– un poste d’assistant administratif au sein de la société SEPR au [Localité 5]

– un poste de responsable administratif site au sein de la société Point P à [Localité 4]

– un poste d’assistant tarif au sein de la société Point P à [Localité 3]

Or, M. [J] a refusé ces propositions par courrier du 16 février 2017 au motif qu’elles n’étaient pas faites de bonne foi, ce qui n’est nullement établi ni en outre pertinent.

La société Comasud justifie de ce qu’aucun poste correspondant aux restrictions du salarié, eu égard à leur nature et leur ampleur compte tenu de ses capacités n’était disponible dans l’entreprise au moment du licenciement.

En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu’il déboute M. [J] de sa demande tendant à voir dire et juger que la société Comasud a manqué à son obligation de reclassement.

4- sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect du droit à congés payés

Pendant l’arrêt de travail, l’absence du salarié ne lui permet pas d’acquérir des droits à congés payés, sauf si des dispositions conventionnelles le prévoient. En 2016, et jusqu’au 4 octobre 2017 le salarié a bénéficié de congés payés en sorte que sa demande n’est pas fondée.

En définitive le jugement déféré sera entièrement confirmé.

Sur les dépens et les frais non-répétibles

Succombant, l’appelant supportera les dépens.

L’équité commande de faire application au bénéfice de l’intimée des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne M. [J] à payer à la société Comasud une somme de 1.800 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [J] de sa demande d’indemnité de procédure en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [J] aux dépens de la procédure d’appel,

Rejette toute autre demande.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

 


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