COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-1
ARRÊT AU FOND
DU 28 FEVRIER 2023
N° 2023/ 83
Rôle N° RG 20/12867 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BGVWV
SCI LES PALMIERS
C/
[C] [S]
[R] [W]
[L] [Z]
[P] [F]
[N] [I]
S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE
Syndic. de copro. [Adresse 6]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Rachel SARAGA-BROSSAT
Me Olivier PEISSE
Me Paul GUEDJ
Me Philippe KLEIN
Me Frédéric PEYSSON
Me Sophie MARCHESE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULON en date du 09 Novembre 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° .
APPELANTE
SCI LES PALMIERS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis,
[Adresse 6]
représentée par Me Rachel SARAGA-BROSSAT de la SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
et ayant Me Alexis KIEFFER de l’ASSOCIATION KIEFFER LECOLIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON, pour avocat plaidant
INTIMES
Madame [C] [S]
née le 11 Septembre 1971 à [Localité 9] (13), demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Olivier PEISSE, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Violaine PETRO, avocat au barreau de TOULON
Monsieur [R] [W]
né le 09 Septembre 1963 à [Localité 11] de la Réunion (974), demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Olivier PEISSE, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Violaine PETRO, avocat au barreau de TOULON
Maître [L] [Z],
demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et ayant Me Jean-christophe GARRY de la SELARL GARRY ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON, pour avocat plaidant substitué par Me Maria DA SILVA, avocat au barreau de TOULON
Maître Bernard TESSEIRE
né le 30 mai 1947 à [Localité 7]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON KLEIN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et ayant Me Nicolas LARRAT de la SCP LARRAT, avocat au barreau de TOULOUSE, pour avocat plaidant
Maître [N] [I]
né le 03 mars 1974 à [Localité 12]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON KLEIN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, Me Nicolas LARRAT de la SCP LARRAT, avocat au barreau de TOULOUSE
LE CREDIT FONCIER DE FRANCE pris en la personne de son représentant légal demeurant et domicilié de droit audit siège.
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Frédéric PEYSSON, avocat au barreau de TOULON
Syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 6] pris en la personne de son administrateur judiciaire en exercice la SELARL [T] ET ASSOCIES représentée par Me [K] [T], demeurant [Adresse 4]
demeurant [Adresse 6]
représentée par Me Sophie MARCHESE de la SCP IMAVOCATS, avocat au barreau de TOULON
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 23 Janvier 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Monsieur Olivier BRUE, Président
Mme Danielle DEMONT, Conseiller
Madame Louise DE BECHILLON, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Février 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Février 2023,
Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Le 10 juin 1986 la SCI les Palmiers a acquis par adjudication, aux termes d’un jugement sur saisie immobilière rendu par le Tribunal de Grande Instance de Toulon une maison d’habitation élevée d’un étage sur sous-sol, ses dépendances et le terrain attenant, sis [Adresse 6].
Par acte authentique portant règlement de copropriété et état descriptif de division du 24 janvier 2008, la SCI a placé l’immeuble sous le régime de la copropriété et l’a divisé en 11 lots.
Le règlement de copropriété et l’état descriptif de division ont été modifiés par acte authentique du 16 décembre 2010.
Par acte authentique dressé le 21 décembre 2010 en l’étude de Me [L] [Z], avec l’assistance de Me [P] [F], la SCI les Palmiers a vendu à Mme [S] et M. [R] [W] ( les consorts [S]-Lebian ) divers lots, dont le n° 3 désigné à l’acte comme un appartement sis au rez-de-chaussée de l’immeuble, au prix de 205 000 €.
L’acquisition a été financée par un contrat de prêt immobilier souscrit auprès de la SA Crédit foncier de France.
Se plaignant d’infiltrations d’eau apparues à l’occasion de travaux réalisés par la SCI Les Palmiers sur un appartement voisin en vue de sa vente à des époux [H], les consorts [S]-Lebian les ont fait constater par procès-verbal le 9 novembre 2011, puis le 20 décembre 2013.
Ils ont obtenu le 22 juillet 2014 la désignation en référé d’un expert judiciaire, M. [A], au contradictoire de la SCI les Palmiers, des notaires, et du Syndicat des copropriétaires de l’immeuble.
Les époux [H] se sont plaints des mêmes types de désordres, lesquels ont l’objet d’une instance au fond distincte.
L’ expert, qui a également été missionné s’agissant du logement voisin, a déposé son rapport définitif le 14 août 2015.
Par exploits des 23, 29 décembre 2015 et du 13 janvier 2016 les consorts [S]-Lebian ont fait assigner à jour fixe la SCI les Palmiers, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 6], et les notaires au visa des articles 1116 et 1382 anciens du code civil, aux fins de voir principalement prononcer la nullité de la vente.
Par jugement en date du 9 novembre 2020 (RG 16/345) le tribunal judiciaire de Toulon a :
‘ déclaré recevable l’action des consorts [S]-[W] ;
‘ prononcé l’annulation de la vente intervenue entre la SCI les Palmiers d’une part, et les les consorts [S]-Lebian d’autre part, dressée par acte authentique du 24 janvier 2008 publiée et enregistrée le 6 février 2008 à la conservation des hypothèques de Toulon I er bureau, du bien immobilier correspondant aux lots n° 2, 3 et 10 d’un immeuble en copropriété sis [Adresse 6] et référencé section [Cadastre 8] et [Cadastre 10] au cadastre de la commune ;
‘ annulé le contrat de prêt n° 506 33 154 souscrit auprès du Crédit Foncier de France en vue de financer la vente susvisée ;
‘ condamné la SCI les Palmiers à payer aux consorts [S]-Lebian la somme de 2000 € à titre de dommages-intérêts pour les travaux d’entretien et d’amélioration du bien ;
‘ condamné in solidum la SCI les Palmiers et maîtres [L] [Z] et [P] [F] et maître [N] [I] ayant repris son étude, à payer aux consorts [S]-Lebian la somme de 51’000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur trouble de jouissance ;
‘ dit que dans les rapports entre coobligés, le partage de responsabilité s’effectuera de la manière suivante:
– la SCI les Palmiers : 90%
– Me [Z] d’une part et d’autre part Me [F] et Maître [N] [I] : 10% partagés entre eux par parts viriles ;
‘ condamné in solidum la SCI les Palmiers, ainsi que Me [Z] d’une part et d’autre part Me [F] et Maître [N] [I] la somme de 5 000 € en réparation de leur préjudice moral ;
‘ dit que dans les rapports entre coobligés, le partage de responsabilité s’effectuera de la manière suivante:
– la SCI les Palmiers : 95%
– Me [Z] d’une part et d’autre part Me [F] et Maître [I] : 5%, partagés par parts viriles ;
‘ débouté les consorts [S]-Lebian du surplus de leurs demandes de dommages intérêts ;
‘ ordonné la compensation entre les créances réciproques de restitutions consécutives à Ia nullité du contrat de prêt des consorts [S]-Lebian d’une part. de Ia SA Crédit Foncier de France d’autre part,
‘ rappellé que le privilège de prêteur de deniers et l’hypothèque conventionnelle bénéficiant à la SA Crédit Foncier de France inscrits sur le bien objet du contrat annulé continueront
à produire leurs effets jusqu’à extinction de l’ obligation de restitution.
‘ condamné solidum la SCI Les palmiers, Me [Z], Me [F] et Me [I] à payer à la SA Crédit foncier de France à titre de dommages et intérêts les sommes de :
– 65 282,59 € au titre de la restitution aux consorts [S]-Lebian des intérêts échus arrêtés au 16 mars 2017,
– 17 896, 80 € au titre de la restitution aux consorts des cotisations d’assurances échues sur le prêt,
– 2 489,71 € au titre de l’indemnité contractuelle de remboursement anticipé,
– 950 € au titre des frais de dossier prévus au contrat,
Dit que dans les rapports entre coobligés, le partage de responsabilité s’eftectuera de la manière suivante:
– SCI Les palmiers : 90%
– la SCI Les palmiers, Me [L] [Z], Me Teissère et Me Soula : 10%.
– par parts viriles entre Me [L] [Z] d’une part , Me [F] et Me [I] , d’autre part,
‘ condamné in solidum la SCI Les palmiers, Me [L] [Z], Me [F] et Me [I] à payer :
– aux consorts [S]-Lebian la somme de 2500 €,
– à la SA Crédit Foncier de France la somme de 2000 €,
– au Syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 6], représenté par Maître [K] [T] la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile civile, outre les entiers dépens d’instance, en ce compris le coût de l’expertise judiciaire ;
‘ dit que s’agissant de leurs condamnations au titre des frais irrépétibles et dépens, les rapports entre coobligés seront définis comme suit:
– 90% à la charge de la SCI les Palmiers
– 10% à la charge de Me [L] [Z], Me Teissère et Me [I] partagés par parts viriles entre M [Z] d’une part et Me [F] et Me [I] d’autre part ;
‘ et ordonné l’exécution provisoire.
Le 23 décembre 2020 la SCI les Palmiers a relevé appel de cette décision.
Par dernières conclusions du 17 octobre 2022 elle demande à la cour :
‘ de juger la procédure irrégulière en l’absence d’appel en cause du syndicat des copropriétaires [Adresse 6] régulièrement représenté à cette fin ;
‘ d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
statuant à nouveau,
‘ d’annuler l’assignation, et de la dire à tout le moins irrecevable ;
‘ de débouter les consorts [S]-[W] de toutes leurs demandes ;
‘ à titre subsidiaire, si la cour s’estimait insuffisamment renseignée sur le lien de causalité entre le trou percé en pied de façade est de l’immeuble au niveau de la cuisine et les désordres invoqués, de désigner un constatant avec pour mission de mettre en eau le trou percé en facade Est de l’immeuble pour apprécier le lien de causalité avec les désordres invoqués, et en observer les conséquences en résultant à l’intérieur du logement des consorts ;
‘ de débouter le Crédit Foncier de France de ses demandes dirigées contre la SCI Les Palmiers ;
‘ de rejeter toutes les demandes dirigées contre elle ;
‘ et de condamner tout succombant à lui payer la somme de 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Par dernières conclusions du 13 octobre 2022 Mme [C] [S] et M. [R] [W] demandent à la cour :
‘ de réformer partiellement le jugement entrepris ;
‘ de rejeter toutes les demandes formulées contre eux ;
‘ d’annuler la vente immobilière ;
‘ de prononcer la résolution du prêt immobilier dans les livres du Crédit Foncier de France d’un montant de 220’200 €;
‘ de condamner in solidum la SCI Les palmiers , Maître [L] [Z], Maître [P] [F] et Me [I] [N] à leur payer :
– les 220’200 € d’emprunt ;
– les 82’798, 98 € d’intérêts arrêtés au mois d’avril 2017 à parfaire au jour de l’annulation de la vente,
– 15’642,12 € d’assurance à parfaire au jour de l’annulation judiciaire de la vente,
– 2 000 € de travaux internes,
– 9009 € de taxe foncière à parfaire au jour de l’annulation de la vente,
– 19’125 € de préjudice de jouissance au mois de février 2016 à parfaire au jour de l’annulation judiciaire de la vente,
– 50’000 € pour leur préjudice moral ;
‘ de condamner la SCI Les Palmiers à leur payer la somme de 5 724,45 € pour frais de gestion de leur immeuble par un administrateur judiciaire ;
‘ et de condamner in solidum la SCI et les notaires à leur payer la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Par dernières conclusions du 2 juin 2021 Me [L] [Z] demande à la cour :
À titre principal,
‘ de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu sa responsabilité ;
statuant à nouveau,
‘ de dire que la man’uvre dolosive du vendeur qui a manqué à son obligation d’information à l’égard des acquéreurs et des notaires s’avère exonératoire de toute éventuelle responsabilité des notaires ;
‘ de débouter en conséquence les consorts [S]-Lebian de toutes leurs demandes , et de mettre le notaire hors de cause ;
À titre subsidiaire, si sa responsabilité était retenue,
‘ de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé à hauteur de 10 % seulement la part de responsabilité des notaires ;
‘ de confirmer le rejet de la demande de remboursement du prix de vente en tant que dirigée à l’ encontre des notaires, en l’état des éléments exposés ci-dessus.
‘ de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté les consorts [S]-Lebian de leur
demande de remboursement des travaux, des taxes foncières et taxes d’habitation, frais de Syndic, intérêts d’emprunt et assurance, préjudice de jouissance, au titre des loyers payés et dépôt de garantie et de préjudice moral en tant que dirigée à l’encontre de Me [Z] ;
S’il en était besoin, confirmer le jugement entrepris de ce chef, ayant fixé la part
imputable aux notaires au titre du préjudice de jouissance à hauteur de 10 %, les 90 %
restants devant être pris en charge par la SCI les Palmiers ;
‘ de débouter les époux [H] de leur demande à hauteur de 80 000 € au titre du préjudice
moral qui s’avère injustifiée, infondée au regard des éléments exposés ci-dessus et à tout
le moins excessive ;
S’il en était besoin,
‘ de confirmer le jugement de ce chef ayant fixé à 5 000 € l’indemnisation
au titre du préjudice moral et fixé la part imputable aux notaires à hauteur de 5 %, les 95
% restants dus devant être pris en charge par la SCI les Palmiers ;
S’il en était besoin, de confirmer le jugement entrepris ayant fixé la part imputable au notaire au titre du préjudice de jouissance à hauteur de 10 %, 90 % de prises en charge par la SCI Les palmiers ;
À titre très subsidiaire,
‘ de débouter le Crédit Foncier de France de toutes les demandes dirigées contre Me [Z], notaire ;
s’il en était besoin de confirmer le jugement entrepris ayant fixé la part imputable au notaire à hauteur de 10 % ;
‘ et de condamner les consorts [S]-Lebian à payer à Me [Z], notaire la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ‘ outre les dépens avec distraction.
Par dernières conclusions du 7 juin 2021 Me Bernard Tesseire et M. [N] [I]
demandent à la cour :
À titre principal
‘ de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu l’existence d’une faute imputable au notaire en lien de causalité pour partie avec des préjudices allégués par les consorts [S]-Lebian ;
statuant à nouveau
À titre principal,
‘ de dire qu’ils n’ont commis aucune faute, à titre subsidiaire, qu’il n’existe pas de lien de causalité entre les manquements qui leur sont reprochés et les préjudices allégués,
‘ de débouter les consorts [S]-Lebian et le Crédit Foncier de France de toutes leurs demandes dirigées contre eux ;
‘ de condamner la SCI Les palmiers, les consorts [S]-Lebian, et le Crédit Foncier de France au paiement chacun de la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure outre les dépens de première instance et d’appel ;
à titre encore plus subsidiaire,
‘ de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu que le dol commis par la SCI Les palmiers n’était pas susceptible d’absorber l’intégralité des conséquences dommageables imputées aux notaires ;
‘ de juger que le dol commis par le vendeur constitue une cause d’exonération totale de la responsabilité des notaires ;
‘ de condamner la SCI Les palmiers à relever et garantir les notaires de toute condamnation qui pourrait être mise à leur charge ;
‘ et de condamner la SCI Les palmiers à lui payer la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d’appel ;
‘ de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que dans les rapports entre coobligés Me [F] et Me [I] supporteraient 10 % des dommages-intérêts au titre du préjudice de jouissance, 5 % au titre du préjudice moral et 10 % des dommages-intérêts alloués au Crédit Foncier de France ;
statuant à nouveau
‘ de dire que dans les rapports entre coobligés, la part supportée par Me [P] [F] et Me [N] [I] ne saurait excéder 5 % des dommages-intérêts alloués aux consorts [S]-Lebian et/ou Crédit Foncier de France,
‘ et de statuer ce que de droit sur les dépens
Par dernières conclusions du 17 octobre 2022 le Crédit Foncier de France demande à la cour :
‘ de confirmer le jugement entrepris ;
‘ de lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte sur la demande d’annulation du contrat de vente du 27 janvier 2008 ;
en cas de confirmation de l’annulation de la vente et de la résolution consécutive des prêts,
‘ de condamner in solidum tout succombant à lui payer la somme de 73’320,78 €
après compensation des créances réciproques entre les emprunteurs et le Crédit foncier ;
‘ de condamner in solidum tout succombant à lui payer les sommes suivantes :
– 76’395,45 € correspondant au cumul des intérêts annuels depuis le début du prêt jusqu’au 14 octobre 2022 (65 282, 59 € depuis le début du prêt jusqu’au 16 mars 2017, date de début de la suspension du paiement des échéances hors assurance ordonnée par le tribunal d’instance de Toulon) ;
– 20’200,84 € correspondant au cumul des cotisations d’assurance depuis le début du prêt jusqu’au 14 octobre 2022 ;
-1 632,56 € correspondant à un semestre d’intérêts au taux moyen de 2,6932 % depuis le début du prêt sur le capital restant dû à ce jour soit 121’233,29 € conformément à l’article R312-2 du code de la consommation et aux stipulations de l’offre de prêt en cas de remboursement anticipé ;
– 950 € au titre des frais de dossier ;
‘ et en toute hypothèse, de condamner tout succombant à lui payer la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens avec distraction.
Par dernières conclusions du 28 avril 2022 le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 6], qui était alors représentée par Me [K] [T], son administrateur judiciaire jusqu’à l’assemblée générale du 11 mai 2022, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, et de condamner tout succombant à lui payer la somme de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
La société Var syndic, assignée à personne habilitée le 6 décembre 2022, n’a pas constitué avocat.
La cour renvoie aux écritures précitées pour l’exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.
L’ordonnance de clôture est datée du 18 octobre 2022.
Motifs
Sur la procédure
Attendu que la procédure a été régularisée à l’égard de la mission d’administration de la Selarl [K] [T] et associés en qualité d’administrateur du syndicat des copropriétaires [Adresse 6], le syndicat des copropriétaires [Adresse 6] étant dûment représenté par son syndic en exercice, la société Var syndic suite à une AG du 11 mai 2022, d’où il suit le rejet de la demande de nullité de l’assignation et d’irrecevabilité des demandes et la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a déclaré recevables les prétentions des consorts [S]-[W] ;
Sur la responsabilité du vendeur
Attendu que la SCI Les Palmiers fait valoir au fond au soutien de son appel :
‘ qu’elle a acquis les biens litigieux suivant jugement d’adjudication en date du 1 er décembre 1986, régulièrement publié aux hypothèques le 26 décembre 1986, duquel il ressort que la maison dont elle a fait l’acquisition comprenait en sous-sol, deux bureaux, deux garages et un petit réduit, selon le cahier des charges ; que 1’ensemble de ces bureaux étaient donnés à bail à la Sarl Cibonne construction ; qu’en ce qui concerne les travaux réalisés après 1987, ils ont été réalisés par la SCI Les Palmiers , elle-même, et ont consisté en la transformation desdits bureaux en deux logements d’habitation dont l’un d’eux est celui qui a été vendu aux consorts [S]-[W] (l’autre a été vendu aux époux [H] qui ont introduit la même procédure dont appel également) ; que les travaux réalisés ont porté sur la plomberie, l’électricité, le cloisonnement et le carrelage ; qu’ils n’ont pas fait l’objet d’un permis de construire en l’absence de modification des façades ; que le changement de destination a été pris en compte par le cadastre, les impôts fonciers étant dûment payés ; que le même jour que la vente aux consorts [S]-[W], un nouvel état descriptif de division a été établi et publié aux hypothèques ; qu’en aucun cas, contrairement à ce que soutiennent les acquéreurs et l’expert M. [A], les appartements litigieux n’ont été réalisés dans un vide sanitaire ; qu’il s’agissait de bureaux ; que dans l’acte d’acquisition de la SCI Les palmiers, soit le jugement d’adjudication,
l’appartement acquis par les consorts [S]-[W] est expressément désigné comme étant des bureaux ; que la connaissance ou non par les consorts [S]-[W] de l’ancienne destination de bureaux de l’appartement qu’ils ont acquis ne saurait avoir une quelconque incidence sur leur connaissance de sa prétendue inhabitabilité ;
‘ que contrairement à ce que l’expert tente maladroitement de conclure dans son rapport, les désordres d infiltrations dont le bien est affecté sont sans lien avec le changement de destination de bureaux à habitation, dans la mesure où des bureaux ne doivent pas plus qu’une habitation subir des infiltrations ; qu’il est donc parfaitement indifférent que les consorts [S]-[W] aient été ou non informés de l’ ancienne destination de bureaux des lieux litigieux ; que la SCI Les Palmiers n’a donc commis aucune dissimulation quant à l’habitabilité des locaux ;
‘ sur la prétendue dissimulation d’infiltrations préexistantes à la vente, qu’il est totalement faux de prétendre que la SCI Les Palmiers aurait dissimulé aux consorts [S]-[W] sa connaissance des infiltrations dont l’appartement est affecté et ce pour la bonne raison que ce dernier n’avait jamais fait l’objet de tels désordres qui ne sont apparus que fin 2010, soit près de trois ans après leur acquisition ; que l’origine des désordres se situe dans des travaux réalisés sur 1 ‘autre appartement fin 2010, mais par ses nouveaux propriétaires, les époux [H], lesquels ont percé un trou en pied de façade pour une gaine d’évacuation d’une hotte de cuisine sans étanchéité ;
‘ que Mme [O] qui témoigne pour les acquéreurs ne s’est jamais plainte d’infiltrations ; que les moisissures invoquées provenaient de l’épandage du linge dans la salle de bains ; qu’un commissaire de justice a constaté le 9 septembre 2022 qu’il n’y n’avait aucune trace d’humidité ;
‘ qu’il existe dans l’acte de vente une clause de non garantie des vices cachés qui doit s’appliquer, le dol ne pouvant pas être retenu ;
Mais attendu que le tribunal lui a déjà exactement répondu :
‘ qu’il ressort du jugement d’adjudication du 10 juin 1986 comme du cahier des charges afférent à cette vente, que le bien alors acquis par la SCI Les palmiers était désigné comme une maison individuelle à usage d’habitation élevée d’un étage sur sous-sol, comprenant au sous-sol : ‘deux bureaux, deux garages, un petit réduit’ ; et que la SCI Les palmiers revendique la transformation des bureaux pour en faire l’appartement qui a été vendu aux consorts [S]-[W] le 24 janvier 2008 ;
‘ que l’expert judiciaire remarque sur le plan annexé à la demande de permis de construire tendant à créer une extension de la villa, obtenue le 10 avril 1987, que le sous-sol consiste ‘en deux garages et une pièce en amont avec des ouvertures sur la façade sud-est. TOUT le reste c’est du vide sanitaire non accessible’ ; que la SCI Les palmiers n’a pas contesté la lecture de ce plan ; que l’expert judiciaire à juste titre a invalidé le plan annexé au permis de construire du 1er août 1973 qui ne présentait pas de garanties suffisantes et avait été décerné pour deux villas, étant observé de surcroît que suivant le titre dont se prévaut la SCI Les palmiers, l’unique maison en litige a été édifiée en 1979-1980, ‘hors toute autorisation ni permis’.
‘ que le plan annexé au permis modificatif a été réalisé par le maître de concepteur sur la base de plans initiaux remis par M. [D], le gérant de la SCI les Palmiers au moment de la vente 2008 et assistant aux opérations d’expertise judiciaire ; et que la SCI ne peut prétendre ignorer le vide sanitaire au niveau inférieur de la villa, une partie de ce vide sanitaire existant concomitamment aux pièces acquises à titre de bureaux ;
Attendu que l’expert judiciaire M. [A] conclut :
« Nous sommes en présence d’une construction dont le soubassement par destination côté des terres, n’est pas utilisable et par voie de conséquence inhabitable.
Les murs d’infrastructure ne sont là que pour décaler du sol le niveau d’habitation. De ce fait il n’ont pas à être étanchés ni recevoir de traitements spéciaux. Les dallages ne sont que pour des garages. Un garage n’étant pas considéré par les règles de la construction comme lieu de vie n’a pas l’obligation d’être étanche non plus.
Les murs enterrés sont contre le bassin versant du ruissellement de la colline, sans étanchéité il est tout à fait normal que l’eau passe au travers du mur qui n’a reçu à l’extérieur ni étanchéité ni drainage contrairement à ce qu’exigent les normes et règles des murs enterrés dans le cadre de pièces d’habitation. » ;
Que les travaux effectués par la SCI de plomberie- électricité- cloisonnement et carrelage n’ont modifié aucune des façades de l’immeuble et qu’elle n’a pas réalisé des travaux nécessaires à l’étanchéité du local ; que, questionné sur le lien de causalité avec les travaux effectués dans le logement voisin des époux [H], l’expert note que les sources d’arrivée d’eau dans le logement des consorts [S]-[W] sont :
-celles qui proviennent du logement voisin appartenant aux époux [H], qui passe pour partie sous la contre cloison et pour partie sous le dallage du logement ; et qui proviennent du défaut d’étanchéité des murs de local
-celles qui se trouvent hors ce secteur au travers du dallage et qui sont étrangères à l’appartement voisin, et qui sont la conséquence directe et exclusive des premières ;
Attendu que c’est ainsi que les époux [O], les locataires qui avaient occupé l’appartement avant sa vente entre le 21 octobre 2000 le mois d’octobre 2006, et donc avant tous travaux chez les [H], ont témoigné le 19 décembre 2014 des pénétrations d’eau à l’époque de leur occupation par le carrelage du couloir et d’infiltrations perpétuelles dans une chambre exposée au nord, de sorte que le logement était déjà insalubre ;
Attendu qu’il est versé aux débats un constat d’huissier dressé le 6 décembre 2000, ainsi qu’une mise en demeure du 17 janvier 2001 adressée par la police municipale du Pradet à la SCI Les Palmiers, en sa qualité de propriétaire du [Adresse 6], visant des infractions au règlement sanitaire départemental :
« Les infractions suivantes ayant été constatées :
-présence d’humidité des traces de moisissures dans la salle à manger et les trois chambres ainsi que la salle de bains ;
-installation électrique défectueuse (‘) situation non conforme à la réglementation en vigueur, notamment aux prescriptions du règlement sanitaire départemental portant ayant pour conséquence de porter atteinte à la sécurité et la santé des occupants ainsi qu’à la salubrité de l’immeuble », suite au signalement des locataires [O] de la SCI ;
Attendu que le rapport de constatation dressé le 12 janvier 2001 par la police municipale du Pradet note :
« La construction comporte trois appartements, celui de Mme [O] est situé au rez-de-chaussée. La configuration du terrain en pente fait que l’appartement de Mme [O] est encaissé sur la partie sud sur une hauteur de 1,50 m, les terres sont soutenues par un mur.
Cet appartement est constitué de six pièces pour une superficie de 85 m² environ (‘) dans la chambre des traces de moisissures et de salpêtre sur le mur sud, des traces de moisissures et de salpêtre.
Chambre 3 : présence d’eau au sol dans l’angle Nord-Est à proximité des installations électriques. Cette chambre la plus atteinte étant exposée au Nord. Les meubles de la locataire sont moisis. (‘)
Dans le couloir le propriétaire a fait des emplâtres de ciment afin d’empêcher des remontées d’eau.
Notons également que l’ensemble de l’appartement n’est pas isolé, les murs sont montés en agglo plus un lissage de béton sur lequel on a passé un crépi blanc. » ;
Attendu que les services municipaux établissent la réalité des désordres subis par Mme [O] dont les doléances ne sont donc pas imputables à de mauvaises relations avec le bailleur-vendeur, contrairement à ce que ce dernier soutient ;
Attendu que M. [D] qui était alors le bailleur des époux [O] et qui est le gérant représentant la SCI les palmiers au jour de la vente au profit des consorts [S]-[W], présent au cours des opérations d’expertise, n’a pu ignorer ainsi, au moment de la vente aux consorts [S]-[W], la gravité des problèmes l’humidité affectant chroniquement le bien immobilier qu’il a transformé puis loué à Mme [O] ;
Attendu qu’il n’est justifié d’aucune suite donnée à la mise en demeure d’insalubrité notifiée au propriétaire par la commune du Pradet ; que la SCI Les Palmiers, à l’opposé, dénie tout problème structurel et verse en cause d’appel un constat d’huissier daté du 9 septembre 2022 effectué dans ‘un appartement du RDC’ mal identifié, où les propretés ont été faites, insuffisant à contredire les conclusions techniquement étayées de l’expertise judiciaire ;
Or attendu que la SCI Les palmiers a indiqué faussement dans l’acte de vente du 24 janvier 2008 litigieux que les biens sont achevés depuis plus de 10 ans, que l’ensemble immobilier n’a subi aucun sinistre et que le bien vendu n’était pas insalubre, et qu’il n’ y a pas eu de modification de la destination du bien en contravention des dispositions légales ou qu’il n’a pas été fait de travaux non autorisés ;
Attendu que le tribunal a donc exactement retenu que la SCI Les Palmiers avait dissimulé ces éléments au moment de la vente, sa réticence dolosive ayan vicié le consentement des consorts [S]-[W], et qu’en présence d’un dol caractérisé, la clause d’exclusion de la garantie des vices cachés, totalement inopérante, devait être écartée ;
Sur la responsabilité des notaires
Attendu que pour retenir la responsabilité des notaires, le tribunal relève en ses motifs « qu’ils ont failli à leur devoir de véritication juridique de la régularité de la construction et de l’affectation des lots ; que la lecture du titre de propriété de la SCI Les palmiers et sa confrontation avec l’état descriptif de division, les plans et les diagnostics fournis pour la vente aurait dû les interpeller, dès lors qu’il en ressortait un changement de destination du local destiné à la vente, sans qu’aucune déclaration ni autorisation d’urbanisme ne soit fournie ; que les seules déclarations du vendeur sur l’absence de réalisation de travaux depuis dix ans ne suffisaient pas, et venaient au contraire interroger le moment et les conditions de réalisation de ce changement de destination ; et que si une telle circonstance ne pouvait laisser présager l’ampleur des conséquences de cette situation sur l’étanchéité du bien, elle aurait dû inciter les officiers publics à approfondir leurs recherches ou bien alerter les parties à l’acte. » ;
Attendu qu’un notaire diligent aurait relevé la discordance entre la désignation à l’acte authentique de vente du bien (‘un appartement’) avec le titre du vendeur (‘un sous sol dans lequel sont aménagés deux bureaux, deux garages et un réduit’) ; que l’officier ministériel aurait pu obtenir des précisions sur les travaux ayant conduit au changement de destination du bien qui avait été réalisés montrant que les déclarations à l’acte du vendeur quant à ‘l’absence de tous travaux’étaient nécessairement fausses ; qu’il aurait pu s’enquérir de l’existence d’une déclaration de changement d’affectation des locaux ( page 54 du rapport de M. [A]) ;
Attendu cependant qu’en l’état d’une simple déclaration de travaux (DP) à déposer en mairie, en l’absence de modification de la structure porteuse ou de la façade de la construction, il n’est pas établi que sans la faute du notaire, apprenant l’absence de DP, les consorts [S]-Lebian eussent renoncé à leur acquisition ou acquis à moindre prix ;
Attendu qu’en effet les notaires font exactement valoir que ce sont bien les travaux réalisés au mépris des règles de l’art qui sont la cause exclusive de la situation ayant rendu le logement inhabitable et insalubre ; que les notaires et le vendeur plaident utilement sur ce point que des locaux à usage d’habitation ou de bureaux doivent être pareillement étanches, de sorte que le changement de destination observable entre les actes successifs de vente ne présente pas, par lui-même, pas un lien de causalité suffisant avec le défaut d’étanchéité du bien, lequel est imputable à un défaut de conception et d’exécution des travaux réalisés par la SCI Les Palmiers, et avec le préjudice qui en est issu pour les consorts [S]-[W] ;
Attendu en conséquence que le jugement qui a retenu que la faute professionnelle commise par les notaires, distincte de celle du vendeur, avait concouru à produire le dommage allégué par les consorts [S]-[W] à hauteur de 10 %, doit être réformé, et toutes les demandes indemnitaires dirigées contre les notaires, rejetées ;
Sur la nullité du prêt
Attendu que le tribunal a exactement retenu que la convention de prêt accessoire du contrat de vente étant atteinte du même vice du consentement doit être annulée, et non résolue ;
Sur le dommage subi par les acquéreurs
Sur la demande en paiement de la somme de 220’000 €
Attendu que le tribunal a exactement retenu qu’en l’état de l’annulation de la vente, la restitution par le vendeur du prix est acquise aux acquéreurs ; et que le vendeur ne saurait être tenu, aux lieu et place de cette restitution, de rembourser aux acquéreurs le capital de l’emprunt souscrit pour financer la vente annulée, qui ne se confond pas avec le prix, ni dans sa nature, ni dans son montant, et qui lui est d’ailleurs supérieur ;
Attendu que les consorts [S]-[W] acquéreurs sont tenus de restituer le capital emprunté à la banque et réciproquement, l’établissement de crédit est tenu de restituer aux consorts toutes les mensualités reçues d’eux, en capital, intérêts, frais, accessoires et cotisations d’assurance au titre du contrat de prêt annulé ;
Attendu en conséquence que les consorts [S]-[W] sont donc fondés à obtenir de la SCI Les Palmiers non les 220’000 € ‘d’emprunt’, mais sur ce montant la somme de 205 000 € correspondant au prix de vente versé à la SCI Les Palmiers,et à leur demande de ‘remise dans leur état initial comme avant l’annulation de la vente immobilière’ ; qu’il sera ordonné la restitution de ce prix de vente par la SCI Les Palmiers aux consorts [S]-[W] contre la restitution par ces derniers du bien immobilier à la SCI Les palmiers ;
Sur les travaux
Attendu que la SCI Les Palmiers sera condamnée à rembourser les travaux inutilement accomplis par les acquéreurs dans le logement dont il est justifié par des factures acquittées auprès de diverses sociétés intervenues dans le logement pour un montant en réalité supérieur au montant de 2000 € sollicité ;
Sur les taxes foncières
Attendu que le tribunal a rejeté cette demande, dont il est justifié à hauteur du montant sollicié de 9009 €, en exposant qu’en application de l’article 1400 et suivants du code général des impôts les consorts [S]-Lebian pourront obtenir le dégrèvement des taxes foncières inutilement exposées après publication de la mutation et qu’il leur appartient de le solliciter, alors que la SCI Les palmiers étant redevenue propriétaire du bien immobilier ab initio en était redevable envers le trésor public, et que les acquéreurs ont acquitté le montant de ces taxes foncières à leur place ;
Qu’il sera donc fait droit à l’appel incident des consorts [S]-[W] de ce chef ;
Sur le préjudice de jouissance
Attendu que les consorts [S]-Lebian ont vécu avec leur jeune enfant dans un logement affecté d’humidité avec des arrivées d’eau chroniques par le sol, trouble de jouissance que l’expert a chiffré à 30 % de la valeur locative du bien, soit 255 € par mois sur les 850 € par mois de la valeur locative, soit 95 mois à compter du mois de janvier 2010 jusqu’au mois de décembre 2017, date à laquelle les consorts [S]-[W] ont quitté les lieux, et un montant total de 24’225 € qui leur sera accordé en réparation de leur touble de jouissance ;
Que pour la période postérieure à leur déménagement, les consorts [S]-Lebian sollicitent le remboursement d’une partie du montant de leurs loyers s’élevant à 1000 € mensuel à hauteur de 765 € par mois qu’ils ont dû acquitter alors qu’ils étaient propriétaires d’un bien s’étant révélé largement inhabitable, de sorte que leur préjudice de jouissance s’élève de ce chef à la somme de 26’775 € ;
Sur les charges de la copropriété
Attendu que les consorts [S]-[W] sont fondés à solliciter la somme de 7197,26 € qu’ils arrêtent en 2018 à parfaire au titre des charges importantes de copropriété qu’ils ont dû régler compte tenu des difficultés de gestion de la copropriété, la SCI Les Palmiers étant demeurée propriétaire du logement sis au-dessus du leur ; que la SCI qui retrouve a posteriori l’entière propriété du bien leur en doit le remboursement ;
Attendu en définitive que le vendeur sera condamné outre la restitution du prix de vente à verser aux consorts [S]-[W] la somme totale de 69’206, 26 € à titre de dommages-intérêts en réparation des divers préjudices matériels qu’ils ont subis (2 000 € + 9 009 € + 24’225 € + 26’775 € + 7 197,26 €) ;
Sur le préjudice moral
Attendu que les consorts [S]-Lebian ont subi divers tracas durant une période de 10 ans ayant du quitter avec leur jeune enfant leur domicile, éprouvé des difficultés pour se reloger et du initier des procédures en référé pour obtenir un moratoire de paiement des mensualités de leur emprunt ;
Attendu que ce préjudice moral sera entièrement réparé par l’octroi de la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts ;
Attendu qu’en définitive la SCI Les Palmiers sera condamnée à payer aux consorts [S]-[W] la somme totale de 74’206,26 € à titre de dommages-intérêts, toutes causes de préjudice confondues ;
Sur les demandes de la banque
Attendu que les acquéreurs, suite à l’annulation du contrat de prêt accessoire au contrat de vente sont tenus de rembourser à la SA Crédit Foncier de France le capital qu’ils ont emprunté, en déduisant le montant total des mensualités (en capital, intérêts, assurance du prêt et frais) qu’ils lui ont réglées, soit après cette compensation entre créances réciproques, la somme réclamée par la banque et non discutée par les consorts [S]-[W] de 73 320, 78 €, comptes arrétés au 14 octobre 2022 ;
Sur la demande de dommages intérêts
Attendu que le tribunal retient exactement qu’en cas d’annulation d’un crédit consécutivement à l ‘annulation de la vente qu’il a financée, l ‘établissement bancaire est fondé à rechercher la responsabilité civile délictuelle des responsables de la nullité de la vente aux fins d être indemnisé au titre de la restitution des frais ainsi que des intérêts échus ; que la banque serait également fondée à se prévaloir de la perte de chance de percevoir les intérêts à échoir, mais qu’elle sollicite en l’espèce seulement le montant de l’indemnité de remboursement anticipé contractuellement prévue ;
Attendu que la SCI Les Palmiers est responsable, à raison de son dol à l’égard des acquéreurs, de l’annulation de la vente et de la nullité subséquente du contrat de prêt ;
Attendu qu’en cause d’appel la banque, qui verse le tableau d’amortissement du prêt, est donc fondée à réclamer la condamnation de la SCI Les Palmiers à lui payer les sommes suivantes :
‘ 76’395,45 correspondant au cumul des intérêts annuels depuis le début du prêt jusqu’au 14 octobre 2022, date à laquelle le paiement des échéances hors assurance a été ordonné par le tribunal d’instance, renouvelée par ordonnance du 28 juin 2019,
‘ 20’200,84 € correspondant au cumul des cotisations d’assurance depuis le début du prêt jusqu’au 14 octobre 2018 ;
‘ 1 632,56 € correspondant à un semestre d’intérêts au taux moyen de 2, 6932 % depuis le début du prêt sur le capital restant dû à ce jour (121’233, 29 €) conformément à l’article R312-2 du code de la consommation et aux stipulations de l’offre de prêt en cas de remboursement anticipé ;
‘ et la somme de 950 € au titre des frais de dossier ;
Attendu, sur le moyen tiré de ce qu’il n’est pas justifié du paiement de l’assurance du prêt, que le tribunal a déjà exactement répondu que l’autorisation de suspendre le paiement des échéances d’un prêt immobilier ne dispense pas I’ emprunteur du paiement des cotisations de l’assurance couvrant ces prêts, ce que l’ordonnance de référé du 28 juin 2019 a expressément rappellé ; et que l’ établissement de crédit a bon droit n’a pas interrompu le calcul des cotisations à la date de suspension du paiement des échéances de l’emprunt ;
Attendu en définitive que le jugement déféré sera partiellement réformé ;
Attendu que la SCI Les Palmiers succombant encore devra supporter la charge des dépens de première instance et d’appel, et verser en équité à Mme [C] [S] et M. [R] [W], ensemble, la somme de 5 000 €, à la SA Crédit Foncier de France la somme de 4 000 €, et au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 6] la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile applicable en première instance et en cause d’appel, la SCI Les Palmiers ne pouvant elle-même, ni davantage les notaires, prétendre au bénéfice de ce texte ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Dit n’y avoir lieu à expertise judiciaire,
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a :
‘ déclaré recevable l’action engagée par Mme [C] [S] et M. [R] [W],
‘ prononcé l’annulation de la vente intervenue entre la SCI les Palmiers d’une part, et les les consorts [S]-Lebian d’autre part, dressée par acte authentique du 24 janvier 2008 publiée et enregistrée le 6 février 2008 à la conservation des hypothèques de Toulon I er bureau, du bien immobilier correspondant aux lots n° 2,3 et 10 d’un immeuble en copropriété sis [Adresse 6] et référencé section [Cadastre 8] et [Cadastre 10] au cadastre de la commune ;
‘ annulé le contrat de prêt n° 506 33 154 souscrit auprès du Crédit Foncier de France en vue de financer la vente susvisée ;
‘ rappellé que le privilège de prêteur de deniers et l’hypothèque conventionnelle bénéficiant à la SA Crédit Foncier de France inscrits sur le bien objet du contrat annulé continueront à produire leurs effets jusqu’à extinction de l’ obligation de restitution.
Infirme le jugement déféré pour le surplus,
statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant
Rejette la demande de nullité de l’acte introductif d’instance,
Déboute la SCI Les Palmiers et Mme [C] [S] et M. [R] [W] de toutes leurs demandes dirigées contre Me [L] [Z], Me [P] [F] et Me [N] Soula,
Condamne la SCI les Palmiers à restituer le prix de vente de 205’000 € à Mme [C] [S] et à M. [R] [W], ensemble ,
Condamne la SCI Les Palmiers à payer Mme [C] [S] et M. [R] [W], ensemble, la somme de 74’206,26 € à titre de dommages-intérêts, toutes causes de préjudice confondues,
Condamne in solidum Mme [C] [S] et M. [R] [W] à payer à la SA Crédit Foncier de France la somme de 73’320,68 € résultant de la compensation entre le capital emprunté et les mensualités de l’emprunt que ces consorts ont réglées en capital intérêts, assurance et frais à la banque,
Condamne la SCI Les Palmiers à payer à la SA Crédit foncier de France à titre de dommages et intérêts les sommes de :
– 76’395,45 € au titre des intérêts échus arrêtés à la date du 14 octobre 2022,
– 20’200,84 € correspondant au cumul des cotisations d’assurance depuis le début du prêt jusqu’au 14 octobre 2022,
– 1632,56 € au titre de l’indemnité de remboursement anticipé,
– et 950 € au titre des frais de dossier prévus au contrat,
Condamne la SCI Les Palmiers à payer :
– à Mme [C] [S] et M. [R] [W], ensemble, la somme de 5 000 €,
– à la SA Crédit Foncier de France la somme de 4 000 €,
– au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 6] la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SCI Les Palmiers aux entiers dépens, ainsi qu’aux coût de l’expertise judiciaire de M. [A], et dit que les dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT