République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 13/04/2023
N° de MINUTE : 23/403
N° RG 20/03507 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TFTT
Jugement (N° 19-004844) rendu le 06 Juillet 2020 par le Tribunal Judiciaire de Lille
APPELANTS
Madame [F] [K] épouse [U]
née le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 9] – de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 3]
Monsieur [J] [U]
né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 7] – de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentés par Me Jérémie Boulaire, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
INTIMÉES
SA Cofidis venant aux droits de la SA Groupe Sofemo suite à une fusion absorption ayant effet au 1er octobre 2015 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 5]
Représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assisté de Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
SCP Brouard-[W] agissant en la personne de Maître [C] [W], es qualités de liquidateur de la Sarl Vivenci Energies, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 7]
Défaillante, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 12 novembre 2020 par acte remis à personne habilitée
DÉBATS à l’audience publique du 18 janvier 2023 tenue par Yves Benhamou magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves Benhamou, président de chambre
Catherine Ménegaire, conseiller
Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 13 avril 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 4 janvier 2023
****
– FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Dans le cadre d’un démarchage à domicile selon bon de commande en date du 9 octobre 2012, M. [J] [U] a conclu avec la société VIVENCI ENERGIES un contrat afférent à une prestation consistant dans l’installation d’un système photovoltaïque et d’un pack écologique Vivenci comprenant notamment des leds et des régulateurs de débit pour les robinets pour un montant total TTC de 22 700 euros.
Pour financer une telle installation le 9 octobre 2012, M. [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U] selon offre préalable acceptée en date du 9 octobre 2012 se sont vu consentir par la société SOFEMO FINANCEMENT (aux droits de laquelle vient à présent la SA COFIDIS) , d’un montant de 22 700 euros remboursable en 180 mensualités, précédées d »un différé de paiement de 11 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 5,02 %.
Le 9 octobre 2012, M. [U] a signé avec la société VIVENCI ENERGIES un contrat publicitaire par lequel la société VIVENCI ENERGIES s’est engagée a rémunérer M. [U] pour sa prestation publicitaire à hauteur d’une somme de 314 euros pour chaque inauguration dans la limite d’un montant maximum de 1 570 euros TTC.
Par actes d’huissier en date des 31 octobre et 4 novembre 2019, M. et Mme [U] ont fait assigner en justice la société COFIDIS venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO et la SCP BROUARD-[W] en la personne de Maître [C] [W] es qualité de liquidateur de la société VIVENCI ENERGIES aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement réputé contradictoire en date du 6 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Lille, a:
– déclaré prescrite l’action de nullité de M. [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U],
– condamné M. [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U] à payer à la société COFIDIS la somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U] aux dépens.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 4 septembre 2020, M. [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U] a interjeté appel de cette décision en visant expressément dans l’acte d’appel tous les points tranchés dans le dispositif du jugement querellé.
Vu les dernières conclusions de M. [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U] en date du 27 décembre 2022, et tendant à voir:
– Infirmer le jugement en ce qu’il :
. déclaré prescrite l’action de nullité de Monsieur [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U] ;
. condamné M. [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U] à payer à la société Cofidis la somme de 500 euros ( cinq cents euros) au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
. condamné M. [J] [U] et Mme [F] [K] épouse [U] aux dépens.
Et, statuant à nouveau :
– Déclarer les demandes de Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U], née [K] recevables et bien fondées ;
– Prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U], née [K] et la société VIVENCI ENERGIES ;
– Prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U], née [K] et la société COFIDIS ;
– Mettre à la charge de la liquidation judiciaire l’enlèvement de l’installation et la remise en état de l’habitation de Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U], née [K] ;
– Constater que la société COFIDIS a commis une faute dans le déblocage des fonds et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté, et la condamner à procéder au remboursement de l’ensemble des sommes versées par Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U], née [K] au titre de l’exécution normale du contrat de prêt litigieux ;
– Condamner la société COFIDIS venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO à verser à Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U], née [K], l’intégralité des sommes suivantes :
– 22 700,00 euros correspondant à l’intégralité du prix de vente de l’installation ;
– une somme à parfaire correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U], née [K], à la société COFIDIS venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO en exécution du prêt souscrit ;
– 5 000,00 euros au titre du préjudice moral ;
– 6 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Débouter la société COFIDIS et la société VIVENCI ENERGIES de l’intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions contraires ;
– Condamner la société COFIDIS à supporter les dépens de l’instance.
Vu les dernières conclusions de la SA COFIDIS en date du 25 février 2021, et tendant à voir:
– Déclarer Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U] née [K] prescrits, irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter.
– Recevoir la SA COFIDIS recevable en ses demandes, fins et conclusions,
Y faisant droit,
– Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions.
– Débouter Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U] née [K] de toutes leurs demandes
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour venait à prononcer la nullité des conventions :
– Donner acte à la SA COFIDIS qu’elle rembourserait aux emprunteurs les intérêts perçus dans le cadre du remboursement anticipé,
– Voir dire et juger que le capital remboursé par anticipation restera définitivement acquis à la SA COFIDIS en l’absence de faute et en toute hypothèse en l’absence de préjudice et de lien de causalité.
A titre infiniment subsidiaire,
– Donner acte à la SA COFIDIS qu’elle remboursera à Monsieur et Madame [U] une partie du capital dont le montant sera fixé souverainement par la juridiction.
En tout état de cause :
– Condamner solidairement Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U] née [K] à payer à la SA COFIDIS une indemnité d’un montant de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– Condamner solidairement Monsieur [J] [U] et Madame [F] [U] née [K] aux entiers dépens qui pourront être directement recouvrés par l’avocat soussigné par application de l’article 699 du CPC.
Pour sa part la SCP BROUARD-[W] en la personne de Maître [C] [W] es qualité de liquidateur de la société VIVENCI ENERGIES a été assignée devant la cour par les époux [U] et la SA COFIDIS respectivement par actes d’huissier du 12 novembre 2020 et du 1er mars 2021 étant précisés que dans les deux cas la signification est intervenue à personne habilitée.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties qui ont constitué avocat et conclu en cause d’appel, il convient de se référer à leurs écritures respectives.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 4 janvier 2023.
– MOTIFS DE LA COUR:
– SUR LA PRESCRIPTION:
En application des dispositions de l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour ou le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
L’article 1144 du même code prévoit quant à lui que le délai de l’action en nullité ne court en cas de dol que du jour où il a été découvert.
I1 résulte des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile qu’il incombe a chaque partie de prouver conformément a la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention;
Au cas particulier, M. [J] [U] et Mme [F] [U] considèrent que le contrat de vente du 9 octobre 2012 est nul en raison, en premier lieu, de l’existence d’un dol et, en second lieu, en raison des violations des dispositions du code de la consommation sur le bon de commande. Par ailleurs ils estiment que la responsabilité de la SA COFIDIS est engagée au regard du fait qu’elle a financé un bon de commande entaché de nullité et libéré les fonds au visa d’une attestation de livraison insuffisamment précise selon les appelants pour rendre compte de la complexité de l’opération.
S’agissant en premier lieu de la nullité invoquée pour dol, les époux [U] font valoir qu’ils ont été intentionnellement trompés par le vendeur sur le montant de la production attendue des installations photovoltaïques.
Par des motifs pertinents que la cour adopte, c’est à bon droit que le premier juge dans la décision entreprise a considéré que la découverte du dol allégué doit ici être considérée comme acquise au 17 février 2014 à réception de la première facture de contrat d’achat d’énergie électrique pour la période du 18 février 2013 au 17 février 2014 qui fait apparaître la production réelle d’électricité. Le premier juge en a donc déduit fort logiquement que l’action engagée, sur le fondement du dol, le 31 octobre et 4 novembre 2019, soit plus de 5 ans après, doit donc être déclarée irrecevable.
Par ailleurs s’agissant de la nullité invoquée pour violation des dispositions du code de la consommation, le premier juge procédant à une exacte application du droit aux faits a estimé à juste titre que le point de départ du délai de prescription de cette action doit être fixé au jour de la signature du contrat le 9 octobre 2012 puisqu’a ce moment, M. [J] [U] et Mme [F] [U] étaient en mesure de vérifier la conformité du bon de commande aux dispositions, ainsi qu’il résulte de l’exemplaire du contrat fourni par elle-même, qui reproduit intégralement l’article L. 121-23. Par suite, le premier juge en a déduit de manière logique et cohérente que l’action engagée de ce chef le 31 octobre 2019 est prescrite.
S’agissant de l’action en responsabilité des époux [U] contre la société COFIDIS, le point de départ du délai de prescription se situe soit au moment de la signature de l’attestation de livraison, soit au moment de la libération des fonds le 26 novembre 2012, soit éventuellement lors du prélèvement de la première échéance le 30 novembre 2013.
Si l’on retient la date la plus récente c’est à dire le 30 novembre 2013 l’objectivité commande de constater que l’action des emprunteurs a été formée le 31 octobre 2019, soit au delà du délai de cinq ans imparti par l’article 2224 du code civil précité.
Par suite, c’est à bon droit que le premier juge a déclaré prescrite l’action initiée par les époux [U]. Le jugement querellé sera donc confirmé sur ce point ainsi qu’en toutes ses autres dispositions pour lesquelles les motifs pertinents du premier juge méritent également adoption.
– SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE AU TITRE DE L’INSTANCE D’APPEL:
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA COFIDIS les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.
Il convient dès lors de condamner in solidum M. [J] [U] et Mme [F] [U] à payer à la SA COFIDIS la somme de 900 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.
En revanche il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de M. [J] [U] et Mme [F] [U] les frais irrépétibles exposés par eux devant la cour et non compris dans les dépens.
Il y a lieu dès lors de débouter M. [J] [U] et Mme [F] [U] de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.
– SUR LES DEPENS D’APPEL:
Il convient de condamner in solidum M. [J] [U] et Mme [F] [U] qui succombent, aux entiers dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement querellé,
Y ajoutant,
Condamne in solidum M. [J] [U] et Mme [F] [U] à payer à la SA COFIDIS la somme de 900 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel,
Les déboute de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel,
Les condamne aux entiers dépens d’appel.
Le greffier, Le président,
Gaëlle PRZEDLACKI Yves BENHAMOU