Conditions Générales de Vente : Tribunal Administratif de Nîmes, 1ère Chambre, 13 avril 2023, 2101614

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Conditions Générales de Vente : Tribunal Administratif de Nîmes, 1ère Chambre, 13 avril 2023, 2101614

Extraits : ou du service offert ;

– elle méconnaît les dispositions de l’article L. 221-18 du code de la consommation tenant au non-respect du droit à rétractation dans le cadre d’un contrat conclu hors établissement commercial dès lors que les conditions générales de vente respectent les dispositions légales en ce qui concerne le point de départ du délai de rétractation ;

– elle méconnaît les dispositions de l’article L. 223-1 du code de la consommation tenant au non-respect de l’interdiction

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Tribunal Administratif de Nîmes, 1ère Chambre, 13 avril 2023, 2101614

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 mai 2021 et 17 mars 2023, la SAS Groupe Beaumet Energies, représentée par Me Bensimon, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 15 mars 2021 par laquelle le directeur départemental de la protection des populations du Gard lui a infligé, en application de l’article L. 522-1 du code de la consommation, une amende administrative d’un montant de 366 930 euros ainsi que la mesure de publicité de celle-ci ;

2°) d’enjoindre à la direction départementale de la protection des populations de procéder à la publication du jugement à intervenir pendant sept jours sur son site internet, sa page Facebook et Twitter dans le délai de 1 mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

– la décision est dépourvue de base légale en ce que la loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux est contraire à la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ;

– la décision en litige a été signée par une autorité incompétente ;

– elle est entachée d’insuffisance de motivation ;

– elle n’a pas respecté le principe du contradictoire et des droits de la défense ;

– elle méconnaît les dispositions de l’article L. 221-8 du code de la consommation tenant au défaut d’information précontractuelle dans le cadre d’un contrat conclu hors établissement dès lors que le bon de commande doit contenir uniquement les caractéristiques essentielles du bien ou du service offert ;

– elle méconnaît les dispositions de l’article L. 221-18 du code de la consommation tenant au non-respect du droit à rétractation dans le cadre d’un contrat conclu hors établissement commercial dès lors que les conditions générales de vente respectent les dispositions légales en ce qui concerne le point de départ du délai de rétractation ;

– elle méconnaît les dispositions de l’article L. 223-1 du code de la consommation tenant au non-respect de l’interdiction sectorielle du démarchage téléphonique pour la vente d’équipements et de prestations destinés à réaliser des économies d’énergies et sur l’interdiction de démarchage d’un consommateur inscrit sur une liste d’opposition au démarchage téléphonique dès lors que les utilisateurs ont consenti de façon libre, spécifique, éclairée et univoque à transmettre leurs données dans le but spécifique de la constitution d’un dossier pour des travaux de rénovation énergétique de sorte que le formulaire utilisé matérialise l’existence d’un contrat en cours ;

– elle méconnaît les dispositions de l’article L. 223-2 du code de la consommation dès lors qu’une clause rappelant cette disposition est prévue dans le bon de commande ;

– le montant de la sanction pécuniaire et la mesure de publicité de la décision sont disproportionnés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2021, la préfète du Gard conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu’aucun des moyens invoqués par la société requérante n’est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– la directive (CE) n° 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 ;

– la loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020 ;

– le code de la consommation ;

– le code des relations entre le public et l’administration ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. D,

– les conclusions de Mme Agnès Bourjade, rapporteure publique,

– et les observations de Mme A représentant la préfète du Gard.

Considérant ce qui suit

:

1. La SAS Groupe Beaumet Energies, dont le siège social est à Bagnols-sur-Cèze, a pour activité principale la réalisation de travaux d’installation d’eau et de gaz en tous locaux. A la suite de plusieurs dépôts de plainte de consommateurs et d’un contrôle effectué le 30 juillet 2020 par la direction départementale de la protection des populations du Gard, un procès-verbal a été établi le 23 décembre 2020, faisant état de 1 428 infractions au code de la consommation. Le même jour, la direction départementale a adressé un courrier à la société l’informant de ce qu’il était envisagé de prononcer à son encontre une amende d’un montant de 366 930 euros. Par une décision en date du 15 mars 2021, la direction départementale a prononcé une amende d’un montant de 366 930 euros et ordonné la publication de la sanction aux frais de la SAS Groupe Beaumet Energies. La SAS Groupe Beaumet Energies demande l’annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :

2. En premier lieu, la décision a été signée par M. E C, directeur départemental adjoint de la protection des populations du Gard, qui disposait, aux termes de l’arrêté n° 30-2021-03-10-003 du directeur de la protection des populations du Gard du 10 mars 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n° 30-2021-015 de la Préfecture Gard le 11 mars 2021, publication accessible tant par le juge que les parties, d’une subdélégation de signature en cas d’empêchement ou d’absence de Claude F, directeur de la protection des populations du Gard. Il ne résulte pas de l’instruction que M. B F n’ait pas été absent ou empêché à la date du 15 mars 2021. Par suite, le moyen tiré de l’incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration :  » Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : () / 2°) Infligent une sanction « . Selon l’article L. 211-5 de ce code :  » La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision « .

4. Il ressort des termes de la décision attaquée que celle-ci liste les manquements retenus, dont la teneur exacte est explicitée tant dans le procès-verbal de constatations que la lettre informant la société requérante de ce qu’il était envisagé de prononcer à son encontre une amende administrative, communiqués le 23 décembre 2020. Il en ressort en outre qu’elle précise les dispositions du code de la consommation dont il a été fait application. Cette décision précise encore les éléments dont le service a tenu compte pour apprécier le montant de la sanction, à savoir l’importance de la réglementation appliquée, l’ampleur des manquements constatés ainsi que le chiffre d’affaires de la société requérante. La décision en litige détaille enfin, manquement par manquement, les éléments de calcul sur lesquels elle se fonde pour fixer le montant de la sanction litigieuse. Contrairement à ce que soutient la société requérante, ces éléments de calcul, éclairés par les considérations qui précèdent, sont suffisamment précis pour lui permettre de comprendre la sanction qui lui a été infligée. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de la motivation doit être écarté.

5. En troisième lieu, d’une part, aux termes de l’article L. 522-1 du code de la consommation :  » L’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation est l’autorité compétente pour prononcer les amendes administratives sanctionnant les manquements aux dispositions mentionnées aux articles L. 511-5, L. 511-6 et L. 511-7 et l’inexécution des mesures d’injonction relatives à des manquements constatés avec les pouvoirs mentionnés aux mêmes articles « . Aux termes de l’article L. 522-4 de ce code :  » Une copie du procès-verbal constatant les manquements passibles d’une amende administrative en est transmise à la personne mise en cause « . Aux termes de l’article L. 522-5 du même code :  » Avant toute décision, l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée à son encontre, en lui indiquant qu’elle peut se faire assister par le conseil de son choix et en l’invitant à présenter, dans un délai précisé par le décret mentionné à l’article L. 522-10, ses observations écrites et, le cas échéant, ses observations orales « .

6. D’autre part, s’agissant des mesures à caractère de sanction, le respect du principe général des droits de la défense implique que la personne concernée soit informée, avec une précision suffisante et dans un délai raisonnable avant le prononcé de la sanction, des griefs formulés à son encontre et puisse avoir accès aux pièces au vu desquelles les manquements ont été retenus, à tout le moins lorsqu’elle en fait la demande.

7. Si la SAS Groupe Beaumet Energies fait valoir que la procédure de sanction a méconnu le principe du contradictoire et les droits de la défense, il résulte de l’instruction qu’elle a été informée par courrier du 23 décembre 2020 du directeur départemental adjoint de la protection des populations du Gard des divers manquements qui lui étaient reprochés au titre des articles L. 221-8, L. 221-24, L. 223-1 et L. 223-2 du code de la consommation et de la sanction d’un montant de 366 930 euros qui était envisagée. Ce même courrier invitait également la société requérante à présenter ses observations, ce qu’elle a pu faire par écrit le 18 janvier 2021 et par oral, le 3 février 2021 par le biais de son avocat, soit préalablement à l’édiction de la sanction contestée. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la société requérante, la décision contestée répond à ses observations et en a tenu compte pour refuser d’ordonner la publication de la sanction dans la presse locale. Dans ces conditions, la SAS Groupe Beaumet Energies n’est pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait intervenue en méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense, alors même que n’y seraient pas repris tous les éléments dont elle s’est prévalue.

En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :

8. En quatrième lieu, les dispositions des articles L. 223-1 et L. 242-16 du code de la consommation, dont les conditions d’application ont été précisées par la loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020, visent seulement à renforcer la protection des consommateurs et à lutter contre les pratiques de démarchage téléphonique intempestif, parfois agressif, intrusif et non consenti des consommateurs et n’ont pas pour objet d’interdire de manière générale des pratiques commerciales déloyales au sens de la directive 2005/29/CE du Parlement et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cette directive doit en tout état de cause être écarté.

9. En cinquième lieu, aux termes de l’article L. 221-8 du code de la consommation :  » Dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues à l’article L. 221-5. / Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible « . Aux termes de l’article L. 221-5 de ce code dans sa rédaction applicable :  » Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes : 1°) Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 () « . Aux termes de l’article L. 111-1 de ce code dans sa rédaction applicable :  » Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes : 1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné () / 6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI () « . Selon les dispositions de l’article R. 111-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable :  » Pour l’application des 4°, 5° et 6° de l’article L. 111-1, le professionnel communique au consommateur les informations suivantes : () / 6° Les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétents dont il relève en application de l’article L. 616-1 « . Les caractéristiques essentielles du bien ou du service sont celles qui sont de nature à déterminer le consommateur dans sa décision de contracter.

10. D’une part, il résulte de l’instruction que les inspecteurs de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ayant procédé à l’enquête relative à la SAS Groupe Beaumet Energies ont relevé, tel qu’il ressort du procès-verbal du 23 décembre 2020, que pour 145 bons de commande, cette société n’avait pas informé le consommateur de la marque ou de la référence du produit vendu. L’administration a estimé que la mention relative à la marque ou à la référence du produit vendu constituait une caractéristique essentielle du contrat au sens des dispositions précitées et qu’en n’informant pas les consommateurs sur ce point, la société avait méconnu les dispositions de l’article L. 221-8 du code de la consommation. La société requérante soutient que l’absence de mention relative à la marque ou à la référence du produit vendu au sein du bon de commande ne méconnaît pas les dispositions précitées. Toutefois, la marque ou la référence d’un produit, dont la fonction est de garantir l’origine d’un produit commercialisé, est une information déterminante pour le consentement du consommateur. Il s’agit donc d’une caractéristique essentielle au sens de l’article L. 111-1 du code de la consommation. Par suite, l’administration n’a pas méconnu le champ d’application de cette dernière disposition et pouvait, dès lors, légalement infliger à la société requérante une amende en raison des manquements constatés.

11. D’autre part, contrairement à ce que soutient la société requérante, il ressort du procès-verbal établi le 23 décembre 2020, qu’outre le défaut d’information portant sur les caractéristiques essentielles du bien, il lui est reproché l’absence de mention des coordonnées du médiateur de la consommation compétent. La société requérante ne soutient et ne rapporte pas la preuve que ses bons de commande ou ses conditions générales de vente contiennent ces informations.

12. Dans ces conditions, eu égard aux manquements exposés aux points 10 et 11, l’administration était fondée à lui infliger une amende pour méconnaissance des dispositions de l’article L. 221-8 du code de la consommation.

13. En sixième lieu, aux termes de l’article L. 221-18 du code de la consommation :  » Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25. Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour : 1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 221-4 ; 2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat () « . Aux termes de l’article L. 221-19 de ce code :  » Conformément au règlement n° 1182/71/ CEE du Conseil du 3 juin 1971 portant détermination des règles applicables aux délais, aux dates et aux termes : 1° Le jour où le contrat est conclu ou le jour de la réception du bien n’est pas compté dans le délai mentionné à l’article L. 221-18 () « . Selon les dispositions de l’article L. 221-24 de ce code :  » Lorsque le droit de rétractation est exercé, le professionnel rembourse le consommateur de la totalité des sommes versées, y compris les frais de livraison, sans retard injustifié et au plus tard dans les quatorze jours à compter de la date à laquelle il est informé de la décision du consommateur de se rétracter () « .

14. Il résulte de l’instruction, notamment des déclarations de la société lors de l’enquête et de la mention de la faculté de rétractation au sein du bon de commande que la société fait courir le délai de rétractation à compter de la signature du bon de commande soit à la date de conclusion du contrat. Dans ces conditions, la procédure suivie par la société correspond à une procédure interne faisant courir le délai de 14 jours à partir d’une date qui ne correspond pas aux dispositions fixées par le code de la consommation qui prévoient, pour les contrats de vente de biens, un point de départ à compter du lendemain de la réception du bien.

15. En tout état de cause, il résulte de l’instruction que le consommateur, pour lequel le manquement est relevé par les inspecteurs de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, a signé un bon de commande en date du 4 décembre 2019 avant de se rétracter, d’abord par mail le 14 décembre 2019, ensuite par lettre recommandée avec accusé de réception le 16 décembre 2019 soit dans le délai de rétractation. Par suite, étant rappelé que la société ne conteste pas de ne pas avoir fait droit à la rétractation demandée, l’administration était fondée à lui infliger une amende pour méconnaissance des dispositions de l’article L. 221-24 du code de la consommation.

16. En septième lieu, aux termes de l’article L. 223-1 du code de la consommation :  » Le consommateur qui ne souhaite pas faire l’objet de prospection commerciale par voie téléphonique peut gratuitement s’inscrire sur une liste d’opposition au démarchage téléphonique. / Il est interdit à un professionnel, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers agissant pour son compte, de démarcher téléphoniquement un consommateur inscrit sur cette liste, sauf lorsqu’il s’agit de sollicitations intervenant dans le cadre de l’exécution d’un contrat en cours et ayant un rapport avec l’objet de ce contrat, y compris lorsqu’il s’agit de proposer au consommateur des produits ou des services afférents ou complémentaires à l’objet du contrat en cours ou de nature à améliorer ses performances ou sa qualité. / Toute prospection commerciale de consommateurs par des professionnels, par voie téléphonique, ayant pour objet la vente d’équipements ou la réalisation de travaux pour des logements en vue de la réalisation d’économies d’énergie ou de la production d’énergies renouvelables est interdite, à l’exception des sollicitations intervenant dans le cadre de l’exécution d’un contrat en cours au sens du deuxième alinéa du présent article « . Il résulte des travaux parlementaires relatifs à la loi du 24 juillet 2020 que les dispositions de ce dernier alinéa visent tant à renforcer la protection des consommateurs, qu’à lutter contre les pratiques de démarchage téléphonique intempestif, parfois agressif, intrusif et non consenti des consommateurs dans le domaine des travaux d’amélioration énergétique, eu égard aux aides publiques en jeu et aux risques élevés de fraude dans ce secteur, alors que ces pratiques sont de nature à entamer la confiance des consommateurs dans la politique publique menée dans ce domaine de la rénovation énergétique et à compromettre ainsi l’atteinte des objectifs nationaux d’économie d’énergie et de développement durable.

17. D’une part, il résulte de l’instruction que l’administration préfectorale a dressé le constat de 54 appels téléphoniques entre le 1er août 2019 et le 25 juillet 2020, sur des numéros inscrits sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique Bloctel. La société requérante, laquelle ne conteste pas par ailleurs avoir démarché les clients inscrits sur la liste d’opposition Bloctel, soutient que les consommateurs ont consenti à ces appels en remplissant un formulaire de contact sur un site internet dans le but spécifique d’être rappelés pour pouvoir bénéficier de travaux dans le domaine des énergies. Toutefois, comme le soutient l’administration préfectorale, le site internet, qui ne présente aucunement les différentes offres de la société, permet seulement de remplir un simulateur  » Eligy  » par lequel le consommateur communique son énergie de chauffage principale, code postal, nom, adresse mail et numéro de téléphone en vue d’être rappelé par un  » expert  » dans un délai de 24 à 48 heures afin d’obtenir une information relative à son éligibilité aux aides d’Etat pour l’installation d’une pompe à chaleur. De plus, le site internet indique clairement que cette demande d’estimation  » ne vous engage à rien  » et précise, préalablement aux rubriques à remplir, de façon non-équivoque  » les données insérées ne serviront qu’à vous mettre en relation avec l’un de nos experts pour qu’il crée votre dossier d’aides sous réserve que vous soyiez éligible « . Dans ces conditions, la société requérante ne saurait utilement soutenir, au regard de son objet, que ce formulaire matérialise l’existence d’un contrat en cours au sens des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 223-1 du code de la consommation doit être écarté.

18. D’autre part, il résulte de l’instruction que l’administration préfectorale a dressé le constat de 1 225 appels téléphoniques entre le 26 juillet 2020 et le 7 septembre 2020 émanant de la société requérante qui a pour activité déclarée les travaux d’installation d’eau et de gaz en tous locaux. La société requérante, laquelle ne conteste pas par ailleurs ni d’être un professionnel ayant pour objet la vente d’équipements en vue de la réalisation d’économies d’énergie ni avoir démarché des clients, soutient que les consommateurs ont consenti à ces appels en remplissant un formulaire de contact sur son site internet dans le but spécifique d’être rappelés pour pouvoir bénéficier de travaux dans le domaine des énergies. Toutefois, comme il a été dit, au regard de l’objet du formulaire qui consiste uniquement à permettre à un consommateur de tester son éligibilité aux aides d’Etat pour l’installation d’une pompe à chaleur, la pratique commerciale de la SAS Groupe Beaumet peut être regardée comme une prospection commerciale téléphonique au sens du troisième alinéa de l’article L. 223-1 du code de la consommation. Au surplus, comme il a été dit, la société requérante ne saurait utilement soutenir, au regard de son objet, que ce formulaire matérialise l’existence d’un contrat en cours au sens des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du troisième alinéa de l’article L. 223-1 du code de la consommation doit être écarté.

19. En huitième lieu, aux termes de l’article L. 223-2 du code de la consommation :  » Lorsqu’un professionnel est amené à recueillir auprès d’un consommateur des données téléphoniques, il l’informe de son droit à s’inscrire sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique. / Lorsque ce recueil d’information se fait à l’occasion de la conclusion d’un contrat, le contrat mentionne, de manière claire et compréhensible, l’existence de ce droit pour le consommateur « .

20. Il résulte de l’instruction, et il n’est pas contesté, qu’entre 2019 et septembre 2020, la société requérante n’informait pas ses clients de leur droit à s’inscrire sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique. La circonstance qu’à compter du 1er février 2021, la société requérante informe désormais ses clients de leur droit à s’inscrire sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique au sein de ses conditions générales de vente jointes aux bons de commande est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que les manquements constatés portent sur une période antérieure. Par suite, dès lors qu’il a été constaté que la société recueillait le numéro de téléphone de clients sans les avertir de leur droit à s’inscrire sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique, l’administration était fondée à lui infliger une amende pour méconnaissance des dispositions de l’article L. 223-2 du code de la consommation.

21. En neuvième et dernier lieu, aux termes de l’article L. 242-10 du code de la consommation dans sa rédaction applicable :  » Tout manquement aux obligations d’information prévues aux articles L. 221-5, L. 221-6, L. 221-8, L. 221-11, L. 221-12 à L. 221-14 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale () / « . Aux termes de l’article L. 242-13 de ce code :  » Tout manquement aux dispositions des articles L. 221-18 à L. 221-28 encadrant les conditions d’exercice du droit de rétractation reconnu au consommateur, ainsi que ses effets, est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 15 000 euros pour une personne physique et 75 000 euros pour une personne morale () / « . Selon les dispositions de l’article L. 242-16 du code de la consommation :  » Tout manquement aux dispositions des articles L. 223-1 à L. 223-5 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale () / « .

22. La société requérante soutient que la sanction en litige est disproportionnée. Il résulte de l’instruction que l’absence de respect de l’article L. 221-8 du code de la consommation a donné lieu à une amende de 100 euros par manquement constaté, que l’absence de respect de l’article L. 221-18 de ce code a été sanctionné d’une amende de 10 000 euros pour le manquement constaté, que l’absence de respect de l’article L. 223-1 de ce code a été sanctionné d’une amende de 120 euros par manquement constaté, que l’absence de respect du troisième alinéa de l’article L. 223-1 de ce code a été sanctionné d’une amende de 270 euros par manquement constaté et que l’absence de respect de l’article L. 223-2 de ce code a été sanctionné par une amende de 5 000 euros pour le manquement constaté. Si la société fait valoir que le montant de l’amende est disproportionné, dès lors qu’elle a connu une nette baisse de son résultat en 2020, cette circonstance est sans incidence sur l’appréciation du bien-fondé de l’amende mise à sa charge pour les manquements aux dispositions précitées du code de la consommation. Eu égard à la nature des manquements reprochés et alors que le code de la consommation prévoit, pour une personne morale, une amende maximale de 15 000 euros pour chacun des manquements en cause aux dispositions de l’article L. 221-8 du code de la consommation, une amende maximale de 75 000 euros pour chacun des manquements en cause aux dispositions de l’article L. 221-24 de ce code et une amende maximale de 375 000 euros pour chacun des manquements en cause aux dispositions des articles L. 223-1 et L. 223-2 de ce code, les montants d’amende retenus par le directeur départemental adjoint de la protection des populations du Gard n’apparaissent pas entachés de disproportion.

23. Aux termes de l’article L. 522-6 du code de la consommation :  » La décision prononcée par l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut être publiée aux frais de la personne sanctionnée / () « . L’article R. 522-3 du même code dispose :  » La publication prévue à l’article L. 522-6 s’effectue par voie de presse, par voie électronique ou par voie d’affichage. La diffusion et l’affichage peuvent être ordonnés cumulativement. / Les modalités de la publication sont précisées dans la décision prononçant l’amende « . Enfin, aux termes du premier alinéa de l’article R. 522-4 de ce code :  » La publication peut porter sur l’intégralité ou sur une partie de la décision, ou prendre la forme d’un communiqué informant le public des motifs et du dispositif de cette décision « .

24. Lorsqu’une autorité administrative prononce une sanction complémentaire de publication de sa décision de sanction, celle-là se trouve nécessairement soumise, et alors même que la loi ne prévoirait pas expressément, au respect du principe de proportionnalité. La légalité de cette sanction s’apprécie, notamment, au regard du support de diffusion retenu et, le cas échéant, de la durée pendant laquelle cette publication est accessible de façon libre et continue.

25. La décision en litige prévoit la publication, d’une part, d’un communiqué sur le site internet de la DGCCRF ainsi que sur les pages de ses comptes Facebook et Twitter et sur le site des services de l’Etat de la préfecture du Gard pendant une durée de soixante jours consécutifs et, d’autre part, d’un communiqué de presse.

26. Si la société requérante soutient que les mesures de publication qui lui ont été infligées sont disproportionnées, il résulte de l’instruction que la société a commis un nombre significatif de manquements aux dispositions relatives au défaut d’information précontractuelle dans le cadre d’un contrat conclu hors établissement, au non-respect du droit à rétractation dans le cadre d’un contrat conclu hors établissement, au démarchage téléphonique de consommateurs inscrits sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique, au non-respect de l’interdiction sectorielle du démarchage dans le secteur de la rénovation énergétique et à l’absence de mention au contrat, de manière claire et compréhensible, du droit à l’inscription du consommateur sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique. De plus, comme le soutient l’autorité préfectorale, si dans la lettre d’intention d’amende administrative en date du 23 décembre 2020 il était prévu une publication de la sanction dans la presse locale, celle-ci a été abandonnée dans la décision contestée. En outre, les publications ordonnées se limitent à une durée de soixante jours. Dans ces conditions, et sans que la société requérante puisse utilement se prévaloir de la reprise de la décision sur les réseaux sociaux et dans la presse locale, les mesures de publication ordonnées ne sont pas entachées de disproportion. Par suite, le moyen doit être écarté.

27. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fins d’annulation contenues dans la requête doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions à fins d’injonction.

Sur les frais liés au litige :

28. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante, la somme demandée par la SAS Groupe Beaumet Energies, au titre des frais non compris dans les dépens que la société a exposés dans cette instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Groupe Beaumet Energies est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la SAS Groupe Beaumet Energies, au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au directeur départemental de la protection des populations du Gard.

Copie en sera adressée à la préfète du Gard.

Délibéré après l’audience du 21 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Antolini, président,

Mme Ruiz, première conseillère

M. Lagarde, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2023.

Le président,

J. D

La conseillère la plus ancienne,

I. RUIZ

La greffière,

A. OLSZEWSKI

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

 

 


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