Conditions Générales de Vente : Tribunal administratif de Bordeaux, 2ème Chambre, 5 avril 2023, 2100782

·

·

Conditions Générales de Vente : Tribunal administratif de Bordeaux, 2ème Chambre, 5 avril 2023, 2100782

Extraits : sociation des usagers des bassins à flots et l’association Lagon Bleu, représentées par Mes Lebrun et Crecent, demandent au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 18 décembre 2020 par laquelle le président du directoire du Grand port maritime de Bordeaux a rejeté leur recours gracieux dirigé contre le règlement d’exploitation du port de plaisance des bassins à flots, ses annexes et ses conditions générales de vente, édicté en 2020 ;

2°) d’annuler par voie de conséquence l’ensemble des factures émises au titre des années 2020 et 2021 ;

3°) d’enjoindre au Grand port maritime de Bordeaux de restaurer la tarification applicable en 2019, sous astreinte d’un montant de 150 par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;

4°) d’enjoindre à cette autorité de procéd

*     *     *

Tribunal administratif de Bordeaux, 2ème Chambre, 5 avril 2023, 2100782

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 16 février 2021, le 18 octobre 2021 et le 23 décembre 2022, l’association des usagers des bassins à flots et l’association Lagon Bleu, représentées par Mes Lebrun et Crecent, demandent au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 18 décembre 2020 par laquelle le président du directoire du Grand port maritime de Bordeaux a rejeté leur recours gracieux dirigé contre le règlement d’exploitation du port de plaisance des bassins à flots, ses annexes et ses conditions générales de vente, édicté en 2020 ;

2°) d’annuler par voie de conséquence l’ensemble des factures émises au titre des années 2020 et 2021 ;

3°) d’enjoindre au Grand port maritime de Bordeaux de restaurer la tarification applicable en 2019, sous astreinte d’un montant de 150 par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;

4°) d’enjoindre à cette autorité de procéder au remboursement des sommes perçues en sus du montant de la tarification de 2019, concernant les tarifications de 2020 et 2021 ;

5°) de mettre à la charge du Grand port maritime de Bordeaux la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

– la requête est recevable.

En ce qui concerne la décision de rejet du recours gracieux :

– elle est signée par une autorité incompétente.

En ce qui concerne le règlement intérieur :

– il n’a pas été signé par le président du directoire ;

– il devait être soumis à l’approbation du conseil de surveillance de l’établissement en application des dispositions du 2° de l’article de l’article R. 5312-24 du code des transports ;

– il ne comporte pas la signature, les nom et prénom et qualité de l’auteur de l’acte, en méconnaissance de l’article L. 212-2 du code des relations entre le public et l’administration ;

– ses articles 3 et 5 ne prévoient pas d’autorisation d’occupation du domaine public à délivrer aux usagers ;

– l’annexe 3 prévoit une redevance disproportionnée au regard des services fournis ; les travaux envisagés n’ont notamment pas été réalisés ;

– il méconnaît le principe d’égalité, en prévoyant un tarif différencié entre les usagers présents depuis plus de 24 mois dans le port et les autres usagers ;

– le taux de pénalité en cas de défaut de paiement présente un caractère manifestement excessif et méconnaît les dispositions de l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ;

– la grille tarifaire est entachée d’incohérences techniques.

En ce qui concerne les factures :

– elles méconnaissent l’objectif à valeur constitutionnelle de lisibilité et de clarté ;

– elles sont entachées d’incompétence ;

– elle sont dépourvues de base légale, à défaut d’autorisation d’occupation du domaine public ;

– elles méconnaissent les dispositions du II de l’article 289 et du 8° de l’article 242 nonies A du code général des impôts.

En ce qui concerne les conditions générales de vente :

– elles sont inopposables dès lors qu’elles s’appliquent en dehors de tout rapport contractuel au sens de l’article L. 111-1 du code de la consommation et qu’elles n’ont pas fait l’objet d’une diffusion sur le site internet permettant aux usagers d’en être informés et de les accepter ultérieurement.

Par des mémoires en défense enregistrés le 22 avril 2021 et le 25 octobre 2022, le Grand port maritime de Bordeaux, représenté par le président de son directoire, conclut au non-lieu à statuer sur la requête et subsidiairement à son rejet.

Il soutient que :

– la requête est devenue sans objet dès lors que par une décision du 14 décembre 2021, publiée le 7 janvier 2022, le directoire a adopté un nouveau règlement d’exploitation qui se substitue de fait à l’ancien ;

– la requête est irrecevable, à défaut de capacité pour agir et à défaut d’intérêt à agir des deux associations ;

– aucun des moyens de la requête n’est fondé.

Par une ordonnance du 28 décembre 2022, la clôture de l’instruction a été fixée en dernier lieu au 28 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ;

– le code des transports ;

– le code général de la propriété des personnes publiques ;

– le code des relations entre le public et l’administration ;

– le code de la consommation ;

– le code général des impôts ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. M,

– les conclusions de M. Vaquero, rapporteur public,

– et les observations de Me Crecent, représentant les associations requérantes.

Une note en délibéré produite pour les associations requérantes, enregistrée le 24 mars 2023, n’a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit

:

1. Le 3 décembre 2020, l’association des usagers des bassins à flots et l’association Lagon Bleu ont demandé au Grand port maritime de Bordeaux de retirer le règlement d’exploitation du port de plaisance des bassins à flots n° 2 de Bordeaux, ses annexes et ses conditions générales de vente, édicté en 2020. Elles demandent au tribunal d’annuler la décision du 18 décembre 2020 par laquelle le président du directoire du Grand Port Maritime de Bordeaux a rejeté leur recours gracieux. Elles lui demandent également d’annuler par voie de conséquence l’ensemble des factures émises au titre des années 2020 et 2021 à l’égard de M. H C, Mme E K, Mme J A, M. D L et M. I B.

Sur l’exception de non-lieu :

2. La circonstance que, par une décision du 14 décembre 2021, le directoire du Grand port maritime de Bordeaux ait adopté un nouveau règlement d’exploitation du port de plaisance des bassins à flot applicable à compter de l’année 2022, qui ne retire pas ni ne se substitue à la décision contestée du 18 décembre 2020 applicable aux années 2020 et 2021, n’a pas eu pour effet de priver le litige de son objet. L’exception de non-lieu à statuer ne peut par suite être accueillie.

Sur les factures :

3. Les associations requérantes ne justifient pas d’un intérêt à agir pour contester les factures notifiées individuellement à certains de leurs membres. En tout état de cause, les associations ne sont pas recevables à solliciter leur annulation par  » voie de conséquence  » de l’annulation de la décision par laquelle le Grand port maritime de Bordeaux a refusé de retirer l’acte qui constitue leur fondement.

4. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d’annulation des factures doivent être rejetées.

Sur la décision portant rejet du recours gracieux :

5. L’exercice du recours gracieux n’ayant d’autre objet que d’inviter l’auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d’un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l’autorité administrative.

6. Il s’ensuit que le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de la décision portant rejet du recours gracieux doit être écarté comme inopérant.

Sur le règlement du port de plaisance et ses annexes :

En ce qui concerne la recevabilité :

S’agissant de l’intérêt à agir :

7. Tout d’abord, l’article 2 des statuts de l’association des usagers des bassins à flots stipule que  » Cette association a pour but de : / représenter et défendre les intérêts des usagers des bassins à flots en favorisant la communication et l’information entre les usagers et les instances décisionnaires « . Ensuite, l’article 2 des statuts de l’association Lagon Bleu stipule que :  » L’association a pour but : / – de faciliter la préparation aux grands voyages en voilier ; / – de gérer l’espace attribué à l’association ; / – de défendre les intérêts collectifs de ses membres « . Les membres de cette association sont définis par les articles 4 et 5 des statuts comme des propriétaires de navires versant des droits de stationnement. Si l’article 7 prévoit ses moyens d’actions, parmi lesquels ne figure pas l’introduction de recours devant la juridiction administrative, il n’a pas d’incidence sur l’objet de l’association et les buts qu’elles entend poursuivre.

8. Il ressort des pièces du dossier que le règlement du port de plaisance prévoit les modalités d’occupation des bassins à flot et fixe la base du montant de la redevance d’occupation du domaine public dans ces bassins. Dans ces conditions, les deux associations doivent être regardées comme présentant un intérêt à agir contre cet acte.

S’agissant de la capacité pour agir :

9. Il ressort des pièces du dossier que les statuts révisés de l’association des usagers des bassins à flots ont été déclarés en préfecture le 18 août 2000. Les statuts de l’association Lagon Bleu ont été déclarés en préfecture de la Gironde et publiés au Journal officiel le 15 juillet 2000. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de leur défaut de capacité pour agir doit être écarté.

S’agissant de la qualité pour agir :

10. Il ressort des pièces du dossier, et notamment d’un extrait de procès-verbal établi le 17 janvier 2021, que par une délibération du 4 janvier 2021 faisant suite à l’assemblée générale tenue le 7 octobre 2020, le conseil d’administration et l’assemblée générale de l’association des usagers des bassins à flots ont mandaté la présidente, avec le conseil de Me Crecent et de Me Lebrun, à fin de saisir le tribunal administratif. Il ressort également des pièces du dossier que, le 30 janvier 2021 et faisant suite à l’assemblée générale du 9 octobre 2020, les membres du bureau de l’association Lagon Bleu ont mandaté le président de l’association avec l’assistance des mêmes conseils afin de saisir le tribunal administratif de Bordeaux d’une requête. Par suite, le moyen tiré du défaut de qualité pour agir doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité de ce règlement :

11. Aux termes de l’article L. 243-3 du code des relations entre le public et l’administration :  » L’administration ne peut retirer un acte réglementaire ou un acte non réglementaire non créateur de droits que s’il est illégal et si le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant son édiction « .

12. En premier lieu, aux termes de l’article L. 5312-6 du code des transports :  » Le grand port maritime est dirigé par un directoire, sous le contrôle d’un conseil de surveillance « . Aux termes de l’article L. 5312-10 de ce code :  » Le directoire assure la direction de l’établissement et est responsable de sa gestion. () Dans les conditions fixées par décret, le président du directoire du grand port fluvio-maritime peut déléguer une partie de ses pouvoirs et sa signature, et en autoriser la subdélégation « . Aux termes de l’article R. 5312-24 de ce code :  » Sont soumis à l’approbation préalable du conseil de surveillance : () 2° Le budget et ses décisions modificatives, notamment l’évolution de la dette, des politiques salariales et tarifaires et des effectifs ; « .

13. D’une part, il ne résulte pas des dispositions précitées du 2° de l’article R. 5312-24 du code des transports qu’elles soumettent à l’approbation préalable du conseil de surveillance la décision du directoire du port portant sur l’approbation du règlement intérieur du port de plaisance, y compris en ce qu’elle fixe le montant des redevances que payeront ultérieurement les occupants du domaine public, ne s’agissant pas d’une décision établissant ou modifiant le budget. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

14. D’autre part, l’article 6 du règlement intérieur du directoire du Grand port maritime de Bordeaux en date du 30 décembre 2009 prévoit que le président du directoire peut déléguer sa signature aux autres membres du directoire en toutes matières. L’article 18 relatif aux procès-verbaux des séances du directoire dispose que :  » Les décisions du directoire sont constatées par des procès-verbaux signés par le président, lesquels sont transcrits sur un registre spécial prévu par l’article R. 102-19 dernier alinéa du Code des transports maritimes. / Les copies ou extraits des procès-verbaux des décisions du directoire sont certifiés en tant que besoin par le président, lequel peut déléguer sa signature à un autre membre du directoire ou à un directeur sectoriel de l’établissement « .

15. S’il ne ressort pas des pièces du dossier que M. G F disposait d’une délégation de signature consentie par le président du directoire actuel lui permettant de signer, en tant que membre du directoire, le procès-verbal d’une séance du directoire, il ne résulte cependant pas des dispositions du règlement intérieur citées au point précédent, lequel n’est d’ailleurs pas opposable aux tiers ni invocables par ceux-ci, qu’elles conditionneraient la légalité du règlement, dès lors qu’il n’est pas sérieusement contesté par les associations requérantes que le directoire a effectivement adopté le règlement intérieur contesté.

16. En deuxième lieu, les dispositions de l’article L. 212-1 du code des relations entre le public et l’administration, en vertu desquelles  » Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci  » ne peuvent être utilement invoquées à l’encontre d’un acte réglementaire.

17. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques :  » Nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1 ou l’utiliser dans des limites dépassant le droit d’usage qui appartient à tous.  » Le pouvoir réglementaire ne peut donc légalement instaurer un régime d’autorisation tacite d’occupation du domaine public, qui fait notamment obstacle à ce que soient, le cas échéant, précisées les prescriptions d’implantation et d’exploitation nécessaires à la circulation publique et à la conservation de la voirie.

18. L’article 2 du règlement du port définit un titre d’autorisation d’occupation temporaire comme :  » délivré en application des règles générales d’occupation du domaine public définies par le code général de la propriété des personnes publiques « . L’article 3 de ce règlement relatif au régime d’occupation dispose que :  » L’autorisation d’occupation temporaire, non constitutive de droits réels, est accordée à titre précaire, révocable et strictement personnelle sur la base des caractéristiques du navire déclarées par le propriétaire. Lors de la vente d’un bateau, la cession de la place de port est strictement interdite sans l’autorisation préalable, expresse et par écrit de la maison du port « . L’article 6 de ce règlement rappelle que  » les titres objet du présent règlement sont délivrés à titre personnel et ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’une transaction notamment lors de la cession d’un navire « .

19. Il résulte des termes du règlement du port de plaisance que l’occupation du domaine public est bien soumise à la délivrance d’une autorisation d’occupation temporaire du domaine public. La circonstance alléguée par les associations requérantes que le Grand port maritime de Bordeaux ne délivrerait en pratique aucun document formalisant cette autorisation et se bornerait à éditer des factures est sans incidence sur la légalité de ce règlement.

20. En quatrième lieu, aux termes de l’article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques:  » Toute occupation ou utilisation du domaine public d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1 donne lieu au paiement d’une redevance () « . Aux termes de l’article L. 2125-3 du même code :  » La redevance due pour l’occupation ou l’utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l’autorisation « . Il appartient à l’autorité gestionnaire du domaine public de fixer, tant dans l’intérêt du domaine que dans l’intérêt général, les conditions de délivrance des permissions d’occupation et à ce titre de déterminer le tarif des redevances en tenant compte des avantages de toute nature que le permissionnaire est susceptible de retirer de l’occupation du domaine public.

21. Pour soutenir que le montant de la redevance d’occupation du domaine public est disproportionné, les associations requérantes, produisant à cet effet un procès-verbal d’huissier du 17 septembre 2020, soutiennent, d’une part, que des travaux prévus par le règlement du port lui-même, consistant notamment en la réalisation de bornes de vidange et d’une aire de carénage, en la création de nouveaux emplacements pour les bateaux conformes à leurs caractéristiques et en la mise en place de services de vidéo-surveillance, n’ont pas été réalisés et, d’autre part, que le service public du port de plaisance est de mauvaise qualité, compte-tenu notamment de ce que la régie est inaccessible, que les bureaux du port sont en bâtiments préfabriqués, qu’il n’existe ni ponton d’attente, ni parking pour les usagers, ni tableau d’affichage des balisages et pollutions et ni le moindre affichage d’information concernant les bassins, que les écluses et les ponts tournants dysfonctionnent, que les poteaux maintenant les pontons sont trop courts, que le système de gestion des déchets est insalubre et que le port n’est pas nettoyé.

22. Toutefois, d’une part, il ressort des pièces du dossier que le Grand port maritime de Bordeaux est compétent pour adopter annuellement la tarification de la redevance d’occupation des postes d’amarrage en vertu de l’article 5 du règlement et il lui appartient alors de tenir compte de l’avancement des travaux pour modifier à la hausse ou à la baisse les tarifs prévus en annexe du règlement. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier qu’il a appliqué une réfaction de 40 % sur le montant défini dans le règlement pour les années 2020 et 2021 afin de prendre en compte la non-réalisation de certains travaux. Au demeurant, le constat d’huissier du 17 septembre 2020 ne permet pas d’établir que certains travaux n’auraient pas été effectivement réalisés au cours de l’année 2021, parmi lesquels l’aménagement de bornes de fourniture d’eau et d’électricité, la mise en place d’un réseau wifi et la pose de portails d’accès verrouillés, comme le fait valoir le Grand port en défense. Le Grand port maritime de Bordeaux a pu légalement tenir compte des dépenses d’équipement et de rénovation du port de plaisance pour définir le tarif des redevances d’occupation de ce port, le cas échéant en diminuant le montant de la redevance collectée au regard de la non-réalisation de certains travaux, dès lors que les usagers sont susceptibles d’en tirer un avantage.

23. D’autre part, si les associations requérantes font valoir que les aménagements du port seraient de mauvaise qualité, elles n’apportent aucun élément permettant de mettre en rapport la valeur de ces aménagements et la valeur locative du domaine, s’abstenant en particulier de produire des termes de comparaison par référence aux grilles de redevances et aux équipements et services de ports de taille ou de situation comparable, alors que l’établissement public fait valoir en défense que ce port est devenu attractif au regard des travaux d’envergure réalisés autour des bassins à flot. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le montant de la redevance tel que prévu par le règlement du port de plaisance serait disproportionné au regard des avantages procurés par l’autorisation d’occupation du domaine public au titre des années 2020 et 2021. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques doit être écarté.

24. En cinquième lieu, le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que l’autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’elle déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l’un comme l’autre cas, en rapport avec l’objet de la norme qui l’établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier.

25. Il ressort des pièces du dossier que le règlement du port établit une tarification différente selon, d’une part, la longueur des bateaux, et d’autre part, la durée de l’occupation. Les associations requérantes, qui se bornent à soutenir que ces différences ne sont pas fondées sur un motif d’intérêt général, n’apportent aucun élément de nature à établir qu’elles ne sont pas en rapport avec l’objet de la redevance d’occupation du domaine public portuaire ni qu’elles seraient disproportionnées, ce qui ne ressort d’ailleurs pas des pièces du dossier. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d’égalité doit être écarté.

26. En sixième lieu, d’une part, aux termes de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen :  » La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée « . D’autre part, aux termes de l’article L. 2125-5 du code général de la propriété des personnes publiques :  » En cas de retard dans le paiement des redevances dues pour l’occupation ou l’utilisation du domaine public d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1, les sommes restant dues sont majorées d’intérêts moratoires au taux légal « . Cet article étant à vocation supplétive, il n’est pas de nature à remettre en cause le pouvoir du gestionnaire du domaine de fixer les conditions financières des occupations se rapportant à son domaine, et notamment de fixer un taux d’intérêt majoré.

27. L’article 5 du règlement contesté prévoit que :  » En cas de non-paiement des sommes dues à la date de l’échéance fixée sur la facture et après une relance écrite de la Maison du port, l’occupant se verra appliquer automatiquement 100% de pénalités de retard, ainsi que l’impossibilité d’accéder au ponton, d’ajouter des crédits d’eau et d’électricité (badge désactivé) auxquelles s’ajoutera l’ensemble des frais occasionnés par le recouvrement « .

28. Il ressort des pièces du dossier que le taux de pénalité de 100 % prévu à l’article 5 cité au point précédent, dès lors qu’il est similaire à celui prévu par les dispositions de l’article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques en cas de stationnement sans autorisation d’un bateau et qu’il n’est appliqué par les autorités du port qu’après relance écrite, n’apparaît pas excessif et il ne méconnaît par suite pas les dispositions de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

29. En septième lieu, le moyen tiré des incohérences techniques entachant la grille tarifaire n’est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé.

30. En huitième et dernier lieu, les  » conditions générales de vente  » annexées au règlement, qui ont pour seul objet de résumer les dispositions prévues par le règlement et rappeler aux occupants du domaine public leurs droits et obligations, ne peuvent être regardées, en dépit de leur intitulé inapproprié, comme des conditions générales de vente au sens de l’article L. 111-1 du code de la consommation, de sorte que le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté.

31. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d’annulation du règlement du port de plaisance et de ses annexes doivent être rejetées, de même que les conclusions à fin d’injonction.

Sur les frais liés au litige :

32. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du Grand Port Maritime de Bordeaux, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les associations requérantes demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge des deux associations requérantes une somme globale de 1 500 euros au titre des frais d’instance exposés par le Grand Port Maritime de Bordeaux en application de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l’association des usagers des bassins à flot et de l’association Lagon Bleu est rejetée.

Article 2 : L’association des usagers des bassins à flot et l’association Lagon Bleu verseront au Grand Port Maritime de Bordeaux une somme globale de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à l’association des usagers des bassins à flot, à l’association Lagon Bleu et au Grand Port Maritime de Bordeaux.

Délibéré après l’audience du 22 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pouget, président,

M. Josserand, conseiller,

M. Frézet, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 avril 2023.

Le rapporteur,

L. M Le président,

L. POUGET

La greffière,

M-A PRADAL

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière

 

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x