Céder son Cabinet de propriété industrielle : quid de l’action en responsabilité du client ?

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Céder son Cabinet de propriété industrielle : quid de l’action en responsabilité du client ?
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La cession d’un fonds libéral (cabinet de conseil en propriété industrielle CPI) sans clause de reprise de passif permet d’échapper à une action en responsabilité au titre du manquement à l’obligation du CPI (dépôt de marque à l’international non effectif).

Affaire Cash Express Groupe

En 2012-2013, la société Cash Express Groupe a demandé au cabinet [J] de déposer la marque internationale “Cash Express, L’Eco Reflexe” et a reçu, le 11 avril 2013, la confirmation de l’enregistrement effectué, avec une durée de protection de 10 ans.  

Selon acte en date du 25 avril 2016, M. [P] [J] a cédé son fonds libéral à la société AIR.

Il est apparu qu’une société, Vidéo 2001, avait procédé à l’inscription de trois marques similaires à la marque « Cash Express » en Suisse. Un litige a suivi concernant la protection de la marque Cash Express en Suisse.  M. [P] [J] a écrit le 28 juillet 2016 qu’il n’y avait aucune marque Cash Express enregistrée définitivement en Suisse au nom de Cash Associés. Le 14 décembre 2016, il a effectué une déclaration de sinistre auprès de son assureur, la société Covea Risks.

 

La cession d’un fonds libéral

 

La juridiction a considéré que la cession d’un fonds libéral n’emporte pas de plein droit cession du passif des obligations dont le vendeur pourrait être tenu, sauf stipulation contraire. 

Or, en l’espèce, l’acte de cession de fond libéral de conseil en propriété intellectuelle signé par M. [P] [J] et la société AIR le 25 avril 2016, et enregistré au SIE le 6 juin 2016, précise que la vente n’emporte transfert d’aucun passif du vendeur à l’acquéreur. En outre, le vendeur déclare qu’à la date du transfert de propriété aucun litige né ou à naître ne l’oppose à l’un des clients et que tous litiges l’ayant opposé à d’éventuels anciens clients sont définitivement terminés et soldés. Le vendeur garantit en conséquence l’acquéreur contre toutes les conséquences dommageables, notamment financières, qui pourraient résulter de tels litiges avant la date de transfert de propriété.

Cette clause est claire et dépourvue de toute ambiguïté.

Par ailleurs, au vu des courriers adressés au mois de juillet 2016 par le conseil de la société Cash Express Groupe, le litige relatif aux marques déposées par la société Vidéo 2001 en Suisse est apparu postérieurement à ladite cession et la société Cash Express Groupe indique, au demeurant, qu’elle a découvert la défaillance du cabinet [J] le 28 juillet 2016.

L’appelante reconnaît dans ses écritures que les dispositions relatives à l’opposabilité aux tiers d’une cession de fonds de commerce ne s’appliquent pas à la cession de fonds libéral. Elle ne saurait déduire de la liberté de choix des clients qui doit être sauvegardée une obligation de notification de la cession aux clients et l’absence d’opposabilité de la clause d’exclusion du passif.

 

La déclaration de sinistre juridique 

La déclaration de sinistre en date du 14 décembre 2016, effectuée par M. [P] [J] sur un courrier à l’en-tête du cabinet [J], n’emporte aucune reconnaissance de responsabilité, de plus fort de la part de la société AIR, et ne peut être assimilée à un quelconque engagement unilatéral de volonté, pris par cette dernière. La prise en charge de dossier, et non du sinistre ou d’une indemnisation, par l’assureur se réfère, comme le relève les intimées, à la défense des intérêts du cabinet [J]. Aucun accord amiable n’est intervenu, ce qu’admet la société Cash Express.

Contrairement à l’affirmation de l’appelante, il ne peut être retenu que la clause de garantie du vendeur, ci-dessus rappelée, signifie que la société AIR entend désintéresser tout créancier se manifestant à elle pour obtenir le règlement d’une créance postérieure, née d’un fait antérieur à la cession, et se faire rembourser ensuite par M. [P] [J].

La théorie d’une apparence trompeuse, avancée par la société Cash Express Groupe, est toute aussi inopérante pour accréditer la thèse d’un transfert d’une dette de responsabilité civile contentieuse, et ce en dépit de la qualité de gérant associé de M. [P] [J] au sein de la société AIR, aux côtés de son frère [M] [J]. Les pièces produites sont insuffisantes à établir, comme le soutient l’appelante, que la société AIR a contribué activement à créer l’apparence selon laquelle elle prendrait à sa charge les conséquences indemnitaires du préjudice allégué par la société Cash Express Groupe, puisqu’elle savait que l’activité de M. [P] [J], en redressement judiciaire, n’avait pas vocation à continuer.

Enfin, l’appelante invoque vainement une dette de réparation qui serait née le 6 juin 2019, alors que le dommage est constitué par l’absence de dépôt de la marque en Suisse en 2013 et qu’il a été découvert, au surplus, au mois de juillet 2016.

L’ordonnance a donc été confirmée sur l’absence de qualité à défendre de la société SPE [J] André et l’irrecevabilité de l’action engagée à son encontre.

*      *      *

Cour d’appel d’Aix-en-Provence, Chambre 1-3, 2 mars 2023, 22/07796

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

ARRÊT

DU 2 MARS 2023

N°2023/ 069

Rôle N° RG 22/07796 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJPOS

Société CASH EXPRESS GROUPE

C/

Société SPE [J] André

SA COVEA PROTECTION JURIDIQUE

Compagnie d’Assurances MMA ASSURANCES

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Talissa ABEGG

Me Jean-françois JOURDAN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Juge de la mise en état d’Aix en provence en date du 16 Mai 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/01034.

APPELANTE

SASCASH EXPRESS GROUPE prise en la personne de son représentant légal en exercice,

domiciliée [Adresse 10] – [Localité 2]

représentée Me Talissa ABEGG, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Julien RIVET de la SELEURL JRI, avocat au barreau de PARIS,

INTIMÉES

SARL SPE [J] André prise en la personne de son représentant légal en exercice,

domiciliée [Adresse 6] – [Localité 1]

SA COVEA PROTECTION JURIDIQUE, société anonyme à conseil d’administration, immatriculée au RCS du Mans sous le numéro 442 935 227, au capital social de 88.077.090,60 euros prise en la personne de son représentant légal en exercice,

domiciliée [Adresse 5], [Localité 9]

MMA ASSURANCES MUTUELLES DE FRANCE, société anonyme d’assurance mutuelle, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LE MANS sous le numéro 442 935 227, prise en la personne de son représentant légal en exercice,

domiciliée [Adresse 7] [Localité 4],

toutes trois représentées par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE, et ayant pour avocat plaidant Me Arnaud PERICARD de la SELARL ARMA, substitué par Maxilien MATTEOLI, avocats au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Décembre 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Béatrice MARS, conseillère et Mme Florence TANGUY, conseillère, chargées du rapport.

Mme Béatrice MARS, conseillère, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente

Mme Béatrice MARS, conseillère

Mme Florence TANGUY, conseillère

Greffière lors des débats : Madame Céline LITTERI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Février 2023 et prorogé au 2 Mars 2023

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 2 Mars 2023.

Signé par Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente et Monsieur Nicolas FAVARD, greffier lors du prononcé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

FAITS ET PROCÉDURE

La société Cash Express Groupe est une société de gestion de réseau de franchise, spécialisée dans le marché de la distribution de biens d’occasion, titulaire de la marque européenne ” Cash Express L’Eco Reflexe”, déposée le 21 novembre 2012.

La SPE [J] André, inscrite à l’ordre des avocats du barreau de Marseille depuis le 16 janvier 2020, est une société pluriprofessionnelle exerçant les professions réglementées d’avocat et de conseil en propriété industrielle et intellectuelle, spécialisée dans les marques. Elle vient aux droits de la société AIR.

En 2012-2013, la société Cash Express Groupe a demandé au cabinet [J] de déposer la marque internationale “Cash Express, L’Eco Reflexe” et a reçu, le 11 avril 2013, la confirmation de l’enregistrement effectué, avec une durée de protection de 10 ans.

Selon acte en date du 25 avril 2016, M. [P] [J] a cédé son fonds libéral à la société AIR.

Il est apparu qu’une société, Vidéo 2001, avait procédé à l’inscription de trois marques similaires à la marque « Cash Express » en Suisse.

Un litige a suivi concernant la protection de la marque Cash Express en Suisse.

M. [P] [J] a écrit le 28 juillet 2016 qu’il n’y avait aucune marque Cash Express enregistrée définitivement en Suisse au nom de Cash Associés.

Le 14 décembre 2016, il a effectué une déclaration de sinistre auprès de son assureur, la société Covea Risks.

Des procédures d’opposition ont été engagées. L’Institut fédéral de la propriété intellectuelle a rejeté celle formée par la société Cash Express Groupe contre la société Vidéo 2001 par décision en date du 27 avril 2017. Il a retenu celles formées par la société Vidéo 2001 et a révoqué l’enregistrement de la marque Cash Express en Suisse par deux décisions en date du 11 juin 2019.

Par acte d’huissier du 13 mai 2020, la société Cash Express Groupe a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Marseille la société AR (cabinet [J]) société à responsabilité limitée, venant aux droits de la société AIR, et la société MMA Assurances Mutuelles de France, venant aux droits de la société Covea Risks, aux fins d’indemnisation de ses préjudices.

Par ordonnance du 9 mars 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Marseille a renvoyé l’affaire devant le tribunal judiciaire de Aix-en-Provence.

*

Vu l’ordonnance d’incident en date du 16 mai 2022 aux termes de laquelle le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence a :

– déclaré irrecevable l’action judiciaire de la SAS Cash Express Groupe à l’encontre de la SPE [J] André pour défaut de qualité,

– déclaré irrecevable l’action judiciaire de la SAS Cash Express Groupe à l’encontre de MMA Assurances Mutuelles de France (venant aux droits de Covea Risks) pour défaut de qualité,

– rejeté les demandes de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que chaque partie prendra en charge la moitié des dépens ;

Vu l’appel relevé le 30 mai 2022 par la société Cash Express Groupe ;

Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 13 décembre 2022, par lesquelles la société Cash Express Groupe société par actions simplifiée demande à la cour de :

Vu les articles 1165 (ancien), 1382 (ancien), 1383 (ancien), 1984 et suivants du code civil,

Vu les articles 1100 et 1100-1 (nouveau) du code civil,

Vu l’article 802 du code de procédure civile,

– juger recevable et bien fondé en son appel,

En conséquence,

Infirmer l’ordonnance du Juge de la mise en état en ce qu’elle a :

– déclaré irrecevable l’action judiciaire de CEG à l’encontre de la SPE [J] André pour défaut de qualité,

– déclaré irrecevable l’action judiciaire de CEG à l’encontre de MMA ASSURANCES ASSURANCES Mutuelles de France (venant aux droits de Covea Risks) pour défaut de qualité,

– rejeté les demandes de condamnation au titre de l’article 700 CPC,

– dit que chaque partie prendra en charge la moitié des dépens.

Et, statuant à nouveau,

– juger que le cabinet [J] a qualité à défendre,

– juger recevable l’action initiée par la société Cash Express Groupe à l’encontre du Cabinet [J] (SPE [J] André),

– juger irrecevables les conclusions du cabinet [J] régularisées le 8 décembre 2022, lendemain de l’ordonnance de clôture du 7 décembre 2022,

– condamner le cabinet [J] à lui verser une somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner le cabinet [J] aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Abegg, avocat au barreau d’Aix-en-Provence, en application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 13 décembre 2022, par lesquelles la SPE [J] André et la société Covéa protection juridique demandent à la cour de :

Vu les articles 30 à 32 et 122 du code procédure civile,

– confirmer l’ordonnance rendue le 16 mai 2022,

– débouter en conséquence Cash Express Groupe de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions dirigées à l’encontre de la SPE [J] André et de Covéa,

Vu l’article 700 du code de procédure civile’

– condamner Cash Express Groupe à payer la SPE [J] André et Covéa la somme de 5.000 au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux entiers dépens ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 15 décembre 2022 ;

SUR CE

En vertu de l’article 31 du code de procédure civile prévoit, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L’article 32 du même code dispose qu’est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

Aux termes de l’article 122 du même code, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Pour retenir l’absence de qualité de la société SPE [J] André venant aux droits de la société AIR, le juge de la mise en état a rappelé la clause d’absence de transfert du passif du vendeur à l’acquéreur insérée dans l’acte de cession de fonds libéral de conseil en propriété intellectuelle, l’absence d’obligation de notifier cette clause aux créanciers et la naissance en 2013 de l’événement sur lequel se fonde la société Cash Express Groupe.

L’appelante conclut à l’infirmation de l’ordonnance. Elle soutient la recevabilité de l’action contre la société SPE [J]. Elle prétend qu’elle n’a pas été informée de la cession du fonds libéral et invoque l’inopposabilité de la clause de non-transfert du passif. Elle affirme que la société AIR s’est engagée à prendre en charge le préjudice subi. Elle déclare que c’est à partir du 6 juin 2019, date de la décision de l’Institut fédéral de la propriété intellectuelle, que son préjudice est devenu certain puisqu’elle a été définitivement empêchée d’enregistrer sa marque sur le territoire suisse, d’y déployer son réseau et d’y exploiter son activité commerciale.

A titre subsidiaire, elle avance la théorie de l’apparence et l’existence d’un quasi-engagement qui conduit à mettre à la charge d’AIR la dette de réparation. Elle met en exergue les liens qui existent entre M. [P] [J] (débiteur réel) et la société SPE [J] André (débitrice apparente) et elle-même, tiers trompé. Elle soutient que la société AIR a protégé M. [P] [J], lequel n’exerce plus la profession de conseil en propriété intellectuelle et ne manquerait pas de soulever la prescription si une action était dirigée à son encontre.

Les intimées répliquent que la SPE [J] André n’a pas qualité pour défendre. Elles exposent que M. [P] [J] a été le seul interlocuteur de la société Cash Express Groupe et arguent des agissements personnels de celui-ci . Elles soulignent que la cession de son fonds n’a pas emporté transfert du passif qui y était attaché. Elles soutiennent que la notification de la cession aux tiers ne s’imposait pas. Elles contestent toute intention de la société AIR de s’engager à l’égard d’un créancier de M. [P] [J]. Elles expliquent que le critère relatif à la certitude du dommage n’a aucun effet sur la détermination du débiteur de la créance de responsabilité, que le dommage est constitué par l’absence de dépôt de la marque en Suisse, et non par sa découverte par le créancier. Elles en déduisent que la créance revendiquée par Cash Express Groupe est née en 2013, peu important que le dommage ait été découvert ensuite.

La cession d’un fonds libéral n’emporte pas de plein droit cession du passif des obligations dont le vendeur pourrait être tenu, sauf stipulation contraire.

Or, en l’espèce, l’acte de cession de fond libéral de conseil en propriété intellectuelle signé par M. [P] [J] et la société AIR le 25 avril 2016, et enregistré au SIE le 6 juin 2016, précise que la vente n’emporte transfert d’aucun passif du vendeur à l’acquéreur. En outre, le vendeur déclare qu’à la date du transfert de propriété aucun litige né ou à naître ne l’oppose à l’un des clients et que tous litiges l’ayant opposé à d’éventuels anciens clients sont définitivement terminés et soldés. Le vendeur garantit en conséquence l’acquéreur contre toutes les conséquences dommageables, notamment financières, qui pourraient résulter de tels litiges avant la date de transfert de propriété.

Cette clause est claire et dépourvue de toute ambiguïté.

Par ailleurs, au vu des courriers adressés au mois de juillet 2016 par le conseil de la société Cash Express Groupe, le litige relatif aux marques déposées par la société Vidéo 2001 en Suisse est apparu postérieurement à ladite cession et la société Cash Express Groupe indique, au demeurant, qu’elle a découvert la défaillance du cabinet [J] le 28 juillet 2016.

L’appelante reconnaît dans ses écritures que les dispositions relatives à l’opposabilité aux tiers d’une cession de fonds de commerce ne s’appliquent pas à la cession de fonds libéral. Elle ne saurait déduire de la liberté de choix des clients qui doit être sauvegardée une obligation de notification de la cession aux clients et l’absence d’opposabilité de la clause d’exclusion du passif.

La déclaration de sinistre en date du 14 décembre 2016, effectuée par M. [P] [J] sur un courrier à l’en-tête du cabinet [J], n’emporte aucune reconnaissance de responsabilité, de plus fort de la part de la société AIR, et ne peut être assimilée à un quelconque engagement unilatéral de volonté, pris par cette dernière. La prise en charge de dossier, et non du sinistre ou d’une indemnisation, par l’assureur se réfère, comme le relève les intimées, à la défense des intérêts du cabinet [J]. Aucun accord amiable n’est intervenu, ce qu’admet la société Cash Express.

Contrairement à l’affirmation de l’appelante, il ne peut être retenu que la clause de garantie du vendeur, ci-dessus rappelée, signifie que la société AIR entend désintéresser tout créancier se manifestant à elle pour obtenir le règlement d’une créance postérieure, née d’un fait antérieur à la cession, et se faire rembourser ensuite par M. [P] [J].

La théorie d’une apparence trompeuse, avancée par la société Cash Express Groupe, est toute aussi inopérante pour accréditer la thèse d’un transfert d’une dette de responsabilité civile contentieuse, et ce en dépit de la qualité de gérant associé de M. [P] [J] au sein de la société AIR, aux côtés de son frère [M] [J]. Les pièces produites sont insuffisantes à établir, comme le soutient l’appelante, que la société AIR a contribué activement à créer l’apparence selon laquelle elle prendrait à sa charge les conséquences indemnitaires du préjudice allégué par la société Cash Express Groupe, puisqu’elle savait que l’activité de M. [P] [J], en redressement judiciaire, n’avait pas vocation à continuer.

Enfin, l’appelante invoque vainement une dette de réparation qui serait née le 6 juin 2019, alors que le dommage est constitué par l’absence de dépôt de la marque en Suisse en 2013 et qu’il a été découvert, au surplus, au mois de juillet 2016.

L’ordonnance sera donc confirmée sur l’absence de qualité à défendre de la société SPE [J] André et l’irrecevabilité de l’action engagée à son encontre.

L’appelante conclut également à l’infirmation de l’ordonnance s’agissant de la recevabilité de l’action initiée à l’encontre de la société MMA. Elle fait valoir qu’elle a assigné l’entité du groupe MMA, qui était l’interlocuteur de son conseil, à l’époque des discussions sur la prise en charge du sinistre.

La société Covéa Protection Juridique soutient que les MMA Assurances Mutuelles de France n’ont pas qualité pour défendre. Elle note que la société Cash Express Groupe n’établit pas que les MMA seraient l’assureur de la société SPE [J] André et met en exergue plusieurs incohérences. Elle fait valoir que l’appelante a assigné une société qu’il est impossible de déterminer, que les deux sociétés, dont les coordonnées semblent avoir été utilisés pour « créer » une troisième entité inconnue, ne peuvent être concernées par la présente instance, dès lors que la société Covéa Protection Juridique dénie sa garantie, puisqu’elle n’a jamais été assureur de responsabilité civile professionnelle, ce qui n’est d’ailleurs pas son activité, et que la société MMA Gestion est un intermédiaire en assurances ayant pour activité de placer des contrats d’assurance.

L’assignation du 13 mai 2020 mentionne les MMA assurances mutuelles de France venant aux droits de Covea Risks immatriculée sous le numéro 442 935 227 ayant son siège social [Adresse 7] [Localité 4]. Le numéro susvisé est celui de la société Covéa Protection Juridique, située [Localité 9], laquelle a divers administrateurs dont les MMA. La société MMA Gestion n° 479459570, situé [Adresse 7] à [Localité 4] exerce, quant à elle, l’activité d’agent général d’assurances.

La déclaration de sinistre du 14 décembre 2016 est adressée à la société Covea Risks [Adresse 3] à [Localité 8].

Les mails échangé au mois d’août et septembre 2017 avec Mme [L] [B], MMA Entrepreneurs ([email protected]) n’établissent pas, avec exactitude, l’organisme d’assurance venu aux droits de la société Covea Risks alors que plusieurs sociétés MMA existent.

Le juge de la mise en état relève, à juste titre, l’absence de démonstration que la société MMA visée dans l’assignation est l’assureur de la SPE [J] André.

En conséquence, il y a lieu de confirmer l’ordonnance sur l’irrecevabilité de l’action engagée à l’encontre de la société MMA Assurances venant aux droits de la société Covea Risks.

Il sera alloué aux intimées la somme de 1 500 euros au titre de leurs frais irrépétibles en cause d’appel .

L’appelante, partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition de la décision au greffe

Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Condamne la société Cash Express Groupe à verser à la société SPE [J] André et la société Covéa protection juridique la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Condamne la société Cash Express Groupe aux dépens d’appel ;

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE  


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