Conditions Générales de Vente : Cour d’appel de Nîmes, 5ème chambre sociale PH, 28 mars 2023, 21/00004

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Conditions Générales de Vente : Cour d’appel de Nîmes, 5ème chambre sociale PH, 28 mars 2023, 21/00004
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Extraits : 2 juillet 2018 seulement, ou encore d’une simulation d’achat d’une arme de catégorie B réalisée postérieurement et prévoyant la possibilité de choix pour l’acheteur entre Chronopost et Colissimo.

La cour constate surtout que l’appelante ne produit nullement le contrat la liant à Colissimo ou un quelconque document émanant de La Poste alors que l’intimée produit aux débats un extrait des conditions générales de vente de La Poste qui énoncent la restriction suivante : « Les envois contenant des armes (montées et/ou démontées) quelque soit leur catégorie, à destination d’un pays autre que la France métropolitaine (hors Corse) sont interdits ».

Il ressort en outre des déclarations très précises de Mme [N] [A], collègue de travail, que Mme [R] [B] n’a pas « défié » son employeur, comme il le prétend au

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Cour d’appel de Nîmes, 5ème chambre sociale PH, 28 mars 2023, 21/00004

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/00004 – N° Portalis DBVH-V-B7F-H4U5

LR/EB

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES

30 novembre 2020 RG :18/00645

S.A.R.L. APOLLO

C/

[B]

Grosse délivrée

le

à

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 28 MARS 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NIMES en date du 30 Novembre 2020, N°18/00645

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Leila REMILI, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

M. Michel SORIANO, Conseiller

Madame Leila REMILI, Conseillère

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 12 Janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 28 mars 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

S.A.R.L. APOLLO APOLLO (ARMURERIE FRANCAISE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Emmanuelle JONZO de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

Madame [R] [B]

née le 25 Mars 1987 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER – JEROME PRIVAT – THOMAS AUTRIC, avocat au barreau D’AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 30 Décembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 28 mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Mme [R] [B] a été engagée par la société Apollo (Armurerie Française) à compter du 20 novembre 2015 dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de préparateur de commandes, employée position II coefficient 160 de la convention collective des entreprises vente à distance.

Le 11 septembre 2018, elle était convoquée à un entretien préalable assorti d’une mise à pied à titre conservatoire et ce pour le 19 septembre 2018.

Le 28 septembre 2018, elle était licenciée pour faute grave.

Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre, le 20 novembre 2018, Mme [B] saisissait le conseil de prud’hommes de Nîmes en paiement d’indemnités de rupture et de diverses sommes lequel, par jugement contradictoire du 30 novembre 2020, a :

– requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

– condamné l’employeur au paiement des sommes suivantes :

* 3 008,98 euros à titre d’indemnité de préavis,

* 300,90 euros à titre de congés payés y afférents,

* 1065,67 euros à titre d’indemnité de licenciement,

* 903,57 euros pour rappel au titre de la mise à pied conservatoire,

* 90,36 euros à titre de congés payés y afférents,

* 1964,62 en deniers ou en quittances pour le rappel de la prime annuelle,

* 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la salariée du reste de ses demandes,

– débouté l’employeur de ses demandes,

– mis les dépens à la charge du défendeur.

Par acte du 04 janvier 2021, la société Apollon a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 29 septembre 2021, la SARL Apollon demande à la cour de :

– accueillir son appel,

– réformer le jugement dont appel en ce qu’il a requalifié le licenciement pour faute grave de Mme [B] en licenciement sans cause réelle et sérieuse

– infirmer le jugement dont appel en ce qu’il lui a accordé les sommes suivantes :

* 3 008.98 euros à titre d’indemnité de préavis, outre les congés payés y afférents

* 1 0657.67 euros à titre d’indemnité de licenciement

* 903.57 euros bruts à titre de rappel de salaire (mise à pied conservatoire) outre les congés payés y afférents

* 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens

– juger que le licenciement de Mme [B] repose sur une faute grave

En conséquence,

– débouter Mme [B] de toutes ses demandes, fins et conclusions

– condamner Mme [B] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Subsidiairement

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il l’a condamné au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouter Mme [B] de toutes autres demandes, fins et conclusions.

L’appelante soutient que :

– Mme [B] reconnaît avoir opposé un refus réitéré à la directive pourtant claire de son employeur au motif qu’elle l’avait « présumée illégale » alors que précisément elle n’était pas illégale.

– Mme [B] ne pouvait refuser d’appliquer une consigne claire et habituelle de son employeur et ce faisant, elle a remis en cause son pouvoir de direction et plus encore sa probité.

– Son licenciement pour faute grave est bien-fondé et c’est à tort que le conseil de prud’hommes a considéré que le refus réitéré d’exécuter la directive de son employeur ne justifiait pas un licenciement pour faute grave.

En l’état de ses dernières écritures en date du 5 juillet 2021, contenant appel incident, Mme [R] [B] demande à la cour de :

– recevoir l’appel de la société Apollo

– le dire mal fondé en la forme et au fond

En conséquence,

– confirmer le jugement en ce qu’il ne reconnait pas la faute grave et fait droit aux demandes d’indemnités de rupture et à la demande de rappel de la prime annuelle

– réformer le jugement en ce qu’il reconnait la cause réelle et sérieuse du licenciement et l’a déboute de sa demande d’indemnité pour licenciement abusif.

En conséquence,

– dire et juger que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse

– condamner l’employeur au paiement des sommes suivantes :

* 3008.98 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 300.90 euros à titre de congés payé y afférent,

* 1 065.67 euros à titre d’indemnité de licenciement,

* un rappel au titre de la mise à pied conservatoire à hauteur de 903.57euros,

* 90.36 euros de congés payés y afférent,

* 7500euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 964.62 euros à titre de rappel de prime annuelle

* 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– condamner l’employeur aux entiers dépens.

L’intimée fait valoir que :

-Il n’existe pas plus de cause réelle et sérieuse que de faute grave, le conseil de prud’hommes ayant considéré à tort que son licenciement était motivé par une cause réelle et sérieuse eu égard à son refus d’exécuter une directive donnée par son employeur.

-Or, elle n’a pas refusé d’exécuter les directives données mais sollicitait, d’obtenir en amont, un ordre écrit de la part de sa hiérarchie afin de ne pas voir sa responsabilité engagée le cas échéant.

-Mais elle n’a jamais obtenu cet écrit et a été mise à pied.

-Il n’y a donc pas eu de refus de la salariée d’effectuer les directives. Elle souhaitait uniquement être certaine que ce qu’elle faisait était bien légal. Si elle avait obtenu cet ordre écrit, elle aurait ensuite pu réaliser ce qui lui était demandé.

-En tout état de cause, il apparaît que la directive donnée par l’employeur était effectivement illégale dans la mesure où les envois d’armes par la poste en Corse sont interdits, les restrictions appliquées par colissimo mentionnent clairement que les envois d’armes, à destination d’un pays autre que la France métropolitaine (hors Corse), sont interdits. Il apparaît de surcroît que la réglementation imposée par le code de la sécurité intérieure prévoit des règles qui ne sont pas satisfaites par le service Colissimo mais uniquement par des transporteurs tels que Chronopost ou Geodis qui ont mis en place des « contrats armes » spéciaux pour être en totale conformité de la réglementation.

-La demande faite était donc totalement illégale de sorte qu’elle était totalement fondée à ne pas la satisfaire.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 19 octobre 2022 , le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 30 décembre 2022. L’affaire a été fixée à l’audience du 12 janvier 2023.

MOTIFS

Sur le licenciement pour faute grave

Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste il profite au salarié.

Quand le licenciement est prononcé pour faute grave, il incombe à l’employeur de prouver la réalité de la faute grave, c’est à dire de prouver non seulement la réalité de la violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail mais aussi que cette faute est telle qu’elle impose le départ immédiat du salarié, le contrat ne pouvant se poursuivre même pour la durée limitée du préavis.

Pour apprécier la gravité de la faute, le juge doit tenir compte des circonstances qui l’ont entourée et qui peuvent atténuer la faute et la transformer en faute légère.

Si un doute subsiste sur la gravité de la faute reprochée, il doit profiter au salarié.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige et c’est au regard des motifs qui y sont énoncés que s’apprécie le bien-fondé du licenciement.

En l’espèce, la lettre de licenciement du 28 septembre 2018 est rédigée comme suit :

« Mardi 11 septembre 2018, vous avez refusé d’expédier un colis contenant une arme à feu de catégorie B par Colissimo à destination de la Corse, prétextant l’illégalité de cette expédition.

[Z] [G], directeur commercial, notamment, a pris la peine à la demande de [H] [U], gérant, de vous expliquer de façon très pédagogique, en quoi cette expédition était pleinement légale et conforme à la loi et au décret du 6 septembre 2013 ainsi qu’au décret du 30 juin 2018.

Il vous a également été précisé que cette expédition était non seulement légale mais également conforme au contrat nous liant à Colissimo.

Malgré les efforts multiples de plusieurs membres de la direction pour vous convaincre de la légalité de cette opération vous avez réitéré votre refus de procéder à l’expédition de ce colis et vous avez persisté à soutenir l’illégalité de cette expédition et vouloir décider vous-même du bien fondé ou non des expéditions.

Il est important de noter que vous nous avez indiqué à plusieurs reprises ce jour-là que pour contester les décisions de la direction en matière de légalité vous vous êtes appuyé sur les consultations internet, notamment des forums, que vous avez pu consulter.

[H] [U], gérant de l’armurerie Française, est venu une dernière fois, en désespoir de cause, à 16h00 afin de vous demander très courtoisement de procéder à l’expédition.

Il a essuyé un nouveau refus de votre part.

Face à cette situation grave nous avons dû prendre la difficile décision de procéder à votre mise à pied immédiate à titre conservatoire avec une convocation simultanée à un entretien préalable au licenciement le mercredi 19 septembre 2018.

Le caractère de gravité est constitué non seulement par la réitération de l’insubordination ci-dessus décrite mais aussi et surtout par le fait que vous ayez la volonté d’interpréter vous même une législation complexe et de décider de la légalité ou non des expéditions en contestant l’interprétation et les décisions de la direction en matière de légalité.

Tout aussi inquiétant est le fait que, de vos propres dires, ce sont des consultations de forums sur internet qui fondent vos décisions d’expédier ou non une arme quelle que soit la décision et les consignes de la direction ce jour-là.

Outre des armes de chasse nous commercialisons des armes de catégorie B, armes de poing et fusils d’assaut type Kalachnikov ou AR15, carabines de précision à très longue distance.

Au-delà du fonctionnement interne de l’entreprise il y a là un enjeu important et grave de sécurité publique. La législation est complexe à interpréter, elle fait l’objet de modification régulière comme par exemple dernièrement avec le décret du 30 juin 2018 et fait également l’objet parfois de décisions préfectorales venant se superposer aux textes en vigueur.

En outre il peut arriver que certains services de police particuliers puissent nous donner des consignes exceptionnelles, notamment dans le cadre d’une enquête.

Par conséquent la décision d’expédition ou non d’une arme ne saurait relever d’aucune autre décision que celle de la direction. Il appartient aux différents personnels de l’entreprise de se conformer strictement et précisément aux consignes de la direction en la matière.

Les personnels de la direction sont formés et compétents. Ils sont également en contact permanent avec les autorités et la préfecture pour appliquer une consigne particulière ou un arrêté préfectoral. Ils disposent d’un diplôme de qualification professionnel dont le programme porte essentiellement sur une connaissance parfaite de la réglementation et de la législation.

Un personnel qui ne respecte plus strictement les consignes de la direction en matière de légalité de délivrance ou d’expédition des armes et qui souhaite interpréter lui-même la législation met de facto gravement en danger l’entreprise ainsi que la responsabilité judiciaire du gérant et compromet gravement la sécurité publique.

Ce jour vous refusez l’expédition d’une arme en prétendant interpréter la législation contre l’avis de tous les membres de la direction, le lendemain vous pouvez expédier une arme illégalement en faisant comme ce jour-là une mauvaise interprétation de la législation.

Notre métier est sans doute fait de grands principes généraux mais il surtout fait d’un très grand nombre de cas particuliers.

Lors de l’entretien préalable (…) nous vous avons exposé ces différentes considérations et nous avions l’espoir que ayez pris conscience de la gravité des faits.

Malheureusement nous n’avons pu que constater que si vous reconnaissez l’ensemble des faits sus mentionnés, vous considérez n’avoir commis aucune faute. Vous nous avez également redit que l’expédition de ce colis n’était pas légale.

De manière très inquiétante vous nous avez indiqué qu’outre avoir consulté des forums pour décider de la légalité de cette expédition vous auriez appelé par téléphone votre compagnon, lors de votre pause déjeuner ce jour-là, et celui-ci, selon vos dire, vous a conforté dans votre décision. Etant ici précisé, sauf erreur de notre part, que votre compagnon n’a aucune compétence ni expérience dans le domaine de la vente d’arme et qu’il ne fait aucunement partie de l’entreprise.

Nous n’avons pu que constater que vous n’aviez absolument pas pris conscience du caractère de gravité que constitue le fait que vous décidiez de ne plus vous conformer aux directives de la direction et vous entendiez décider vous-même de ce qui est légal ou non matière d’expédition des armes et en l’occurrence d’arme de catégorie B.

Compte tenu de ces faits, compte de l’entretien préalable au licenciement durant lequel vous ne semblez absolument pas avoir pris conscience de la gravité d’une telle situation pour l’entreprise et la sécurité publique, nous sommes au regret de vous informer de notre décision de procéder à votre licenciement pour faute grave (…) ».

Il ressort en réalité des propres conclusions de l’appelante et des pièces du dossier que la salariée a refusé d’expédier une arme de catégorie B par colissimo au motif que les envois d’armes par ce service étaient interdits en Corse et qu’elle considérait que seule l’entreprise Chronopost pouvait assurer ce service en toute sécurité.

Si effectivement, les dispositions du code de la sécurité intérieure (et non du décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013, lequel était abrogé au moment de faits), articles R. 315-12 et suivants, ne désignent pas le ou les prestataires de service habilités à assurer l’expédition des armes à feu, de sorte que rien ne permet d’exclure formellement Colissimo, pour autant, la SARL Apollo ne discute pas les arguments précis, présentés en pièce 12 sous chaque disposition réglementaire et selon lesquels Colissimo n’assure pas une sécurité renforcée des colis contrairement à Chronopost.

En outre, l’employeur n’apporte pas les éléments de preuve permettant d’établir que le refus de Mme [R] [B], le 11 septembre 2018, était illégitime, ce qui ne saurait ressortir des seules attestations de M. [Z] [G], directeur commercial ou de M. [M] [K], préparateur de commandes et embauché depuis le 2 juillet 2018 seulement, ou encore d’une simulation d’achat d’une arme de catégorie B réalisée postérieurement et prévoyant la possibilité de choix pour l’acheteur entre Chronopost et Colissimo.

La cour constate surtout que l’appelante ne produit nullement le contrat la liant à Colissimo ou un quelconque document émanant de La Poste alors que l’intimée produit aux débats un extrait des conditions générales de vente de La Poste qui énoncent la restriction suivante : « Les envois contenant des armes (montées et/ou démontées) quelque soit leur catégorie, à destination d’un pays autre que la France métropolitaine (hors Corse) sont interdits ».

Il ressort en outre des déclarations très précises de Mme [N] [A], collègue de travail, que Mme [R] [B] n’a pas « défié » son employeur, comme il le prétend aujourd’hui mais lui a simplement demandé un accord écrit.

Ainsi, Mme [N] [A] atteste « avoir assisté le mardi 11 septembre 2018 aux alentours de 14h30 au sein de l’armurerie française à une conversation téléphonique entre l’un de nos patrons M. [E] [I] et Mme [R] [B]. L’action c’est passée tel quel : j’ai reçu un appel téléphonique de M. [E] [I] me demandant de partir à l’entrepôt pour passer le téléphone sans fil à Mme [B] [R] car l’entrepôt n’avait plus de moyens de télécommunication. J’ai donc apporté ledit téléphone jusqu’à Mme [B] qui était en train d’emballer des colis avec M. [D] [C]. Elle a prit la communication, la fonction haut-parleur était activée pour qu’elle puisse continuer à travailler en même temps. J’ai donc pu assister et entendre la totalité de la conversation.

M. [E] [I] a demandé à Mme [R] [B] de faire partir une arme de catégorie B par colissimo à destination de la Corse, celle-ci a d’abord formulé à haute et intelligible voie ces craintes concernant cet envoi via colissimo, et pas par Chronopost qui était l’envoi habituel pour des colis armes de catégorie B par colissimo, car seul transporteur chez qui la société avait soucrit un contrat spécial armes (…). M. [I] lui a alors clairement demandé si elle refusée catégoriquement d’effectuer cet envoi.

Elle a répondu, que non elle ne refusait pas d’effectuer cet envoi mais qu’elle demandait juste un accord écrit (sans faire de simple signature sur le bon d’expédition) à ses responsables hiérarchiques l’autorisant à effectuer cet envoi par ce moyen, pour la rassurer. M. [I] a répondu qu’il n’avait pas d’écrit à lui fournir et que seul sa parole comptait. Mme [B] par professionalisme et afin de couvrir son intégrité a alors réitéré ces craintes et a expliqué qu’elle ne se sentait pas rassurée de procéder à une telle directive sans écrit. Plus tard dans l’après-midi Mme [B] a été convoquée et mise à pied pour ne pas avoir exécuté un ordre direct émanant de la direction et a eu 3 minutes pour quitter les locaux de la société (…). Mme [R] [B] a toujours fait preuve de la plus grande rigueur et du plus grand sérieux dans son travail au sein de l’armurerie française, et ce dans un univers très masculin. Je n’ai jamais eu l’occasion de constater un quelconque débordement de cette personne calme mais non moins efficace et il lui a fallut ce jour là un très grand courage pour exposer calmement à sa hiérarchie ses craintes ».

M. [Z] [G], dans l’attestation produite par l’employeur, indique pour sa part ne pas avoir entendu la réponse téléphonique de Mme [R] [B] et reconnaît avoir toujours eu de bonnes relations avec celle-ci dont il indique qu’elle était une personne plutôt efficace avant cet incident.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, la cour considère qu’en l’espèce le refus de Mme [R] [B] ne constitue pas une insubordination constitutive d’une faute grave, que son intention n’était pas de défier l’autorité de l’employeur mais que son opposition était motivée par la crainte de ne pas respecter les règles de sécurité en matière d’expédition d’armes. Si le salarié doit se conformer aux consignes et directives, y compris orales de son employeur, il n’est pas illégitime, dans un tel contexte, de solliciter un écrit, étant relevé d’ailleurs que la SARL Apollo n’a jamais fourni aucun document, ni au conseiller du salarié lors de l’entretien préalable du 19 septembre 2018 qui demandait la communication du document autorisant l’envoi par Colissimo, ni non plus dans le cadre de la présente procédure.

Il convient donc de considérer que le licenciement de Mme [R] [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré, qui ne contient d’ailleurs aucune motivation hormis l’indication selon laquelle la faute n’est pas suffisamment grave, sera infirmé en ce qu’il a retenu que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes financières

Mme [R] [B] est fondée à solliciter l’indemnité compensatrice de préavis prévue à l’article L. 1234-1 du code du travail, soit la somme de 3008,98 euros outre 300,89 euros de congés payés afférents, l’indemnité légale de licenciement suivant les dispositions de l’article R. 1234-2, soit 1065,67 euros ainsi que la somme de 903,57 euros outre 90,36 euros pour rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire.

Le jugement sera ici confirmé.

La condamnation en deniers ou en quittance au titre du rappel pour la prime annuelle n’est pas contestée.

Le jugement sera en conséquence confirmé.

En application des dispositions de l’article L.1235-3 telles qu’issues de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 tenant compte du montant de la rémunération de Mme [R] [B] (1504,49 euros en moyenne) et de son ancienneté en années complètes (deux années), dans une entreprise comptant moins de onze salariés, la cour retient que l’indemnité à même de réparer intégralement le préjudice de Mme [R] [B] doit être évaluée à la somme de 5265 euros correspondant à l’équivalent de trois mois et demi de salaire brut.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Les dépens de l’appel seront mis à la charge de la SARL Apollo et l’équité justifie d’accorder à Mme [R] [B] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

– Confirme le jugement rendu le 30 novembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Nîmes en ce qu’il a :

-condamné l’employeur au paiement des sommes suivantes :

* 3008,98 euros à titre d’indemnité de préavis,

* 300,90 euros à titre de congés payés y afférents,

* 1065,67 euros à titre d’indemnité de licenciement,

* 903,57 euros pour rappel au titre de la mise à pied conservatoire,

* 90,36 euros à titre de congés payés y afférents,

* 1964,62 en deniers ou en quittances pour le rappel de la prime annuelle,

* 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté l’employeur de ses demandes,

– mis les dépens à la charge du défendeur.

– L’infirme pour le surplus,

– Statuant à nouveau et y ajoutant,

– Dit que le licenciement de Mme [R] [B] est sans cause réelle et sérieuse,

– Condamne la SARL Apollo à payer à Mme [R] [B] la somme de 5265 euros à titre de dommages et intérêts,

– Rejette le surplus des demandes,

– Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la réception par l’employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation, et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées, que s’agissant des créances salariales à venir au moment de la demande, les intérêts moratoires courent à compter de chaque échéance devenue exigible, et qu’ils courent sur les sommes à caractère indemnitaire, à compter du jugement déféré sur le montant de la somme allouée par les premiers juges et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

– Condamne la SARL Apollo à payer à Mme [R] [B] la somme de 1500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne la SARL Apollo aux dépens d’appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 

 


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