Formalités légales et AG des Sociétés : Cour d’appel de Nouméa, Chambre commerciale, 2 mars 2023, 22/00041

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Formalités légales et AG des Sociétés : Cour d’appel de Nouméa, Chambre commerciale, 2 mars 2023, 22/00041
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N° de minute : 17/2023

COUR D’APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 2 mars 2023

Chambre commerciale

Numéro R.G. : N° RG 22/00041 – N° Portalis DBWF-V-B7G-TBL

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 6 mai 2022 par président du tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG n° 2022/18)

Saisine de la cour : 19 mai 2022

APPELANT

SOCIETE DE ROULAGE, D’EXPLOITATION ET DE NAVIGATION DE POUM (dite SONAREP), prise en la personne de son représentant légal en exercice,

Siège social : [Adresse 4]

Représentée par Me Nicolas MILLION de la SARL NICOLAS MILLION, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉS

M. [H] [S],

demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Morgan NEUFFER de la SELARL D’AVOCATS MORGAN NEUFFER, avocat au barreau de NOUMEA

M. [A] [D],

demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Morgan NEUFFER de la SELARL MORGAN NEUFFER, avocat au barreau de NOUMEA

Mme [T] [Z],

demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Morgan NEUFFER de la SELARL MORGAN NEUFFER, avocat au barreau de NOUMEA

M. [R] [Z],

demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Morgan NEUFFER de la SELARL MORGAN NEUFFER, avocat au barreau de NOUMEA

M. [U] [Z],

demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Morgan NEUFFER de la SELARL MORGAN NEUFFER, avocat au barreau de NOUMEA

M. [M] [Z],

demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Morgan NEUFFER de la SELARL MORGAN NEUFFER, avocat au barreau de NOUMEA

Mme [O] [X],

demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Morgan NEUFFER, avocat au barreau de NOUMEA

AUTRE INTERVENANT

S.E.L.A.R.L. MARY LAURE GASTAUD, ès qualités de mandataire judiciaire de la société SONAREP, désignée par jugement du tribunal mixte de commerce de Nouméa du 01/08/2022,

Siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Nicolas MILLION de la SARL NICOLAS MILLION, avocat au barreau de NOUMEA

S.C.P. CBF & ASSOCIES, ès qualités d’adminisrateur judiciaire de la société SONAREP, désignée par jugement du tribunal mixte de commerce de Nouméa du 01/08/2022,

Siège social : [Adresse 2]

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 30 janvier 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller,

Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,

qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Philippe ALLARD.

Greffier lors des débats : M. Petelo GOGO

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Cécile KNOCKAERT

ARRÊT :

– contradictoire,

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

– signé par M. Philippe ALLARD, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l’article R 123-14 du code de l’organisation judiciaire auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

***************************************

Selon assignation délivrée le 28 avril 2022, M. [H] [S], M. [A] [D], Mme [T] [Z], M. [R] [Z], M. [U] [Z], M. [M] [Z] et Mme [O] [X], qui se présentaient comme des associés minoritaires de la Société de roulage, d’exploitation et de navigation de Poum (Sonarep) et dénonçaient les conditions de convocation et de tenue des assemblées générales de cette société, ont attrait la société Sonarep devant le juge des référés de Nouméa pour obtenir la suspension des effets des convocations des 10 mars 2022 et 1er avril 2022 et des assemblées générales des 30 mars 2022 et du 9 avril 2022 ainsi que la désignation d’un mandataire ad hoc.

La société Sonarep s’est opposée à ces demandes en objectant que les requérants n’invoquaient aucune cause de nullité obligatoire et que les griefs allégués n’étaient pas fondés.

Selon ordonnance du 6 mai 2022, le juge des référés a :

– ordonné la suspension des effets de l’assemblée générale ordinaire de la société Sonarep en date du 30 mars 2022,

– ordonné la suspension des effets de l’assemblée générale extraordinaire de la société Sonarep en date du 9 avril 2022,

– désigné la SCP CBF associés, en la personne de Me [J], en qualité de mandataire ad hoc de la société Sonarep, avec pour seule mission de convoquer, dans les formes et délais prévus par la loi et les statuts sociaux, l’assemblée générale ordinaire de cette société, d’en fixer l’ordre du jour en lien avec les souhaits de tout ou partie des associés, mais en toute hypothèse, moyennant vérification de leur existence et de leur finalisation au regard des exigences légales, avec pour ordre du jour minimal l’approbation des comptes sociaux des exercices clos aux 30 juin 2019, 2020 et 2021, et de la présider dans les conditions et suivant les modalités légales et statutaires,

– dit que les frais et honoraires de ce mandataire seraient taxés in fine par le président du tribunal mixte de commerce de Nouméa,

– fixé les frais et honoraires provisionnels à la somme de 300.000 FCFP et donné mandat complémentaire au mandataire ad hoc de prélever cette somme, à titre provisionnel, sur l’un ou l’autre des comptes bancaires de la société Sonarep,

– dit n’y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes des requérants,

– débouté chacune des parties de sa demande au titre des frais irrépétibles,

– condamné la société Sonarep aux dépens de l’instance.

Le premier juge a retenu en substance :

– que l’huissier de justice désigné suivant ordonnance du 17 mars 2022 pour assister à l’assemblée générale du 30 mars 2022 avait été, du fait de l’action des dirigeants de la société Sonarep, dans l’impossibilité d’y assister de sorte qu’il était impossible de « démêler l’écheveau des contradictions des témoignages » sur le déroulement de ces assemblées générales ;

– que le président des assemblées générales avait commis « de véritables fraudes aux droits » de certains associés ;

– que les demandeurs avaient été victimes d’un trouble manifestement illicite qui imposait la suspension des effets des deux assemblées ;

– que le profond conflit qui opposait les actionnaires depuis plusieurs années interdisait toute tenue sereine des assemblées générales et rendait nécessaire la désignation d’un mandataire ad hoc chargé de convoquer et présider l’assemblée générale.

Selon requête déposée le 19 mai 2022, la société Sonarep a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives transmises le 11 janvier 2023, la société Sonarep et la selarl Gastaud, ès qualités, qui déclare intervenir volontairement à la cause, demandent à la cour de :

– dire l’appel recevable et bien fondé ;

– infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a suspendu les effets de l’assemblée générale extraordinaire de la société sonarep du 9 avril 2022 ;

– débouter les intimés de leurs demandes de ce chef ;

– condamner les intimés, ensemble, à payer à la société Sonarep la somme de 250.000 FCFP au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de l’instance, dont distraction au profit de la sarl Nicolas Million.

Selon conclusions transmises le 15 septembre 2022, M. [H] [S], M. [A] [D], Mme [T] [Z], M. [R] [Z], M. [U] [Z], M. [M] [Z] et Mme [O] [X] prient la cour de :

à titre principal,

– confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise, notamment en ce qu’elle a suspendu les effets de l’assemblée générale extraordinaire du 9 avril 2022 ;

à titre subsidiaire,

– suspendre les effets de la cinquième résolution adoptée lors de l’assemblée générale du 9 avril 2022 visant le droit de vote des actionnaires ;

– dire que les frais et dépens seront mis à la charge de la société Sonarep ;

– condamner la société Sonarep à verser la somme de 100.000 FCFP à chacun des intimés au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans une note déposée le 13 janvier 203, la SCP CBF associés, ès qualités d’administrateur judiciaire de la société Sonarep, demande à la cour de déclarer recevable son intervention volontaire.

Sur ce, la cour,

1) Les parties ne remettent en cause ni la désignation d’un mandataire ad hoc ayant mission de convoquer l’assemblée générale ordinaire pour approbation des comptes sociaux, ni la suspension des effets de l’assemblée générale ordinaire du 30 mars 2022. Le débat est circonscrit à la suspension des effets de l’assemblée générale extraordinaire du 9 avril 2022.

2) La société appelante conteste la suspension des effets de l’assemblée générale extraordinaire du 9 avril 2022 en soutenant que cette assemblée était intervenue dans le prolongement de l’assemblée extraordinaire convoquée pour le 30 mars 2022, qui n’avait alors pu délibérer en l’absence de quorum, et que cette seconde assemblée s’était valablement tenue puisque le quorum de 25 % avait été respecté.

En vertu de l’article de l’article L 225-96 du code du commerce, seule l’assemblée générale extraordinaire de la société Sonarep, société anonyme, était habilitée à adopter les résolutions examinées le 9 avril 2022 qui emportaient modification des statuts.

En application de ce même article, cette assemblée générale n’a pu délibérer valablement que si les actionnaires présents ou représentés possédaient au moins, sur première convocation, le tiers des actions ayant le droit de vote et, sur deuxième convocation, le quart des actions.

L’article L 225-121 du code du commerce déclare « nulles les délibérations prises en violation » de l’article L 225-96.

Selon le procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire du 9 avril 2022, les actionnaires présents ou représentés possédaient 28 % des parts. Il en résulte que cette assemblée générale n’a pu valablement se tenir que sur deuxième convocation.

La société Sonarep affirme que l’assemblée générale extraordinaire avait été ouverte le 30 mars 2022 mais n’avait pu valablement délibérer en l’absence de quorum : c’est pourquoi il avait été procédé à une seconde convocation conforme aux dispositions de l’article 33-III de statuts, dans un délai de six jours. Les intimés rétorquent que, compte tenu de la confusion qui régnait, l’assemblée générale n’avait pas été ouverte mais été ajournée de sorte que la convocation de la nouvelle assemblée générale supposait l’accord du conseil d’administration.

L’article R 225-107 du code du commerce dispose que « si, à défaut du quorum requis, une assemblée ne peut délibérer régulièrement, il en est dressé procès-verbal par le bureau de cette assemblée. »

Si la société Sonarep est en mesure de produire une feuille d’émargement relative à l’assemblée générale extraordinaire du 30 mars 2022, elle est, en revanche, dans l’incapacité de produire le procès-verbal prévu par l’article précité, ni d’ailleurs le moindre procès-verbal établi lors de la prétendue assemblée. Autrement dit, l’appelante ne démontre pas qu’une assemblée générale extraordinaire s’est effectivement tenue le 30 mars 2022.

En l’état de ces éléments, l’assemblée du 9 avril 2022 ne pouvant pas être considérée comme une seconde assemblée au sens de l’article L 225-96 alinéa 2 du code du commerce, les résolutions prises lors de cette assemblée encourent la nullité en application de l’article L 225-121 du code du commerce. Dans ces conditions, c’est à bon droit qu’en réponse à cette situation manifestement illicite, le premier juge a suspendu les effets de cette assemblée.

Par ces motifs

La cour,

Déclare recevables les interventions volontaires de la SCP CBF associés et de la selarl Gastaud, ès qualités ;

Confirme l’ordonnance entreprise ;

Déboute les intimés de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Sonarep aux dépens d’appel.

Le greffier, Le président.


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