Droit à l’image des biens : rien d’absolu
Droit à l’image des biens : rien d’absolu
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Acheter un bien chez un fournisseur (de mobilhomes) ne confère aucun droit sur l’image de ces biens au bénéfice de l’acheteur.

Photographies de mobilhomes

La société Milialie a mis en demeure la société Eteca de cesser l’exploitation de certaines photographies montrant les mobilhomes, prises par la société Ypo Camp dans l’environnement du site de son camping ‘Les Cyprès’, qui auraient été présentes sur les sites internet du camping ‘La Puerta Del Sol’ de la société Eteca et sur différents sites internet d’agences de réservation prestataires de ce camping.

Le 5 juin 2020, la société Milialie a assigné la société Eteca afin de demander notamment le retrait des photographies litigieuses utilisées par les agences de réservation.

 

Ni originalité, ni droit privatif  

 

Or,  la société Eteca ne se prévaut d’aucun droit privatif sur le modèle des mobil homes ainsi livrés, et ceux-ci d’un modèle très communément répandu, ne constituent pas en eux-mêmes un signe distinctif permettant d’identifier son propre camping.

Par ailleurs, les photographies ainsi produites, dont la présentation ne comporte aucune originalité particulière, ne permettent pas de déterminer qu’elles ont été prises au camping Les Cyprès, exploité par la société Milialie.

La teneur des photographies produites annexées au constat d’huissier, ne permet pas de distinguer en quoi la gamme ou la qualité des mobil homes y figurant serait différente ou supérieure de celle proposées effectivement par la société Eteca.

Dès lors, aucun risque de confusion de la part de la clientèle n’existe entre les deux campings exploités par chacune des parties.

 

Aucun parasitisme 

Et alors que la société Eteca a procédé à l’acquisition des mobilhomes dont elle a fait la promotion à l’aide des photographies litigieuses, ainsi que le démontre son bon de commande produit par la société Milialie, il ne peut pas lui être fait grief de s’être s’immiscée dans le sillage de cette dernière aux fins d’en tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et du son savoir-faire de cette dernière.

Enfin, la société Milialie ne démontre pas qu’au moment où ces photographies auraient été utilisées par la société Eteca pour promouvoir son propre camping, les mobilhomes qui y étaient représentés n’étaient pas physiquement présents et effectivement proposés à la clientèle dans le camping exploité par cette dernière.

Aucune manoeuvre de détournement de clientèle, comportement parasitaire, ni acte de concurrence déloyale n’est ainsi caractérisé.

 

Commercialiser des produits similaires ou compatibles 

 

Pour rappel, il n’est pas interdit de commercialiser des produits compatibles avec ceux d’un concurrent. Mais l’action en concurrence déloyale, nonobstant la libre concurrence, tend à sanctionner l’accomplissement de procédés déloyaux au regard des règles présidant à la probité commerciale.

Le parasitisme est un comportement fautif résultant de la volonté délibérée d’un tiers de se placer dans le sillage d’autrui, en tirant indûment profit notamment de la notoriété, du savoir-faire, ou des investissements d’un tiers.

L’action en responsabilité pour agissements parasitaires n’est pas subordonnée à l’existence d’un risque de confusion. L’action en concurrence déloyale et en parasitisme est de nature délictuelle.

 

* * *

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ARRET N°132

CL/KP

N° RG 21/03225 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GM6J

S.A.R.L. SARL MILIALIE

C/

S.A.S. ETECA

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 21 MARS 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/03225 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GM6J

Décision déférée à la Cour : jugement du 14 septembre 2021 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHE SUR YON.

APPELANTE :

S.A.R.L. MILIALIE représentée par son gérant en exercice.

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Ayant pour avocat postulant Me Bruno MAZAUDON de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS.

Ayant pour avocat plaidant Roland RINALDO, avocat au barreau de NANTES.

INTIMEE :

S.A.S. ETECA, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS.

Ayant pour avocat plaidant Me Tiphaine MOREAU, avocat au barreau de ANGERS.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 18 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

La société à responsabilité limitée Milialie (la société Milialie) exploite un camping sous la dénomination ‘Les Cyprès’ à [Localité 2], dont le gérant est Monsieur [B] [U], également gérant de l’associé majoritaire de cette dernière, la société à responsabilité limitée [U].

La société par actions simplifiée Eteca (la société Eteca) exploite elle aussi un camping, nommé ‘La Puerta Del Sol’, à [Localité 4], soit à une dizaine de kilomètres du camping de la société Milialie.

La société Eteca a commandé 16 mobil homes Trigano Evolution à la société Ypo Camp Espace pour un prix de 322 166,40 euros.

La société [U] a commandé 29 mobil homes Trigano Evolution à cette même société pour un prix de 583 244,11 euros.

La société Milialie a mis en demeure la société Eteca de cesser l’exploitation de certaines photographies montrant les mobilhomes, prises par la société Ypo Camp dans l’environnement du site de son camping ‘Les Cyprès’, qui auraient été présentes sur les sites internet du camping ‘La Puerta Del Sol’ de la société Eteca et sur différents sites internet d’agences de réservation prestataires de ce camping.

Le 5 juin 2020, la société Milialie a assigné la société Eteca afin de demander notamment le retrait des photographies litigieuses utilisées par les agences de réservation.

En dernier lieu, la société Milialie a demandé :

Avant dire droit,

– d’enjoindre à la société Eteca de communiquer les éléments suivants:

– le premier bon de commande auprès de la société Ypo Camp n°14147 annulé et remplacé par le bon de commande n°13751 du 9 février 2017 communiqué par la société Eteca en pièce 2 ;

– le(s) bon(s) de livraison de 16 mobil homes bois Trigano Evolution commandés le 9 février 2017 ;

– les brochures de réservation du camping ‘La Puerta Del Sol’ en format papier pour les années 2017 et 2018 ;

A titre principal,

– de dire et juger que la société Eteca avait commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire en utilisant des photographies montant les mobil homes du camping ‘Les Cyprès’ pour faire la promotion du camping ‘ La Puerta Del Sol’ et avait ainsi engagé sa responsabilité envers la société Milialie ;

en conséquence,

– de rejeter l’ensemble des prétentions de la société Eteca;

– d’interdire à la société Eteca toute exploitation commerciale des photographies montrant les mobilhomes du camping ‘Les Cyprès pour faire la promotion du camping ‘Puerta Del Sol’;

– de condamner la société Eteca à indemniser le préjudice financier subi par la société Milialie à hauteur de 716 277 euros ;

– de condamner la société Eteca à indemniser le préjudice moral subi par la société Milialie à hauteur de 30 000 euros ;

– de condamner la société Eteca à lui verser la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles ;

– d’ordonner la publication du jugement à intervenir aux frais de la société Eteca pendant une durée ininterrompue de deux mois sur le site internet de la société Eteca, accessible à l’url htpps://www.campinglapuertadelsol.com/, sur un bandeau fixe, en haut de page, dans un encadré étant précisé que la taille des caractères de l’encadré ne pourrait être inférieure à celle utilisée pour des encadrés habituels existants sur ledit site ainsi que la publication dans deux éditions locales des quotidiens Presse Océan et Ouest-France dont les dates de parution seraient choisies par elle-même, sans que le coût de chaque publication excédât 5000 euros du texte suivant: ‘Par jugement en date du […] rendu par le tribunal de commerce de La Roche sur Yon, la société Eteca exploitant le camping ‘ La Puerta Del Sol’ a été condamnée pour actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société Milialie, exploitant le camping ‘Les Cyprès’ pour avoir utilisé des photographies du camping ‘Les Cyprès’ pour faire la promotion du camping ‘La Puerta Del Sol’.

En dernier lieu, la société Eteca a demandé de :

A titre principal,

– prononcer la nullité de l’assignation à bref délai délivrée par la société Milialie le 28 mai 2020, compte tenu de la nullité manifeste de l’autorisation d’assigner à bref délai, délivrée au visa de l’article 858 du code de procédure civile, sans qu’il fût justifié d’une quelconque urgence, pourtant nécessaire en la matière par les dispositions de l’article 858 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire,

– juger que la société Milialie ne justifiait pas d’une faute commise par la société Eteca, pas plus qu’elle ne justifiait d’un préjudice subi à raison de cette prétendue faute qu’elle ne rapportait pas ;

en conséquence,

– débouter la société Milialie de toutes ses prétentions ;

A titre reconventionnel,

– condamner la société Milialie au versement d’une somme de 30 000 euros en raison de préjudice subi du fait de cette procédure urgente, injustifiée, et initiée volontairement par la société Milialie à l’ouverture de la saison touristique de la société Eteca;

– condamner la société Milialie à lui payer la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par jugement en date du 14 septembre 2021, le tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon a :

– dit et jugé que l’assignation à bref délai signifiée à la société Eteca n’était pas nulle et a débouté la société Eteca de ce chef de demande ;

– débouté la société Milialie de sa demande avant dire droit d’injonction de production de pièces ;

– dit et juge que la société Milialie ne justifiait pas avoir subi d’acte de concurrence déloyale commis par la société Eteca;

– débouté la société Milialie de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions;

– débouté la société Eteca de sa demande indemnitaire reconventionnelle injustifiée;

– condamné la société Milialie à payer à la société Eteca la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le 12 novembre 2021, la société Milialie a relevé appel de ce jugement, en intimant la société Eteca.

Le 15 août 2022, la société Milialie a demandé à la cour de :

A titre principal :

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé que l’assignation à bref délai signifiée à la société Eteca n’était pas nulle et a débouté la société Eteca de ce chef de demande ;

– infirmer le jugement ce qu’il a :

– dit et jugé que la société Eteca ne justifiait pas avoir subi d’acte de concurrence déloyale commis par elle-même ;

– débouter la société Milialie de l’ensemble de ses demandes ;

– condamner la société Milialie à lui payer à la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles;

Statuant à nouveau :

– dire et juger que la société Eteca avait commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire en utilisant des photographies montrant les mobilhomes du camping « Les Cyprès » pour faire la promotion du camping « La Puerta del Sol » et avait ainsi engagé sa responsabilité envers la société Milialie

En conséquence,

– interdire à la société Eteca toute exploitation commerciale des photographies montrant les mobilhomes du camping « Les Cyprès » pour faire la promotion du camping « La Puerta del Sol» ;

– condamner la société Eteca à indemniser son préjudice financier à hauteur de 761 277 euros ;

– condamner la société Eteca à indemniser son préjudice moral subi à hauteur de 30 000 euros ;

A titre subsidiaire et si par extraordinaire, la cour ne s’estimait pas suffisamment éclairée sur le montant du préjudice subi,

– désigner tel expert ou sapiteur qu’il lui plairait afin d’évaluer le montant du préjudice subi par la société Milialie avec les missions suivantes :

– se faire communiquer par les parties tous documents qu’il estimerait utiles à l’accomplissement de sa mission ;

– entendre les parties et recueillir leurs dires et explications ;

– entendre tout sachant ;

– examiner et décrire les préjudices se rapportant aux actes de concurrence déloyale de la société Eteca ;

– évaluer l’ensemble des préjudices subis par la société Milialie et rassembler les éléments propres à en établir le montant ;

– adresser aux parties un pré-rapport avant le dépôt du rapport définitif;

– s’expliquer techniquement dans le cadre de ces chefs de mission sur les dires et observations des parties qu’il aurait recueillis après leur avoir fait part de sa note de synthèse ou de son pré-rapport;

– dire que l’Expert judiciaire effectuerait sa mission conformément aux dispositions du code de procédure civile et déposerait son rapport dans le délai qui lui serait imparti ;

– condamner la société Eteca à supporter les frais d’expertise ;

En tout état de cause :

– ordonner la publication du jugement à intervenir aux frais de la société Eteca pendant une durée ininterrompue de deux mois sur le site Internet de la société Eteca accessible à l’url http://www.campinglapuertadelsol.com/, sur un bandeau fixe, en haut de page, dans un encadré étant précisé que la taille des caractères ne pourrait être inférieure à celle utilisée pour les titres des encadrés habituels existants sur ledit site ainsi que dans deux éditions locales des quotidiens Presse Océan et Ouest-France dont les dates de parution seraient choisies par la société Milialie, sans que le coût de chaque publication excédât 5.000 euros du texte suivant : « Par arrêt en date du [.] rendu par la Cour d’appel de Poitiers, la société ETECA exploitant le camping « La Puerta del Sol » a été condamnée pour actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société MILIALIE, exploitant le camping « Les Cyprès » ;

– condamner la société Eteca à verser à la société Milialie la somme de 10 000 euros au titre de des frais irrépétibles ;

– condamner la société Eteca aux entiers dépens des deux instances incluant le coût des procès-verbaux d’huissier.

Le 13 mai 2022, la société Eteca a demandé à la cour de :

– confirmer le jugement rendu en ce qu’il a:

– dit et jugé que la société Milialie ne justifiait pas avoir subi d’acte de concurrence déloyale commis par la société Eteca ;

– débouté la société Milialie de l’ensemble de ses demandes ;

– condamné la société Milialie à lui payer à la société Gfa Elec la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles ;

– infirmer le jugement rendu en ce qu’il a :

– dit et jugé que l’assignation à bref délai signifiée à la société Eteca n’était pas nulle et l’a déboutée de ce chef de demande,

– débouté la société Eteca de sa demande indemnitaire reconventionnelle injustifiée ;

Et statuant à nouveau et y ajoutant:

– la recevoir dans ses demandes et les juger fondées ;

– débouter la société Milialie de sa demande de dommages et intérêts, laquelle était infondée et injustifiée ;

– débouter la société Milialie de sa demande d’expertise judiciaire ;

– débouter la société Milialie de sa demande de publication du jugement ;

– débouter la société Milialie de l’intégralité de ses demandes lesquelles étaient infondées et injustifiées ;

– condamner la société Milialie au paiement de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– condamner la société Milialie au remboursement des frais irrépétibles pour un montant de 5000 euros.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

Le 4 janvier 2023, a été rendue l’ordonnance de clôture.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la nullité de l’assignation:

Selon l’article 856 du code de procédure civile, l’assignation devant le tribunal de commerce doit être délivrée 15 jours avant la date de l’audience.

Selon l’alinéa 1 de l’article 858 du même code, en cas d’urgence, les délais de comparution et de remise de l’assignation peuvent être réduits par autorisation du président du tribunal.

La société Eteca soulève la nullité de l’assignation à bref délai qui lui a été délivrée, selon elle sur la base d’une ordonnance non motivée, faute d’avoir caractérisé la condition essentielle d’urgence pour justifier une telle procédure.

Elle fait ainsi valoir avoir cessé début 2018 l’utilisation des photographies litigieuses, fait observer que les constats d’huissier produits par son adversaire datent d’avril 2019, et remarque que celle-ci a attendu le mois de juin 2020 pour introduire son action, sans vérifier que les faits qu’elle alléguait étaient toujours d’actualité, et sans pouvoir valablement se prévaloir avoir été empêchée d’agir plus tôt au motif erroné pris de la situation exceptionnelle liée à la pandémie de covid 19.

Mais en ce que l’assignation délivrée le 5 juin 2020 à la société Eteca fait suite à l’autorisation d’assigner à bref délai, donnée par ordonnance du président de commerce, constituant une mesure d’administration judiciaire insusceptible de tout recours, la demande de nullité de l’assignation ne peut pas prospérer.

Surabondamment, il sera observé que l’affaire initialement appelée à l’audience du premier juge du 9 juin 2020, certes 4 jours après la délivrance de l’assignation, a fait l’objet de renvois successifs aux audiences des 23 juin 2020, 8 septembre 2020 et finalement 9 février 2021.

De la sorte, la société Eteca ne justifie pas au surplus que la brièveté initiale de sa convocation en justice ait pu l’empêcher de disposer d’un temps suffisant pour préparer sa défense.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a dit et jugé que l’assignation à bref délai signifiée à la société Eteca n’était pas nulle et a débouté la société Eteca de ce chef de demande.

Sur la demande principale de la société Milialie :

Il n’est pas interdit de commercialiser des produits compatibles avec ceux d’un concurrent.

Mais l’action en concurrence déloyale, nonobstant la libre concurrence, tend à sanctionner l’accomplissement de procédés déloyaux au regard des règles présidant à la probité commerciale.

Le parasitisme est un comportement fautif résultant de la volonté délibérée d’un tiers de se placer dans le sillage d’autrui, en tirant indûment profit notamment de la notoriété, du savoir-faire, ou des investissements d’un tiers.

L’action en responsabilité pour agissements parasitaires n’est pas subordonnée à l’existence d’un risque de confusion.

L’action en concurrence déloyale et en parasitisme est de nature délictuelle.

Il ressort des pièces du dossier que:

– le 29 février 2017, la société Milialie a passé commande auprès de la société Ypo Camp de 29 bungalows ‘Evolution 33 et 29, qui lui ont été livrés au cours du deuxième trimestre 2017, soit avant la saison estivale;

– le 9 février 2017, la société Eteca a passé commande auprès de la société Ypo Camp de plusieurs bungalows ‘Evolution 33 et 29, qui lui ont été livrés après ceux commandés par la société Milialie;

– le commercial de la société Ypo Camp a pris des photos des bungalows qui avaient été livrés à la société Milialie et dans le camping exploité par celle-ci après leur livraison.

La sommation interpellative du 28 janvier 2017 fait ressortir que le préposé de la société Ypo Camp déclare avoir pris les photographies des bungalows installés et commandés par la société Milialie aux fins de promouvoir sa propre gamme auprès de ces clients, et qu’il les a transmises à la société Eteca car celle-ci souhaitait faire l’acquisition de produits identiques à ceux pris en photo, et qu’elle a d’ailleurs choisis; la personne requise a précisé qu’elle n’avait pas autorisé la société Eteca à se servir de ces photographies, purement promotionnnelles, pour faire la promotion de son propre camping.

En outre, la société Milialie reconnaît s’être servie des photographies ainsi prises des bungalows livrés à la société Milialie sur son propre site internet pour faire la promotion de son propre camping, mais avoir mis fin à leur usage au début de l’année 2018.

Mais la société Eteca ne se prévaut d’aucun droit privatif sur le modèle des mobil homes ainsi livrés, et ceux-ci d’un modèle très communément répandu, ne constituent pas en eux-mêmes un signe distinctif permettant d’identifier son propre camping.

Par ailleurs, les photographies ainsi produites, dont la présentation ne comporte aucune originalité particulière, ne permettent pas de déterminer qu’elles ont été prises au camping Les Cyprès, exploité par la société Milialie.

La teneur des photographies produites annexées au constat d’huissier, ne permet pas de distinguer en quoi la gamme ou la qualité des mobil homes y figurant serait différente ou supérieure de celle proposées effectivement par la société Eteca.

Dès lors, aucun risque de confusion de la part de la clientèle n’existe entre les deux campings exploités par chacune des parties.

Et alors que la société Eteca a procédé à l’acquisition des mobilhomes dont elle a fait la promotion à l’aide des photographies litigieuses, ainsi que le démontre son bon de commande produit par la société Milialie, il ne peut pas lui être fait grief de s’être s’immiscée dans le sillage de cette dernière aux fins d’en tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et du son savoir-faire de cette dernière.

Enfin, la société Milialie ne démontre pas qu’au moment où ces photographies auraient été utilisées par la société Eteca pour promouvoir son propre camping, les mobilhomes qui y étaient représentés n’étaient pas physiquement présents et effectivement proposés à la clientèle dans le camping exploité par cette dernière.

Aucune manoeuvre de détournement de clientèle, comportement parasitaire, ni acte de concurrence déloyale n’est ainsi caractérisé.

La société Milialie sera donc déboutée de l’ensemble de ses demandes, et le jugement sera confirmé de ce chef.

La société Milialie sera encore déboutée de ses autres demandes formées à hauteur de cour.

Sur la demande indemnitaire reconventionnelle de la société Eteca:

Le droit d’ester en justice ne dégénère en abus qu’avec la caractérisation d’une intention dolosive ou malicieuse.

Au cas d’espèce, le caractère particulièrement mal fondé de l’action de la société Milialie n’est pas suffisamment de nature à faire ressortir une telle intention.

La société Eteca sera donc déboutée de sa demande indemnitaire reconventionnelle, et le jugement sera confirmé de ce chef.

* * * * *

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société Milialie aux dépens de première instance et à payer à la société Eteca la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance.

La société Milialie sera aussi condamnée aux dépens d’appel et à payer à la société Eteca la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS

:

La cour,

statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions;

Y ajoutant:

Déboute la société à responsabilité limitée Milialie de ses prétentions;

Condamne la société à responsabilité limitée Milialie aux entiers dépens d’appel et à payer à la société par actions simplifiée Eteca la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


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