Votre panier est actuellement vide !
M. B A exerce, en tant qu’entrepreneur individuel, depuis le 1er juillet 2005, une activité de création artistique, dans le domaine de l’animation graphique et numérique. Il est soumis, à raison de cette activité, à l’impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. A compter du 17 novembre 2011, M. A a transféré son établissement à Roubaix, en zone franche urbaine. L’activité de M. A a fait l’objet, au cours de l’été 2017, d’une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2014 au 31 mai 2017. A l’issue de ce contrôle, l’administration a entendu remettre en cause, au motif que les conditions requises pour y prétendre n’étaient pas satisfaites, l’exonération prévue, en faveur des activités exercées en zone franche urbaine, par l’article 44 octies A du code général des impôts, à laquelle M. A avait estimé pouvoir prétendre au titre de son activité
* * *
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B A a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015 et 2016.
Par un jugement no 1901139 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2021, et par un mémoire, enregistré le 24 février 2023, qui n’a pas été communiqué, M. A, représenté par la SELARL Initia Avocats, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d’annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015 et 2016 ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 960 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
– en opérant, le 29 juin 2017, une visite sur le lieu de son exploitation, afin, selon les termes de la proposition de rectification qui lui a été adressée le 28 septembre 2017, repris par la réponse apportée, le 11 janvier 2018, à ses observations, de constater l’existence, ainsi que l’état des moyens d’exploitation à la disposition de l’entreprise, de même que la présence du personnel employé par celle-ci, le vérificateur a réalisé un contrôle inopiné au sens de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales ; or, à la date de ce contrôle, l’administration ne lui avait pas encore envoyé l’avis de vérification, ce qu’elle n’a fait que le 5 juillet 2017 ; à cette date, l’administration ne l’avait pas non plus mis en possession de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; en conséquence, la procédure d’imposition méconnaît les dispositions de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales et est ainsi entachée d’une irrégularité de nature à justifier la décharge des impositions en litige ;
– ce contrôle a eu lieu à un moment où il n’était pas présent dans les locaux de son entreprise et s’est déroulé en présence du propriétaire des locaux, qui n’était pas habilité à le représenter et avec lequel le vérificateur s’est entretenu, ce qui constitue une cause supplémentaire d’irrégularité de la procédure d’imposition.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2021, le ministre de l’économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les visites opérées par le service, à deux reprises, le 29 juin 2017 et le 4 juillet 2017, sur le lieu d’exploitation de l’entreprise de M. A, au cours desquelles le vérificateur a pu s’entretenir, en l’absence de l’intéressé, avec le propriétaire des locaux, ne présentent pas le caractère d’un contrôle inopiné au sens des dispositions de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales, en l’absence de véritables constatations matérielles, et n’ont pas davantage constitué le commencement de la vérification de comptabilité dont a ensuite fait l’objet cette activité, laquelle n’a débuté qu’à la date à laquelle le vérificateur a commencé à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par M. A au titre de l’exercice de l’activité en cause ; en conséquence, le fait que l’avis de vérification du 5 juillet 2017 n’a été adressé à M. A qu’après ces visites sur place est sans incidence sur la régularité de la procédure d’imposition.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
– et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
:
1. M. B A exerce, en tant qu’entrepreneur individuel, depuis le 1er juillet 2005, une activité de création artistique, dans le domaine de l’animation graphique et numérique. Il est soumis, à raison de cette activité, à l’impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. A compter du 17 novembre 2011, M. A a transféré son établissement à Roubaix, en zone franche urbaine. L’activité de M. A a fait l’objet, au cours de l’été 2017, d’une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2014 au 31 mai 2017. A l’issue de ce contrôle, l’administration a entendu remettre en cause, au motif que les conditions requises pour y prétendre n’étaient pas satisfaites, l’exonération prévue, en faveur des activités exercées en zone franche urbaine, par l’article 44 octies A du code général des impôts, à laquelle M. A avait estimé pouvoir prétendre au titre de son activité. L’administration a fait connaître à l’intéressé sa position sur ce point, par une proposition de rectification qu’elle lui a adressée le 28 septembre 2017. Les observations présentées par M. A n’ayant pas convaincu le service d’adopter une autre position, les suppléments d’impôt sur le revenu, résultant, au titre des années 2015 et 2016, de ces rehaussements ont été mis en recouvrement le 30 avril 2018, pour un montant total de 49 919 euros en droits et pénalités. Sa réclamation ayant été rejetée, M. A a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a ainsi été assujetti au titre des années 2015 et 2016. Il relève appel du jugement du 1er juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
2. Aux termes du I de l’article L. 13 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l’espèce : ” Les agents de l’administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. / () “. Aux termes de l’article L. 47 du même livre, dans sa rédaction applicable : ” () une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l’envoi ou la remise d’un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. : / () / En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l’exploitation ou de l’existence et de l’état des documents comptables, l’avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles. L’examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu’à l’issue d’un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil. “.
3. Une vérification de comptabilité consiste à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par un contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont le service prend alors connaissance et dont il peut remettre en cause l’exactitude. Un contrôle inopiné effectué conformément aux dispositions précitées du quatrième alinéa de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales ne constitue pas le commencement d’une vérification de comptabilité. Toutefois, s’il résulte de ces dernières dispositions, éclairées par les travaux préparatoires, que le législateur a entendu reconnaître à l’administration la possibilité de procéder à un contrôle inopiné des éléments physiques de l’exploitation ou de l’existence et de l’état des documents comptables, il a subordonné cette possibilité, ainsi qu’il ressort des dispositions précitées de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales, à la condition que l’avis de vérification de comptabilité soit remis au contribuable au début des opérations de constatations matérielles et que l’examen au fond des documents comptables ne commence qu’à l’issue d’un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister d’un conseil.
4. Il résulte de l’instruction qu’avant même de débuter la vérification de comptabilité à laquelle il envisageait de soumettre l’activité individuelle exercée par M. A, le vérificateur s’est rendu, le 29 juin 2017, au lieu d’exploitation de cette activité, situé à Roubaix, afin, selon les termes de la proposition de rectification adressée le 28 septembre 2017 à M. A, de constater l’existence, ainsi que l’état, des moyens d’exploitation à la disposition de l’entreprise, de même que la présence de personnel employé par celle-ci. M. A étant absent au moment de cette visite, le vérificateur a été reçu, sur place, par le propriétaire des locaux, qui lui a fait visiter ceux donnés en location à M. A et qui lui a indiqué, à cette occasion, que ces locaux se limitaient à un espace de travail commun équipé d’un accès à l’internet, mais qu’ils ne comportaient aucun bureau dédié. Il résulte également de l’instruction, et notamment de la même proposition de rectification, que le vérificateur s’est de nouveau rendu sur place, le 4 juillet 2017, et que, M. A étant absent lors de cette visite, il a été, cette fois encore, reçu par le propriétaire des lieux. Or, il est constant que le vérificateur n’a pas adressé, par courrier recommandé, un avis de vérification à M. A dans des conditions permettant à l’intéressé d’être en possession de cet avis au début des opérations de constatations matérielles, mais qu’il ne lui a envoyé ce document que le 5 juillet 2017.
5. Si le ministre soutient que ces deux visites impromptues n’avaient pas le caractère d’un contrôle inopiné, au sens des dispositions précitées du quatrième alinéa de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales, dès lors que le vérificateur ne s’est, selon lui, pas livré, à l’occasion de ces visites, à de véritables constatations matérielles, il ressort des termes mêmes de la proposition de rectification adressée le 28 septembre 2017 à M. A que ces visites ont permis au vérificateur, dans le cadre de sa visite des locaux donnés en location à l’intéressé, de constater que celui-ci était absent sur les lieux, et qu’il ne disposait pas, au lieu d’établissement de son entreprise, d’une véritable implantation matérielle, telle un bureau, ni de moyens d’exploitation lui permettant d’exercer une activité économique générant des recettes professionnelles. Or, il résulte des termes mêmes de la proposition de rectification que l’administration, pour remettre en cause le bénéfice du régime d’exonération prévu à l’article 44 octies A du code général des impôts sous lequel M. A avait placé son activité, s’est fondée sur le constat, alors opéré, de l’absence d’une véritable implantation matérielle et de moyens d’exploitation en zone franche urbaine, quand bien même ces constats ont ensuite été confortés par l’examen par le vérificateur, dans le cadre de la vérification de comptabilité dont a fait l’objet l’entreprise, des documents comptables mis à sa disposition. Par suite, et alors même que les visites des 29 juin et 4 juillet 2017 n’ont pas constitué, par elles-mêmes, le début de la vérification de comptabilité, faute pour le vérificateur d’avoir, à ces occasions, procédé à un examen critique des documents comptables de l’entreprise, au regard notamment des déclarations souscrites par le contribuable dans le cadre de son exploitation, ces visites présentent le caractère d’un contrôle inopiné, au sens des dispositions précitées du quatrième alinéa de l’article L. 47 du livre des procédures fiscales. Dès lors, en n’adressant pas à M. A un avis de vérification selon des modalités propres à permettre au contribuable d’en disposer au début des opérations de constatation matérielle auxquelles il s’est livré, mais en n’adressant cet avis à l’intéressé que le 5 juillet 2017, c’est-à-dire après avoir achevé ces opérations, le vérificateur a entaché d’irrégularité la procédure d’imposition mise en œuvre à l’égard de M. A.
6. Toutefois, il appartient au juge de l’impôt, qui constate que la procédure d’imposition mise en œuvre à l’égard d’un contribuable est entachée d’irrégularité, d’apprécier, dans le cadre de son office, si l’irrégularité ainsi commise a eu, dans l’espèce qui lui est soumise, pour effet de priver le contribuable d’une garantie attachée à la procédure d’imposition et si cette irrégularité est, en conséquence, susceptible de justifier une décharge de l’imposition établie à l’issue de cette procédure. Or, il ne résulte pas de l’instruction que l’irrégularité ainsi commise par l’administration aurait privé M. A d’une garantie de procédure, alors que le contribuable a été mis à même, dans le cadre de la vérification de comptabilité dont son activité a fait l’objet, puis au cours de la procédure qui a suivi, de discuter, avec l’assistance d’un conseil, des constatations opérées sur place par le vérificateur. Cette irrégularité doit, dès lors, être regardée comme dépourvue d’incidence sur les impositions en litige. Enfin, la double circonstance que le vérificateur n’a pu, lors de ces contrôles inopinés, rencontrer M. A mais qu’il s’est entretenu avec un tiers non habilité pour représenter celui-ci ne peut être regardée, eu égard à l’objet et à la portée d’un tel contrôle, comme constituant une irrégularité de procédure.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige. Par voie de conséquence, les conclusions qu’il présente sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B A et au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera transmise à l’administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l’audience publique du 2 mars 2023 à laquelle siégeaient :
– M. Christian Heu, président de chambre,
– M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,
– M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023.
Le rapporteur,
Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,
Signé : C. Heu
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Nathalie Roméro
1
N°21DA02141
1
3
N°”Numéro”