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M. A B, joueur de football professionnel, a exercé son activité au sein du Football Club de Nantes de 2008 à 2014 avant son transfert au club de football Lazio di Roma, au cours de l’année 2014, qui l’a conduit à transférer son domicile en Italie. A la suite d’un contrôle sur pièces de son dossier fiscal portant sur les années 2013 et 2014, l’administration fiscale a relevé que M. B n’avait souscrit à aucune déclaration de revenus au titre de l’année 2014 et que s’il s’était placé, pour l’imposition de ses rémunérations de sportif des années 2011 et 2012, sous le régime dérogatoire de l’étalement, sur une durée de trois ans, prévu à l’article 100 bis du code général des impôts
* * * REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu la procédure suivante :
Par une ordonnance n° 1902776 du 19 juin 2019, enregistrée le 20 juin 2019 au greffe du tribunal, la présidente du tribunal administratif de Nice a transmis au tribunal, en application de l’article R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée par M. A B.
Par une requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nice le 10 juin 2019, M. A B, représenté par Me Nahon, demande au tribunal :
1°) à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 ainsi que des pénalités correspondantes ;
2°) à titre subsidiaire, de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 résultant de l’application, pour chacune de ces années, du régime de l’étalement des revenus ;
3°) en tout état de cause, de prononcer la décharge des pénalités pour manquement délibéré ;
4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 10 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
– il n’a pas été destinataire des différents actes de poursuites et avis d’imposition, de sorte que les impositions en résultant n’ont pas été rendues exigibles ; ces avis de même que tous les actes de poursuites diligentés en vue du recouvrement sont donc nuls ; par suite, en l’absence d’acte interruptif ou suspensif valable, l’action en recouvrement est atteinte par la prescription conformément à l’article L. 247 du livre des procédures fiscales ;
– la proposition de rectification du 24 mars 2016 ne lui a pas été régulièrement notifiée ;
– elle est insuffisamment motivée ;
– en s’abstenant de lui adresser une mise en demeure de souscrire une déclaration de revenus au titre de l’année 2014, l’administration fiscale a entaché la procédure d’imposition d’irrégularité justifiant qu’il soit déchargé des impositions en cause ;
– l’administration fiscale a manqué à son devoir de loyauté ;
– il n’était redevable d’aucune cotisation à l’impôt sur le revenu au titre de l’année 2014 dans la mesure où il a été transféré au club de football italien Lazio di Roma en janvier 2014, de sorte qu’il n’était plus résident fiscal français au regard des dispositions de l’article 4 B du code général des impôts et de la convention fiscale entre la France et l’Italie ;
– faute de démarche expresse en ce sens, il ne peut pas être regardé comme ayant révoqué son option pour le régime d’imposition dérogatoire prévu à l’article 100 bis du code général des impôts de ses salaires de joueur de football perçus au titre des années 2013 et 2014 ; c’est par erreur qu’il a omis de spécifier l’exercice de cette option, pourtant explicitement mise en œuvre pour les revenus perçus en 2011 et 2012, en souscrivant à sa déclaration des revenus perçus en 2013 ;
– il doit bénéficier, à cet égard, du droit à l’erreur prévu par la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 ;
– il est fondé à se prévaloir, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, s’agissant de l’exigence d’une demande expresse pour que la révocation de l’option soit acquise, des paragraphes 110 et 130 de l’instruction publiée au bulletin officiel des finances publiques – Impôts le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-BNC-SECT-20-20 et du paragraphe 70 de l’instruction publiée au bulletin officiel des finances publiques – Impôts le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-RSA-BASE-10 ;
– en tout état de cause, quand bien même il devait être regardé comme ayant révoqué ladite option, il est fondé à se prévaloir, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 110 de l’instruction publiée au bulletin officiel des finances publiques – Impôts le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-BNC-SECT-20-20, qui reprend la réponse ministérielle à M. de Villiers, député, publiée au Journal officiel du 15 août 1994 sous le n° 14365 qui prévoit la possibilité d’exercer l’option pour le régime prévu par l’article 100 bis du code général des impôts à la suite d’une procédure de redressement ou par voie de réclamation contentieuse ;
– eu égard à l’application, au titre des années 2013 et 2014, des dispositions de l’article 100 bis du code général des impôts, il y a lieu, une fois appliquée aux montants des salaires en cause la déduction forfaitaire de 10%, de fixer la base imposable à 580 231 euros au titre de l’année 2013 et à 495 023 euros au titre de l’année 2014 ;
– du fait de son mariage en Italie en novembre 2014, il convient de calculer l’impôt au titre de l’année 2014 en retenant un quotient familial de deux parts ;
– il était en droit de déduire de son revenu imposable au titre de l’année 2013 la somme de 23 000 euros dès lors qu’il avait les moyens de verser une telle pension alimentaire à sa mère ;
– les pénalités infligées, à savoir les intérêts de retard, la majoration de 40% prévu par le a de l’article 1729 du code général des impôts et la majoration de 10% prévu par l’article 1758 A du code général des impôts, procèdent d’un cumul de sanctions, lequel a été jugé confiscatoire et contraire au droit européen ;
– l’administration fiscale n’apporte pas la preuve du caractère délibéré du manquement dès lors qu’il est de nationalité étrangère, avait confié son dossier fiscal à un conseil et n’a jamais exprimé sa volonté de révoquer l’option prévue à l’article 100 bis du code général des impôts ; partant, l’infliction d’une pénalité de 40% au seul motif qu’il n’a pas fourni de pièces permettant de justifier la déduction de la pension alimentaire versée à sa mère est disproportionnée.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 décembre 2019, le directeur du contrôle fiscal Centre-Ouest conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code civil ;
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Thierry, conseillère,
– et les conclusions de M. Vauterin, rapporteur public.
:
1. M. A B, joueur de football professionnel, a exercé son activité au sein du Football Club de Nantes de 2008 à 2014 avant son transfert au club de football Lazio di Roma, au cours de l’année 2014, qui l’a conduit à transférer son domicile en Italie. A la suite d’un contrôle sur pièces de son dossier fiscal portant sur les années 2013 et 2014, l’administration fiscale a relevé que M. B n’avait souscrit à aucune déclaration de revenus au titre de l’année 2014 et que s’il s’était placé, pour l’imposition de ses rémunérations de sportif des années 2011 et 2012, sous le régime dérogatoire de l’étalement, sur une durée de trois ans, prévu à l’article 100 bis du code général des impôts et applicable aux salaires des sportifs en vertu de l’article 84 A du même code, il devait être regardé comme ayant révoqué l’option pour ce régime à compter de l’imposition de ses rémunérations de sportif de l’année 2013, eu égard aux conditions dans lesquelles il a déclaré ces revenus au titre de cette même année. Partant, dans la mesure où, en dépit de la révocation de l’option, le régime ci-dessus exposé continue de produire ses effets pour les sommes perçues au cours des années couvertes par l’option jusqu’à la fin de la période de référence choisie par le contribuable, l’administration fiscale a rehaussé les revenus déclarés au titre de l’année 2013 à concurrence du solde des revenus des années 2011 et 2012 soumis à l’étalement, ainsi que les revenus de source française perçus en 2014, à concurrence du solde des revenus de l’année 2012 soumis à l’étalement. Enfin, l’administration fiscale a remis en cause la déduction des revenus imposables au titre de l’année 2013 d’une pension alimentaire d’un montant de 23 000 euros. Il en est résulté des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre des années 2013 et 2014, qui ont été notifiées à M. B par une proposition de rectification du 24 mars 2016, à laquelle il s’est abstenu de répondre. Les impositions litigieuses ont été mises en recouvrement le 30 juin 2016 pour un montant global de 280 632 euros au titre de l’année 2013 et de 219 532 euros au titre de l’année 2014. La réclamation préalable de M. B tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires a été rejetée par une décision du 10 avril 2019. M. B demande au tribunal, à titre principal, la décharge des impositions litigieuses et, à titre subsidiaire, la réduction de celles-ci.
Sur les conclusions aux fins de décharge et de réduction des impositions litigieuses :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d’imposition :
2. En premier lieu, alors qu’il est constant que M. B n’a pas présenté au comptable chargé du recouvrement de l’impôt la réclamation préalable exigée par les dispositions de l’article L. 281 du livre des procédures fiscales, les moyens tirés de l’irrégularité de notification des avis relatifs aux impositions recouvrées par voie de rôle et des actes de poursuite propres au recouvrement desdites impositions, qui se rattachent exclusivement au contentieux du recouvrement et non à celui de l’assiette, sont sans incidence sur la régularité de la procédure d’imposition ou le bien-fondé des impositions supplémentaires qui en ont résulté.
3. En deuxième lieu, il résulte de l’instruction, notamment de la proposition de rectification du 24 mars 2016, que le service a fait application de la procédure de rectification contradictoire prévue à l’article L. 55 du livre des procédures fiscales, laquelle n’implique pas pour l’administration fiscale l’obligation d’adresser préalablement une mise en demeure au contribuable de satisfaire à ses obligations déclaratives, cette obligation n’étant requise qu’en vue de la mise en œuvre de la procédure de taxation d’office prévue aux articles L. 66 et L. 67 du livre des procédures fiscales. Ainsi, M. B n’est pas fondé à soutenir que la procédure d’imposition engagée à son encontre serait entachée d’irrégularité, faute pour l’administration fiscale de lui avoir adressé au préalable une mise en demeure de souscrire à une déclaration de revenus au titre de l’année 2014.
4. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales : ” L’administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. () “.
5. D’une part, il résulte des dispositions citées au point 4 que pour être régulière, la notification d’une proposition de rectification prévue par ces dispositions doit être effectuée à la dernière adresse communiquée par le contribuable à l’administration fiscale et, en cas de changement de domicile, il appartient au contribuable d’établir qu’il a accompli les diligences nécessaires pour informer l’administration de sa nouvelle adresse.
6. Il résulte de l’instruction que la proposition de rectification du 24 mars 2016 a été adressée à M. B, par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception, au lieu d’exercice de sa profession en Italie, le club de football italien Lazio situé à Rome. Le pli correspondant a été distribué à son destinataire le 1er avril 2016 ainsi qu’en attestent les mentions de l’avis de réception dument signé ainsi que celles de l’historique d’acheminement du pli issu du site internet de La Poste produits par l’administration fiscale. Ces éléments permettent d’établir que la proposition de rectification en cause a été régulièrement notifiée à M. B sur son lieu de travail, l’administration fiscale n’étant pas tenue, contrairement à ce que soutient le requérant, d’adresser la proposition de rectification à son domicile, à plus forte raison dans la mesure où ce dernier n’a pas informé l’administration de sa nouvelle adresse de domiciliation en Italie à la suite de son déménagement au cours de l’année 2014. Par suite, le moyen tiré de l’irrégularité de la notification de la proposition de rectification doit être écarté.
7. D’autre part, il résulte des dispositions citées au point 4 que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l’impôt concerné, de l’année d’imposition et de la base d’imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l’administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.
8. Il résulte de l’instruction que la proposition de rectification adressée à M. B précise les dispositions légales retenues comme fondement des impositions en litige, les impositions concernées, les années d’imposition, le montant des rectifications envisagées et les motifs sur lesquels le service s’est fondé pour rehausser les bases d’imposition du requérant et leur appliquer des intérêts de retard et des pénalités. Elle indique en outre le détail du calcul au terme duquel le service a déterminé la fraction des revenus qu’il convenait d’ajouter à la base imposable de chacune des deux années litigieuses à raison des effets produits par le régime de l’étalement d’imposition prévu à l’article 100 bis du code général des impôts pour lequel le contribuable avait opté pour l’imposition des revenus perçus en 2011 et 2012. La proposition de rectification l’a donc mis en mesure de formuler ses observations de façon entièrement utile, sans qu’il soit besoin au demeurant qu’elle contienne un exposé détaillé du calcul du montant des contributions exceptionnelles sur les hauts revenus dues pour chacune des années en cause. Dans ces conditions, le moyen tiré de l’insuffisante motivation de la proposition de rectification du 24 mars 2016 doit être écarté comme manquant en fait. Par suite, M. B, qui n’a été, à cet égard, privé d’aucune garantie attachée à la procédure de rectification contradictoire, n’est pas fondé à soutenir que les impositions en litige doivent être déchargées en application des dispositions de l’article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, contrairement à ce que soutient M. B, l’administration fiscale n’a pas méconnu son devoir de loyauté et que le requérant n’a été, à cet égard, privé d’aucune garantie attachée à la procédure de rectification contradictoire.
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions litigieuses :
10. Aux termes de l’article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : ” Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s’étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l’imposition, en démontrant son caractère exagéré () “. M. B s’étant abstenu de présenter des observations dans le délai de trente jours qui lui était imparti à la suite de la réception de la proposition de rectification qui lui a été régulièrement notifiée le 1er avril 2016, il lui revient de démontrer le caractère exagéré des impositions auxquelles il a été assujetti.
S’agissant de la résidence fiscale au titre de l’année 2014 :
11. Il résulte de l’instruction que M. B n’a souscrit à aucune déclaration de revenus en France au titre de l’année 2014. S’il soutient qu’il n’était pas tenu de souscrire une telle déclaration en France dans la mesure où sa résidence fiscale se situait en Italie à compter de janvier 2014, en raison de son transfert du club de football de Nantes au club de football Lazio di Roma, et qu’à ce titre il n’était plus résident fiscal en France au sens de l’article 4 A du code général des impôts, il n’assortit toutefois cette allégation d’aucune preuve alors que l’administration fiscale fait valoir quant à elle, sans être contredite sur ce point, que la date du transfert de l’intéressé est intervenue au plus tôt au cours du mois d’août 2014.
S’agissant de l’application du régime d’étalement des revenus au titre des années 2013 et 2014 :
12. Aux termes l’article 100 bis du code général des impôts : ” I – Les bénéfices imposables provenant de la production littéraire, scientifique ou artistique de même que ceux provenant de la pratique d’un sport peuvent, à la demande des contribuables soumis au régime de la déclaration contrôlée, être déterminés en retranchant, de la moyenne des recettes de l’année de l’imposition et des deux années précédentes, la moyenne des dépenses de ces mêmes années. / Les contribuables qui adoptent ce mode d’évaluation pour une année quelconque sont obligatoirement soumis au régime de la déclaration contrôlée en ce qui concerne les bénéfices provenant de leur production littéraire, scientifique ou artistique ou ceux provenant de la pratique d’un sport. L’option reste valable tant qu’elle n’a pas été expressément révoquée ; en cas de révocation, les dispositions du premier alinéa continuent toutefois de produire leurs effets pour les bénéfices réalisés au cours des années couvertes par l’option. / II – A compter de l’imposition des revenus de 1982, les contribuables peuvent également demander qu’il soit tenu compte de la moyenne des recettes et des dépenses de l’année d’imposition et des quatre années précédentes. / Les contribuables qui adoptent cette période de référence ne peuvent revenir sur leur option pour les années suivantes. “. Et aux termes de l’article 84 A du même code : ” Les dispositions prévues par l’article 100 bis du code général des impôts sont applicables, sous les mêmes conditions, pour la détermination des salaires imposables des artistes du spectacle, titulaires d’un contrat entrant dans les prévisions de l’article L. 762-1 du code du travail et des salaires imposables des sportifs perçus au titre de la pratique d’un sport “.
13. Il est constant que M. B a fait connaître à l’administration fiscale sa volonté de bénéficier, pour l’imposition de ses salaires provenant de la pratique du football perçus en 2011 et en 2012, du régime dérogatoire de l’étalement des revenus prévu par les dispositions combinées des articles 100 bis et 84 A du code général des impôts, selon une période de référence de trois ans.
14. D’une part, s’il résulte de l’instruction qu’au titre des salaires perçus au cours de l’année 2013, M. B s’est borné à déclarer, au moyen du formulaire 2042, la somme de 690 074 euros correspondant au montant brut des salaires perçus, l’administration fiscale ne pouvait toutefois légalement déduire d’un tel constat que M. B avait entendu renoncer, implicitement mais nécessairement, au régime dérogatoire d’étalement des revenus pour lequel il avait opté à compter de l’année 2011, alors que les dispositions du I de l’article 100 bis du code général des impôts prévoient précisément que cette option ne peut faire l’objet que d’une révocation expresse. D’autre part, en s’abstenant de déclarer les revenus qu’il a perçus en 2014, M. B ne peut davantage être regardé comme ayant implicitement mais nécessairement renoncé à l’option d’étalement des revenus au titre de cette année au regard des dispositions précitées du I de l’article 100 bis du code général des impôts. Il en résulte que M. B est fondé à soutenir que l’administration fiscale ne pouvait valablement remettre en cause l’option pour le régime d’étalement des revenus faute de révocation expresse à cette option.
15. Dans ces conditions, il y a lieu de déterminer le revenu imposable de M. B selon la moyenne du montant des revenus nets de la déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels, des années 2011, 2012 et 2013 s’agissant du revenu imposable au titre de l’année 2013 d’une part, et des années 2012, 2013 et 2014 s’agissant du revenu imposable au titre de l’année 2014 d’autre part.
S’agissant du quotient familial :
16. M. B doit être regardé comme entendant se prévaloir des dispositions de l’article 6 du code général des impôts selon lesquelles ” Les personnes mariées () sont soumis à une imposition commune pour les revenus dont ils ont disposé pendant l’année du mariage () “, qui ouvrent droit à l’application de deux parts de quotient familial. Toutefois, en se bornant à soutenir qu’il s’est marié en Italie en novembre 2014, sans produire un quelconque document d’état civil, il n’établit pas la date de son mariage de sorte qu’il n’est pas fondé à revendiquer le bénéfice d’une imposition commune pour le calcul de l’impôt sur le revenu de l’année 2014.
S’agissant de la déductibilité de la pension alimentaire :
17. Aux termes de l’article 156 du code général des impôts : ” L’impôt sur le revenu est établi d’après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé () sous déduction : () II. Des charges ci-après lorsqu’elles n’entrent pas en compte pour l’évaluation des revenus des différentes catégories : () / 2° () pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211, 367 et 767 du code civil à l’exception de celles versées aux ascendants quand il est fait application des dispositions prévues aux 1 et 2 de l’article 199 sexdecies () / Le contribuable ne peut opérer aucune déduction pour ses descendants mineurs lorsqu’ils sont pris en compte pour la détermination de son quotient familial. / La déduction est limitée, par enfant majeur, au montant fixé pour l’abattement prévu par l’article 196 B. () “. Aux termes de l’article 205 du code civil : ” Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin “. L’article 208 du même code dispose : ” Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit () “. Il résulte de ces dispositions que les contribuables qui déduisent du montant global de leurs revenus, pour l’assiette de l’impôt sur le revenu, les versements qu’ils ont fait à leurs enfants ou à leurs parents doivent justifier devant le juge de l’impôt de l’importance des aliments dont le paiement a été rendu nécessaire par le défaut de ressources suffisantes de leurs descendants ou de leurs ascendants.
18. Il résulte de l’instruction qu’au titre de l’année 2013, M. B a déduit de ses revenus la somme de 23 000 euros à raison d’une pension alimentaire versée à sa mère. Toutefois, le requérant ne justifie ni de l’impécuniosité de sa mère, ni de la réalité des versements qu’il a effectués en sa faveur au titre de l’année 2013 de sorte que l’administration fiscale a pu à bon droit estimer que la pension litigieuse ne revêtait pas un caractère alimentaire et, par suite, n’était pas déductible du revenu de M. B au titre de l’année 2013. Par suite, le requérant n’est pas fondé à solliciter l’application d’une telle déduction au titre des revenus perçus en 2013, ni davantage des revenus perçus en 2014.
En ce qui concerne les pénalités :
S’agissant du bien-fondé de la pénalité pour manquement délibéré :
19. Aux termes de l’article 1729 du code général des impôts : ” Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré () “.
20. Il résulte de l’instruction que l’administration fiscale a assorti les cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus de l’année 2013 de la pénalité de 40% prévue par les dispositions du a. de l’article 1729 du code général des impôts au motif que le contribuable ne pouvait ignorer que les ” sommes perçues sur [son] compte bancaire étaient des salaires imposables à l’impôt sur le revenu ” et qu’il n’apportait aucune justification du versement de 23 000 euros déduit au titre des déductions diverses. Dans la mesure où il y a lieu de prononcer la décharge des pénalités qui ont été infligées à M. B au titre de l’année 2013 en conséquence de la décharge en droits prononcée au titre de cette même année à raison de l’application du régime d’étalement des revenus, ainsi qu’il a été dit au point 15 ci-dessus, la circonstance que le requérant a déduit à tort une somme de 23 000 euros de ses revenus perçus en 2013, faute d’apporter les justificatifs nécessaires, ne permet pas, à elle seule, de justifier de l’application de la pénalité pour manquement délibéré au titre de l’année en cause. Par suite, M. B doit être déchargé de la pénalité pour manquement délibéré dont les cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ont été assorties au titre de l’année 2013.
S’agissant du cumul des sanctions :
21. Compte tenu de ce que, eu égard à ce qui a été dit aux points 19 et 20 ci-dessus, il y a lieu de décharger M. B de la pénalité pour manquement délibéré qui lui a été infligée et alors que les intérêts de retard prévus par les dispositions de l’article 1727 du code général des impôts, qui s’appliquent indépendamment de toute appréciation portée par l’administration fiscale sur le comportement du contribuable, visent essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l’État à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l’impôt aux dates légales et n’ont pas la nature de sanctions, le moyen tiré de ce que le cumul de la pénalité pour manquement délibéré, de la pénalité pour déclaration tardive et des intérêts de retard constitue un cumul de sanction confiscatoire et ” contraire au droit européen “, ne peut qu’être écarté.
22. Il résulte de tout ce qui précède que M. B est fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, à concurrence des réductions en base résultant du point 15 du présent jugement, ainsi que des intérêts de retard et des majorations correspondantes.
Sur les frais liés à l’instance :
23. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B et non compris dans les dépens.
Article 1er : La base de l’impôt sur le revenu et de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus fixée à M. B au titre des années 2013 et 2014 est réduite à concurrence de la somme correspondant à la différence entre la base imposable du requérant telle qu’elle a été retenue par le service vérificateur et celle correspondant à la moyenne triennale des revenus nets perçus en 2011, 2012 et 2013 en ce qui concerne l’année 2013 et des revenus nets perçus en 2012, 2013 et 2014 en ce qui concerne l’année 2014.
Article 2 : M. B est déchargé des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, et de la pénalité pour manquement délibéré afférente, correspondant à la réduction des bases d’imposition définie à l’article 1er du présent jugement.
Article 3 : L’Etat versera à M. B une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B est rejeté.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. A B et au directeur du contrôle fiscal Centre-Ouest.
Délibéré après l’audience du 17 février 2023, à laquelle siégeaient :
M. Livenais, président,
Mme Rosemberg, première conseillère,
Mme Thierry, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2023.
La rapporteure,
S. THIERRY
Le président,
Y. LIVENAISLe greffier,
E. LE LUDEC
La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,