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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 23 FÉVRIER 2023
N° 2023/177
N° RG 22/05171 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJGDG
[M] [Z]
[O] [Y]
C/
S.C.I. GROUPEMENT DE LA LOUBE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me UGO
Me DIAZ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l’exécution de GRASSE en date du 29 Mars 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 20/05213.
APPELANTS
Monsieur [M] [Z], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Gilbert UGO, avocat au barreau de GRASSE
Madame [O] [Y], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Gilbert UGO, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEE
S.C.I. GROUPEMENT DE LA LOUBE, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Clément DIAZ, avocat au barreau de NICE, substitué par Me Maïlys LARMET, avocat au barreau D’AIX EN PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Présidente
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Ingrid LAVALLEE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Férvier 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Février 2023
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Présidente et Madame Ingrid LAVALLEE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon jugement du 5 décembre 2019, signifié le 11 décembre suivant, le tribunal d’instance d’Antibes condamnait la SCI Groupement de la Loube à arracher une haie de cyprès implantée à moins de cinquante centimètres de limite de propriété des époux [Z] , ce dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte journalière de 10 € passé ce délai, pendant une durée de trois mois.
Une ordonnance d’incident du 9 octobre 2020 du conseiller de la mise en état de la cour d’appel d’Aix en Provence déclarait irrecevable comme tardif l’appel formé par la SCI Groupement de la Loube à l’encontre de cette décision.
Dans un courrier officiel du 22 octobre 2020, le conseil de cette dernière informait celui des époux [Z] des intentions de sa cliente de ne pas déférer l’ordonnance à la cour et d’exécuter le jugement de sorte que la signification de l’ordonnance n’était pas nécessaire.
Le 8 décembre 2020, les époux [Z] faisaient assigner la SCI Groupement de la Loube devant le juge de l’exécution de Grasse aux fins de liquidation de l’astreinte à la somme de 7 000 € et de fixation d’une nouvelle astreinte outre condamnation à une indemnité de 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles.
Par jugement du 29 mars 2022, le juge de l’exécution de Grasse :
– déboutait les époux [Z] de toutes leurs demandes,
– condamnait in solidum monsieur et madame [Z] au paiement d’une somme de 1 000 € de dommages et intérêts et de 1 600 € pour frais irrépétibles ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure.
Le premier juge fixait le point de départ de l’astreinte un mois après le courrier officiel du 20 octobre 2020 portant acquiescement à l’ordonnance d’irrecevabilité d’appel et engagement à exécuter les travaux. Il rappelait que la condamnation ne porte que sur la haie de cyprès et non sur celle de photinias et considérait que la facture du 8 décembre 2020 de l’entreprise spécialisée dans l’élagage et les travaux de jardin établissait l’exécution des travaux prescrits, avec utilisation d’une technique professionnelle courante ayant pour effet de couper les racines au ras du sol sans les enlever. Il caractérisait le préjudice de la défenderesse par une multiplication de procédures et notamment celle aux fins de liquidation d’astreinte alors que son obligation était exécutée.
Selon déclaration reçue le 7 avril 2022 au greffe de la cour d’appel d’Aix en Provence, les époux [Z] formaient appel du jugement précité.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 19 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de leurs moyens, les époux [Z] demandent à la cour de :
– infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
– liquider l’astreinte fixée par jugement du 5 décembre 2019 à la somme de 5 000 €,
– condamner la SCI Groupement de la Loube à exécuter le jugement du 5 décembre 2019 sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt à intervenir,
– condamner la défenderesse au paiement d’une indemnité de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Ils affirment que le titre exécutoire ordonne l’arrachage, prévu par l’article 672 du code civil, des arbres formant une haie de cyprès et que le constat d’huissier du 25 mars 2021 établit la présence de souches sous forme de larges troncs toujours visibles. Ils considèrent que l’arrachage est synonyme de déracinement et que le maintien des souches permet une repousse. Ils constatent que le professionnel mandaté par l’intimé confirme ne pas avoir arraché les souches dont la présence au nombre de 22 est confirmée par le constat d’huissier de justice du 5 mai 2022.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 13 juin 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la SCI Groupement de la Loube demande à la cour de :
– confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
– condamner solidairement les époux [Z] au paiement d’une indemnité de 4 000 € au titre de ses frais irrépétibles en appel ainsi qu’aux entiers dépens.
Elle rappelle que le tribunal a ordonné un arrachage, et non un déracinement, de la haie de cyprès mais que la mesure ne concerne pas la haie de photinias située le long de la piscine et les plantations situées au sud-ouest.
Elle soutient que les travaux ont été exécutés par l’entreprise spécialisée [F] et qu’en l’absence de nouveaux plants, il n’existe aucune possibilité de repousse lorsque le nerf ou la charnière de l’arbre a été arrachée de la souche.
Elle invoque un préjudice constitué par le harcèlement moral dont elle est l’objet au moyen de cette 8ème procédure et précise que le permis de construire des époux [Z] a été annulé par jugement du 30 juin 2021 du tribunal administratif de Nice.
L’instruction de la procédure était clôturée par ordonnance du 13 décembre 2022.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
– Sur la demandes de liquidation de l’astreinte provisoire,
Selon l’article L 131-4 du code des procédures civiles d’exécution, le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. L’astreinte définitive ou provisoire est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère.
Selon l’article 1353 du code civil, il appartient au débiteur de l’obligation de rapporter la preuve de l’exécution de son obligation de faire.
En l’espèce, comme rappelé ci avant, le jugement du 5 décembre 2019 du tribunal d’instance d’Antibes a notamment :
– condamné la SCI Groupement de la Loube à arracher la haie de cyprès plantée à moins de 50 cm de la limite de propriété des époux [Z],
– dit qu’à défaut d’arrachage dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement, la SCI Groupement de la Loube est condamnée à une astreinte de 10 € par jour de retard et ce, sur une durée de trois mois,
– dit que passé ce délai, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge de l’exécution de la liquidation de l’astreinte,
– rejeté la demande d’exécution provisoire du présent jugement.
Ledit jugement était signifié le 11 décembre 2019 à la SCI Groupement de la Loube, laquelle en a interjeté appel déclaré irrecevable par ordonnance du 9 octobre 2020 du Conseiller de la mise en état. Il n’a pas été signifié à la SCI Groupement de la Loube mais cette dernière a acquiescé à cette décision par courrier officiel de son conseil du 22 octobre 2020. Elle disposait donc d’un délai de deux mois expirant le 22 décembre 2020 pour faire procéder à l’arrachage de la haie de cyprès implantée à moins de 50 cm de la limite de propriété des époux [Z].
Les parties ne contestent pas devant la cour que la mesure d’arrachage prononcée par le jugement du 5 décembre 2019 porte exclusivement sur la haie de cyprès bordant la piscine, située coté nord-ouest du terrain. Elle ne concerne donc pas la haie végétale de photinias située coté Est selon constat d’huissier des 25 mars et 5 mai 2021 (cf pièce n° 7 et 8 appelants).
Au titre de l’exécution des travaux précités, la SCI Groupement de la Loube produit un devis du 3 novembre 2020 et une facture du 8 décembre 2020 de l’entreprise [F] [W] et fils, spécialisée dans l’élagage et tous travaux de jardin, laquelle mentionne en objet : l’abattage d’une haie de cyprès de Provence, l’arrachage des souches de la haie abattue, le nettoyage du
sol et l’évacuation de déchets végétaux en décharge, pour un montant de 1 800 € ( cf pièces n°14 et 15 intimée).
L’exécution des travaux est confirmée par le témoignage du 4 mars 2022 du gérant de l’entreprise précitée dans lequel il confirme la suppression complète, fin octobre 2020, de la haie de cyprès plantée à moins de 50 cm de la limite de propriété des époux [Z] (cf pièces n°15 et 22 intimée).
Le constat d’huissier du 25 mars 2021 confirme l’exécution de la mesure ordonnée par le dispositif du jugement du 5 décembre 2019, lequel ordonne, conformément aux termes de l’article 672 du code civil, l’arrachage de la haie de cyprès et non leur déracinement.
De plus, le témoignage précité du gérant de la société spécialisée chargée des travaux précise que les cyprès ont été abattus selon une technique professionnelle courante d’abattage des arbres avec coupe des racines au ras du sol de la plantation. Cette affirmation est confirmée par le schéma d’abattage d’un arbre (pièces n°18 et 21 intimée), lequel est considéré comme arraché lorsqu’après l’entaille de la tronçonneuse, l’arbre tombe et arrache la charnière. En l’état de la rupture de la charnière, les époux [Z] ne peuvent procéder par voie d’affirmation et n’établissent pas, par avis ou document technique, que le maintien des souches permettrait une repousse.
Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a, retenu l’exécution par l’intimée des travaux prescrits dans le délai imparti par le jugement du 5 décembre 2019, et rejeté les demandes de liquidation d’astreinte et de fixation d’une nouvelle astreinte.
La nature de la décision prive de fondement la demande en fixation d’une nouvelle astreinte.
– Sur la demande de dommages et intérêts pour abus de procédure,
Selon les dispositions de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Le droit d’agir en justice peut dégénérer en abus, s’il est établi une faute dans l’exercice de ce droit à l’origine d’un préjudice subi par l’autre partie.
En l’espèce, la SCI Groupement de la Loube justifie avoir été assignée en liquidation d’astreinte alors que les époux [Z] ne pouvaient ignorer l’exécution des travaux d’arrachage de la haie de cyprès établie par constat du 25 mars 2021 de l’huissier qu’ils avaient mandaté.
La demande de liquidation d’astreinte des époux [Z] s’inscrit dans le contexte d’un conflit de voisinage alimenté régulièrement par huit procédures depuis l’année 2019 ( pièces n°9 à 13, 25 et 26 intimée ).
Elle cause à la SCI Groupement de la Loube, un préjudice d’agrément en lien avec la nécessité de préparer une nouvelle fois sa défense justement évalué à 1000 € par le premier juge.
– Sur les demandes accessoires,
Les époux [Z] supporteront les dépens d’appel.
L’équité commande d’allouer à la SCI Groupement de la Loube, contrainte d’engager des frais irrépétibles pour assurer la défense de ses intérêts devant la cour, une indemnité de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.