Résiliation de contrat sans préavis : illégal sans clause dédiée

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Résiliation de contrat sans préavis : illégal sans clause dédiée
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La société Moon Harbour a été condamnée pour avoir résilié sans préavis le contrat d’un distributeur à effet immédiat sans versement d’aucune indemnité de résiliation arguant d’un défaut de communication par son cocontractant de la synthèse globale des ventes du trimestre et du non-respect des objectifs contractuels d’achat.

Le contrat ne pouvait être résilié qu’à la fin de chaque année civile moyennant un préavis de 6 mois et le versement d’une indemnité ‘égale à 30% du montant des achats de Produit de l’année n-1 par le Distributeur auprès du Fournisseur’ à compter de la deuxième année d’exécution du contrat si ‘le Distributeur avait atteint ou dépassé l’objectif annuel d’achat sur l’année précédant la résiliation.’

Le fait pour le distributeur de ne pas déférer à l’obligation de communiquer une synthèse de ces ventes n’était pas une hypothèse prévue par le contrat de suppression du préavis.


 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

— ————————-

ARRÊT DU : 18 JANVIER 2023

N° RG 21/02493 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-MCTD

S.A.R.L. MOON HARBOUR

c/

S.A. MAHLER BESSE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 avril 2021 (R.G. 2019F00413) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 28 avril 2021

APPELANTE :

S.A.R.L. MOON HARBOUR, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 2]

représentée par Maître Xavier DELAVALLADE de la SCP DELAVALLADE – RAIMBAULT, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

S.A. MAHLER BESSE, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 1]

représentée par Maître Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Erwan DINETY, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 23 novembre 2022 en audience publique en double rapporteur, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller, chargé du rapport et Madame Nathalie PIGNON, Président, composée de :

Madame Nathalie PIGNON, Président,

Madame Elisabeth FABRY, Conseiller,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

La société Moon Harbour est une société spécialisée dans la production de boissons alcooliques distillées.

Elle a conclu un contrat de distribution exclusive de son whisky dénommé Pier 1 avec la société Mähler-Besse ayant une activité de négoce de vins et de spiritueux. Ce contrat comportait des objectifs d’achat et une clause de résiliation contractuelle.

Par courrier du 20 décembre 2018, la société Moon Harbour a averti son distributeur qu’elle résiliait le contrat à effet immédiat sans versement d’aucune indemnité de résiliation arguant d’un défaut de communication par sa cocontrante de la synthèse globale des ventes du trimestre et du non-respect des objectifs contractuels d’achat.

Par acte du 28 mars 2019, la société Mähler-Besse a assigné la société Moon Harbour devant le tribunal de commerce aux fins de voir condamner celle-ci à lui verser la somme de 60 109 euros au titre de l’indemnité contractuelle de résiliation et diverses sommes en indemnisation de son préjudice matériel et moral.

Par décision du 6 avril 2021, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

— condamné la société Moon Harbour à payer à la société Mälher-Besse la somme de 39.629,00 euros,

— débouté la société Mälher-Besse du surplus de ses demandes,

— débouté la société Moon Harbour de l’ensemble de ses demandes,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement, nonobstant appel et sans caution,

— condamné la société Moon Harbour à payer la somme de 1.500 euros à la société Mälher-Besse sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

— condamné la société Moon Harbour aux entiers dépens.

En substance, le tribunal a considéré que la société Moon Harbour était en droit de procéder à la résiliation du contrat sans indemnité mais qu’elle aurait dû respecter le préavis de six mois prévu par le contrat. Elle a fixé le préjudice subi du fait du non respect du préavis à 39 626 euros.

Selon déclaration du 28 avril 2021, la société Moon Harbour a interjeté appel de cette décision à l’encontre de l’ensemble des chefs de la décision qu’il a expressément énumérés intimant la société Mälher-Besse.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 avril 2022, la société Moon Harbour demande à la cour :

— infirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Bordeaux du 6 avril 2021 en ce qu’il a:

— condamné la société Moon Harbour SARL à payer à la société Mälher-Besse la somme de 39.629 euros à titre de dommages intérêts pour non-respect du préavis de résiliation,

— débouté la société Moon Harbour de l’ensemble de ses demandes,

— condamné la société Moon Harbour à payer à la société Mälher-Besse la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société Moon Harbour aux dépens.

— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Mälher-Besse du surplus de ses demandes et notamment en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de paiement d’une indemnité contractuelle de résiliation et de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.

en conséquence,

statuant à nouveau :

— mettre hors de cause la société Moon Harbour dès lors que la résiliation du contrat de distribution exclusive par lettre recommandée AR de la société Moon Harbour du 20 décembre 2018 est intervenue conformément aux dispositions de l’article 3 dudit contrat et que cette résiliation est parfaitement fondée, au regard des manquements contractuels commis par la société Mälher-Besse consistant dans le non-respect des objectifs d’achat pour 2018 et l’absence de communication d’une synthèse globale des volumes vendus tous les trois mois,

— débouter la société Mälher-Besse de l’ensemble de ses demandes et prétentions ;

— surseoir à statuer sur la question préjudicielle de la contrefaçon de marque ;

— transmettre cette question préjudicielle au tribunal judiciaire de Bordeaux exclusivement compétent en la matière ;

— compétente la société Mälher-Besse à verser à la société Moon Harbour la somme de 133.344 euros au titre de son préjudice financier ;

— juger que la société Mälher-Besse a commis une faute en vendant des bouteilles estampillées

Moon Harbour depuis la résiliation du contrat de distribution ;

— enjoindre à la société Mälher-Besse de communiquer à la société Moon Harbour tous les documents comptables certifiés permettant de déterminer la somme correspondant aux bénéfices réalisés par elle sur la vente des bouteilles estampillées Moon Harbour depuis la résiliation du contrat de distribution, sous astreinte de 50 euros par jour de retour à compter de la notification de la décision à intervenir et surseoir à statuer jusqu’à cette communication ;

— condamner la société Mälher-Besse à payer à la société Moon Harbour la somme résultant des bénéfices réalisés par elle sur la vente des bouteilles estampillées Moon Harbour depuis la résiliation du contrat de distribution ;

— condamner la société Mälher-Besse à verser à la société Moon Harbour la somme de 20.000 euros au titre de son préjudice moral ;

— interdire à la société Mälher-Besse d’utiliser et exploiter la marque Moon Harbour.

— condamner la société Mälher-Besse à payer à la société Moon Harbour une indemnité de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

— condamner la société Mälher-Besse aux entiers dépens, de première instance et d’appel

à titre subsidiaire,

— débouter la société Mälher-Besse de l’ensemble de ses demandes et prétentions ;

— condamner la société Mälher-Besse à payer à la société Moon Harbour la somme de 133.344 euros au titre du gain manqué.

La société Moon Harbour soutient qu’elle a pu à bon droit résilier le contrat de distribution sans être redevable d’une indemnité de résiliation dans la mesure où la société Mälher-Besse n’avait pas rempli ses objectifs; qu’elle n’avait pas à respecter de délai de préavis puisqu’elle n’invoquait pas l’article XI du contrat retenu à tort par le premier juge mais l’article III ; que le respect des objectifs d’achat s’analysait en une obligation de résultat dans l’esprit des parties; que le non-respect de ceux-ci constitue donc un manquement grave par la société Mälher-Besse à ses obligations contractuelles justifiant une résiliation du contrat sans préavis aux torts de son cocontractant; qu’en outre, le distributeur ne lui avait pas transmis sa synthèse trimestrielle globale des volumes vendus, ce qui constitue un autre manquement justifiant la résiliation du contrat sans préavis.

Elle soutient encore que l’intimée ne justifie ni de son préjudice matériel, ni de son préjudice moral; que les attestations produites doivent être écartées; qu’il est par ailleurs injustifié de prendre base de calcul du préjudice économique la perte de marge brute de l’intimée.

La société Moon Harbour enfin affirme que son distributeur n’avait plus l’autorisation d’utiliser sa marque après la résiliation du contrat; que celle-ci a cependant continué à utiliser en toute illicéité celle-ci, se rendant ainsi coupable d’actes de contrefaçon; que le tribunal de commerce a, à tort, rejeté sa demande visant à saisir le tribunal judiciaire de Bordeaux de la question relative à la contrefaçon de sa marque. A titre subsidiaire, elle reproche à la société Mälher-Besse d’avoir continué à proposer à la vente à ses cavistes des bouteilles de whisky de marque ‘Pier 1″ en promotion ‘5+1″, de s’être livrée à une ‘distribution illicite’, entraînant une confusion auprès des cavistes; qu’elle a subi une baisse importante de ses propres ventes de ce fait du fait de ces actes de concurrence déloyale.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 décembre 2021, la société Mälher-Besse demande à la cour de:

— confirmer le jugement du 6 avril 2021 du Tribunal de Commerce de Bordeaux en ce qu’il a :

‘ condamné la société Moon Harbour à payer à la société Mälher-Besse :

— la somme de 39.629 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du préavis de résiliation ;

— la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ débouté la société Moon Harbour de sa demande de sursis à statuer après transmission d’une question préjudicielle et de ses autres demandes ;

— infirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société Mälher-Besse du surplus de ses demandes ;

Statuant à nouveau,

— condamner la société Moon Harbour à payer à la société Mälher-Besse la somme de 60.109 euros à titre d’indemnité contractuelle de résiliation ;

— condamner la société Moon Harbour à payer à la société Mälher-Besse la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en indemnisation de son préjudice moral consécutif à la violation de son obligation de respecter un délai de préavis contractuel de 6 mois ;

— débouter la société Moon Harbour de toutes ses demandes ;

— condamner la société Moon Harbour à payer à la société Mälher-Besse ;

la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société Moon Harbour aux entiers dépens.

La société Mälher-Besse soutient qu’elle avait largement dépassé l’objectif annuel d’achat sur l’année précédant la résiliation et que dès lors elle était en droit de réclamer une indemnité égale à ‘30% du montant des achats de Produit de l’année n-1 par le Distributeur auprès du Fournisseur’; qu’il lui est donc due une indemnité de résiliation de 60 109 euros; qu’elle a par ailleurs subi un préjudice du fait du non-respect du préavis minimum de 6 mois qui lui a causé un préjudice matériel de 39 629 euros et moral de 20 000 euros.

Concernant les demandes reconventionnelles de la société Moon Harbour, elle fait valoir que l’article XII du contrat stipule que le distributeur restera propriétaire de produits en stocks à la fin de contrat et en assurera la distribution, le fournisseur ayant la possibilité de les racheter.

S’agissant de la demande de sursis à statuer, elle soutient que celle-ci est irrecevable car elle n’a pas été formulée in limine litis, le tribunal de commerce ayant mis en place un calendrier de procédure. En outre, la question préjudicielle n’est pas sérieuse et n’est pas nécessaire à la solution du litige. Il appartient à la société Moon Harbour d’initier une action en contrefaçon.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 9 novembre 2022 et le dossier a été fixé à l’audience du 23 novembre 2022.

Il conviendra de se reporter aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et de leurs prétentions.

MOTIFS

1) sur la résiliation du contrat de distribution :

Le contrat litigieux stipule :

— en son article 3 intitulé ‘exclusivité d’approvisionnement’ :

‘En contrepartie de l’engagement de distribution exclusive sur le territoire défini, le distributeur s’oblige à s’approvisionner en bouteilles de 70 cl de whisky « PIER-1 » exclusivement auprès du fournisseur pendant toute la durée du contrat.

En prévision des objectifs commerciaux du distributeur, les objectifs d’achat par le distributeur des whiskies MOON HARBOUR / PIER-1 sont les suivants :

— Année 2017 : 5 000 bouteilles,

— Année 2018 : 15 000 bouteilles,

— Année 2019 : 25 000 bouteilles.

Ces objectifs ne constituent en aucun cas un engagement d’achat ferme du produit par le distributeur au fournisseur.

En cas de non atteinte de ces objectifs d’achats, le fournisseur se réserve le droit de résilier le présent contrat sans aucune indemnité, avec effet au 31 décembre de l’année en cours.

Les objectifs d’achats des années ultérieures seront définis d’un commun accord entre les parties au regard des résultats commerciaux observés et de l’évolution de la gamme des produits MOON HARBOUR. A défaut d’accord, l’objectif 2019 sera reconduit.’

— en son article 5 intitulé ‘obligations des parties’ :

‘le distributeur communiquera au fournisseur une synthèse globale des volumes vendus tous les trois mois et fera part des difficultés rencontrées dans la commercialisation de Pier 1″

— en son article 9 intitulé ‘résiliation et clause résolutoire’ :

‘ à compter de la 2ème année d’exécution du contrat, la résiliation par l’une ou l’autre des parties moyennant le respectif d’un préavis minimum de six (6) mois ne donne lieu au versement d’une indemnité de rupture que si la résiliation intervient à l’initiative du Fournisseur et que le Distributeur avait atteint ou dépassé l’objectif annuel d’achat sur l’année précédant la résiliation.

Dans cette hypothèse, le Fournisseur sera tenu de verser au Distributeur à la date d’effet de la résiliation, une indemnité égale à 30% du montant des achats de Produit de l’année n-1 par le Distributeur auprès du Fournisseur. ‘

Il n’y a pas de contradiction entre les différentes clauses du contrat de distribution, l’article 9 précisant les conditions de la résiliation dont le principe est affirmé à l’article 3.

Ainsi, le contrat ne peut-il être résilié qu’à la fin de chaque année civile moyennant un préavis de 6 mois et le versement d’une indemnité ‘égale à 30% du montant des achats de Produit de l’année n-1 par le Distributeur auprès du Fournisseur’ à compter de la deuxième année d’exécution du contrat si ‘le Distributeur avait atteint ou dépassé l’objectif annuel d’achat sur l’année précédant la résiliation.’ Le fait pour le distributeur de ne pas déférer à l’obligation de communiquer une synthèse de ces ventes n’est pas une hypothèse prévue par le contrat de suppression du préavis.

En l’espèce, le fournisseur ne pouvait procéder à une ‘résiliation à effet immédiat’. Il a ainsi manqué à ses obligations contractuelles.

En outre, la résiliation étant intervenue au cours de l’année 2018, il convient de rechercher si le fournisseur a respecté ses objectifs en 2017 et non en 2018, comme l’ont retenu à tort les premiers juges.

Or, il n’est pas contesté que la société Mälher-Besse a réalisé ses objectifs en 2017.

Dès lors, la société Mälher-Besse est bien fondée à solliciter le paiement d’une indemnité de résiliation égale à 30% du montant des achats de Produit de l’année n-1 par le Distributeur auprès du Fournisseur.

La société Mälher-Besse soutient que le montant de ses achats en 2017 s’élève à 200 363 euros HT. La société Moon Harbour conteste ce montant qui selon elle serait de 152 070 euros.

Il ressort des différentes factures, identiques, produites par les deux parties ayant une date de facturation en 2017 que le montant des commandes sur cette année est de 176 904 euros HT.

L’indemnité de résiliation est donc de 53 071,20 euros.

La société Moon Harbour sera donc condamnée à verser la somme de 53 071,20 euros à la société Mälher-Besse au titre de l’indemnité de résiliation. La décision de première instance sera ainsi infirmée de ce chef.

Les juges de première instance ont accordé en outre une indemnisation à hauteur de 39 629 euros en indemnisation du préjudice subi par la société Mälher-Besse du fait de la rupture du contrat de distribution sans respect du préavis en prenant pour base la marge brute de la société sur 6 mois.

L’appelante soutient avec raison que l’intimée ne précise pas son mode de calcul de sa marge brute. En effet, le directeur administratif et financier produit un tableau comportant pour l’année 2017 et 2018 une colonne relative au chiffre d’affaires et une colonne relative à la marge brute sans justifier de son calcul pour cette dernière colonne. La pièce 11 de l’intimée est une attestation du commissaire aux comptes de celle-ci qui ne détaille pas plus le mode de calcul adopté de la marge brute, le commissaire aux comptes précisant d’ailleurs qu’il ne lui appartenait pas de donner une interprétation à la définition retenue par la société Mälher-Besse de la ‘marge brute’.

La société Mälher-Besse ne conteste pas en outre qu’elle a continué à vendre des produits de son distributeur pendant les quelques mois suivant la résiliation, ayant des bouteilles en stocks, ce qui a diminué sa perte de marge brute.

Compte tenu de ces éléments, il sera fait droit à la demande dans son principe mais celle-ci sera réduite dans son montant à la somme de 20 000 euros. La décision de première instance sera ainsi infirmée de ce chef.

En revanche, l’intimée ne justifie ni d’une atteinte à son image ni d’une atteinte à sa réputation. Elle sera dès lors déboutée de la demande de réparation de son préjudice moral qu’elle forme de son chef.

La décision de première instance sera confirmée de ce chef.

2) sur la contrefaçon et la concurrence déloyale :

L’appelante soutient que l’intimée se livre à des actes de contrefaçons à son encontre et demande à la cour de transmettre la question préjudicielle de la contrefaçon de marque au tribunal judiciaire et de surseoir à statuer.

La question préjudicielle est celle qui, soulevée par un moyen de défense, relève de la compétence exclusive d’une autre juridiction et dont la solution est nécessaire à la résolution du litige principal.

En l’espèce, la question de la contrefaçon de la marque n’est pas un moyen de défense au fond formé à l’encontre de la demande principale de la société Mälher-Besse de se voir reconnaître le droit de percevoir une indemnité de résiliation et d’obtenir la réparation du non-respect du délai de préavis.

Il n’y a donc pas lieu de la transmettre et il appartient à la société Moon Harbour de saisir directement la juridiction compétente de sa demande.

La demande de sursis à statuer sera rejetée. La décision de première instance sera confirmée de ce chef.

S’agissant de la concurrence déloyale, l’appelante soutient que la société Mälher-Besse a continué de manière illicite à distribuer ses produits en 2019 alors que sa licence avait expiré, qu’elle a continué à vendre en 2019 des bouteilles de sa marque à des cavistes en promotion ‘5+1″ alors que cette offre n’était valable que jusqu’au 2 janvier 2019 et qu’elle ne l’a jamais autorisée à continuer à distribuer ses produits après la résiliation du contrat.

Si l’appelante soutient avec raison qu’elle n’a accordé une licence gratuite d’exploitation de son produit au fournisseur de son produit que pendant la durée du contrat, elle a cependant permis à celui-ci aux termes de l’article XII du contrat de distribuer les produits en stocks dont il resterait propriétaire à l’issue du contrat, sauf pour le fournisseur à les lui racheter au prix du tarif en cours majoré de 10%.

A défaut de justifier d’une proposition de rachat, et compte tenu de la rupture immédiate du contrat qu’elle a imposé à sa cocontractante, l’appelante ne peut reprocher à celle-ci d’avoir continué à distribuer ses produits en stocks et de s’être ainsi livré à une concurrence déloyale.

Elle sera donc déboutée de cette demande sur laquelle la décision de première instance avait omis de statuer.

3) sur les demandes accessoires :

La société Moon Harbour qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

La société Moon Harbour sera condamnée à verser la somme de 3500 euros à la société Mälher-Besse au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Infirme la décision rendue le 6 avril 2021 par le tribunal de commerce de Bordeaux, sauf en ce qu’elle a débouté :

— la société Mälher-Besse de sa demande d’indemnisation de son préjudice moral,

— la société Moon Harbour de sa demande de sursis à statuer et de transmission d’une question préjudicielle,

et statuant à nouveau

— condamne la société Moon Harbour à verser la somme de 53 071,20 euros à la société Mälher-Besse au titre de l’indemnité de résiliation,

— condamne la société Moon Harbour à verser la somme de 20 000 euros à la société Mälher-Besse en indemnisation de son préjudice résultant de la privation du délai contractuel de six mois de préavis,

— déboute la société Moon Harbour de sa demande de dommages et intérêts formée au titre d’actes de concurrence déloyale,

y ajoutant,

Condamne la société Moon Harbour aux dépens de première instance et d’appel,

Condamne la société Moon Harbour à verser la somme de 3500 euros à la société Moon Harbour au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pignon, présidente, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

 


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