Apprécier le caractère distinctif d’une marque 
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Signe Gammascan

Le signe Gammascan est distinctif dès lors qu’il n’est pas de nature à désigner uniquement un produit et ses fonctionnalités, à savoir un appareil servant à scanner des rayons gammas au regard des produits et services désignés à l’enregistrement.

Présentation accolée de termes

La présentation accolée des termes « Gamma » et « Scan » en « Gammascan », outre sa prononciation qui peut différer, n’est pas de nature à permettre au public pertinent d’associer ce signe à la fonctionnalité d’un objet, étant précisé qu’il résulte des pièces et témoignages que le terme « Gammascan » est également utilisé pour un logiciel, de sorte que la marque apparaît détachée de ses fonctionnalités.

Le public pertinent

Par ailleurs, le public pertinent, au sens de l’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, à savoir celui qui perçoit la marque Gammascan, et est susceptible d’en apprécier le caractère intrinsèquement distinctif et l’origine commerciale, est composé en l’espèce, non pas de professionnels ou d’experts de la radioactivité mais de professionnels du traitement des déchets urbains et industriels qui font usage de ces portiques afin de détecter d’éventuelles traces de radioactivité.

Distinctivité d’une marque 

Pour rappels, aux termes de l’article L.714-3 du code de la propriété intellectuelle est déclaré nul par décision de justice l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux dispositions des articles L.711-1 à L.711-4.

Ainsi, en application de de l’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019, « le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.

Sont ainsi dépourvus de caractère distinctif :

a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;

b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ;

c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle.

Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l’usage. »

Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, signifie dès lors que cette marque est apte à identifier le produit pour lequel est demandé l’enregistrement comme provenant d’une entreprise déterminée, le distinguant de celui provenant d’autres entreprises.

Ainsi, le signe doit présenter un caractère intrinsèquement distinctif permettant de déterminer l’origine commerciale des produits et de les distinguer d’une autre marque.

A cet égard, il a été jugé que le caractère distinctif d’un signe s’apprécie à la date de son dépôt et qu’il s’apprécie en outre par rapport à chacun des produits ou services visés par l’enregistrement, ainsi que par rapport à la perception qu’en a le public auquel la marque est destinée.


COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 03 NOVEMBRE 2022

N°2022/ 319

N° RG 21/18338 –

N° Portalis DBVB-V-B7F-BITG7

S.A.R.L. AUTOMATISME MESURE CONTROLE ET CONSEILS – AM2C

C/

S.A.S. BERTHOLD FRANCE

Copie exécutoire délivrée le :

à : Me Joseph MAGNAN

Me Arnaud ABRAM

Décision déférée à la Cour :

Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 10 Novembre 2021, qui a cassé et annulé l’arrêt rendu le 22 Février 2018 par la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE enregistré au répertoire général sous le n° 15/4950.

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.A.R.L. AUTOMATISME MESURE CONTROLE ET CONSEILS – AM2C, dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, Me Vincent POLLARD, avocat au barreau de BORDEAUX, plaidant

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.A.S. BERTHOLD FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Arnaud ABRAM, avocat au barreau de MARSEILLE, assisté de Me Didier FELIX, avocat au barreau de PARIS, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Christine BERQUET, Présidente, et Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, chargés du rapport.

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Christine BERQUET, Présidente

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

Madame Françoise FILLIOUX, Conseillère

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2022.

Signé par Madame Marie-Christine BERQUET, Présidente et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

La société Berthold France est titulaire de la marque verbale « Gammascan » n°3 639 719 déposée le 26 mars 2009 auprès de l’institut national de la propriété industrielle (ci-après l’INPI) pour désigner des produits en classe 9.

Le 25 mars 2011, la société Automatisme Mesure Contrôle et Conseils (ci-après la société AM2C), qui commercialise des portiques de contrôle de la radioactivité sous la dénomination « Gammascan », a assigné la société Berthold France devant le tribunal de grande instance de Marseille afin d’obtenir l’annulation de la marque « Gammascan » pour dépôt frauduleux et voir constater des actes de concurrence déloyale et de parasitisme.

A titre reconventionnel, la société Berthold France a formé une demande en contrefaçon de la marque et en concurrence déloyale pour la période de 2006 à 2009.

Par jugement du 22 janvier 2015, le tribunal de grande instance de Marseille a, sur le fond, rejeté la demande d’annulation de la marque « Gammascan » déposée par la société Berthold France en classe 9, a débouté la société AM2C de l’ensemble de ses demandes et a fait interdiction à cette dernière, sous astreinte, d’utiliser la dénomination « Gammascan » pour désigner ses portiques de contrôle de la radioactivité et lui a enjoint de faire radier le nom de domaine « Gammascan.fr » également sous astreinte.

Par ailleurs, le tribunal a condamné la société AM2C à payer à la société Berthold France la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des actes de contrefaçon.

Par arrêt rendu le 22 février 2018 la cour d’appel d’Aix-en-Provence a confirmé le jugement sauf en ce qu’elle a réduit les dommages et intérêts alloués à la somme de 50.000 euros.

Sur pourvoi formé par la société AM2C la Cour de Cassation, par arrêt du 10 novembre 2021, a cassé et annulé l’arrêt rendu mais seulement en ce qu’il a :

— rejeté la demande d’annulation de la marque « Gammascan » déposée par la société Berthold France le 23 mars 2009 pour les produits de la classe 9,

— débouté la société AM2C de toutes ses autres demandes,

— interdit à la société AM2C, sous astreinte, d’utiliser la dénomination « Gammascan » pour désigner ses portiques de contrôle de la radioactivité,

— enjoint à la société AM2C sous astreinte de faire radier le nom de domaine « Gammascan.fr »,

— condamné la société AM2C à payer à la société Berthold France la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts,

— statué sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

La Cour de Cassation a renvoyé les parties devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, laquelle a été saisie par acte du 27 décembre 2021.

Le 27 janvier 2022 la société AM2C a fait signifier à la partie adverse la déclaration de saisine et l’affaire a été fixée au 22 septembre 2022.

— ————-

Par conclusions enregistrées le 8 septembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société AM2C (SARL) fait valoir que :

— la société Berthold France est dépourvue du droit d’agir en l’état de l’extinction de sa marque Gammascan n° 09 3 639 719 depuis le 26 mars 2019, de sorte que l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions sont irrecevables,

— ses demandes additionnelles en vue de voir reconnaître des actes de concurrence déloyale sont recevables,

— la marque « Gammascan » est nulle pour défaut de caractère distinctif et en raison des droits antérieurs détenus par la société AM2C,

— le dépôt de la marque « Gammascan » par la société Berthold France est frauduleux,

— la société Berthold France n’exploite plus le terme « Gammascan » depuis 1995 ; la marque « Gammascan » encourt dès lors la déchéance en l’absence d’usage sérieux,

— la société Berthold France est à l’origine d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme,

— la société Berthold France ne justifie d’aucun préjudice

Ainsi, la société AM2C demande à la cour de:

« RECEVOIR la société Automatisme Mesure Contrôle et Conseils en son appel et la dire bien fondée,

JUGER que la marque GAMMASCAN n°09 3639719 n’est plus en vigueur depuis le 26 mars 2019.

En conséquence,

JUGER que la société BERTHOLD est dépourvue de tout droit a agir sur le fondement de la marque GAMMASCAN n°09 3639719,

JUGER que l’ensemble des demandes, fins et prétentions de la société BERTHOLD dans le cadre du présent litige, sont irrecevables,

JUGER que l’ensemble des demandes de la société AM2C sur la nullité et la déchéance de la marque GAMMASCAN n°09 3639719 n’ont plus lieu d’être,

INFIRMER le jugement du Tribunal de grande instance de Marseille du 22 janvier 2015 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a :

o Déclarer recevable la demande additionnelle formée par la société AM2C sur le fondement d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme de la société BERTHOLD;

o Dit n’y avoir lieu d’écarter des débats les attestations de Messieurs [U] et [I] produites aux débats par la société AM2C ;

o Débouter la société AM2C de l’ensemble de ses autres demandes ;

o Débouter la société BERTHOLD du surplus de ses demandes indemnitaires ;

En conséquence, STATUANT A NOUVEAU, de :

— JUGER que la société BERTHOLD FRANCE s’est rendue coupable d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme envers la société Automatisme Mesure Contrôle et Conseils,

— INTERDIRE à la société BERTHOLD FRANCE tout usage de la dénomination GAMMASCAN sous astreinte de 10.000 Euros par jour de retard a compter de la notification de la décision à intervenir puis par infraction constatée,

— CONDAMNER la société BERTHOLD FRANCE à verser à la société Automatisme Mesure Contrôle et Conseils la somme de 400.000 euros en réparation du préjudice patrimonial et moral subi, du fait des actes de concurrence déloyale et de parasitisme commis,

— CONDAMNER la société BERTHOLD FRANCE à faire publier, à ses frais, la décision à intervenir au sein de cinq publications, écrites ou internet, au choix de la société Automatisme Mesure Contrôle et Conseils dans la limite d’un montant de 8.000 Euros H.T.par publication, dans un délai de 15 jours a compter de la notification à intervenir et sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé ce délai,

— ORDONNER la publication judiciaire du dispositif de la décision à intervenir sur la page d’accueil du site Internet de la société BERTHOLD FRANCE accessible a l’adresse www.berthold.fr ou tout autre adresse qui lui serait substituée, dans une police de taille similaire au reste de ce site pour une durée de trois (3) mois et ce, dans les quinze (15) jours suivants la date de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 1.000 Euros par jour de retard passé ce délai.

— JUGER que la société Automatisme Mesure Contrôle et Conseils ne s’est rendue coupable d’aucun acte de contrefaçon, de concurrence déloyale ou de parasitisme envers la société BERTHOLD,

— DEBOUTER la société BERTHOLD FRANCE de toutes ses demandes, fins, prétentions et conclusions,

— CONDAMNER la société BERTHOLD FRANCE à payer à la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils une somme de 50.000 Euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

— CONDAMNER la société BERTHOLD FRANCE aux entiers frais et dépens de la première instance et d’appel.

Si par extraordinaire, la Cour estimait que la société BERTHOLD reste pourvue d’un droit à agir sur le fondement de la marque GAMMASCAN n°09 3639719 et que ses demandes, fins et prétentions ne sont pas irrecevables, alors la société AM2C entend maintenir l’ensemble de ses demandes, comme suit.

— RECEVOIR la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils en son appel et la dire bien fondée,

— CONFlRMER le jugement du Tribunal de grands instance de Marseille du 22 janvier 2015 en ce qu’il a :

o Dit recevable la demande additionnelle de la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils ;

o Dit n’y avoir lieu d’écarter des débats les attestations de Messieurs [U] et [I] produites aux débats par la société Automatisme Mesure Contrôle et Conseils ;

o Dit n’y avoir lieu de se réserver le pouvoir de liquider l’astreinte ;

o Débouté la société BERTHOLD FRANCE du surplus de ses demandes ;

Dit n’y avoir lieu d’assortir la décision de l’exécution provisoire.

INFIRMER le jugement du Tribunal de grande instance de Marseille du 22 janvier 2015 en ce qu’il a :

o Dit n’y avoir lieu d’écarter des débats les pièces produites aux débats par la société BERTHOLD FRANCE sous les numéros 2, 6, 9, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18 et19;

o Rejeté la demande de la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils

d’annulation de la marque « GAMMASCAN » déposée par la société BERTHOLD FRANCE e FENPI le 23 mars 2009 pour les produits de la classe 9 ;

o Débouté la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils de l’ensemble de ses autres demandes ;

o interdit à la société la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils d’utiliser la dénomination GAMMASCAN pour designer ses portiques de contrôle de la radioactivité, à compter de la signification de sa décision, sous astreinte, passé ce délai, de 500 euros par jour de retard pendant un délai de six mois à l’issue desquels il pourra être de nouveau statué ;

o Enjoint à la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils de faire radier le nom de domaine « GAMMASCAN.fr » dans un délai de 48 h a compter de la signification de sa décision, sous astreinte, passe ce délai, de 500 euros par jour de retard pendant six mois a l’issue desquels il sera de nouveau statue ;

o Condamne la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils a payer a la société BERTHOLD FRANCE une somme de 150.000 euros a titre de dommages et intérêts;

o Condamne la société Automatisme Mesure Contrôle et Conseils à payer à la société BERTHOLD FRANCE une somme de 2.000 euros à titre d’indemnité de l’article 700 du code de procédure civile

o Condamne la société Automatisme Mesure Controls et Conseils aux dépens.

Et, en conséquence, STATUANT A NOUVEAU, de :

JUGER que la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils est recevable et bien fondée en ses demandes,

Sur la nullité de la marque c: GAMMASCAN » n°093639719 déposée par la société BERTHOLD FRANCE le 26 mars 2009 :

JUGER que la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils dispose de droits antérieurs sur la dénomination « GAMMASCAN », en ce qu’elle l’a exploité antérieurement à la société BERTHOLD FRANCE, à titre de nom commercial et de marque d’usage,

JUGER que la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils dispose des droits antérieurs sur la dénomination « GAMMASCAN », au titre du droit d’auteur relatif au nom du logiciel « GAMMASCAN »,

— JUGER que la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils a exploité la dénomination « GAMMASCAN » à titre de nom de logiciel, antérieurement à la société BERTHOLD France, pour désigner le logiciel intégré au portique de norme RC8 qu’elle commercialise,

— JUGER que la marque «GAMMASCAN» n°093639719 déposée par la société BERTHOLD FRANCE le 26 mars 2009 est nulle comme portant atteinte aux droits antérieurs de la société Automatisme Mesure Controles et Conseils,

— JUGER que le dépôt de la marque « GAMMASCAN » n°093639719 par la société BERTHOLD FRANCE est frauduleux,

— JUGER que la marque «GAMMASCAN» n°093639719 déposée par la société BERTHOLD FRANCE le 26 mars 2009 est nulle pour dépôt frauduleux,

— JUGER que le dépôt de la marque « GAMMASCAN » n°093639719 par la société BERTHOLD FRANCE ls 26 mars 2009 ne présente pas de caractère distinctif,

— JUGER que la marque « GAMMASCAN » n°093639719 déposée par la société BERTHOLD FRANCE le 26 mars 2009 est nulle pour défaut de caractère distinctif,

— JUGER que la présente décision sera transmise par le greffier a l’INPI pour inscription de l’annulation de ia marque n°093639719 au registre national des marques,

Si par impossible, la Cour ne jugeait pas que la marque « GAMMASCAN » n°093639719, déposée par La société BERTHOLD FRANCE, le 26 mars 2009, est nulle :

— JUGER que les pièces n°2, n°6, n°9, n”12 a 19,-n°36 a 44, et-n°46, n°51, n°54, n°56 st n°58 communiquées par la société BERTHOLD FRANCE, sont dénuées de force probante

— JUGER que la société BERTHOLD France est déchue de ses droits sur la marque « GAMMASCAN » n°093639719, pour l’ensemble des produits et services désignés à l’enregistrement et ce, depuis son enregistrement, le 26 mars 2009,

— ORDONNER la radiation de la marque « GAMMASCAN » n°093639719 déposée le 26 mars 2009 et ce, pour l’ensemble des produits et services désignés a l’enregistrement,

— JUGER que la présente décision sera transmise par le greffier a l’INPI pour inscription de la radiation de ladite marque au registre national des marques,

Et, en conséquence,

— INTERDIRE à la société BERTHOLD FRANCE tout usage de la dénomination GAMMASCAN sous astreinte de 10.000 Euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir puis par infraction constatée,

— JUGER que la société BERTHOLD FRANCE s’est rendue coupable d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme envers la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils,

— CONDAMNER la société BERTHOLD FRANCE à verser à la société Automatisme Mesure Controls et Conseils la somme de 400.000 euros en réparation du préjudice patrimonial et moral subi, du fait des actes de concurrence déloyale st de parasitisme commis,

— CONDAMNER la société BERTHOLD FRANCE à faire publier, à ses frais, la décision à intervenir au sein de cinq publications, écrites ou internet, au choix de la société Automatisme Mesure Controls et Conseils dans la limite d’un montant de 8.000 Euros H.T.par publication, dans un délai de 15 jours à compter de la notification à intervenir et sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé ce délai,

ORDONNER la publication judiciaire du dispositif de la décision à intervenir sur la page d’accueil du site Internet ds la société BERTHOLD FRANCE accessible à l’adresse www.berthold.fr ou tout autre adresse qui lui serait substituée, dans une police de taille similaire au reste de ce site pour une durée de trois (3) mois et ce, dans les quinze (15) jours suivants la date de sa notification du jugement à intervenir sous astreinte de 1.000 Euros par jour de retard passé ce délai.

En toute hypothèse,

JUGER qu’il n’est pas démontré que la perte de clients de la société BERTHOLD FRANCE à partir de l’année 2009 serait imputable à la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils,

JUGER que les tableaux communiquès par la société BERTHOLD France, en première instance et en cause d’appel, pour justifier de son préjudice ont été établis par des personnes et dans des conditions qui ne sont pas établies, de sorte qu’ils ne peuvent servir de référence,

JUGER que la société Automatisme Mesure Contrôles et Conseils ne s’est rendue coupable d’aucun acte de contrefaçon, de concurrence déloyale ou de parasitisme,

DEBOUTER la société BERTHOLD FRANCE de toutes ses demandes, fins, prétentions st conclusions,

CONDAMNER la société BERTHOLD FRANCE à payer à la société Automatisme Mesure Controls et Conseils une somme de 50.000 Euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER la société BERTHOLD FRANCE aux entiers frais et dépens de la première instance et d’appel

— —————

Par conclusions enregistrées le 14 septembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Berthold France (SAS) réplique que :

— elle justifie toujours d’un intérêt à agir,

— elle justifie d’un usage sérieux et ininterrompu du signe Gammascan dans le délai de cinq ans précédant la demande de déchéance en date du 25 juin 2015 de la marque ; en conséquence, aucune déchéance à ce titre n’est encourue,

— la marque « Gammascan » est valide : elle présente un caractère distinctif, elle ne porte atteinte à aucun droit antérieur et le dépôt ne revêt aucun caractère frauduleux,

— la demande de la société AM2C au titre des actes de concurrence déloyale est irrecevable à titre principal, et subsidiairement, cette demande n’est pas fondée,

— à titre reconventionnel, elle est bien-fondée à invoquer les actes de contrefaçon de marque commis par la société AM2C et le préjudice qui en est résulté pour la société,

— la société AM2C est à l’origine d’actes de concurrence déloyale antérieurement à l’enregistrement de la marque

Ainsi, la société intimée demande à la cour de :

« – Débouter la société AM2C de ses demandes relatives au défaut de droit d’agir de la société BERTHOLD,

— Débouter la société AM2C de la demande de déchéance de la marque 09 3639719,

— Juger que la société AM2C ne rapporte pas la preuve d’une utilisation du signe GAMMASCAN à titre de nom commercial antérieure au dépôt de la marque 09 3639719; – Juger que la société AM2C ne rapporte pas la preuve d’une utilisation du signe GAMMASCAN à titre de marque verbale notoirement connue antérieure au dépôt de la marque 09 3639719;

— Juger que la société AM2C ne rapporte pas la preuve d’un quelconque droit d’auteur sur le signe GAMMASCAN antérieur au dépôt de la marque 09 3639719;

EN CONSÉQUENCE :

Confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Marseille en date du 22 janvier 2015 en ce qu’il a :

— Débouté la société AM2C de la demande de nullité de dépôt de la marque GAMMASCAN 09 3639719 ;

— Constaté l’antériorité de l’utilisation du signe GAMMASCAN par la société BERTHOLD ;

— Constaté que la société BERTHOLD n’a commis aucun acte de concurrence déloyale et de parasitisme ;

— Débouté la société AM2C de ses demandes sur le fondement de la concurrence déloyale et de parasitisme ;

En conséquence, débouter la société AM2C de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

A TITRE RECONVENTIONNEL

— Juger la société BERTHOLD recevable et bien fondée en ses demandes reconventionnelles ;

— Juger que l’usage du signe GAMMASCAN par la société AM2C, notamment à titre de nom de domaine et de dénomination d’un logiciel, constitue un acte de contrefaçon de la marque GAMMASCAN ;

— Ordonner à la société AM2C de cesser immédiatement tout usage de la marque GAMMASCAN n°010439818 pour dénommer les produits ou services qu’elle conçoit, fabrique ou commercialise, directement ou indirectement ;

— Faire interdiction à la société AM2C d’utiliser, sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers, la dénomination GAMMASCAN ou toute dénomination similaire portant atteinte aux droits antérieurs que la société BERTHOLD détenait sur la marque GAMMASCAN n°093639719 et détient actuellement sur la marque de l’Union Européenne n°010439818, et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;

— Faire interdiction à la société AM2C d’enregistrer tout nom de domaine comprenant le terme « GAMMASCAN » et ce sous astreinte de 1000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l’arrêt à intervenir.

Réformer le jugement du Tribunal de grande instance de Marseille en date du 22 janvier 2015 pour le surplus et, en conséquence :

— Condamner la société AM2C à payer à la société BERTHOLD la somme de 765 000 euros en réparation du préjudice qu’elle a subi du fait des actes de contrefaçon commis à compter du 26 mars 2009 ;

— Juger que les actes commis par la société AM2C France antérieurement au 26 mars 2009 sont des actes de concurrence déloyale ;

— Condamner la société AM2C à verser à la société BERTHOLD la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice qu’elle a subi du fait des actes de concurrence déloyale;

— Condamner la société AM2C à verser à la société BERTHOLD la somme de 30 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

— Condamner la société AM2C aux entiers dépens distraits au profit de Maître [L] [P] sur son affirmation de droit ;

— ————–

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l’instruction par ordonnance du 1er septembre 2022 et a fixé l’examen de l’affaire à l’audience du 22 septembre 2022. La clôture a été reportée à la date des débats.

A cette date, l’affaire a été retenue et mise en délibéré au 3 novembre 2022.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de préciser que le renvoi après cassation porte sur une partie du dispositif de l’arrêt rendu le 22 février 2018 tel que rappelé ci-dessus et n’inclut pas certains chefs du jugement confirmé à savoir :

— déclare recevable la demande additionnelle formée par la société Automatismes Mesure Contrôle et Conseils ;

— dit n’y avoir lieu d’écarter des débats les pièces produites aux débats par la société BERTHOLD sous les numéros 2, 6, 9, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18 et 19 ;

— dit n’y avoir lieu d’écarter des débats les attestations de Messieurs [U] et [I] produites aux débats par la société Automatismes Mesure Contrôle et Conseils,

(‘)

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire

de sorte qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ces chefs de demandes non visés par la cassation.

Sur le rejet des conclusions prises par la partie intimée le 14 septembre 2022 :

Au visa des articles 907, 802 et 803 du code de procédure civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats postérieurement à l’ordonnance de clôture, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, à l’exception des demandes en intervention volontaire, des conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu’à l’ouverture des débats, et à l’exception également des demandes de révocation de l’ordonnance de clôture et des conclusions qui tendent à la reprise de l’instance en l’état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption.

En l’espèce, aucun motif ne justifie que soient écartées des débats les conclusions prises par la partie intimée, la société Berthold France, le 14 septembre 2022 dès lors que ces conclusions sont antérieures à l’ordonnance de clôture et interviennent en réponse aux conclusions de la partie appelante en date du 8 septembre 2022, et ce, après divers échanges de conclusions.

En conséquence, il y a lieu de rejeter la demande de la société AM2C tendant à ce que les conclusions datées du 14 septembre 2022 prises par la société Berthold France soient écartées.

Sur l’irrecevabilité des demandes formées par la société Berthold France :

La société AM2C soutient que la société Berthold France n’aurait plus qualité pour agir en l’état de l’extinction de sa marque Gammascan n° 09 3 639 719 depuis le 26 mars 2019 en l’absence de renouvellement de cette marque auprès de l’INPI.

Pour autant, il convient de rappeler qu’au visa de l’article 625 du code de procédure civile, sur les points qu’elle atteint, la cassation replace les parties dans l’état où elles se trouvaient avant l’arrêt cassé, de sorte que l’appréciation de la qualité et de l’intérêt pour agir de la société Berthold France s’apprécie antérieurement à l’arrêt partiellement annulé rendu le 22 février 2018, et ce, d’autant que les moyens soulevés visent notamment un dépôt frauduleux et le caractère non distinctif de la marque, éléments qui s’apprécient au moment du dépôt de la marque, en l’espèce en 2009.

En conséquence, le moyen tiré de l’irrecevabilité des demandes formées par la société Berthold France doit être écarté, sans préjudice de l’appréciation qui sera faite au fond sur ses droits de marque.

Sur la demande d’annulation de la marque Gammascan :

Aux termes de ses conclusions de première instance, la société AM2C a sollicité du tribunal de grande instance de Marseille que soit prononcée la nullité de la marque Gammascan déposée le 26 mars 2009 par la société Berthold France en faisant valoir que ce dépôt était frauduleux comme contrevenant à ses droits antérieurs et avait été effectué dans l’intention de nuire.

La société AM2C soutenait ainsi que par le biais de son fondateur, M. [O] [J], un système de portique de détection de la radioactivité avait été élaboré, ainsi qu’un logiciel intitulé « Gammascan », et que cette dénomination était utilisée par la société AM2C, depuis sa création le 7 avril 2006, à titre de nom commercial et de marque d’usage dans des activités de distribution et de commercialisation de contrôle de la radioactivité, sans pour autant qu’une marque ait été enregistrée. La société AM2C relevait par ailleurs que la société Berthold France ne pouvait ignorer que la société AM2C utilisait cette dénomination dans la mesure où elles exercent toutes deux sur un domaine d’activité très spécifique et sont concurrentes sur de nombreux appels d’offres.

En cause d’appel, la société AM2C a également soutenu que la marque « Gammascan » était nulle pour défaut de distinctivité aux motifs que la société Berthold France n’utilisait pas le signe « Gammascan » à titre de marque mais pour désigner le produit et ses fonctionnalités, à savoir un scanner par détection de rayons gamma.

Sur l’absence de caractère distinctif :

Aux termes de l’article L.714-3 du code de la propriété intellectuelle est déclaré nul par décision de justice l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux dispositions des articles L.711-1 à L.711-4.

Ainsi, en application de de l’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019, « le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.

Sont ainsi dépourvus de caractère distinctif :

a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;

b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ;

c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle.

Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l’usage. »

Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, signifie dès lors que cette marque est apte à identifier le produit pour lequel est demandé l’enregistrement comme provenant d’une entreprise déterminée, le distinguant de celui provenant d’autres entreprises.

Ainsi, le signe doit présenter un caractère intrinsèquement distinctif permettant de déterminer l’origine commerciale des produits et de les distinguer d’une autre marque.

A cet égard, il a été jugé que le caractère distinctif d’un signe s’apprécie à la date de son dépôt et qu’il s’apprécie en outre par rapport à chacun des produits ou services visés par l’enregistrement, ainsi que par rapport à la perception qu’en a le public auquel la marque est destinée.

En l’espèce, et contrairement aux énonciations de la société AM2C qui conclut que la société Berthold France « a déposé le signe « Gammascan », le 26 mars 2009, en classe 9, pour désigner un portique de détection de radioactivité » il ressort du dépôt effectué le 26 mars 2009 que la classe 9 désigne divers produits ou services incluant des « appareils et instruments scientifiques (autres qu’à usage médical) », des « distributeurs automatiques et mécaniques pour appareils à pré-paiement » des « bâches de sauvetage » et divers autres produits et services tels que listés au dépôt de la marque (pièce 3 de l’intimée).

Le terme « portique de sécurité » ne fait pas partie de la liste des produits et services de la classe 9 visés par l’enregistrement de la marque Gammascan sauf à l’inclure dans la qualification générique des « appareils et instruments scientifiques (..) de mesurage (..), de contrôle ».

Dès lors, le signe Gammascan n’est pas de nature à désigner uniquement un produit et ses fonctionnalités, à savoir un appareil servant à scanner des rayons gammas au regard des produits et services désignés à l’enregistrement.

Par ailleurs, le public pertinent, au sens de l’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, à savoir celui qui perçoit la marque Gammascan, et est susceptible d’en apprécier le caractère intrinsèquement distinctif et l’origine commerciale, est composé en l’espèce, non pas de professionnels ou d’experts de la radioactivité mais de professionnels du traitement des déchets urbains et industriels qui font usage de ces portiques afin de détecter d’éventuelles traces de radioactivité.

Cette perception est corroborée par les attestations de Messieurs [Y], [W] et [X] (pièces 49, 50 et 52 de l’intimée), M. [Y] étant lui-même en charge de 225 sites de traitement des déchets en France.

Ainsi, M. [O] [X] (pièce 52) atteste que « de manière générale, dans ce domaine industriel, les compétences des dirigeants et exploitants des centres de traitement de déchets sont orientées vers la gestion technique, humaine, et financière des installations équipées de portiques. Ils n’ont aucune connaissance dans le domaine du nucléaire. Le nom de Gammascan n’évoque rien de familier en dehors d’être la marque des portiques de la société Berthold France ».

M. [N] [Y] (pièce 49) confirme cette analyse concernant l’absence de connaissance des intervenants dans le domaine nucléaire.

M. [B] [W], président de plusieurs sociétés spécialisées dans le recyclage des matériaux (pièce 50) affirme que « dans le métier nous n’avons aucune compétence dans le domaine du nucléaire. Par conséquent, pour moi le nom gamma SCAN n’évoque rien de particulier, mis à part d’être la marque des portiques de la société Berthold France que j’achète régulièrement pour équiper mes sites ».

Il en résulte que la perception invoquée par la société AM2C de la marque Gammascan comme étant l’apposition des mots « Gamma » et « Scan », et qui renverrait, dans l’esprit du public concerné, aux seules fonctionnalités du produit, à savoir un matériel de détection par rayons atomiques de type y (gamma), n’est pas celle appréhendée par le public visé par la marque, celui-ci n’ayant manifestement pas les compétences en matière nucléaire pour percevoir immédiatement la fonctionnalité du produit par la seule évocation des mots utilisés.

Ainsi, la présentation accolée des termes « Gamma » et « Scan » en « Gammascan », outre sa prononciation qui peut différer, n’est pas de nature à permettre au public pertinent d’associer ce signe à la fonctionnalité d’un objet, étant précisé qu’il résulte des pièces et témoignages que le terme « Gammascan » est également utilisé pour un logiciel, de sorte que la marque apparaît détachée de ses fonctionnalités.

La perception faite par le public pertinent, tel que défini par l’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, relève manifestement en l’espèce d’une appréhension de la marque comme ayant une origine commerciale, à savoir celle des portiques de la société Berthold.

Au demeurant, la société AM2C n’apporte aucune pièce de nature à démentir les attestations communiquées par la société Berthold France.

En conséquence, il y a lieu de juger que le signe « Gammascan » revêt un caractère suffisamment distinctif pour constituer une marque en ce qu’il ne vise pas uniquement les caractéristiques d’un produit concerné par l’enregistrement de la marque, nonobstant le fait que le portique de détection visé par la société AM2C ne fait pas partie explicitement des produits de la classe 9 visés par l’enregistrement de la marque effectuée le 26 mars 2009 et que l’absence de distinctivité n’a pas été déclinée aux autres produits de la classe.

Sur le dépôt frauduleux :

Au visa de l’article L.712-6 du code de la propriété intellectuelle, il a été jugé que le dépôt d’une marque en fraude des droits d’autrui était nécessairement déposée de mauvaise foi et que dès lors, l’enregistrement frauduleux d’une marque pouvait être annulé de ce fait.

L’appréciation de la bonne foi est effectuée au moment du dépôt de la marque et ne suppose pas nécessairement la justification de droits antérieurs de la partie plaignante sur le signe litigieux dès lors que celle-ci établit la preuve de l’existence d’intérêts sciemment méconnus par le déposant, notamment par l’intention frauduleuse qui pourrait résulter, entre autres, d’une volonté de priver l’autre partie de l’usage d’un signe nécessaire à son activité.

En l’espèce, comme l’ont relevé les premiers juges, à la motivation desquels il convient de se référer expressément, la société Berthold France a, dès les années 90, élaboré un portique de détection de la radioactivité dénommé Gammascan, lequel a fait l’objet d’un rapport d’essai de l’organisme Ascora le 26 avril 1996 et a été commercialisé sous cette dénomination dès l’année 1995, tel que cela résulte des attestations de Messieurs [Y], [T], [M], [H], [F], et d’un bon de livraison à l’en-tête de la société Berthold France daté du 29 mars 1995 ainsi que de trois factures libellées en 1995, 1996 et 1997.

Sous réserve de la destruction de pièces à la suite de l’incendie dont a été victime la société Berthold France en 2006, il n’est pas établi que l’usage de la dénomination Gammascan se soit poursuivi régulièrement jusqu’en 2009, date du dépôt de la marque, les témoignages faisant état du remplacement du portique Gammascan par un portique dénommé Radascan ou encore Multiscan.

Pour autant, il apparaît que la société Berthold France, constatant que la société AM2C, société concurrente créée le 7 avril 2006 par M. [S] [I] et M. [C] [U], eux-mêmes anciens salariés de la société Berthold France, faisaient usage du signe Gammascan depuis trois ans, a pu légitimement, et sans mauvaise foi, revendiquer comme marque le signe qu’elle avait déjà utilisé pendant de nombreuses années et ce, dès les années 90, bien avant l’usage qui en a été fait par la société AM2C entre 2006 et 2009.

A cet égard, il ressort de l’arrêt rendu le 20 octobre 2010 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence que le logiciel créé par M. [J] et portant la dénomination Gammascan a été considéré comme une ‘uvre originale ayant pour auteur M. [J].

Néanmoins, outre que cette reconnaissance ne concerne que le logiciel et non un portique de détection, la société AM2C ne justifie pas d’une antériorité de ses droits sur le signe Gammascan, laissant présumer l’intention de nuire de la société Berthold France, afin notamment de faire obstacle à l’usage de la dénomination.

Par ailleurs, il apparaît que la société Berthold France a déposé la marque pour en faire un usage effectif dès son dépôt et non pour paralyser l’activité de la société AM2C.

En effet, il ressort de courriels échangés entre la société Berthold France et M. [A] entre le 22 juin et le 13 juillet 2011, des procès-verbaux d’huissier de justice établis les 15 mars et 14 décembre 2011 sur le site de la société Berthold France ainsi que des factures émises entre les années 2010 et 2014 que la société Berthold France a fait un usage effectif de la marque déposée.

Par ailleurs, le procès-verbal établi par Maître [R] huissier de justice le 8 août 2022, et produit dans le cadre de la présente instance, atteste ainsi que pas moins de 236 factures ont été émises entre les années 2010 et 2014 par la société Berthold France avec la dénomination Gammascan.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande d’annulation de la marque « Gammascan » déposée par la société Berthold France à L’INPI le 23 mars 2009 pour les produits de la classe 9.

Sur la déchéance de la marque pour défaut d’usage sérieux :

Aux termes de l’article L.714-5 alinéa 1er du code de la propriété intellectuelle encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans.

La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée.

En cause d’appel (date non précisée par l’appelant), la société AM2C a sollicité pour la première fois que soit prononcée pour défaut d’usage sérieux la déchéance des droits de la société Berthold France sur la marque Gammascan déposée le 26 mars 2009 et réitère sa demande dans le cadre de la présente instance en sollicitant qu’il soit jugé que la société Berthold France est « déchue de ses droits sur la marque « Gammascan » n°093639719, pour l’ensemble des produits et services désignés à l’enregistrement et ce, depuis son enregistrement, le 26 mars 2009 ».

A cet égard, il convient de souligner que le débat soulevé par la société AM2C ne porte en réalité que sur les portiques de détection et le logiciel exploités sous la dénomination Gammascan et non sur les autres produits visés par l’enregistrement. La demande de déchéance, bien que générale, est dès lors limitée par l’intérêt pour agir justifié par la société AM2C au regard de ses propres activités.

Par ailleurs, la société AM2C ne précise pas, dans le cadre de ses conclusions, la période visée par le défaut d’usage sérieux, sauf à relever que la société Berthold France fait elle-même référence à un délai de cinq ans précédant la demande de déchéance qui aurait été faite en date du 25 juin 2015, de sorte que cette période sera retenue comme période de référence, étant précisé que la marque a fait l’objet d’une publication au BOPI le 30 avril 2009.

En l’espèce, la société AM2C conteste la force probante des pièces produites par la société Berthold France pour la première fois après l’arrêt de renvoi rendu le 10 novembre 2021.

Nonobstant le caractère tardif de la production de certaines pièces, il apparaît que la société Berthold France a d’ores et déjà communiqué divers éléments attestant d’un usage sérieux et ininterrompu de la marque jusqu’en 2014, tels que rappelés ci-dessus.

Cet usage est en outre corroboré par le propre témoignage de M. [O] [J] (pièce 46 de l’intimée) qui relève qu’en tant que salarié associé de la société AM2C à compter de 2008 il a « rapidement pu constater que le nom Gammascan était déjà utilisé par la société Berthold France pour son portique de détection de radioactivité et ce, depuis des années aux dires des clients (..) Dans les années qui ont suivi la concurrence a été soutenue et la confusion entretenue! ».

M. [J] évoque également l’action judiciaire envisagée en 2010 par la société AM2C contre la société Berthold France (pièces 13 et 13 bis de l’appelante) et ajoute « A cette époque, le système de détection de la radioactivité de la société Berthold France nommé Gammascan était l’appareil le plus commercialisé de la gamme dans le domaine du traitement des déchets sur le marché français où il était le plus connu par son nom et très répandu chez les clients ».

En outre, en dépit de la dissimulation de l’identité de certains clients auxquels les factures ont été adressées, il ressort du procès-verbal établi par huissier de justice du 8 août 2022 (pièce 58 de l’intimé) que celui-ci a inventorié 236 factures de 2010 à 2014 inclus comportant le terme Gammascan.

La société Berthold France produit également diverses factures (pièces 36 à 40 incluses) sur lesquelles figure la dénomination « Portique Gammascan » ou « Gammascan LB112 » de 2010 à 2014.

Il en résulte que la société Berthold France justifie, par la production de factures ainsi que par des témoignages, d’un usage sérieux de la marque Gammascan pendant une période ininterrompue de cinq ans entre 2009 et 2014 inclus.

Néanmoins, cet usage n’est justifié que pour le portique de détection, lequel peut s’entendre des « appareils et instruments scientifiques(…), de mesurage, (‘) de contrôle » visés en classe 9 mais n’est pas justifié pour l’usage de « logiciels » ni pour les autres produits visés.

Il y a donc lieu de juger que la société Berthold France est déchue de ses droits sur la marque Gammascan s’agissant des produits dits « logiciels » visés à l’enregistrement, étant cependant observé que la société AM2C n’a pas sollicité subsidiairement, aux termes du dispositif de ses conclusions, la déchéance de la marque pour le logiciel mais a formé une seule demande principale à l’ensemble des produits sans distinction et sans appréciation in concreto du défaut d’usage sérieux pour l’ensemble des produits visés par la classe 9.

Pour le surplus et en tout état de cause, la société AM2C ne justifie pas d’un intérêt à agir au sens de l’article L.714-5 du code de la propriété intellectuelle s’agissant des autres produits visés par la classe 9 de sorte qu’elle sera déboutée de ses demandes complémentaires.

Sur les actes de contrefaçon :

Aux termes des articles L.713-1 et L.713-2 du code de la propriété intellectuelle l’enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque pour les produits et services qu’il a désignés.

Sont ainsi interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque.

En l’espèce, s’agissant du seul portique de détection visé par l’enregistrement de la marque Gammascan, il apparaît que la société AM2C a fait usage de cette marque pour désigner également son portique de détection même après le dépôt de la marque Gammascan en 2009, ce qui résulte des constats établis par voie d’huissiers de justice les 7 et 11 décembre 2012 (pièce 30 de l’intimée) mais également des propres diffusions effectuées par la société AM2C après 2009 (demande de devis pour un portique par mail du 24 juillet 2012 (pièces 25 de l’appelante et 32 de l’intimée).

Comme l’ont noté les premiers juges, cette exploitation consacre par sa seule matérialité une contrefaçon constitutive pour la société Berthold France d’un préjudice.

M. [J] lui-même reconnaît dans son attestation la confusion qui régnait dans l’esprit de la clientèle quant à la société à l’origine de la commercialisation du portique Gammascan.

Pour autant, considérant que les actes de contrefaçon ne portent que sur un produit déterminé (portiques de détection) et non sur le logiciel en l’état de la déchéance de la société Berthold France de ses droits sur ce produit, et que les éléments communiqués par la société Berthold France concernant son préjudice ne sont pas étayés, le montant des dommages et intérêts alloués à la société Berthold France sera limité à la somme de 50.000 euros et est de nature à compenser utilement le préjudice subi par la société Berthold France du fait de la confusion entretenue par l’usage d’une marque qu’elle a elle-même enregistrée.

La société Berthold France se prévaut d’un tableau faisant référence aux clients qu’elle aurait perdus entre le 26 mars 2009, date de dépôt de la marque, et l’année 2013, et invoque une perte annuelle moyenne de 300.000 euros soit un préjudice qu’elle évalue à 765.000 euros (300.000 ‘ 130.000) x 4,5 ans) aux termes du dispositif de ses conclusions.

Outre que ce tableau constitue une preuve à soi même au visa de l’article 1353 du code civil et n’est corroboré par aucune autre pièce probante, aucun lien certain ne peut être fait entre la perte par la société Berthold France de certains marchés et l’usage par la société AM2C de la marque Gammascan en l’état des multiples facteurs économiques et concurrentiels pouvant également expliquer l’attribution de marchés à d’autres opérateurs.

Et ce, d’autant que la société Berthold France n’établit pas que ces contrats auraient été remportés par la société AM2C elle-même.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a alloué à la société Berthold France la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts mais confirmé en ce qu’il a interdit à la société AM2C d’utiliser la dénomination Gammascan pour désigner ses portiques de contrôle de la radioactivité, à compter de la signification de la décision, sous astreinte, et en ce qu’il a enjoint à la société AM2C de faire radier le nom de domaine Gammascan.fr dans un délai de 48 heures à compter de la signification de la décision, sous astreinte, étant observé que la société Berthold France ne conteste pas que sa marque française n’a pas été renouvelée auprès de l’INPI de sorte qu’elle ne serait plus en vigueur depuis le 26 mars 2019.

La société Berthold France invoque en revanche l’enregistrement de la marque de l’union européenne Gammascan sous le numéro 010439818 en classe 9 depuis le 23 novembre 2011 (date d’expiration : 23 novembre 2031) et demande qu’il soit également fait interdiction à la société AM2C d’utiliser la dénomination Gammascan en méconnaissance des droits qu’elle détient au niveau européen (pièce 59 de l’intimée).

A cet égard, l’interdiction faite par le tribunal de grande instance à la société AM2C d’utiliser la marque Gammascan détenue par la société Berthold France est, par son libellé, propre à englober les deux marques, et doit en tout état de cause, être comprise comme incluant la marque française et la marque européenne.

En revanche, il convient de rappeler qu’au visa de l’article 954 du code de procédure civile la cour n’est tenue que par les prétentions visées au dispositif des conclusions de sorte que les demandes additionnelles formées dans les motifs n’ont pas à être examinées.

Sur les actes de concurrence déloyale commis par la société AM2C :

La société Berthold France sollicite à cet égard l’octroi d’une somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale commis par la société AM2C antérieurement au dépôt de sa marque en 2009.

Aux termes de l’article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

A cet égard, la concurrence existant entre deux sociétés, spécialisées dans un secteur de marché similaire, ne constitue pas en soi un acte fautif en vertu du principe de la liberté du commerce et de l’industrie.

En revanche, est fautive la concurrence qui s’accompagne d’actes ou de man’uvres déloyales ayant pour effet de désorganiser ou déstabiliser une autre entreprise, voire de neutraliser son activité.

S’agissant du parasitisme, il consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

En l’espèce, la société Berthold France ne démontre pas l’existence de pratiques fautives de la part de la société AM2C au sens des dispositions de l’article 1382 susvisé.

En effet, il résulte des témoignages, notamment de celui de M. [C] [U] (pièce 31 de l’appelante) et de M. [O] [J] (pièce 46 de l’intimée) que ceux-ci sont à l’origine de recherches sur l’élaboration d’un portique de détection et d’un logiciel.

Par arrêt du 20 octobre 2010 la présente cour, dans le cadre du litige opposant M. [J] à la société Nannotech, a d’ailleurs jugé que le logiciel Gammascan « est une ‘uvre originale ayant pour auteur Monsieur [J] » (pièce 26 de l’appelante).

Parallèlement, la société Berthold France a justifié, comme rappelé ci-dessus, qu’elle avait élaboré dans les années 90 un portique de détection de la radioactivité dénommé Gammascan et diffusé sous cet intitulé sans dépôt de marque, a minima jusqu’en 2006, et ensuite sous couvert de l’enregistrement de la marque auprès de l’INP le 26 mars 2009.

Les pièces produites ne permettent pas de déterminer précisément l’inventeur ou l’initiateur du concept de détection de la radioactivité des déchets par portique, le procédé semblant être davantage le fruit de recherches communes et croisées au sein d’un milieu professionnel restreint, dans lequel les salariés se connaissent et ont pu eux-mêmes, au fil de leurs embauches successives, avoir connaissance des divers projets en cours en matière de recherche et de développement.

Il en résulte que, si indéniablement un contexte de concurrence s’est instauré entre les deux sociétés, parfaitement décrit par les témoignages versés au dossier, il n’en demeure pas moins que cette concurrence ne revêt pas de caractère déloyal, aucun acte fautif n’étant démontré de la part de la société AM2C, étant rappelé que la société Berthold France a attendu elle-même l’année 2009 afin de protéger la marque Gammascan en dépit d’un usage revendiqué depuis les années 90.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a débouté la société Berthold France du surplus de ses demandes.

Sur les actes de concurrence déloyale et parasitisme commis par la société Berthold France :

La société AM2C sollicite quant à elle l’octroi d’une somme de 400.000 euros en réparation du préjudice patrimonial et moral subi du fait des actes de concurrence déloyale et de parasitisme commis par la société Berthold France.

A titre liminaire il convient de relever que la demande tendant à voir constater le caractère irrecevable de la demande additionnelle de la société AM2C concernant la balise « LB 112 Scint » présentée par conclusions du 23 septembre 2013, soit antérieurement au jugement rendu par le tribunal de grande instance de Marseille, est sans objet en cause d’appel dès lors que le tribunal a statué sur cette exception et que la cour n’est pas saisie de ce chef au regard de l’arrêt de renvoi.

Sur le fond, la société AM2C invoque en premier lieu le débauchage par la société Berthold France de l’un de ses salariés. Or, il ressort de l’attestation de M. [K] [E] (pièce 55 de l’intimée) que celui-ci indique que la société Berthold France n’a pas essayé de le contacter pour le débaucher et que son changement d’employeur résulte de son initiative. La société AM2C n’apporte pas d’éléments de nature à démentir les propos du salarié en cause.

En tout état de cause, le seul départ d’un salarié auprès d’un concurrent ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale.

La société AM2C fait également grief à la société Berthold France d’avoir reproduit servilement l’un de ses portiques de sécurité. Outre les imprécisions relatives à la nature du portique, rendant impossible une quelconque comparaison, cet élément n’est pas de nature à constituer un acte de concurrence déloyale eu égard au contexte susvisé, à savoir la présence de plusieurs axes de recherches concentrés dans un milieu professionnel restreint, n’excluant pas que des avancées communes aient été effectuées.

En outre, les innovations technologiques de chacun étaient portées à la connaissance des différents acteurs du marché sans qu’aucun d’entre eux n’ait jugé utile de faire protéger ses droits d’auteur ou de marque jusqu’en 2009.

Enfin, la société AM2C invoque un préjudice d’image lié à l’usage du terme Gammascan alors qu’elle-même exploitait un logiciel du même nom.

A cet égard, la déchéance prononcée pour les droits détenus par la société Berthold Francesur les logiciels atteste que la société Berthold France, sous couvert des portiques de détection, a entendu également assurer la protection d’un logiciel dont elle n’établit pas la commercialisation, les factures de commercialisation sous la marque Gammascan ne concernent que des portiques de détection.

La société Berthold France a dès lors, par l’enregistrement d’une marque relative à un produit non commercialisé par ses soins, nécessairement généré une concurrence déloyale à l’égard de la société AM2C en créant une confusion dans l’esprit des clients sur la société chargée de commercialiser les logiciels et ce, alors même que, comme le reconnaissent des témoins, la société Berthold France avait d’ores et déjà acquis une notoriété concernant les détecteurs de radioactivité commercialisés sous la dénomination Gammascan.

L’enregistrement de la marque Gammascan, en ce compris pour le logiciel développé par la société AM2C, par le biais de M. [J] qui lui en avait consenti les droits, a dès lors généré une confusion permettant aux clients d’associer systématiquement le logiciel au portique et de créer un avantage au profit de la société Berthold en terme d’image de marque.

Considérant qu’il a été jugé qu’il s’infère nécessairement un préjudice d’un acte de concurrence déloyale, le préjudice moral de la société AM2C sera dès lors évalué à 50.000 euros de dommages et intérêts.

Pour le surplus, il n’est pas démontré que le préjudice financier invoqué par la société AM2C procède du seul comportement de la société Berthold France, aucune pièce ni aucun témoignage ne permettant de corréler la perte financière invoquée et le comportement de cette dernière.

La société Berthold France sera dès lors condamnée à payer à la société AM2C la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires en publication de la décision :

La nature du contentieux et les enjeux du litige ne rendent pas nécessaire une telle publication demandée par la société AM2C.

Cette demande doit dès lors être rejetée.

Sur les frais et dépens :

Eu égard aux motifs adoptés il y a lieu de juger que chaque partie conservera la charge de ses frais et dépens, de première instance et d’appel, recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu l’arrêt de renvoi en date du 10 novembre 2021,

Rejette la demande de la société AM2C tendant à ce que les conclusions datées du 14 septembre 2022 prises par la société Berthold France soient écartées,

Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir de la société Berthold France,

Confirme le jugement rendu le 22 janvier 2015 par le tribunal de grande instance de Marseille en ce qu’il a :

— rejeté la demande d’annulation de la marque Gammascan déposée par la société Berthold France à l’INPI le 23 mars 2009 pour les produits de la classe 9,

— interdit à la société AM2C d’utiliser la dénomination Gammascan pour désigner ses portiques de contrôle de la radioactivité, à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte passé ce délai, de 500 euros par jour de retard pendant un délai de six mois à l’issue desquels il pourra être de nouveau statué,

— enjoint à la société AM2C de faire radier le nom de domaine Gammascan.fr dans un délai de 48 heures à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte, passé ce délai, de 500 euros par jour de retard pendant six mois à l’issue desquels il sera de nouveau statué, et dit n’y avoir lieu de se réserver la liquidation de l’astreinte,

— débouté la société Berthold France du surplus de ses demandes indemnitaires

Infirme le jugement en ce qu’il a :

— débouté la société AM2C de ses autres demandes,

— condamné la société AM2C à payer à la société Berthold France la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts,

— condamné la société AM2C aux dépens,

— condamné la société AM2C à payer à la société Berthold France la somme de 2.000 euros à titre d’indemnité de l’article 700 du code de procédure civile

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Ordonne la déchéance des droits de la société Berthold France sur la marque « Gammascan » n°093639719, pour les produits enregistrées en classe 9 mais uniquement en ce qui concerne la catégorie « logiciels » et ce, depuis son enregistrement, le 26 mars 2009,

Ordonne la radiation de la marque Gammascan n°093639719 déposée le 26 mars 2009 par la société Berthold France auprès de l’INPI mais uniquement en ce qu’elle vise les produits dits « logiciels » et non l’ensemble des produits de la classe 9,

Interdit à la société Berthold France d’utiliser la dénomination Gammascan pour désigner des logiciels à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte provisoire, passé ce délai, de 500 euros par jour de retard pendant un délai de six mois,

Condamne la société Berthold France à payer à la société AM2C la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale,

Déboute la société AM2C du surplus de ses demandes,

Condamne la société AM2C à payer à la société Berthold France la somme de 50.000 euros de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon,

Déboute la société Berthold France de sa demande de dommages et intérêts au titre des actes de concurrence déloyale,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses frais de première instance et d’appel, recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Le GREFFIER La PRÉSIDENTE


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