Your cart is currently empty!
Commercialiser des boucles d’oreilles similaires à celles d’un autre opérateur économique mais à un prix particulièrement bas est constitutif (outre de contrefaçon de modèle) de parasitisme.
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 7 décembre 2022
Rejet non spécialement motivé
M. VIGNEAU, président
Décision n° 10741 F
Pourvoi n° T 21-11.232
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 DÉCEMBRE 2022
La société APM [Localité 4], société anonyme monégasque, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 21-11.232 contre l’arrêt rendu le 27 novembre 2020 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l’opposant :
1°/ à Mme [N] [E], domiciliée [Adresse 1],
2°/ à la société [E], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bellino, conseiller référendaire, les observations écrites de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société APM [Localité 4], de la SARL Corlay, avocat de Mme [E] et de la société [E], après débats en l’audience publique du 18 octobre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bellino, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société APM [Localité 4] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société APM [Localité 4] et la condamne à payer à la société [E] et à Mme [E], la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société APM [Localité 4].
PREMIER MOYEN DE CASSATION
(faute de parasitisme)
La société APM [Localité 4] fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir jugé que ses agissements étaient constitutifs d’actes de parasitisme, d’avoir ordonné la cessation de la commercialisation des deux modèles APM litigieux, à savoir les modèles de références Mono Black Silver Earcuff-AE9950BZT et Mono Black Silver Clip Earing-AE9949BZT, sous astreinte de 20 euros par infraction constatée et ce, à compter du quinzième jour suivant la signification de la décision, d’avoir ordonné l’interdiction d’en effectuer la publicité sur tout support et par quelque moyen que ce soit sous astreinte de 20 euros par infraction constatée et ce, à compter du quinzième jour suivant la signification de la décision, de l’avoir condamnée à payer à la société [E], venue aux droits des sociétés [E] Diffusion et Or de Vendôme, la somme de 69 361 euros en réparation de son préjudice matériel, outre la somme complémentaire de 5 000 euros au titre de la réparation du préjudice matériel actualisé en cause d’appel, de l’avoir condamnée à payer à la société [E] Diffusion, aux droits de laquelle est venue la société [E], la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral, de l’avoir condamnée à payer à madame [N] [E] la somme de 10 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral et d’avoir ordonné la publication de l’intégralité du dispositif en partie supérieure de la page d’accueil du site internet accessible à l’adresse https://www.apm.mc pendant une durée de 60 jours consécutifs à compter du huitième jour suivant la signification de la décision ;
1°) Alors que l’effort dont le demandeur à l’action en parasitisme soutient qu’il a bénéficié indûment à son adversaire ne saurait se déduire de la seule existence de coûts de fabrication d’un produit et d’investissements pour le promouvoir ; qu’en se fondant pourtant exclusivement, pour retenir que la société APM [Localité 4] avait commis des actes de parasitisme, sur des considérations tirées de l’existence de coûts de fabrication afférents aux boucles d’oreille litigieuses et de l’existence d’investissements réalisés par la société [E] pour les promouvoir (arrêt, pp. 8, al. 4, à p. 9, al. 10), la cour d’appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser les efforts que la société [E] aurait déployés et dont la société APM [Localité 4] aurait pu indûment tirer profit, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1240 du code civil, ensemble le principe de liberté du commerce et de l’industrie ;
2°) Alors que la commercialisation à un prix inférieur de produits similaires à ceux, non protégés par des droits de propriété intellectuelle, d’un concurrent n’est pas fautive ; qu’en se fondant pourtant, pour retenir que la société APM [Localité 4] avait commis des actes de parasitisme, sur la modicité du prix de commercialisation des boucles d’oreille mises sur le marché par cette dernière (arrêt, p. 10, al. 5), la cour d’appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser que la société APM [Localité 4] aurait indûment tiré profit du savoir-faire et des efforts humains et financiers consentis par la société [E], a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1240 du code civil, ensemble le principe de liberté du commerce et de l’industrie ;
3°) Alors que la reprise d’un thème de libre parcours exclut le parasitisme par reproduction servile d’un produit ; que la cour d’appel a relevé que les modèles de boucles d’oreilles litigieux appartenaient respectivement aux genres tribal et minimaliste (arrêt, p. 10, al. 6), d’où il résultait qu’ils constituaient des reprises de thèmes de libre parcours exclusives de tout parasitisme ; qu’en retenant pourtant que la société APM [Localité 4] avait reproduit servilement les modèles en cause et commis des actes de parasitisme, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article 1240 du code civil, ensemble le principe de liberté du commerce et de l’industrie.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION
(préjudice matériel de la société [E])
La société APM [Localité 4] fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir condamnée à payer à la société [E], venue aux droits des sociétés [E] Diffusion et Or de Vendôme, la somme de 69 361 euros en réparation de son préjudice matériel, outre la somme complémentaire de 5 000 euros au titre de la réparation du préjudice matériel actualisé en cause d’appel et de l’avoir condamnée à payer à la société [E] Diffusion, aux droits de laquelle est venue la société [E], la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral ;
Alors que lorsque le juge appelé à statuer sur la réparation d’un préjudice résultant d’agissements parasitaires et conférant à son auteur un avantage concurrentiel indu se fonde sur l’économie injustement réalisée par l’auteur des agissements parasitaires, il lui appartient de tenir compte des volumes d’affaires respectifs des parties affectés par lesdits agissements ; qu’en se fondant, pour déterminer le préjudice subi par la société [E], sur les économies réalisées par la société APM [Localité 4] (arrêt, p. 11, al. 1er), sans tenir compte des volumes d’affaires de chacune des parties, la cour d’appel a méconnu son office, en violation de l’article 1240 du code civil.
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
(préjudice moral de madame [E])
La société APM [Localité 4] fait grief à l’arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, de l’avoir condamnée à payer à madame [N] [E] la somme de 10 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral ;
Alors que le préjudice, pour être réparable, doit être personnel ; que la cour d’appel a constaté que madame [E] occupait au sein de la société [E] les fonctions de directrice artistique et qu’elle était la créatrice des modèles de boucles d’oreilles Berbère et Staple (arrêt, p. 11, al. 6), d’où il résultait qu’elle ne pouvait subir de préjudice moral distinct de celui de cette société et partant, aucun préjudice personnel ; qu’en retenant pourtant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 1240 du code civil.