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Le calcul de la prime d‘ancienneté du journaliste pigiste se fait dès le 1er contrat conclu y compris lorsque le contrat n’a pas fait l’objet d’un écrit.
L’article 23 de la convention collective prévoit que les barèmes minima des traitements se trouvent majorés d’une prime d’ancienneté calculée de la façon suivante :
Ancienneté dans la profession en qualité de journaliste professionnel :
— 3 % pour 5 années d’exercice ;
— 6 % pour 10 années d’exercice ;
— 9 % pour 15 années d’exercice ;
— 11 % pour 20 années d’exercice.
Ancienneté dans l’entreprise en qualité de journaliste professionnel :
— 2 % pour 5 années de présence ;
— 4 % pour 10 années de présence ;
— 6 % pour 15 années de présence ;
— 9 % pour 20 années de présence.
Est considéré comme temps de présence dans l’entreprise, pour le calcul de l’ancienneté, le temps passé dans les différents établissements de l’entreprise.
L’article 24 précise que l’on entend par présence pour le calcul de l’ancienneté du journaliste professionnel :
a) Dans la profession : le temps pendant lequel il a exercé effectivement son métier ;
b) Dans l’entreprise : le temps pendant lequel il est employé comme tel dans l’entreprise, quelles que puissent être les modifications survenant dans la nature juridique de celle-ci.
Lorsqu’un journaliste remplaçant est titularisé sans qu’il y ait eu interruption de service, son ancienneté dans l’entreprise prend effet à la date de son remplacement.
Sont considérés comme temps de présence (profession et entreprise) :
— le service national obligatoire, sous réserve que le journaliste professionnel ait été réintégré dans l’entreprise sur sa demande dès la fin de son service ;
— le temps de mobilisation et, plus généralement, les interruptions pour faits de guerre telles qu’elles sont définies au titre Ier de l’ordonnance du 1er mai 1945 ;
— les périodes militaires obligatoires ;
— les interruptions pour congés annuels et congés exceptionnels résultant d’un accord entre les parties ;
— les interruptions pour maladies, accidents et maternités.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL DE VERSAILLES 5e chambre ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022 N° RG 20/00736 N° Portalis DBV3-V-B7E-TZU3 AFFAIRE : [U] [T] C/ S.A.S. L’EQUIPE Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Décembre 2019 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Boulogne-Billancourt N° Section : Encadrement N° RG : F19/00115 LE VINGT DEUX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX, La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, initialement fixé au au 21 septembre 2022 et différé au 22 septembre 2022, les parties ayant été avisées, dans l’affaire entre : Monsieur [U] [T] né le 13 Août 1973 à [Localité 5] (95) de nationalité Française [Adresse 1] [Localité 4] Représentant : Me Magali SALVIGNOL-BELLON, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 355 – Représentant : Me Thibault PINATEL de la SCP BOLLET & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE APPELANT **************** S.A.S. L’EQUIPE N° SIRET : 332 978 485 [Adresse 2] [Localité 3] Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 – Représentant : Me Arnaud TEISSIER de la SELARL CAPSTAN LMS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020 et par Me Jules SACHEL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS INTIMÉE **************** Composition de la cour : En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 30 mai 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Perrine ROBERT, Vice-président placé chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Régine CAPRA, Présidente, Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller, Madame Perrine ROBERT, Vice-président placé, Greffier lors des débats : Madame Carine DJELLAL, FAITS ET PROCÉDURE, Monsieur [U] [T] a collaboré avec la société L’Equipe à compter du 1er octobre 2001 en qualité de pigiste. La société l’a engagé à compter du 1er octobre 2007 en qualité de Reporter, coefficient 200 et l’a affecté à la rubrique ‘football’ de la rédaction. La relation de travail était soumise à la convention collective des journalistes. La société l’Equipe emploie au moins onze salariés. En février 2009, Monsieur [T] est devenu Grand Reporter. Le 1er octobre 2014, il a été nommé Rédacteur en chef adjoint au Pôle Football. Par courrier du 21 mars 2018, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail. Par requête du 28 janvier 2019, Monsieur [U] [T] a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin que la prise d’acte de son contrat de travail soit requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et afin d’obtenir le paiement de diverses sommes. Par jugement du 19 décembre 2019, auquel la cour renvoie pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a : — Dit que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par Monsieur [T] s’analyse en une démission, — Condamné Monsieur [T] à verser à la société L’Equipe la somme brute de 7 140,60 euros au titre de l’indemnité compensatrice du préavis qu’il n’a pas effectué, — Condamné la société L’Equipe à verser à Monsieur [T] la somme brute de 5 465,95 euros au titre du rappel de prime d’ancienneté ainsi que la somme brute de 546,59 euros au titre des congés payés afférents, — Condamné la société L’Equipe à verser à Monsieur [T] la somme de 1 000 euros nets au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, — Prononcé l’application de l’intérêt au taux légal ainsi que sa capitalisation, l’exécution provisoire sur le fondement de l’article R. 1454-28 du Code du travail, — Débouté les parties du surplus de leurs demandes, — Condamné 1a société L’Equipe aux entiers dépens. Monsieur [U] [T] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 9 mars 2020. Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par Rpva le 14 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, il demande à la cour de : — Infirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 19 décembre 2019 en ce qu’il : * a dit que la prise d’acte de la rupture de son contrat s’analysait en une démission et non en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, * l’a condamné à verser à la société L’Equipe la somme brute de 7 140,60 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis qu’il n’a pas effectué, * Limité à la somme de 1 000 euros le montant de la condamnation prononcée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, * l’a débouté de ses autres demandes qui étaient les suivantes : * Condamner la SAS L’Equipe aux sommes suivantes : — 117 994,66 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle — 116 051,16 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement, – 16 856,38 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 1685,64 euros de congés payés y afférents, — 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions conventionnelles, — 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail, — 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral, — Ordonner la délivrance de bulletins de paie et documents de rupture rectifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard avec faculté de liquidation, — Confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 19 décembre 2019 en ce qu’il a condamné la société L’Equipe à lui verser la somme brute de 5 465,95 euros au titre du rappel de prime d’ancienneté ainsi que la somme brute de 546,59 euros au titre des congés payés afférents, Et y ajoutant, — le Juger recevable et bien fondé dans son action, — Ordonner que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail produise les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, — Juger que la société L’Equipe a violé les dispositions conventionnelles relatives à la prime d’ancienneté, — Juger que l’exécution du contrat par la société L’Equipe est constitutive d’une inexécution fautive ouvrant droit à des dommages-intérêts distincts, En conséquence, — Condamner la société L’Equipe aux sommes suivantes : * 117 994,66 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, * 116 051,16 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement, * 16 856,38 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 1685,64 euros de congés payés y afférents, *10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des dispositions conventionnelles, *15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail, *15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral, — Débouter la société L’Equipe de l’ensemble de ses demandes — Ordonner que toute condamnation prononcée produira des intérêts de droit à compter de la saisine de la juridiction, avec capitalisation des intérêts, — Condamner la société L’Equipe à 4 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens, — Entendre la Cour ordonner à la société L’Equipe la délivrance de bulletins de paie et documents de rupture rectifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard avec faculté de liquidation, Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par Rpva le 19 août 2020, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société L’Equipe demande à la cour de : A titre principal : — Confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 19 décembre 2019 en ce qu’il a jugé que la prise d’acte de Monsieur [T] constitue une démission, — Débouter Monsieur [T] de l’ensemble de ses demandes, — Infirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 19 décembre 2019 en ce qu’il l’a condamnée à verser à Monsieur [T] un rappel de prime d’ancienneté A titre subsidiaire : — Ramener ses condamnations à de plus justes proportions : * 21 421,80 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; * 78 546,60 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ; * 14 281,20 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 1 428,12 euros à titre de congés payés sur préavis ; En tout état de cause : — Condamner Monsieur [T] lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, — Confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 19 décembre 2019 en ce qu’il a condamné Monsieur [T] à verser la somme de 7 140,60 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis de démission, — Condamner Monsieur [T] aux entiers dépens. La clôture de l’instruction a été prononcée le 6 avril 2022. MOTIFS DE LA DÉCISION Sur la prime d’ancienneté Monsieur [T] affirme que la société l’Equipe l’a privé d’une partie de sa prime d’ancienneté, qu’elle n’a pris en compte son ancienneté qu’à compter de l’année 2012 alors qu’il a commencé à travailler pour elle à compter du mois d’octobre 2001, que si il n’avait pas à l’époque de contrat, la société était son employeur unique et régulier et il est ainsi réputé avoir été embauché dès l’origine par contrat à durée indéterminée, qu’il a, à plusieurs reprises vainement sollicité auprès de son employeur la régularisation de sa situation. La société soutient que la collaboration de Monsieur [T] entre 2001 et 2007 en tant que pigiste était irrégulière, que si il doit être considéré qu’il a bénéficié en tant que tel d’un contrat à durée indéterminée en l’absence de contrat écrit, il a néanmoins accepté lorsqu’elle l’a engagé par contrat écrit en 2007 en qualité de reporter de renoncer à son ancienneté, qu’il a accepté cette situation pendant plusieurs années. L’article 23 de la convention collective prévoit que les barèmes minima des traitements se trouvent majorés d’une prime d’ancienneté calculée de la façon suivante : * Ancienneté dans la profession en qualité de journaliste professionnel : — 3 % pour 5 années d’exercice ; — 6 % pour 10 années d’exercice ; — 9 % pour 15 années d’exercice ; — 11 % pour 20 années d’exercice. * Ancienneté dans l’entreprise en qualité de journaliste professionnel : — 2 % pour 5 années de présence ; — 4 % pour 10 années de présence ; — 6 % pour 15 années de présence ; — 9 % pour 20 années de présence. Sera considéré comme temps de présence dans l’entreprise, pour le calcul de l’ancienneté, le temps passé dans les différents établissements de l’entreprise. L’article 24 précise que pour l’application des dispositions de l’article ci-dessus, on entend par présence pour le calcul de l’ancienneté du journaliste professionnel : a) Dans la profession : le temps pendant lequel il a exercé effectivement son métier ; b) Dans l’entreprise : le temps pendant lequel il est employé comme tel dans l’entreprise, quelles que puissent être les modifications survenant dans la nature juridique de celle-ci. Lorsqu’un journaliste remplaçant est titularisé sans qu’il y ait eu interruption de service, son ancienneté dans l’entreprise prend effet à la date de son remplacement. Sont considérés comme temps de présence (profession et entreprise) : — le service national obligatoire, sous réserve que le journaliste professionnel ait été réintégré dans l’entreprise sur sa demande dès la fin de son service ; — le temps de mobilisation et, plus généralement, les interruptions pour faits de guerre telles qu’elles sont définies au titre Ier de l’ordonnance du 1er mai 1945 ; — les périodes militaires obligatoires ; — les interruptions pour congés annuels et congés exceptionnels résultant d’un accord entre les parties ; — les interruptions pour maladies, accidents et maternités, dans les conditions prévues aux articles 36 et 42 de la présente convention. S’agissant de l’ancienneté de Monsieur [T], il est acquis que celui-ci a été embauché par la société L’Equipe en qualité de pigiste sans contrat écrit du 1er octobre 2001 au 1er octobre 2007 et que cette collaboration était régulière, Monsieur [T] justifiant par la production de son relevé de carrière qu’il en tirait la quasi intégralité de ses revenus sur la période. Il doit dès lors être considéré qu’il était lié dès le 1er octobre 2001 à la société L’Equipe par un contrat de travail à durée indéterminée ce que cette dernière reconnaît d’ailleurs elle-même. Cette période doit au regard de la définition de l’ancienneté dans l’entreprise posée par la convention collective précitée être prise en compte pour la détermination de son ancienneté et partant de sa prime d’ancienneté, la circonstance selon laquelle Monsieur [T] a signé le 1er octobre 2007 un contrat de travail à durée indéterminée avec la société l’Equipe sans que ne soit prévue explicitement la reprise de son ancienneté au titre de ses missions de pigistes réalisées antérieurement ne permettant pas de présumer qu’il y a renoncé. Il est établi que la société a calculé la prime d’ancienneté de Monsieur [T] à compter de l’année 2012. C’est en conséquence à juste titre que Monsieur [T] réclame un rappel de prime d’ancienneté dans l’entreprise en prenant en compte son ancienneté à compter du mois d’octobre 2007 qu’il calcule conformément aux stipulations conventionnelles susvisées et après application du délai de prescription triennal applicable aux salaires prévue par l’article L.3245-1 du code du travail sur la période du mois de mars 2015 au mois de mars 2018. Il sera fait droit à sa demande à ce titre à hauteur de 5 465, 95 euros, somme non discutée en son quantum et justifiée par les pièces produites. Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a condamné la société à lui payer cette somme outre celle de 546,59 euros au titre des congés payés afférents. Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail Lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission. Seuls peuvent être de nature à justifier la prise d’acte de la rupture, des manquements de l’employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail. Il appartient au salarié de rapporter la preuve des manquements allégués et en cas de doute sur les faits, il profite à l’employeur. A l’appui de la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail, Monsieur [T] reproche à la société L’Equipe de ne pas lui avoir payé l’intégralité de sa prime d’ancienneté et de l’avoir rétrogradé à un poste de reporter en 2016. Il a été précédemment établi que la société avait privé Monsieur [T] d’une partie de la prime d’ancienneté à laquelle il pouvait prétendre à compter du mois de mars 2015 et jusqu’à la rupture de son contrat de travail en mars 2018 en refusant de prendre en compte son ancienneté dès le début de sa collaboration avec elle en octobre 2001 alors qu’il travaillait pour elle en tant que pigiste. Il est également établi qu’alors qu’il avait été promu le 1er octobre 2014 à un poste de rédacteur en chef adjoint au Pôle Football, la société l’a affecté de nouveau à compter du mois de juillet 2016 à un poste de moindre responsabilité de reporter. Si la société indique que ce changement d’affectation qu’elle reconnaît ne s’est accompagné d’aucune modification de l’intitulé du poste du salarié et de sa rémunération, il n’en demeure pas moins que les missions effectivement attribuées à Monsieur [T] n’étaient plus celle d’un rédacteur en chef mais bien celle d’un reporter, Monsieur [T] indiquant sans être contredit notamment qu’il avait perdu à cette occasion la gestion et l’encadrement de la majorité des journalistes de la rubrique football alors qu’il encadrait une trentaine de personnes auparavant, qu’à compter du mois d’octobre 2017, la société lui a retiré le suivi de l’Equipe de France au motif d’une mésentente collective entre les journalistes en charge de ce suivi, qu’après avoir manifesté une certaine réticence à suivre les instances internationales du football , l’UEFA et la FIFA, il a été affecté au suvi du club des girondins de Bordeaux en tant que n°2, mission comparable à celle qu’il avait exercé dix ans auparavant en tant que reporter, qu’il n’était plus considéré que comme un référent, que son bureau lui avait été retiré et qu’il avait rejoint un open space avec les autres journalistes, La société ne peut justifier cette rétrogradation de fait en expliquant qu’il est d’usage en cas de changement de direction de la rédaction comme ce fut le cas en l’espèce que le rédacteur en chef réorganise son équipe en fonction de sa ligne éditoriale. De même, elle ne démontre pas que Monsieur [T] avait accepté cette rétrogradation. L’observation portée par le salarié sur le compte rendu d’entretien du 31 mars 2017 en ces termes ‘depuis que je suis revenu au reportage je m’efforce de tisser un lien de confiance avec ma hiérarchie. Je fais mon travail du mieux que je peux sans état d’âme, je fais en sorte de donner le meilleur de moi-même dans une fonction que je ne voulais plus exercer ( du reportage). Globalement la crainte que j’aurais pu avoir d’être ‘placardisé’, les plannings et le boulot que j’ai montrent que vous avez confiance en moi, même si je pense que vous devriez vous appuyez davantage sur mes infos’ ne permet pas d’en justifier et témoigne au contraire d’une réserve certaine du salarié quant à ces nouvelles fonctions. Monsieur [T] justifie en outre avoir alerté longuement et vainement la société sur sa situation et sur son ‘désarroi professionnel’ à plusieurs reprises au début de l’année 2018, par courriels électroniques des 8 janvier 2018 et 17 janvier 2018 puis par courrier du 5 février 2018 et par courrier de son avocat du 14 février 2018. En revanche, aucun élément ne vient étayer l’hypothèse émise par la société selon laquelle Monsieur [T] aurait orchestré la rupture de son contrat de travail afin de rejoindre la Fédération Française de Football après la rupture de son contrat de travail. Les manquements de la société sont établis et revêtent une gravité telle qu’ils faisaient obstacle à la poursuite du contrat de travail de Monsieur [T]. En conséquence, la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail le 21 mars 2018 produit à cette date les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et Monsieur [T] peut dès lors prétendre aux indemnités de rupture. L’article L.7112-3 du code du travail, applicable aux journalistes, prévoit que si l’employeur est à l’initiative de la rupture, le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à la somme représentant un mois, par année ou fraction d’année de collaboration, des derniers appointements. Le maximum des mensualités est fixé à quinze. En application de l’article 44 de la convention collective des journalistes, l’ indemnité de licenciement sera calculée pour les journalistes professionnels employés à plein temps ou temps partiel sur le dernier salaire perçu ou, pour les journalistes salariés ne percevant pas un salaire mensuel régulier, sur la base de 1/12 des salaires perçus au cours des 12 mois précédant le licenciement ou de 1/24 des salaires perçus au cours des 24 derniers mois précédant le licenciement au choix du salarié. Cette somme sera augmentée de 1/12 pour tenir compte du treizième mois conventionnel défini à l’article 25. Lorsque l’ancienneté du journaliste professionnel dans l’entreprise sera inférieure à 1 an, l’indemnité de licenciement sera calculée sur la moyenne des salaires perçus pendant cette période. Il ressort des pièces produites que Monsieur [T] qui percevait un salaire régulier par mois ne peut calculer son salaire de référence sur la base des douze derniers mois de salaires avant son licenciement alors qu’il doit en application de l’article susvisé prendre pour référence le dernier salaire perçu avant son licenciement et y ajouter en sus 1/12 de salaire pour tenir compte du treizième mois qu’il aurait perçu au titre de l’année durant laquelle son contrat a été rompu. En conséquence, au vu des pièces produites, ce salaire de référence s’établit à la somme de 7 140,61 euros et Monsieur [T] est bien fondé à réclamer au vu de son ancienneté une somme de 107 109,15 euros dans la limite de quinze mensualités. Monsieur [T] peut également réclamer une indemnité de préavis correspondant selon l’article 46 de la convention collective à 2 mois de préavis et qui s’établit sur la base des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail durant ces périodes à la somme totale de 14 281, 22 euros. La société sera condamnée à lui payer cette somme outre celle de 1 428, 12 euros au titre des congés payés afférents. Monsieur [T] comptait au moment de la rupture de son contrat de travail, le 21 mars 2018, 16 années complètes d’ancienneté et la société comptait au moins onze salariés. En application de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, il peut prétendre à une indemnité comprise entre trois mois minimum de salaire brut et treize mois et demi maximum de salaire brut. En raison de l’âge du salarié au moment de son licenciement, de son ancienneté au sein de la société, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi et des justificatifs produits sur sa situation professionnelle postérieure au licenciement, la cour fixe le préjudice matériel et moral qu’il a subi du fait de la perte injustifiée de son emploi à la somme de 90 000 euros. Le jugement sera infirmé et la société condamnée à payer les sommes susvisées à Monsieur [T]. Sur l’exécution fautive et déloyale du contrat de travail et la perte de rémunération y afférant Monsieur [T] indique que la société a eu à son égard une attitude déloyale en le poussant à quitter l’entreprise, en le déclassant, en le privant d’une part importante de sa rémunération ( prime de nuit) du fait de sa rétrogradation. Il a été établi que la société avait rétrogradé Monsieur [T] en lui attribuant à compter du mois de juillet 2016 des missions de reporter alors qu’il occupait un poste de rédacteur en chef adjoint. Ce manquement de la société dans l’exécution du contrat de travail du salarié a causé à ce dernier un préjudice distinct de celui déjà indemnisé par les indemnités de rupture lui ayant été précédemment allouées et qui, au vu des pièces produites, sera réparé par l’allocation d’une somme de 3 000 euros. Le jugement sera infirmé et la société condamnée à lui payer cette somme. Sur les dommages et intérêts pour violation des dispositions conventionnelles Monsieur [T] indique avoir un subi un préjudice du fait de l’absence de versement par la société de l’intégralité de la prime d’ancienneté à laquelle il avait droit en dépit de ses alertes répétées auprès de la direction sur cette violation par l’entreprise des dispositions conventionnelles. Néanmoins, Monsieur [T] ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui déjà réparé par les sommes lui ayant été allouées précédemment. Le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a débouté de cette demande. Sur le préjudice moral et l’atteinte à la réputation Monsieur [T] explique qu’il a été du fait de l’attitude de son employeur humilié publiquement devant ses collègues et des personnalités du monde du football, qu’il a été poussé à quitter l’entreprise en dépit de ses demandes répétées de régularisation de sa situation. Cependant, ce faisant, Monsieur [T] ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui déjà indemnisé par les sommes lui ayant été allouées au terme du présent arrêt. Le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a débouté de cette demande. Sur la demande reconventionnelle de la société L’Equipe La société sera déboutée de sa demande formée à l’encontre de Monsieur [T] en paiement d’une indemnité de préavis au titre d’un préavis qu’il n’a pas effectué alors qu’il a été établi que la rupture du contrat de travail produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que c’est elle qui était redevable dans ces circonstances d’une telle indemnité au salarié. Le jugement sera infirmé et la société déboutée de cette demande. Sur la remise des documents sociaux Eu égard aux sommes allouées à Monsieur [T], la société sera condamnée à lui remettre un bulletin de paie récapitulatif et les documents de rupture rectifiés conformément au présent arrêt, sans qu’il n’y ait lieu d’assortir cette condamnation d’une astreinte. Sur le remboursement par l’employeur à l’organisme des indemnités de chômage En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur à l’organisme concerné du montant des indemnités de chômage éventuellement servies à Monsieur [T] du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités. Sur les intérêts Les créances salariales et assimilées produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation. Les créances indemnitaires produiront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt. La capitalisation des intérêts sera ordonnée conformément à l’article 1343-2 du code civil. Sur les dépens et l’indemnité de procédure La société L’Equipe qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel. Il apparaît en outre équitable de la condamner à verser à Monsieur [T] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel en sus de l’indemnité lui ayant été accordée à ce titre par le conseil de prud’hommes. PAR CES MOTIFS, La cour, Statuant par arrêt contradictoire, INFIRME partiellement le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Boulogne Billancourt du 19 décembre 2019, Condamne la société L’Equipe à payer à Monsieur [U] [T] les sommes suivantes : — 14 281, 22 euros au titre de l’indemnité de préavis — 1 428, 12 euros au titre des congés payés afférents, — 107 109, 15 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement, — 90 000 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, — 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail, Déboute la société L’Equipe de sa demande en paiement d’une indemnité de préavis, Confirme pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris, Y ajoutant, Rappelle que les créances salariales et assimilées produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation, Rappelle que les créances indemnitaires produisent intérêts à compter du présent arrêt, Ordonne la capitalisation des intérêts, Ordonne le remboursement par la société L’Equipe à Pôle emploi des indemnités de chômage qu’elle a versées à Monsieur [U] [T] à compter du jour de son licenciement, et ce à concurrence de six mois d’indemnités, Condamne la société L’Equipe à payer à Monsieur [U] [T] la somme de 3 000 euros pour les frais irrépétibles exposés en appel en application de l’article 700 du code de procédure civile en sus de celle lui ayant été allouée à ce titre par le conseil de prud’hommes, Condamne la société L’Equipe aux dépens de première instance et d’appel, — Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. — Signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE | |