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Patronyme du fondateur de société et cession du groupe familial

Patronyme du fondateur de société et cession du groupe familial

Celui qui porte le patronyme du fondateur d’une entreprise familiale ne peut s’opposer à l’usage de son nom par une société ayant acquis régulièrement la marque et l’entreprise familiale.

Celui-ci ne démontre aucune atteinte à ses droits, laquelle ne peut résulter du seul usage du nom dont il est porteur, ni aucun usage abusif du nom ‘ Merger ‘, nom commercial utilisé depuis de nombreuses années sur le territoire national et régulièrement acquis par la société cessionnaire des droits, laquelle n’a pas commis d’abus ou ne s’est pas livrée à une pratique commerciale trompeuse en se référant à des éléments factuels concernant la société Usines Merger dont elle détient les droits, et le rôle qu’y a tenu le fondateur.

Pour rappel, aux termes de l’article L. 714-6 du CPI, encourt la déchéance de ses droits le propriétaire d’une marque devenue de son fait : a) La désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service ; b) Propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
 
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRÊT DU 28 OCTOBRE 2022
 
Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 21/00013 – n° Portalis 35L7-V-B7F-CC3I4
 
Décision déférée à la Cour : jugement du 20 novembre 2020 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 2ème section – RG n°18/10419
 
APPELANTE
 
S.A.S. XL FRAIS, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
 
[Adresse 1]
 
[Localité 3]
 
Immatriculée au rcs d’Orléans sous le numéro 515 180 842
 
Représentée par Me Pascal WILHELM de la SAS WILHELM & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque K 0024
 
INTIMEE
 
S.A.S. ALPHAPRIM, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé
 
[Adresse 4]
 
[Adresse 4]
 
[Localité 2]
 
Immatriculée au rcs de Melun sous le numéro 348 935 131
 
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP JEANNE BAECHLIN, avocate au barreau de PARIS, toque L 0034
 
Assistée de Me Mathilde CHAUVIN de LA ROCHE plaidant pour la SELARL CHAUVIN de LA ROCHE – HOUFANI, avocate au barreau de PARIS, toque L 098
 
COMPOSITION DE LA COUR :
 
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 juin 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
 
Mme Laurence LEHMANN a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
 
Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente
 
Mme Agnès MARCADE, Conseillère
 
Mme Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre, désignée pour compléter la Cour
 
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
 
ARRET :
 
Contradictoire
 
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
 
Signé par Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
 
Vu le jugement contradictoire rendu le 20 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Paris,
 
Vu la déclaration d’appel du 22 décembre 2020 par la société XL Frais,
 
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 9 septembre 2021 par la XL Frais, appelante,
 
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 9 décembre 2021 par la société Alphaprim, intimée,
 
Vu l’ordonnance de clôture du 14 avril 2022.
 
SUR CE, LA COUR,
 
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
 
La société Alphaprim, inscrite au registre du commerce et des sociétés de Créteil indique exercer une activité de revente de produits en gros et exploiter par ses filiales plusieurs moyennes et grandes surfaces dans le domaine de l’agroalimentaire. MM. [P] [V] et [O] [V] en sont les directeurs généraux.
 
Elle indique être intégrée au Groupe Alphaprim, lequel réunit les sociétés exploitant des supérettes ou des supermarchés sous les marques-enseignes «O’Marché Frais» et/ou «M” O’ marché FRAIS» en région parisienne avec des services communs mis à disposition au travers de la société Syrinxpan.
 
La société O’Marché Frais dont la société Alphaprim était devenu l’unique associé a fait l’objet d’une dissolution sans liquidation avec transmission universelle de son patrimoine au profit de la société Alphaprim à compter du 3 novembre 2014.
 
La société O’Marché Frais était titulaire de deux marques françaises :
 
— la marque verbale O’MARCHE FRAIS enregistrée sous le numéro 3724756 le 25 mars 2010 pour désigner des produits visés dans les classes 25, 28, 29, 30, 31, 32 et 33,
 
— la marque semi-figurative en couleur «M”O’marché FRAIS» enregistrée sous le numéro 3788692 le 7 décembre 2010 pour désigner des produits visés dans les classes 25, 28, 29, 30, 31, 32 et 33, se présentant comme suit :
 
Les transferts de ces marques au profit de la société Alphaprim du fait de la transmission universelle de patrimoine du 3 novembre 2014 ci-dessus précisée n’ont été inscrits au Registre national des marques de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) que le 14 février 2019.
 
La société Alphaprim a en outre effectué un nouveau dépôt à titre de marque du signe semi-figuratif ci-dessus reproduit «M”O’marché FRAIS» sous le numéro 174370533 le 21 juin 2017 pour désigner des produits visés dans les classes 16, 21, 25, 28, 29, 30, 31, 32, 33 et 35.
 
La société XL Frais indique exploiter depuis sa création en 2012 un supermarché de vente au détail de produits frais alimentaires à [Localité 3] et précise que son président M. [D] [V] est le neveu des directeurs généraux de la société Alphaprim.
 
Elle s’est approvisionnée en produits alimentaires auprès de la société Alphaprim jusqu’au 29 juin 2017.
 
La société Alphaprim a fait constater par huissier de justice, le 6 janvier 2018, que le magasin exploité par la société XL Frais situé à [Localité 3] utilisait la marque «M”O’Marché FRAIS» n°3788692 comme enseigne à la verticale le long de la devanture du magasin et la marque «O’Marché Frais» déclinée avec les codes couleurs de la marque «M”O’Marché Frais» comme enseigne lumineuse sur le toit du magasin.
 
La mise en demeure du 10 janvier 2018 d’avoir à déposer les enseignes étant restée vaine, elle a fait procéder par huissier de justice à un constat, le 21 mars 2018, sur les sites internet «omarchefrais-chalette.fr» et «omarchefrais-chalette.com» ainsi que sur le compte facebook «O’Marché FRAIS Chalette».
 
Puis, le 6 juillet 2018, la société Alphaprim a fait, à nouveau, constater par huissier de justice que la société XL Frais conservait son enseigne lumineuse «O’Marché FRAIS» reprenant les mêmes couleurs orange et vertes et les mêmes polices de caractère que la partie basse des marques semi-figuratives «M”O’marché Frais».
 
Estimant qu’il ressort de ces constats l’utilisation contrefaisante de ses marques, la société Alphaprim a fait assigner la société XL Frais, par acte du 13 juillet 2018, devant le tribunal de grande instance de Paris (devenu tribunal judiciaire) en contrefaçon des trois marques n°3724756, n°3788692 et n°174370533.
 
Le 6 mars 2019, elle a fait délivrer une seconde assignation à la société XL Frais «au sûr et aux fins» de la première et a demandé la jonction des deux procédures qui a été ordonnée par la juge de la mise en état le 20 juin 2019.
 
Le jugement du tribunal judiciaire du 20 novembre 2020 dont appel a :
 
— dit n’avoir lieu d’examiner la demande de jonction de la présente instance avec l’affaire RG n° 19/3736, prononcée le 20 juin 2019 par le juge de la mise en état,
 
— rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription et du défaut d’inscription soulevées par la société XL Frais,
 
— rejeté les demandes de la société XL Frais tendant au prononcé de la nullité, pour défaut de distinctivité, des marques de la société Alphaprim,
 
— dit que la société XL Frais a commis, par l’utilisation, au cours de l’année 2018, des termes «O’marché FRAIS» comme enseigne et sur son site internet et sa page Facebook, des actes de contrefaçon des marques «O’MARCHE FRAIS» n°3724756, «M’O’marché FRAIS » n°3788692 et « M”O’marché » FRAIS déposée le 21 juin 2017 sous le n° 174370 533 dont est titulaire la société Alphaprim,
 
— condamné la société XL Frais à payer à la société Alphaprim la somme de 15.000 euros en réparation du préjudice économique résultant de la contrefaçon de marque et du parasitisme,
 
— fait interdiction à la société XL Frais d’utiliser les marques précitées de la société Alphaprim sous astreinte de 150 euros par infraction constatée, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement,
 
— enjoint, en tant que de besoin, à la société XL Frais d’avoir à déposer les enseignes contrefaisant les marques précitées de la société Alphaprim sous astreinte de 150 euros par infraction constatée, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement,
 
— rejeté les demandes de publication,
 
— condamné la société XL Frais à payer à la société Alphaprim une somme de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, condamné la société XL Frais aux dépens,
 
— ordonné l’exécution provisoire.
 
La société XL Frais demande à la cour d’infirmer ledit jugement sauf en ce qu’il a rejeté les demandes de publication formulées par la société Alphaprim et,
 
* statuantà nouveau :
 
— déclarer irrecevables les demandes, fins et prétentions de la société Alphaprim,
 
— débouter la société Alphaprim de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
 
— prononcer la nullité des marques n°3724756, n°3788692 et n°4370533,
 
— dire que la présente décision, une fois devenue définitive, sera inscrite au Registre National des Marques à l’initiative de la partie la plus diligente.
 
* A titre infiniment subsidiaire, rejeter l’ensemble des demandes de la société Alphaprim.
 
* A titre reconventionnel, condamner la société Alphaprimà verserà la société XL Frais la somme de 5.000 euros au titre de la procédure abusive.
 
* En tout état de cause, condamner la société Alphaprimà verserà la société XL Frais la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.
 
La société Alphaprim demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, de débouter la société XL Frais de toutes ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
 
La cour constate que la question relative à l’effectivité de la jonction des procédures initiées par les assignations des 13 juillet 2018 et 6 mars 2019 prononcée par une ordonnance du juge de la mise en état le 20 juin 2019 et le rejet de la demande de publication ne sont pas contestés par les parties en cause d’appel rendant ces chefs du dispositif du jugement irrévocables.
 
Sur les fins de non recevoir soulevées par la société XL Frais
 
Sur la prescription et la tolérance
 
La société XL Frais oppose à titre de fin de non-recevoir la prescription de l’action de la société Alphaprim et la tolérance de l’usage des marques en vertu des dispositions des deux derniers alinéas de l’article L.716-5 du code de la propriété intellectuelle, applicable à la présente procédure, qui disposent que :
 
«L’action en contrefaçon se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer.
 
Est irrecevable toute action en contrefaçon d’une marque postérieure enregistrée dont l’usage a été toléré pendant cinq ans, à moins que son dépôt n’ait été effectué de mauvaise foi. Toutefois, l’irrecevabilité est limitée aux seuls produits et services pour lesquels l’usage a été toléré».
 
La première assignation ayant été délivrée à la société XL Frais le13 juillet 2018, les faits qui lui sont reprochés constatés sur l’année 2018 ne sont pas prescrits.
 
La société XL Frais ne peut par ailleurs se prévaloir du dernier alinéa de l’article sus-cité dès lors qu’elle ne fait pas état d’une marque dont elle serait titulaire et dont l’exploitation aurait été tolérée pendant 5 ans mais d’un simple usage des signes litigieux dont la société Alphaprim est aujourd’hui titulaire.
 
Sur l’opposabilité des marques par la société Alphaprim
 
La société Alphaprim est devenue titulaire des marques françaises numéros 3724756 et 3788692 opposées par une transmission universelle de patrimoine de la société O’Marché Frais le 3 novembre 2014 mais cette transmission n’a été inscrite au Registre de l’INPI que le 14 février 2019, soit postérieurement à la première assignation introductive d’instance du 13 juillet 2018 et antérieurement à la seconde assignation délivrée le 6 mars 2019 «au sûr et aux fins» de la première, les deux instances ayant été jointes.
 
Ainsi la société Alphaprim était irrecevable à agir en contrefaçon de ces deux marques antérieurement au 14 février 2019 et donc au jour de la première assignation délivrée le 13 juillet 2018.
 
Si comme le prévoit l’article 126 du code de procédure civile, la fin de non-recevoir est susceptible d’être régularisée en cours d’instance, ce qui a été effectué par la publication de la transmission à l’INPI, cette régularisation ne peut avoir effet que pour les actes commis postérieurement à l’inscription opérée.
 
Dès lors, la société Alphaprim n’est recevable à poursuivre les actes de contrefaçon allégués sur le fondement des marques 3724756 et 3788692 que pour les faits commis postérieurement au 14 février 2019. le jugement qui l’a déclaré recevable à agir sur le fondement de ces marques est infirmé de ce chef.
 
La société Alphaprim est en revanche recevable à agir sur le fondement de la contrefaçon de sa marque semi-figurative «M”O’marché FRAIS» numéro 174370533 à compter de son enregistrement, le 21 juin 2017, et pour les produits visés par la marque dans les classes 16, 21, 25, 28, 29, 30, 31, 32, 33 et 35.
 
Sur la nullité des marques numéros 3724756, 3788692 et 174370533 de la société Alphaprim
 
Lasociété XL Frais sollicite l’annulation des trois marques numéros 3724756, 3788692 et 174370533 pour défaut de distinctivité.
 
Le premier alinéa de l’article L.714-3 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable à l’espèce, dispose qu’ «est déclaré nul par décision de justice l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux dispositions des articles L.711-1 à L.711-4».
 
L’article L.711-2 interdit l’adoption à titre de marque d’un signe dépourvu de caractère distinctif.
 
Le caractère distinctif d’une marque signifie que cette marque est apte à identifier le produit pour lequel est demandé l’enregistrement comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises.
 
Il doit être apprécié à la date de son dépôt par rapport à chacun des produits ou services visés par l’enregistrement et à la perception qu’en a le public auquel la marque est destinée.
 
En l’espèce, le public pertinent est le consommateur moyen français des produits visés par les marques normalement attentif.
 
Sur la marque verbale O’MARCHE FRAIS
 
La société XL Frais soutient que les termes MARCHE et FRAIS ne sont pas distinctifs pour les produits visés par la marque, sans d’ailleurs distinguer entre les produits d’alimentation et les autres produits et que ni l’adjonction d’un terme à l’autre, ni l’ajout de «O’» en attaque ne confère au signe une distinctivité intrinsèque.
 
Pour autant, c’est par de justes motifs que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu la distinctivité intrinsèque du signe verbal en énonçant que les deux termes MARCHE et FRAIS faisant référence pour l’un à un lieu et pour l’autre à des modalités de commercialisation ne peuvent être considérés comme s’appliquant à la qualité des produits visés et que leur juxtaposition revêt un caractère inhabituel. Ils ajoutent que le terme d’attaque O’, dans lequel l’apostrophe ne remplace pas un mot en particulier, est dépourvu de signification autonome, pris isolément ou en combinaison avec les autres termes, et ne remplit donc pas de fonction descriptive.
 
Sur les deux marques semi-figuratives
 
La cour retient que l’ajout d’un M stylisé surmonté de deux gouttes d’eau stylisées et le recours aux couleurs vert et orange et à des polices en minuscules et en majuscules différentes constituent des éléments arbitraires supplémentaires accentuant la distinctivité des signes ci-dessus déjà retenue pour la marque verbale.
 
Aissi les trois marques opposées par la société Alphaprim ont un caractère intrinsèquement distinctif, sans qu’i1 soit besoin de rechercher si celui-ci a été acquis par l’usage.
 
Le jugement qui a rejeté les demandes d’annulation de ces trois marques et les a déclaré valides est confirmé.
 
Sur les actes de contrefaçon
 
La société Alphaprim n’a pas formé d’appel incident et demande à la cour la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a dit que la société XL Frais a commis, par l’utilisation, au cours de l’année 2018, des termes «O’marché FRAIS» comme enseigne et sur son site internet et sa page Facebook, des actes de contrefaçon des marques «O’MARCHE FRAIS» numéro 3724756, «M’O’marché FRAIS» numéro 3788692 et «M”O’marché» FRAIS» numéro 174370 533 dont elle est titulaire.
 
Les faits argués de contrefaçon soumis à la cour se situent donc sur la seule année 2018 et, comme ci-dessus retenu, la cour ne pourra pas les examiner au regard de la marque verbale numéro 3724756 ni de la marque semi-figurative numéro 3788692 dès lors que l’acquisition de ces marques par la société Alphaprim n’a été publiée au registre national des marques qu’en 2019.
 
S’agissant de la marque semi-figurative numéro 174370533, la société XL frais oppose les dispositions de l’article L.713-6 a) dans sa version applicable à l’espèce au terme duquel «l’enregistrement d’une marque ne fait pas obstacle à l’utilisation du même signe ou d’un signe similaire comme dénomination sociale, nom commercial ou enseigne, lorsque cette utilisation est soit antérieure à l’enregistrement, soit le fait d’un tiers de bonne foi employant son nom patronymique».
 
Pour autant, «O’Marché Frais» n’est ni la dénomination sociale, ni le nom commercial de la société XL Frais, et la seule utilisation d’une enseigne lumineuse avec ces termes qui était le fait d’un accord du titulaire des marques n°3724756 et n°3788692 ne peut être utilement invoquée au titre de l’article susvisé.
 
Ainsi, la société Alphaprim est en droit d’opposer à la société XL Frais sa marque semi-figurative numéro 174370533 déposée à l’INPI le 21 juin 2017 et la cour doit apprécier si les faits constatés par procès-verbaux dressés par huissiers de justice les 6 janvier, 21 mars et 6 juillet 2018 doivent être analysés par rapport à la dite marque.
 
Il est reproché l’enseigne O’marché FRAIS visible lors des constats sur le magasin et sur des pages internet ainsi que la reprise sur internet de la marque semi-figurative quasi à l’identique sans la reprise de la première ligne de la marque et avec l’ajout en dessous de la mention dans un cartouche gris de «Chalette s/ Loing».
 
La cour observe qu’il n’est pas contesté que les produits notamment alimentaires commercialisés par la société XL Frais sont similaires ou identiques aux produits visés par la marque semi-figurative numéro 174370533.
 
Les signes reprochés à la société XL Frais n’étant pas identiques à la marque semi-figurative opposée qu’elle ne reproduit pas sans modification ni ajout en tous les éléments la composant, il convient de rechercher s’il existe entre les signes en présence un risque de confusion, incluant le risque d’association, qui doit être apprécié globalement à la lumière de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des signes en présence, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci en tenant compte notamment de leurs éléments dominants et distinctifs ; un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de la marque sur le marché, confère à celle-ci une protection plus étendue.
 
Or s’agissant de l’enseigne elle reprend l’élément dominant de la marque semi-figurative «O’Marché Frais» à l’identique de sorte que l’on peut, comme l’a fait le tribunal, retenir des similitudes visuelle, auditive et conceptuelle des signes en présence suffisamment élevées pour entraîner un risque de confusion auprès du public venant s’approvisionner en denrées alimentaires dans des supermarchés.
 
De même l’utilisation sur internet du même signe que la marque opposée avec seulement la suppression de la première ligne et l’ajout de la localité dans laquelle se situe le magasin est susceptible d’entraîner, au vue des similitudes visuelle, auditive et conceptuelle des signes en présence, un risque important de confusion.
 
Dès lors la contrefaçon de la marque 174370533 sera retenue entre le 6 janvier et le 6 juillet 2018 à l’encontre de la société XL Frais et au préjudice de la société Alphaprim.
 
Aucun fait postérieur à la date du 6 juillet 2018 n’est allégué, ni démontré par la société Alphaprim qui précise que la société XL Frais a, suite aux assignations qui lui ont été délivrées, décidé de régulariser sa situation.
 
Sur la réparation des actes de contrefaçon
 
L’article L.7 16-14 du code de la propriété intellectuelle qui dispose que :
 
Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
 
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
 
2 ° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
 
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
 
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer a titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandée l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porte atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral cause a la partie lésée».
 
La société Alphaprim n’apporte au débat aucun élément relatif ni à ses gains manqués, ni aux bénéfices réalisées par la société XL Frais du fait des actes de contrefaçon retenus.
 
Elle e ne fait état que d’un préjudice d’image et d’altération de ses marques qu’elle n’évalue pas précisément mais que la cour est à même de fixer à la somme de 3.000 euros s’agissant de l’atteinte limitée à une seule marque et sur une période allant du 6 janvier au 6 juillet 2018 seulement.
 
Au regard de la cessation des faits contrefaisants postérieurement à l’introduction de la présente instance, et à leur contexte particulier faisant suite à la fin de relations commerciales entre les parties, il n’y a pas lieu de confirmer les mesures d”interdiction et de dépose prononcées sous astreintes par le tribunal.
 
Sur le parasitisme
 
Le parasitisme, fondé sur l’artice 1240 du code civil consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
 
La société Alphaprim fait valoir qu’elle détient sur ses marques un monopole qui constitue un actif économique pérenne et essentiel quant au devenir de son activité et du Groupe ALPHAPRIM en son ensemble. Elle reproche à la société XL Frais de vouloir bénéficier indument des éléments identifiant la société ALPHAPRIM sans en supporter les conséquences et les coûts associés en termes par exemple d’exigence et de coût publicitaire et ainsi de s’inscrire dans le sillage de sa notoriété sans bourse délier contrairement aux autres sociétés du groupe qui doivent participer financièrement aux campagnes de publicité. Elle ajoute que ce faisant, elle fait courir un risque de dépréciation et d’atteinte à la notoriété de ses marques O’marché Frais et M”O’marché FRAIS.
 
Comme souligné à juste titre par la société XL Frais, il n’est pas reproché d’autres actes à la société XL Frais que ceux d’avoir continué à utiliser l’enseigne «O’marché Frais» et des signes imitant le des marques semi-figuratives pour lesquels il a été retenu la qualification d’actes contrefaisants.
 
De plus, les investissement publicitaires produits au débat consistent en la production de factures à la charge de différentes sociétés tierces et non à celle de la société Alphaprim.
 
Dès lors, en l’absence de faits distincts de la contrefaçon retenue ci-avant et d’atteinte aux investissements propres qui auraient été effectués par la société Alphaprim, le parasitisme ne doit pas être retenu et le jugement déféré infirmé de ce chef.
 
Sur les autres demandes
 
Le sens de l’arrêt, la société XL Frais étant condamnée pour des faits de contrefaçon, conduit à rejeter sa demande incidente au titre de l’abus de procédure et à confirmer les condamnations prononcées par les premiers juges au titre des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile.
 
Les parties, qui succombent chacune partiellement en cause d’appel, conserveront à leurs charge les frais et dépens qu’elles ont engagés en appel.
 
PAR CES MOTIFS
 
La Cour, statuant dans les limites de l’appel,
 
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription, rejeté les demandes de la société XL Frais tendant au prononcé de la nullité pour défaut de distinctivité des marques n°3724756, n°3788692 et n°174370533 de la société Alphaprim, dit que la société XL Frais a commis, par l’utilisation au cours de l’année 2018, des termes «O’marché FRAIS» comme enseigne et sur son site internet et sa page Facebook, des actes de contrefaçon de la marque semi-figurative déposée le 21 juin 2017 sous le n° 174370 533 et condamné la société XL frais à payer à la société Alphaprim une somme de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens,
 
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
 
Déclare la société Alphaprim irrecevable à poursuivre les faits contrefaisants qui auraient été commis en 2018 sur le fondement de ses marques françaises enregistrées sous les numéros 3724756 et 3788692,
 
Déclare la société Alphaprim recevable à poursuivre les faits contrefaisants qui auraient été commis en 2018 sur le fondement de sa marque française enregistrées sous le numéro 174370533,
 
Condamne la société XL frais à la société Alphaprim la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice pour les faits de contrefaçon retenus,
 
Déboute la société Alphaprim de ses demandes fondées sur le parasitisme,
 
Déboute la société Alphaprim de sa demande fondée sur l’abus de procédure,
 
Déboute la société XL Frais du surplus de ses demandes et notamment de ses demandes d’interdiction et de dépose sous astreinte,
 
Dit que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens qu’elle a engagés en appel.
 
La Greffière La Conseillère, Faisant Fonction de Présidente
 

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