Cour de cassation, Chambre civile 1, du 17 juillet 1990, 88-20.145, Inédit

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Cour de cassation, Chambre civile 1, du 17 juillet 1990, 88-20.145, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°) M. X…, Marie, Paul de Y… de Lamaze, administrateur de société, demeurant …,

2°) M. Jean-Daniel Z…, administrateur de société, demeurant … de Serbie à Paris 16ème,

en cassation d’un arrêt rendu le 29 septembre 1988 par la cour d’appel de Paris (15ème chambre, section B), au profit de la société de financement régional Elf Aquitaine (SOFREA), ayant siège dans la tour Elf à Paris -La Défense (Hauts-de-Seine),

défenderesse à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 19 juin 1990, où étaient présents :

M. Jouhaud, président, M. Mabilat, rapporteur, M. Viennois, conseiller, Mme Flipo, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Mabilat, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat de MM. de Y… de Lamaze et Z…, et de Me Spinosi, avocat de la société SOFREA, les conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu’ayant conclu un accord avec la société Plastover, en règlement judiciaire, pour reprendre l’entreprise industrielle de celle-ci, la société Cord International a obtenu, pour cette opération, le soutien financier de la société de financement régional Elf Aquitaine (SOFREA) qui lui a consenti, par acte sous-seing privé du 9 juin 1981, un prêt de 750 000 francs, dont le remboursement était cautionné solidairement par ses principaux dirigeants, MM. de Y… de Lamaze et Z… ; qu’ayant renoncé, peu après, à exploiter l’entreprise Plastover, la société Cord International a défailli partiellement à ses obligations envers la SOFREA et a été mise en liquidation des biens le 29 novembre 1983, alors qu’elle restait devoir à la société prêteuse la somme de 384 629 francs ; que la SOFREA a assigné les deux cautions, le 2 septembre 1985, en paiement de cette somme, augmentée des intérêts courant depuis la mise en demeure du 14 décembre 1983 ; que MM. de Y… et Z… ont excipé de la nullité de leurs engagements de caution pour dol et erreur et, subsidiairement, ont demandé la résiliation des cautionnements aux torts de la SOFREA ;

que l’arrêt confirmatif attaqué (Paris, 29 septembre 1988) a rejeté ces prétentions et fait droit intégralement à la demande de la SOFREA ; Attendu que MM. de Y… et Z… reprochent, tout d’abord, à la juridiction du second degré d’avoir refusé d’annuler les cautionnements souscrits par eux au profit de la SOFREA, alors que, selon le moyen, d’une part, en se bornant à affirmer qu’ils auraient été pleinement conscients de la situation, sans rechercher si l’espoir de redressement de l’entreprise Plastover n’avait pas été artificiellement créé par la SOFREA et si la société Cord et ses dirigeants auraient eu un intérêt à se porter cautions d’une entreprise sans aucun espoir de redressement, ce qui, aussi avantageux qu’eût été le prêt cautionné, ne pouvait qu’entraîner le dépôt du bilan de la société Cord, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision ; et alors que, d’autre part, en décidant que l’action en nullité des cautionnements était prescrite, alors que cette nullité était invoquée par voie d’exception à la demande principale de la SOFREA, laquelle exception était perpétuelle, la cour d’appel a violé l’article 1304 du Code civil ; Mais attendu, d’une part, que, contrairement à ce qu’allègue le moyen, la société Cord International et ses dirigeants ne se sont pas portés caution d’obligations de l’entreprise Plastover ; qu’ayant relevé que MM. de Y… et Z… ont cautionné les engagements de la société Cord International, tenant au remboursement du prêt consenti à celle-ci par la SOFREA, l’arrêt attaqué énonce, d’abord, qu’ils étaient, lorsqu’ils se sont engagés en qualité de cautions, non seulement les actionnaires majoritaires de la société Cord International, mais aussi les dirigeants de celle-ci, en tant que président du conseil d’administration et administrateur ; qu’il retient ensuite, tant par motifs propres qu’adoptés, qu’ils ont souscrit leur engagement en parfaite connaissance de la situation et que l’ensemble des faits, invoqués comme constitutifs d’un dol ou d’une erreur ayant vicié leur consentement, ont été immédiatement connus d’eux ; qu’ils ne rapportent pas la preuve de leurs allégations, les documents produits démontrant, au contraire, que les dirigeants de la société Cord tenaient à obtenir le prêt de la SOFREA avant de s’engager définitivement dans l’opération de reprise de l’entreprise Plastover, ce qu’ils ont finalement renoncé à faire peu de temps après avoir reçu les fonds prêtés ; qu’ils connaissaient la situation de l’entreprise Plastover, lors de la

signature du contrat du prêt, le 9 juin 1981, et de la remise des fonds, ayant eux-mêmes indiqué, dans la lettre du 28 juillet 1981 envoyée à la SOFREA pour expliquer leur décision de ne pas donner suite à l’opération, que les difficultés avaient commencé dès le mois d’avril 1981 ; qu’ils avaient toutes possibilités d’apprécier l’opération et d’en mesurer les risques avec précision, sans commettre d’erreur ; qu’enfin, les deux cautions ont renouvelé leur engagement le

31 décembre 1982, à un moment où ils ne pouvaient plus commettre une quelconque erreur sur la situation de l’entreprise Plastover ; qu’en l’état de ces énonciations et constatations, la cour d’appel a pu estimer que le consentement de MM. de Y… et Z… n’avait été vicié ni par un dol ni par une erreur ; qu’elle a ainsi légalement justifié sa décision ; Et attendu, d’autre part, qu’est sans portée, dès lors que la cour d’appel a statué au fond, le grief fait à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré prescrite l’action en nullité des cautionnements, bien que les cautions aient invoqué cette nullité, non par voie d’action, mais par voie d’exception imprescriptible ; Et sur le second moyen :

Attendu qu’il est encore fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir refusé de considérer que les engagements des cautions n’avaient qu’un caractère provisoire et avaient été remplacés par un nantissement de matériel, alors que, selon le moyen, en relevant que le contrat de prêt avait prévu que la substitution de garantie se ferait « d’accord parties », éventuellement par avenant, la cour d’appel a ajouté des conditions qui n’y figuraient pas et ainsi dénaturé, par adjonction, les termes clairs et précis de l’article 5 de ce contrat ; Mais attendu que les juges du second degré, après avoir relevé que les cautionnements ont été reçus dans l’acte intitulé « contrat de prêt », établi et signé par les parties à la même date du 9 juin 1981 que le protocole d’accord préalable conclu entre la SOFREA et la société Cord International, ont énoncé que ce contrat précisait clairement que la substitution des garanties se ferait « d’accord parties », éventuellement

par avenant ; qu’ayant ainsi fondé leur décision sur les stipulations du contrat de prêt, ils n’ont pu dénaturer celles de l’article 5 du protocole d’accord ; que le grief manque en fait ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;


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