Cour d’appel de Versailles, du 11 mai 2000, 1997-8562

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Cour d’appel de Versailles, du 11 mai 2000, 1997-8562

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

FAITS ET PROCEDURE Suivant convention en date du 23 décembre 1985, messieurs X… et Bernard Y…, agissant tant en leur nom personnel qu’en se portant fort de tous les autres actionnaires de la SA LAVERHNE, ont cédé aux Etablissements GOMBERT 4.350 actions des Etablissements Y… pour le prix de 2.175.000 francs payable le jour de la signature des ordres de mouvement de titres. Monsieur X… Y… a également versé aux Etablissements GOMBERT une somme de 1.000.000 francs, productive d’un intérêt au taux de 10 % l’an, et destinée à couvrir l’engagement du passif exprimé dans la convention en date du 23 décembre 1985. Au motif que la Société des Etablissements GOMBERT ne s’est pas acquittée du paiement du prix des actions, monsieur X… Y… l’a, par acte du 05 avril1993, fait assigner en paiement des sommes de 200.000 francs, correspondant aux 400 actions qu’il détenait dans la société Y…, et de 1.000.000 francs au titre de la restitution du dépôt de garantie. Par jugement en date du 4 septembre 1995, le Tribunal de Commerce de PARIS s’est déclaré incompétent en raison de la clause compromissoire insérée dans la convention du 23 décembre 1995, stipulant que tous litiges seraient déférés à la juridiction exclusive d’un collège d’arbitres. A la suite de ce jugement d’incompétence, monsieur X… Y… a désigné en qualité d’arbitre monsieur Z…, expert comptable; pour sa part, la Société des Etablissements GOMBERT a nommé monsieur A…; ultérieurement, messieurs Z… et A… se sont accordés sur la désignation d’un troisième arbitre en la personne de monsieur B…. Un premier rendez-vous d’arbitrage a eu lieu le 26 juin 1996, au cours duquel les arbitres ont évoqué les questions relatives à l’organisation de la procédure, à la fixation du calendrier et à la fixation de la provision d’honoraires; pour sa part, suivant courrier en date du 2 juillet 1996, monsieur Z…, arbitre choisi par monsieur Y…, faisait part de sa « décision

irrévocable » de ne pas donner suite à sa désignation en qualité d’arbitre. Par courrier en date du 5 août 1996, adressé en réponse à la demande qui lui avait été faite de procéder à la désignation d’un nouvel arbitre, monsieur Y… a, par l’intermédiaire de son Conseil, fait savoir à monsieur B… qu’il entendait user à son encontre de sa faculté de récusation; le 7 octobre 1996, Le Tribunal Arbitral, constitué de messieurs A… et B…, seuls arbitres demeurés en fonction, a dressé un procès-verbal de carence; le 28 octobre 1996, monsieur Y… a sommé monsieur B… d’avoir à se départir de sa mission de Président du Tribunal Arbitral. C’est dans ces conditions que, par acte d’huissier en date du 24 mars 1997, monsieur X… Y… a fait assigner la Société GOMBERT & LOUVRADOUX devant le Président du Tribunal de Commerce de NANTERRE statuant en qualité de juge des référés, à l’effet de voir désigner tel collège d’arbitres qu’il plaira à celui-ci de constituer pour tribunal arbitral. Par courrier du 6 mai 1997, monsieur X… Y… a notifié à la Société GOMBERT sa décision de choisir monsieur C… en qualité d’arbitre, et il a fait sommation à cette société de faire connaître le nom de l’arbitre qu’elle entend désigner. Par ordonnance en date du 2 juillet 1997, le Président du Tribunal de Commerce de NANTERRE a : À constaté la constitution du tribunal arbitral composé de messieurs A…, STEIFF et B… ; À débouté monsieur Y… de ses demandes ; À dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; À condamné monsieur Y… aux dépens. Monsieur X… Y… a interjeté appel de cette ordonnance. Par arrêt avant-dire-droit en date du 15 novembre 1999, la Cour de ce siège a : À rouvert les débats et invité les parties à s’expliquer sur la recevabilité de l’appel, au regard des dispositions de l’article 1457 du nouveau code de procédure civile ; À invité en outre les avoués à s’exprimer sur

la recevabilité de leurs demandes tendant à l’application, à leur profit, des dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile. D’abord sur la recevabilité de son appel, monsieur Y… fait valoir que la décision rendue le 02 juillet 1997 est une ordonnance de référé, comme telle susceptible d’appel conformément aux dispositions de l’article 490 du nouveau code de procédure civile, et non une décision par laquelle le Président du Tribunal de Commerce a statué comme en matière de référé en faisant application de l’article 1457 du nouveau code de procédure civile. Ensuite relativement au bien fondé de sa demande, il explique qu’il n’a fait qu’user de ses droits en faisant connaître à monsieur B…, par écrit de son conseil en date du 05 août 1996, qu’il entendait se prévaloir à son encontre de sa faculté de récusation, puis en lui faisant sommation, par acte du 28 octobre 1996, d’avoir à se départir de la mission qui lui avait été confiée. En effet, il explique que, compte tenu du retrait de monsieur Z…, lié au désaccord sur le montant des honoraires intervenu lors de la réunion du collège d’arbitres en date du 26 juin 1996, messieurs B… et A… ne pouvaient pas être régulièrement maintenus de telle sorte que, pour se conformer aux termes de la clause compromissoire, il a procédé à la désignation d’un nouvel arbitre et a demandé à la Société GOMBERT de procéder à une nouvelle désignation. Relevant que les premiers juges ont à tort retenu qu’un tel collège était régulièrement constitué malgré le différend survenu entre les parties, et ajoutant qu’il est victime des manoeuvres de la partie adverse laquelle fait obstacle à l’application de la clause compromissoire, l’appelant demande à la Cour d’infirmer l’ordonnance entreprise, de désigner tel collège d’arbitres qu’il lui plaira de constituer pour Tribunal arbitral, et de condamner la Société FRANCE BOISSONS, anciennement dénommée GOMBERT & LOUVRADOUX, à lui payer

la somme de 10.000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. La Société FRANCE BOISSONS, anciennement GOMBERT & LOUVRADOUX, conclut à titre principal à l’irrecevabilité de l’appel interjeté par monsieur Y… à l’encontre d’une ordonnance, non susceptible de recours, intervenue dans le cadre des dispositions de l’article 1457 du nouveau code de procédure civile. Subsidiairement au fond, elle fait observer que l’appelant ne peut valablement faire grief au premier juge de n’avoir pas accédé à sa demande de désignation d’un collège d’arbitres, alors que si, en application de la disposition sus-mentionnée, il entre dans les pouvoirs du juge des référés de désigner un troisième arbitre au cas où les deux co-arbitres n’arriveraient pas à se mettre d’accord sur le nom de celui-ci, ce magistrat n’a toutefois aucune compétence pour désigner un collège d’arbitres. Tout en relevant que la décision de monsieur Z… de se retirer de l’arbitrage était en réalité motivée par l’attitude adoptée par monsieur Y…, et non par un différend entre les arbitres sur le montant des honoraires, l’intimée considère que le juge des référés ne pouvait faire autrement que constater que le Tribunal arbitral était régulièrement constitué et composé de messieurs C…, A… et B…. Aussi la Société FRANCE BOISSONS demande à la Cour de confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a débouté la partie adverse de ses prétentions. De plus, elle sollicite la condamnation de monsieur Y… à lui payer la somme de 30.000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.  » MOTIFS DE LA DECISION uSur l’irrecevabilité de l’appel :

Considérant qu’aux termes de l’article 1457 alinéa 1er du nouveau code de procédure civile, dans les cas prévus aux articles 1444, 1454, 1456 et 1463, le président du tribunal, saisi comme en matière de référé par une partie ou par le tribunal arbitral, statue par ordonnance non susceptible de recours ;

considérant qu’en l’espèce la demande de désignation d’un collège d’arbitres présentée par monsieur X… Y… suivant assignation en référé en date du 24 mars 1997 fait suite à une difficulté survenue dans la constitution du tribunal arbitral ; considérant que la solution de cette difficulté est expressément prévue par l’article 1444 du nouveau code de procédure civile, lequel dispose que la désignation du ou des arbitres est faite selon les cas par le président du tribunal de grande instance ou par le président du tribunal de commerce ; considérant qu’au demeurant la clause compromissoire insérée à la convention du 23 décembre 1985 liant les parties, rédigée conformément aux dispositions légales sus-mentionnées, précise les modalités de constitution du tribunal arbitral dans les termes ci-après : « Chacune des parties désignera son arbitre; les arbitres ainsi désignés en choisiront un autre, s’il y a lieu, de telle sorte que le Tribunal soit constitué en nombre impair. A défaut d’accord sur cette désignation, il y sera pourvu par ordonnance non susceptible de recours du Président du Tribunal compétent saisi comme en matière de référé par la partie ou l’arbitre le plus diligent… » ; considérant qu’il s’ensuit que l’ordonnance déférée à la Cour, en tant qu’elle est intervenue en application des dispositions combinées des articles 1444 et 1457 alinéa 1er du nouveau code de procédure civile, est non susceptible de recours ; considérant que l’appel interjeté par monsieur Y… à l’encontre de cette décision doit donc être déclaré irrecevable ; considérant que l’équité commande d’allouer à l’intimée, sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, une indemnité de 5.000 francs en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par elle en appel ; considérant qu’il n’est toutefois pas inéquitable que l’appelant conserve la charge des frais non compris dans les dépens engagés par lui dans le cadre de la présente

procédure ; considérant que monsieur Y…, qui succombe dans l’exercice de son recours, doit supporter les entiers dépens de première instance et d’appel ; considérant qu’en application de l’article 699 du nouveau code de procédure civile, c’est seulement dans les matières où le ministère d’avoué est obligatoire que les avoués de la cause peuvent demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision ; or considérant qu’il résulte de l’article 1457 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile que, dans l’hypothèse où l’ordonnance rendue par le président du tribunal peut être frappée d’appel (pour une des causes prévues à l’article 1444 alinéa 3), l’appel est formé, instruit et jugé comme en matière de contredit de compétence ; considérant que, dès lors que le ministère d’avoué n’est pas obligatoire en matière de contredit, les avoués ne peuvent en l’espèce prétendre au bénéfice du recouvrement direct des dépens.  » PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Vu l’arrêt avant-dire-droit du 15 novembre 1999 ; Vu l’article 1457 alinéa 1er du nouveau code de procédure civile ; DECLARE irrecevable l’appel formé par monsieur X… Y… à l’encontre de l’ordonnance déférée ; CONDAMNE monsieur X… Y… à payer à la Société FRANCE BOISSONS, anciennement dénommée GOMBERT & LOUVRADOUX, la somme de 5.000 francs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; CONDAMNE monsieur X… Y… aux entiers dépens de première instance et d’appel. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR FEDOU, CONSEILLER PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT M. Thérèse D…

F. ASSIÉ


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