Cour d’appel de Dijon, 10 juillet 2007, 06/1418

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Cour d’appel de Dijon, 10 juillet 2007, 06/1418

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

FB / BL

Daniel X…

C /

Jean Jacques Y…

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 10 Juillet 2007

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE-AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE CIVILE B

ARRÊT DU 10 JUILLET 2007

No

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 06 / 01418

Décision déférée à la Cour : AU FOND du 07 JUIN 2006, rendue par le TRIBUNAL D’INSTANCE DE CHALON SUR SAONE

RG 1ère instance : 11-04-0269

APPELANT :

Monsieur Daniel X…

représenté par la SCP AVRIL & HANSSEN, avoués à la Cour

assisté de Me Alain GUIGNARD, avocat au barreau de CHALON SUR SAONE

INTIME :

Monsieur Jean Jacques Y…

né le 18 août 1955 à MULHOUSE

représenté par la SCP BOURGEON & KAWALA & BOUDY, avoués à la Cour

assisté de la SCP TISSOT-HOPGOOD-DEMONT-HOPGOOD, avocats au barreau de CHALON SUR SAONE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 07 Juin 2007 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur LITTNER, Conseiller le plus ancien, présidant la Chambre désigné à ces fonctions par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 22 décembre 2006, Président,

Monsieur RICHARD, Conseiller, assesseur,

Monsieur BESSON, Conseiller, assesseur, ayant fait le rapport sur désignation du président

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Madame CREMASCHI, greffier

ARRET rendu contradictoirement,

PRONONCE publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau Code de procédure civile,

SIGNE par Monsieur LITTNER, Conseiller, et par Madame GARNAVAULT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties :

M.X…, qui était employé par la société Clark France, en relation commerciale avec la société A.M.T. dirigée par M.Y…, a été engagé au mois de mai 1997 par ce dernier pour s’occuper plus particulièrement de l’activité manutention de la société ;

Le 17 novembre 1997, le conseil d’administration de la société A.M.T. décidait de procéder à une augmentation du capital afin de fournir des liquidités à la société ;

Il était ainsi convenu de porter le capital social de 600 000 à 1 200 000 F, et c’est à cette occasion que M.X…, acceptant de participer à l’augmentation du capital, concluait le 23 décembre 1997 avec M.Y… une convention aux termes de laquelle il acquérait 2000 actions d’une valeur unitaire de 150 F, moyennant le règlement d’une somme de 300 000 F (45 734,70 €) remboursable par mensualités de 4 592 F (700,05 €) ;

M.Y…, constatant ultérieurement que M.X… avait cessé de régler les mensualités de remboursement convenues, le mettait en demeure de régulariser la situation, puis, n’obtenant pas de réponse favorable, présentait alors au juge du tribunal d’instance de Chalon sur Saône, en exécution de la convention conclue le 23 décembre 1997, une requête en injonction de payer dirigée contre M.X…, à laquelle ce magistrat a fait droit, par ordonnance du 2 mars 2004 enjoignant ce dernier de payer à M.Y… la somme de 47 625,37 € ;

Le tribunal d’instance, saisi sur opposition de M.X… à l’ordonnance d’injonction de payer signifiée le 18 mars 2004, a décidé, par un jugement prononcé le 7 juin 2006 :

-qu’il y avait lieu de rejeter les moyens invoqués par l’opposant, tirés tant de la nullité de l’engagement souscrit le 23 décembre 1997, pour cause illicite et vice du consentement, que de la renonciation de M.Y… à sa créance ;

-et que M.X… devait en conséquence être condamné à payer :

. la somme de 47 625,37 € à M.Y… en application de cet engagement, ainsi que les intérêts au taux légal de cette somme à compter du 2 mars 2004, date de l’ordonnance d’injonction de payer ;

. ainsi qu’une indemnité de 450 € en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

M.X… a interjeté appel de ce jugement, par déclaration reçue le 25 juillet 2006 au secrétariat-greffe de la cour d’appel de ce siège ;

Au soutien de son appel tendant à la réformation complète de la décision déférée, au rejet des prétentions de M.Y… et à l’allocation d’une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, M.X… expose, dans ses écritures présentées le 5 décembre 2006 :

-à titre principal, que l’engagement qu’il a souscrit le 23 décembre 1997 doit être annulé  » tant pour violence que pour fausse cause « , dés lors que l’opération d’augmentation de capital initiée par M.Y… a pour l’essentiel consisté à rembourser le compte courant de celui-ci des avances qu’il avait pu faire à la société ;

L’appelant explique, au demeurant, que la cause du contrat

consistait, en contrepartie de la souscription d’un emprunt de 300 000 F, dans la cession d’actions de la société A.M.T. représentant la même valeur, cependant que, du fait des pertes enregistrées par la société en 1997 et les années précédentes, le capital social avait été perdu, de sorte que l’apport de 600 000 F-qui, en dépit des recommandations du commissaire aux comptes, n’est pas resté liquide et exigible dans le compte courant jusqu’à la libération des actions nouvelles-ne permettait de distribuer que des actions d’une valeur équivalente à la moitié de leur nominal ;

-à titre subsidiaire, que la dette s’est éteinte du fait de la renonciation de M.Y… qui a en effet accepté, en contrepartie de cette extinction de dette, la promesse unilatérale sous seing privé faite le 4 avril 2003 par l’appelant de céder à titre gratuit 5 % de ses actions dans la nouvelle société A.M.T. créée pour la reprise des activités de la société A.M.T. placée en liquidation judiciaire ;

Au terme de ses écritures remises le 22 février 2007, M.Y… conclut à la condamnation de M.X… à lui payer la somme en principal de 55 027,32 € assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure délivrée le 11 mai 2000 à l’appelant, ainsi qu’une indemnité de 2 500 € en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

L’intimé fait en effet valoir :

-en premier lieu, que le paiement qu’il réclame au principal correspond à la somme du montant de la créance arrêté par le tribunal au mois de février 2004 et des mensualités échues et impayées du mois de mars au mois de novembre 2004 ;

-en deuxième lieu, que M.X…, qui était parfaitement au courant de la situation financière de la société et ne procède que par allégations, ne rapporte pas la preuve qui lui incombe :

. d’une part, du caractère faux ou illicite de la cause de l’acte conclu le 23 décembre 1997, alors que l’augmentation de capital décidée pour redresser l’entreprise a bien eu lieu, attestée tant par le conseil d’administration, dans son procès-verbal de réunion du 19 décembre 1997, que par la publication légale qui en a été faite et par le certificat du commissaire aux comptes constatant la libération de la somme de 600 000 F ;

. d’autre part, que son consentement aurait été vicié, par des pressions morales ou des manoeuvres destinées à l’amener à souscrire à l’augmentation de capital ;

M.Y… souligne en effet, d’abord, qu’il n’y avait aucune raison de modifier la valeur nominale des actions quatre jours après que le conseil d’administration ait constaté la réalisation de l’augmentation de capital faite sur la base d’une valeur unitaire de 150 F, ensuite, que cette valeur est calculée sur la base de l’actif net de la valeur du fonds, et pas uniquement en fonction du résultat de l’exercice avant impôt ;

L’intimé souligne à cet égard que la valeur des actions, que M.X… n’avait jamais contestée auparavant, était justifiée au regard des valeurs des éléments corporels et incorporels du fonds et de la situation nette de la société, laquelle disposait de capitaux propres importants et n’était alors pas en situation de cessation des paiements, et n’a été placée en redressement judiciaire que le 9 décembre 2002, sans report à une période antérieure de la date de cessation des paiements

-en dernier lieu, que la promesse sous seing privé du 4 avril 2003

n’a pas emporté renonciation de l’intimé à sa créance, dès lors que cet acte était assorti d’une condition suspensive, qui n’a pas été levée, tenant à la cession par M.X… d’actions de la nouvelle société qu’il n’a en définitive pas acquises, faute pour lui, et sans que l’appelant en soit responsable, d’avoir réglé le montant de sa participation au capital social ;

La clôture des débats a été prononcée le 10 mai 2007 ;

La cour d’appel se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée ainsi qu’aux écritures d’appel évoquées ci-dessus ;

Motifs de La Décision :

Sur la validité de l’engagement souscrit le 23 décembre 1997 par M.X… :

Attendu que M.X… soutient que l’engagement qu’il a souscrit doit être annulé  » tant pour violence que pour fausse cause « , dés lors que l’opération d’augmentation de capital initiée par M.Y… ne permettait de distribuer que des actions d’une valeur équivalente à la moitié de leur nominal, du fait des pertes enregistrées par la société en 1997 et les années précédentes, et a pour l’essentiel consisté à rembourser le compte courant de celui-ci des avances qu’il avait pu faire à la société ;

Attendu, cependant, que M.X… n’établit pas qu’en dépit des pertes qu’elle avait enregistrées, la société A.M.T., dont le redressement judiciaire a été déclaré le 9 décembre 2002 sans report de l’état de cessation des paiements à une date antérieure, avait connu, lorsqu’a été décidée l’augmentation de capital, et du seul fait des pertes subies, une diminution de moitié de la valeur de ses actions ;

Attendu, en outre que la réalisation de cette opération autorisée le 17 novembre 1997 par le conseil d’administration de la société A.M.T., a été constatée par celui-ci au terme d’une résolution adoptée le 19 décembre 1997, visant le rapport préalable de contrôle de l’arrêté de compte courant de M.Y…, certifié exact, et établi, en vue de l’augmentation de capital, par le commissaire aux comptes de la société ;

Et attendu, enfin, que l’appelant ne produit pas d’élément de preuve de nature, d’une part, à accréditer de façon tangible son allégation selon laquelle cette augmentation de capital était en réalité destinée à rembourser le compte courant de M.Y…-dont l’exactitude avait ainsi été attestée-d’avances faites en faveur de la société, d’autre part, à révéler la contrainte que ce dernier aurait exercée sur lui et qui aurait déterminé son consentement à l’engagement souscrit le 23 décembre 1997, aux termes duquel l’appelant reconnaissait pourtant qu’il avait  » fait part à M.Y… de son désir de devenir actionnaire  » ;

Qu’il résulte de ceci que M.X… doit être débouté de sa demande de nullité dudit engagement ;

Sur l’extinction de la dette :

Attendu que M.X… fait valoir qu’il s’était engagé, aux termes d’une promesse sous seing privé en date du 4 avril 2003, et en contrepartie de l’extinction de sa dette à l’égard de M.Y…, à céder gratuitement à ce dernier une part des actions de la société  » nouvelle A.M.T.  » créée pour la reprise des activités de la société A.M.T., de sorte que l’acceptation de la promesse par l’intimé a eu pour effet d’entraîner de plein droit l’extinction de la créance qu’il détenait sur l’appelant ;

Attendu, cependant, que la lecture de l’acte sous seing privé du 4 avril 2003 enseigne qu’il comporte deux engagements réciproques, souscrits respectivement par M.X…, tenu de céder à M.Y…, au plus tard dans le courant de l’année 2004,5 % des actions de la société nouvelle alors en formation, et par l’intimé, concédant l’extinction de sa créance en contrepartie ;

Qu’il résulte sans ambiguïté de cet acte que les obligations ainsi souscrites de part et d’autre étaient interdépendantes, et subordonnées l’une à l’autre, de sorte que l’extinction de la dette de M.X… ne pouvait avoir lieu qu’à la condition de la cession préalable à M.Y… de la fraction convenue des actions de la société nouvelle A.M.T. ;

Et attendu qu’il s’ensuit que M.X…, qui admet en ses écritures n’avoir pas  » à ce jour fait le nécessaire pour matérialiser dans les faits la cession « , est sans fondement à revendiquer l’extinction de sa dette qui n’a pu, de son seul fait, se réaliser ;

Sur le montant des sommes dues par M.X… :

Attendu que M.Y…, au moyen des pièces qu’il produit, et en particulier :

-de l’engagement souscrit le 23 décembre 1997 par M.X…, faisant obligation à ce dernier de rembourser sur sept ans, et par mensualités de 4592,03 F (700,05 €), le prêt contracté à hauteur de 300 000 F (45 734,71 €),

-et du décompte de sa créance arrêté au 17 février 2004,

justifie que l’appelant, qui ne discute pas le quantum de sa dette, lui était redevable à cette date de la somme de 47 625,37 € accordée par le premier juge ;

Attendu, au surplus, que M.X…, n’alléguant ni n’établissant le versement de mensualités depuis le 17 février 2004, reste également redevable à l’égard de M.Y… des neuf dernières échéances de remboursement de l’emprunt arrivé à terme le 15 novembre 2004, lesquelles représentent un montant total de 6 300,45 €, de sorte que sa dette s’établit pour le tout à la somme 53 925,82 € ;

Qu’il y a lieu, par conséquent, de condamner M.X… à payer ladite somme à M.Y…, assortie des intérêts au taux légal qui seront dus à compter du 18 mars 2004, date de la signification de l’ordonnance d’injonction de payer délivrée à la requête de l’intimé, sur les sommes alors échues, et à compter du 28 février 2005, date des premières conclusions présentées par M.Y… devant le premier juge, tendant à la condamnation en paiement de M.X…, pour le surplus ;

Sur l’article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu qu’il n’apparaît pas inéquitable de laisser à M.X…, à hauteur de la somme de 1 500 €, une part des frais irrépétibles exposés par M.Y… à l’occasion de l’instance d’appel ;

Sur les dépens :

Attendu que M.X…, dont les prétentions sont écartées, supportera la charge des dépens d’appel ;

Par ces motifs :

La cour d’appel, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme le jugement prononcé le 7 juin 2006 par le tribunal d’instance de Chalon sur Saône, sauf en ses dispositions relatives au quantum de la dette due par M.X… et au point de départ des intérêts ;

Le réformant pour le surplus et ajoutant :

Condamne M.X… à payer à M.Y… :

-la somme de 53 925,82 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2004 sur les sommes échues à cette date, et à compter du 28 février 2005 pour le surplus ;

-ainsi que la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Laisse à M.X… la charge des dépens d’appel ;

Admet la SCP BOURGEON KAWALA BOUDY, avoués, au bénéfice de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


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