Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Irina X… épouse Y…,
en cassation d’un arrêt rendu le 10 janvier 1989 par la cour d’appel de Reims (audience solennelle), au profit de M. Philippe Y…,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l’audience du 5 juillet 1990, où étaient présents :
M. Dutheillet-Lamonthézie, président ; Mme Dieuzeide, rapporteur ; MM. Michaud, Deroure, Burgelin, conseillers ; MM. Bonnet, Mucchielli, conseillers référendaires ; M. Monnet, avocat général ; Mme Lagardère, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Dieuzeide, les observations de Me Brouchot, avocat de Mme Y…, de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de M. Y…, les conclusions de M. Monnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Reims, 10 janvier 1989) rendu sur renvoi après cassation partielle d’un précédent arrêt, que le jugement ayant prononcé le divorce des époux Y…-X… avait alloué une prestation compensatoire provisionnelle à Mme Y…, lui avait attribué la jouissance d’une villa sise à Rome et avait sursis à statuer sur l’attribution d’une prestation compensatoire jusqu’au dépôt d’un rapport d’expertise ;
Attendu que Mme Y… fait grief à l’arrêt de l’avoir déboutée de sa demande de prestation compensatoire alors que, d’une part, la cassation n’ayant porté que sur les dispositions relatives à la prestation provisionnelle et à la jouissance de la villa, la cour d’appel, en statuant sur l’attribution d’une prestation compensatoire définitive constituant un chef du litige dont la connaissance ne lui avait pas été dévolue, aurait violé les articles 625, 631 et 638 du nouveau Code de procédure civile et alors que, d’autre part, la cour d’appel aurait méconnu l’autorité de la chose jugée par le précédent arrêt renvoyant les parties à débattre de la demande de prestation compensatoire définitive devant les premiers juges ;
Mais attendu que le premier arrêt a seulement confirmé la disposition du jugement décidant qu’il serait sursis à statuer sur la prestation compensatoire jusqu’au dépôt du rapport d’expertise ;
Et attendu que, dans ses conclusions d’appel, Mme Y… a elle-même demandé à la cour d’appel de statuer sur l’attribution de la prestation compensatoire définitive ;
Que le moyen, qui, pour partie manque en fait est, pour le surplus, irrecevable en ce qu’il est contraire aux écritures de Mme Y… devant la cour d’appel ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses diverses branches :
Attendu que Mme Y… reproche à l’arrêt de l’avoir déboutée de sa demande de pension pour la durée de la procédure, qualifiée de « prestation provisionnelle », en articulant différents griefs reproduits en annexe qui sont pris d’une violation des règles
applicables à la pension alimentaire allouée durant la procédure en divorce ;
Mais attendu qu’il résulte de l’arrêt et des productions que Mme Y… n’a pas demandé l’attribution d’une pension alimentaire fondée sur le devoir de secours durant la procédure de divorce, mais une prestation compensatoire provisionnelle jusqu’à la liquidation des droits des époux ; que la cour d’appel, en énonçant que, le principe même du bénéfice d’une prestation compensatoire ayant été rejeté, il y avait lieu de supprimer à compter du jour du prononcé du jugement cette prestation provisionnelle, a, abstraction faite d’un motif surabondant critiqué par le moyen, légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen, pris en ses diverses branches :
Attendu que Mme Y… reproche à l’arrêt de l’avoir déboutée de sa demande d’attribution de la villa de Rome sans répondre, d’une part, à ses conclusions soutenant que la société, propriétaire de l’immeuble, était une société fictive dont M. Y… était le principal actionnaire, ni répondre, d’autre part, à ses conclusions alléguant le caractère fictif de la société locataire de l’immeuble, alors qu’en outre, l’épouse pouvant prétendre à l’attribution en jouissance d’un immeuble constituant le logement de la famille, propriété d’une société dont le mari est porteur de parts et dont l’usage lui est concédé, en décidant que la participation de M. Y… à la société propriétaire du logement familial mis à sa disposition ne saurait conférer à Mme Y… des droits sur celui-ci, la cour d’appel aurait violé l’article 255 du Code
civil, alors qu’enfin, en ne caractérisant pas le titre par lequel M. Y… était bénéficiaire de la mise à disposition du logement familial par une société dont il était porteur de parts, la cour d’appel n’aurait pas mis la Cour de Cassation en mesure de contrôler si le logement était ou non susceptible d’être attribué en jouissance à l’épouse et aurait ainsi privé sa décision de base légale au regard de l’article 255 du Code civil ;
Mais attendu que l’arrêt retient que la villa de Rome n’est pas la propriété du couple mais un logement de fonction mis antérieurement à la disposition de M. Y…, et que le fait que le mari ait des parts dans la société, véritable propriétaire de l’immeuble, ne saurait conférer à l’épouse des droits sur celui-ci ;
Que, par ces énonciations, la cour d’appel, répondant aux conclusions, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ! Condamne Mme Y…, envers M. Y…, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix sept octobre mil neuf cent quatre vingt dix.