Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 novembre 2007), que M. X…, engagé le 15 mai 1976 par la société Serena où il exerçait en dernier lieu les fonctions de directeur administratif et financier d’un établissement de santé, a été licencié le 25 mai 2004 pour motif économique ;
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de décider que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :
1° / que la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu’en retenant que l’existence de difficultés financières importantes de tous ordres de la société justifiait le licenciement du salarié cependant que la lettre de licenciement était motivée par la réorganisation de l’entreprise en vue de sauvegarder la compétitivité du secteur d’activité auquel elle appartenait et non par des difficultés économiques, la cour d’appel a violé les articles L. 122-14-2 et L. 321-1 du code du travail devenus les articles L. 1233-16 et L. 1233-3 du code du travail ;
2° / que, lorsque l’entreprise appartient à un groupe, il appartient au juge d’apprécier la réalité du motif économique au regard du secteur d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise ; qu’en relevant que la légitimité de ce licenciement économique avait été retenue, à juste titre, par les premiers juges sur la base du motif avancé d’une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité du groupe Finagest auquel appartenait l’entreprise à partir des démonstrations des difficultés financières importantes de tous ordres de cette société, la cour d’appel qui a, en réalité, apprécié la réalité du motif économique de licenciement au niveau de l’entreprise, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 321-1 du code du travail, devenu l’article L. 1233-3 du code du travail ;
3° / que, lorsque l’entreprise appartient à un groupe, l’employeur doit rechercher des possibilités de reclassement dans le cadre du groupe dont les activités, l’organisation ou le lieu de travail permettent la permutation de tout ou partie du personnel ; qu’il appartient au juge de vérifier que l’employeur s’est livré à cette recherche ; qu’en se bornant à retenir que l’employeur avait satisfait à son obligation de reclassement en proposant un poste de reclassement qui avait été refusé par le salarié sans même vérifier ainsi qu’elle aurait dû si l’employeur avait procédé à une recherche de reclassement au sein du groupe, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 321-1, alinéa 3 du code du travail devenu l’article L. 1233-4 du code du travail ;
4° / que le refus par un salarié d’un poste proposé par l’employeur n’implique pas, à lui seul, le respect par ce dernier de son obligation de reclassement ; qu’il appartient à la juridiction du fond de rechercher si l’employeur a satisfait à son obligation de reclassement en proposant de nouvelles offres ; qu’en se bornant à relever que l’obligation de reclassement avait été satisfaite par la proposition du poste de directeur de l’établissement les Ophéliades à Simiane le 21 avril 2004, qui avait été refusé le 12 mai 2004 par le salarié, sans rechercher si l’employeur avait proposé de nouvelles offres de reclassement à la suite de ce refus, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 321-1, alinéa 3 du code du travail devenu l’article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu que, s’en tenant aux termes de la lettre de licenciement, la cour d’appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que la réorganisation mise en oeuvre était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise et de la branche d’activité du groupe dont elle relevait ;
Et attendu qu’ayant constaté que les conditions du reclassement avaient fait l’objet d’une négociation entre l’employeur et le salarié, en considération des exigences de ce dernier, que celui-ci avait dans un premier temps occupé l’emploi de directeur d’établissement ainsi proposé, puis qu’il y avait renoncé, la cour d’appel a pu juger que l’employeur avait satisfait à son obligation de reclassement ;
D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour M. X….
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le licenciement de Monsieur Bernard X… était fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté en conséquence le salarié de ses demandes tendant à obtenir diverses indemnités de rupture outre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE « le jugement entrepris sera confirmé, les moyens critiqués et les prétentions contraires développés en appel par Monsieur X… s’avérant dénués de fondement ; que la référence dans la lettre de licenciement à la rupture par Monsieur X… de la période d’essai stipulée dans le projet de contrat du 1er mai 2004 ne s’analyse pas en une cause propre de rupture, ne faisant qu’expliciter l’échec du reclassement proposé entraînant lui-même le licenciement économique opéré ; qu’elle ne peut, dès lors, conférer un caractère abusif à ce licenciement, étant au demeurant constant que le projet précité n’a pas été accepté par Monsieur X… ; que la légitimité de ce licenciement économique a été retenue, à juste titre, par les premiers juges sur la base du motif avancé d’une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité du groupe FINAGEST auquel appartient l’entreprise SERENA à partir des démonstrations des difficultés financières importantes de tous ordres de cette société, en particulier de fonctionnement, et de l’existence dans ce groupe d’un service de comptabilité centralisé de nature à réduire en partie les charges nouvelles ainsi générées par l’intégration de cette entreprise ; que l’obligation de reclassement a été satisfaite par la proposition du poste de directeur de l’établissement les OPHELIADES à SIMIANE le 21 avril 2004, laquelle avait été concertée avec Monsieur X… puis a été modifiée au plan salarial suivant sa demande dans le cadre du projet daté du 1er mai 2004, et refusé le 12 mai 2004 par le salarié ; que les griefs, de forme et de fond, avancés par Monsieur X… ne sont pas caractérisés, reposant sur l’affirmation d’une prise de fonction effective dans cet établissement dès le 3 février 2004 qui n’est pas la elle-même établie ; que l’attestation rédigée en ce sens par Monsieur Y…, et contestée par l’intimée en l’état du contentieux les opposant, est contredite par la propre lettre de Monsieur X… du 12 mai 2004 se référant à sa formation en février et par le défaut, constant, de conclusion d’un accord entre partie sur le nouvel emploi » ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE « la lettre de licenciement en date du 25 mai 2004, qui fixe les limites du litige, est ainsi motivée : « Monsieur, suite à votre entretien préalable en date du 1er avril 2004, nous nous voyons contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif économique pour les raisons qui vous ont été exposées lors de cet entretien et que nous vous rappelons. La société SERENA connaît des difficultés liées à un déficit de remplissage, à des charges de fonctionnement auxquelles elle ne peut subvenir seule sans l’aide de son actionnaire et qui se traduisent par une perte de 145 K. Si nous intégrons la charge financière liée à la reprise de SERENA par FINAGEST ce déficit atteint 814 K sur l’année. Au regard d’une telle situation susceptible d’impacter la compétitivité du secteur d’activité du groupe auquel appartient Serena, certaines mesures ont d’ores et déjà été décidées telles que : vente de lits du service de médecine, travaux lourds de rénovation de l’établissement, réorganisation des services de soins, application du mode de fonctionnement commun aux autres établissements du groupe. Il apparaît en effet indispensable à la sauvegarde de compétitivité du secteur d’activité du groupe auquel appartient SERENA de réorganiser celle-ci, ce qui nécessite notamment que les fonctions comptables soient centralisées aux fins de permettre une organisation optimale et un fonctionnement satisfaisant et adapté aux besoins de notre clientèle. A défaut, la compétitivité du groupe pourrait être menacée voire la pérennité de la société, si aucune réorganisation n’est initiée au sein de la société Serena. Cette réorganisation a pour conséquence la suppression de votre poste de Directeur Administratif et Financier. Nous avons réalisé des efforts de reclassement au sein du Groupe qui nous ont permis de vous proposer en date du 21 avril 2004, un poste de Directeur d’Etablissement au sein des OPHELIADES DE SIMIANE (34). Vous avez accepté cette proposition et avez pris vos fonctions dans la société le 1er mai 2004. Par courrier en date du 12 mai 2004, vous nous avez avertis que vous mettiez fin à votre période d’essai. Comme convenu lors de notre proposition de reclassement, si l’une ou l’autre des parties venait à rompre la période d’essai, les dispositions en matière de licenciement économique trouveraient à s’appliquer » ; que la société SERENA invoque donc une « réorganisation en vue de la sauvegarde de la compétitivité » ayant entraîné la suppression du pôle comptable, afin de centraliser la comptabilité sur DEVECEY, à l’instar des autres sociétés du groupe ; ; qu’en l’espèce, certains éléments versés aux débats démontrent une perte de compétitivité du secteur du groupe auquel appartient SERENA (défaut de remplissage non contesté par le salarié, charges de fonctionnement trop lourdes, résultat courant déficitaire 130 K, créances anciennes sur l’assurance maladie non provisionnées…) ; que la situation de la société SERENA était critique et le groupe FINAGEST auquel elle appartient, a dû prendre des mesures (travaux importants de rénovation, embauche de personnel soignant et centralisation de la comptabilité du groupe) ; que l’une des particularités du 71268 / bp / mam groupe était d’avoir une comptabilité centralisée sur le siège et les différentes sociétés ne disposaient pas d’une comptabilité autonome pour réduire les frais et permettre un fonctionnement optimal et satisfaisant ; que la Cour de Cassation a jugé récemment que « lorsque les charges financières de l’employeur compromettaient durablement ses résultats et que la suppression du poste de la salariée était impérative pour assurer la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise, le licenciement était justifié (Cass. Soc. 26 janvier 2005 Mme X.. C / Société DOMUS) ; qu’en l’espèce, il résulte des pièces versées au dossier, que dans le cadre de la nouvelle entité issue du rapprochement avec FINAGEST, la centralisation des fonctions comptables au sein d’un siège unique s’avérait nécessaire pour la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise et la branche d’activité du groupe à laquelle elle appartient ; que cette réorganisation n’a pas été effectuée pour réaliser des bénéfices et améliorer sa rentabilité mais bien pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise qui était en déclin ; ;
que dès lors, le licenciement de M. X… repose sur un motif économique réel et sérieux ; ; qu’en l’espèce, la société SERENA a proposé à Monsieur X… par courrier du 21 avril 2004, une proposition de reclassement au sein des Ophéliades de SIMIANE, en qualité de directeur d’établissement, avec une fiche de poste et les conditions de sa rémunération ; que par courrier du 23 avril 2004, le salarié tout en remerciant la société SERENA de cette proposition, demandait à bénéficier d’un treizième mois et de la mutuelle frais de santé AGRR ; que dans ces conditions, un contrat de travail en date du 10 mai 2004 lui a été proposé, sur ce poste, avec une clause prévoyant un rattrapage de salaire correspondant à la moitié d’un treizième mois ; qu’en outre, il avait été indiqué au salarié l’existence d’un usage au sein des OPHELIADES permettant le versement d’une prime de fin d’année susceptible d’être équivalente à un demi treizième mois, ce qui au final, permettait le versement sur l’année de la totalité du treizième mois revendiqué par Monsieur X… (cf. attestation Mme Brigitte Z…) ; que ce faisant, l’employeur a satisfait à son obligation de reclassement et s’est heurté au refus du salarié en date du 12 mai 2004 ; que conformément à la jurisprudence susvisée, le licenciement de Monsieur X… doit être déclaré fondé sur une cause réelle et sérieuse » ;
ALORS D’UNE PART QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu’en retenant que l’existence de difficultés financières importantes de tous ordres de la société SERENA justifiait le licenciement du salarié cependant que la lettre de licenciement était motivée par la réorganisation de l’entreprise en vue de sauvegarder la compétitivité du secteur d’activité auquel elle appartenait et non par des difficultés économiques, la Cour d’appel a violé les articles L. 122-14-2 et 71268 / bp / mam L. 321-1 du Code du travail devenus les articles L. 1233-16 et L. 1233-3 du (nouveau) Code du travail ;
ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE lorsque l’entreprise appartient à un groupe, il appartient au juge d’apprécier la réalité du motif économique au regard du secteur d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise ; qu’en relevant que la légitimité de ce licenciement économique avait été retenue, à juste titre, par les premiers juges sur la base du motif avancé d’une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d’activité du groupe FINAGEST auquel appartenait l’entreprise SERENA à partir des démonstrations des difficultés financières importantes de tous ordres de cette société, la Cour d’appel qui a, en réalité, apprécié la réalité du motif économique de licenciement au niveau de l’entreprise SERENA, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 321-1 du Code du travail, devenu l’article L. 1233-3 du (nouveau) Code du travail ;
ALORS EN OUTRE QUE lorsque l’entreprise appartient à un groupe, l’employeur doit rechercher des possibilités de reclassement dans le cadre du groupe dont les activités, l’organisation ou le lieu de travail permettent la permutation de tout ou partie du personnel ; qu’il appartient au juge de vérifier que l’employeur s’est livré à cette recherche ; qu’en se bornant à retenir que l’employeur avait satisfait à son obligation de reclassement en proposant un poste de reclassement qui avait été refusé par le salarié sans même vérifier ainsi qu’elle aurait dû si l’employeur avait procédé à une recherche de reclassement au sein du groupe, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 321-1, alinéa 3 du Code du travail devenu l’article L. 1233-4 du (nouveau) Code du travail ;
ALORS ENFIN QUE le refus par un salarié d’un poste proposé par l’employeur n’implique pas, à lui seul, le respect par ce dernier de son obligation de reclassement ; qu’il appartient à la juridiction du fond de rechercher si l’employeur a satisfait à son obligation de reclassement en proposant de nouvelles offres ; qu’en se bornant à relever que l’obligation de reclassement avait été satisfaite par la proposition du poste de directeur de l’établissement les Ophéliades à SIMIANE le 21 avril 2004, qui avait été refusé le 12 mai 2004 par le salarié, sans rechercher si l’employeur avait proposé de nouvelles offres de reclassement à la suite de ce refus, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 321-1, alinéa 3 du Code du travail devenu l’article L. 1233-4 du (nouveau) Code du travail.