Cour d’appel d’Orléans, 27 septembre 2007, 07/00052

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Cour d’appel d’Orléans, 27 septembre 2007, 07/00052

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE SOCIALE

Prud’Hommes

GROSSES le

à

SCP PIOUX POTIER

SCP LE METAYER CAILLAUD

SCP CESAREO BONHOMME

COPIES le

à

M.Y…

SA Z… LOGISTIQUE

UNEDIC

ARRÊT du : 27 SEPTEMBRE 2007

No :

No RG : 07 / 00052

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD’HOMMES D’ORLEANS en date du 05 Décembre 2006

section : ENCADREMENT

ENTRE

APPELANT :

Monsieur Jacques Y…

45160 ARDON

comparant en personne, assisté de Me Véronique PIOUX, membre de la SCP PIOUX-POTIER, avocats au barreau d’ORLEANS

ET

INTIMÉE :

S.A.S.Z… LOGISTIQUE venant aux droits de la SAS Z… DISTRIBUTION

645 Rue des Châtaigniers

45770 SARAN

représentée par Me Jean-François LE METAYER, membre la SCP LE METAYER-CAILLAUD-CESAREO-BONHOMME, avocats au barreau d’ORLEANS

A l’audience publique du 26 Juin 2007 tenue par Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller, et ce, en l’absence d’opposition des parties,

Assisté lors des débats de Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier,

Après délibéré au cours duquel Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller, a rendu compte des débats à la Cour composée de :

Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre,

Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller,

Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller,

A l’audience publique du 27 Septembre 2007,

Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre,

Assisté de Madame Ghislaine GAUCHER, Greffier,

A rendu l’arrêt dont la teneur suit :

RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE

M. Jacques Y… a saisi le Conseil de Prud’hommes d’ORLEANS de diverses demandes à l’encontre de la SAS Z… DISTRIBUTION, pour le détail desquelles il est renvoyé au jugement du 5 décembre 2006, la Cour se référant également à cette décision pour l’exposé des demandes reconventionnelles et des moyens initiaux.

Il a été débouté et condamné à payer 1000 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Le jugement lui a été notifié le 11 décembre 2006.

Il en a fait appel le 3 janvier 2007.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES

Il demande :

-23782,05 € de préavis

-2378,20 € de congés payés afférents

-4156,62 € de congés payés 2002

-4566,31 € de congés payés 2003

-38051,28 € d’indemnité de licenciement

-7927,35 € de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement

-200000 € de dommages et intérêts pour licenciement infondé

-3000 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile

-l’exécution provisoire (?).

Il reprend pour l’essentiel son argumentation initiale, telle que résumée au jugement, auquel la Cour se réfère sur ce point, et critique la motivation de celui-ci.

La SAS Z… LOGISTIQUE, venant aux droits de la SAS Z… DISTRIBUTION, demande à la Cour :

-au principal, de se déclarer incompétente au profit du tribunal de commerce d’ORLEANS

-subsidiairement, de déclarer les demandes irrecevables, de les rejeter, et de lui allouer 5000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive, ainsi que 2500 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Elle reprend elle aussi, pour l’essentiel, son argumentation, telle que résumée au jugement, auquel la Cour se réfère sur ce point.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Eu égard aux dates ci-dessus, les appels, principal et incident, sont recevables.

La SA Z… DISTRIBUTION, immatriculée au RCS sous le numéro B 353 513 450, a engagé M.Y… comme directeur général salarié le 14 septembre 1990.

Le 6 décembre 1999, M.Y… a donné sa démission, et conteste aujourd’hui sa validité.

Le 22 décembre 1999, cette société a pris la dénomination de Z… LOGISTIQUE.

Le 30 décembre 1999 a été constituée une SA Z… DISTRIBUTION, immatriculée au RCS sous le numéro B 428 820 468, et M.Y… en a, selon les statuts, été nommé administrateur.

Le premier conseil d’administration du 30 décembre 1999 l’a nommé directeur général.

Par assemblée générale du 27 juin 2002, la société a pris la forme d’une SAS, M.Y…, de même que M. Lucien Z…, étant nommé directeur général, en précisant cette fois-ci  » mandataire social  » (le président étant M.A…).

Le 30 décembre 2002, l’assemblée générale a révoqué M.Y….

Le 3 janvier 2003, une transaction a été signée pour régler les conséquences litigieuses de cette révocation, accord dans lequel M.Y… reconnaissait qu’il ne bénéficiait pas d’un contrat de travail. Les fonctions occupées au sein de la nouvelle société Z… DISTRIBUTION constituent le deuxième point de contestation. Enfin, après le départ de M.Y…, et à la suite d’une dissolution attribution, la société Z… LOGISTIQUE vient aux droits de la nouvelle société Z… DISTRIBUTION.

La validité de la démission

La démission doit résulter d’une manifestation de volonté donnée de façon réfléchie, et ne pas être initiée par l’employeur.

M.Y… a signé un document ainsi libellé :

 » Saran, le 6 décembre 1999

Chers actionnaires,

J’ai l’honneur de porter à votre connaissance ma décision de démissionner ; pour des raisons personnelles, des fonctions de Directeur Général que j’occupe au sein de notre société, et ce à compter de ce jour.

Je vous remercie de bien vouloir en prendre acte.

Veuillez agréer, Chers actionnaires, l’expression de mes sentiments distingués.  »

Il n’est pas contesté que c’est le PDG, M. Lucien Z…, qui a fait dactylographier ce document par sa secrétaire, et qui l’a présenté, au sein de l’entreprise, à M.Y…, en lui demandant de le signer.

Cette signature au sein de l’entreprise est au demeurant établie par la mention  » Saran, le 6 décembre 1999 « , alors que M.Y… habite ARDON.

Le fait que M.Z… ait été à l’initiative de cette décision est quant à lui prouvé par la prise d’acte de la démission par le conseil d’administration le 6 décembre 1999 à 9 heures, ce conseil ayant été convoqué pour statuer, notamment, sur cette démission, et cette convocation étant nécessairement antérieure au 9 décembre.C’est donc le PDG qui avait préparé à l’avance cette décision et qui a demandé à M.Y… de l’entériner sans lui laisser le moindre délai de réflexion.

Ces circonstances démontrent que la démission a été suscitée par l’employeur et n’a pas été donnée librement. Son caractère artificiel est confirmé par sa prise d’effet  » à compter de ce jour « , alors que le bulletin de paie de décembre 1999 ne fait état d’aucune retenue pour absence et que les fonctions de l’intéressé n’ont pas cessé entre le 6 et le 30 décembre 1999.

Elle doit donc être annulée.

Les fonctions réellement exercées à compter du 30 décembre 1999

Selon le conseil d’administration du 30 décembre 1999, M.Y…, en tant que directeur général, avait pour mission d’assister le président (à l’origine M. Frédéric Z…, puis M.A…) dans ses fonctions, avec les mêmes pouvoirs que celui-ci, agissant toutefois sous la responsabilité du président.

Il disposait donc de pouvoirs étendus pour la gestion de la société, ce qui impliquait qu’il ait à rendre compte de ses décisions les plus importantes au président, mais non qu’il soit soumis à un lien de subordination caractéristique du contrat de travail.

Il prétend qu’il était en réalité salarié.

Il convient de s’attacher aux conditions dans lesquelles il a réellement exercé son activité.

Il produit les attestations de :

-M.B… :  » j’atteste qu’en 2002 l’organigramme de Z… DISTRIBUTION positionnant M. Jacques Y… sous les ordres de M. Lucien Z…. Toutes les décisions devaient être validées par M. Lucien Z… sur les stagiaires, les choix économiques et les actions à prendre sur la société « .

-MME E… :  » en tant que chef de produit j’ai été rattachée à M. Jacques Y… durant plusieurs années.M. Jacques Y… rendait compte à M. Lucien Z… qui lui donnait des instructions « .

-M.D… :  » Dans l’organigramme de Z… DISTRIBUTION en 2002, M. Jacques Y… était sousmis aux ordres de Lucien Z…. Toutes les décisions stratégiques, concernant l’entreprise, devaient être validées par la hiérarchie de Jacques Y… en particulier à celle de M. Lucien Z… ce qui confirme un lieu de subordination vis à vis de M. Lucien Z… « .

Il convient d’observer que M. Lucien Z… :

-jusqu’au 27 juin 2000 n’était qu’actionnaire

-était ensuite, comme directeur général, l’égal de M.Y….

L’appelant produit aussi :

-un organigramme  » filiale BPI  » (le principal client de Z… DISTRIBUTION) le désignant comme le  » responsable de la distribution « , subordonné à Mme C…, directrice générale salariée

-un autre organigramme de Z… LOGISTIQUE confirmant que, pour la filiale Z… DISTRIBUTION dédiée à BPI, M.Y… était  » responsable distribution  » et placé sous la direction de Mme C…, directrice générale salariée.

L’appelant ne pouvait être directeur général mandataire social et être subordonné à une directrice générale salariée.

Enfin, la société ne produit pas de documents pour démontrer que M.Y… a effectivement assumé les responsabilités d’un directeur général mandataire social. Sa participation à 2 comités de gestion de Z… LOGISTIQUE en septembre et octobre 2002 n’est pas significative dès lors que Mme C… y participait aussi.

Ces éléments concordants prouvent qu’en réalité M.Y… exerçait des fonctions techniques salariées, et non des fonctions de directeur général mandataire social, ayant conservé au sein de la nouvelle société Z… DISTRIBUTION des attributions semblables à celles exercées au sein de la première société Z… DISTRIBUTION.

L’accord transactionnel du 31 janvier 2003 est nul, car :

-il règle les conséquences de la révocation alors que M.Y…, salarié, a été licencié

-il ajoute qu’il reconnaît ne pas être titulaire d’un contrat de travail, alors que tel était le cas et que le statut salarié est d’ordre public.

En l’absence de lettre de licenciement, la rupture est infondée.

M.Y… a droit :

-aux indemnités de rupture, dont le montant est justifié et non contesté

-à des dommages et intérêts qui ne peuvent être inférieurs au salaire des 6 derniers mois, puisqu’il avait plus de 2 ans d’ancienneté, et que la société avait au moins 11 salariés.

Il avait 12 ans d’ancienneté.

Il a retrouvé un emploi :

-au sein de la société MORAND du 1er février au 27 juin 2003

-au sein de la société AUDAS DISTRIBUTION le 8 décembre 2003.

Son préjudice matériel et moral n’a pas excédé le minimum et sera fixé à 48000 €.

Le fond et la procédure ne se cumulent pas en application de l’article L 122-14-4 du Code du travail.

Il convient d’ordonner le remboursement des indemnités de chômage, dans la limite d’un mois.

En tant que salarié, M.Y… avait droit à des congés payés ; il n’a pas pris ceux acquis en 2001 / 2002 et en 2002 / 2003 ; les sommes réclamées à ce titre sont justifiées.

Dès lors que la transaction est nulle, M.Y… doit restituer la somme perçue ou payée pour son compte en application de celle-ci, soit 57860 €.

La procédure intentée n’est pas abusive, mais fondée.

Il est inéquitable que M.Y… supporte ses frais irrépétibles. Compte tenu d’une audience supplémentaire (départition) il lui sera alloué 2200 €.

Enfin, la société supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

DÉCLARE recevables les appels, principal et incident,

INFIRME le jugement, et statuant à nouveau,

CONDAMNE la SAS Z… LOGISTIQUE, venant aux droits de la SAS Z… DISTRIBUTION, à payer à Monsieur Jacques Y… :

-23782,05 € de préavis

-2378,20 € de congés payés afférents

-4156,62 € de congés payés 2002

-4566,31 € de congés payés 2003

-38051,28 € d’indemnité de licenciement-48000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-2200 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de procédure civile

ANNULE la transaction du 31 janvier 2003

CONDAMNE Monsieur Jacques Y… à restituer à la SAS Z… LOGISTIQUE, venant aux droits de la SAS Z… DISTRIBUTION,57860 €, montant de la transaction

REJETTE les dommages et intérêts pour procédure abusive

ORDONNE le remboursement par la SAS Z… LOGISTIQUE, venant aux droits de la SA Z… DISTRIBUTION, des indemnités de chômage payées à Monsieur Jacques Y… du jour de la rupture, dans la limite d’un mois d’indemnités

CONDAMNE la SAS Z… LOGISTIQUE, venant aux droits de la SA Z… DISTRIBUTION, aux dépens de première instance et d’appel.

Et le présent arrêt a été signé par Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre et par Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


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