Cour d’appel de Paris, du 16 janvier 2002, 2001/3

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Cour d’appel de Paris, du 16 janvier 2002, 2001/3

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS 1ère chambre, section H ARRET DU 7 MAI 2002

(N , 6 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 2001/22360 2001/22361, 2001/22362, 2001/22363 Décision dont recours : décision n°10909 de la Commission des opérations de bourse en date du 13/11/2001 Nature de la décision : Contradictoire Décision : REJET DEMANDEURS AU RECOURS : – Monsieur Eric X…, demeurant xxxxxxxxxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxxxx (GRANDE BRETAGNE) – Monsieur Olivier Y…, demeurant xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx PARIS – Monsieur Franck Z…, … par la SCP VERDUN-SEVENO, avoué, 5, rue Récamier – 75007 PARIS Assistés de Me E. HEMMERDINGER, avocat, 94, boulevard de Courcelles 75017 PARIS – Monsieur Jean-Yves A…,

demeurant 171, boulevard Péreire – 75017 PARIS Assisté de Me C. LEGER, avocat, 2, rue de Logelbach – 75017 PARIS EN PRESENCE DE : – La Commission des opérations de bourse, 17, Place de la Bourse 75082 Paris Cédex 2 Représentée aux débats par Madame B. GARRIGUES, munie d’un mandat régulier. COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Madame RENARD-PAYEN, Président Monsieur SAVATIER, Conseiller Monsieur MAUNAND, Conseiller GREFFIER : Lors des débats : Madame JAGODZINSKI Lors du prononcé du délibéré : Madame PADEL MINISTERE PUBLIC :

Monsieur WOIRHAYE, Substitut Général DEBATS : A l’audience publique du 2 Avril 2002, ARRET : Prononcé publiquement le SEPT MAI DEUX MILLE DEUX, par Madame RENARD-PAYEN, Président, qui a signé la minute avec Madame PADEL, Greffier. Après avoir, à l’audience publique du 2 avril 2002, entendu les conseils des parties, les observations de Madame le représentant de la Commission des opérations de bourse et celles du Ministère Public, les conseils des parties ayant eu la parole endernier

;

Au cours du mois de novembre 1999, la société Valtech, cotée au nouveau marché depuis le 12 avril 1999, a procédé à une augmentation de capital par émission d’actions à raison d’une action nouvelle pour dix actions anciennes, sans droit préférentiel de souscription. 408 939 actions nouvelles ont été émises au prix de 32 euros alors que le 10 novembre 1999 l’action Valtech cotait 45 euros. Les souscriptions étaient ouvertes du 10 au 17 novembre 1999 inclus, période pendant laquelle les anciens actionnaires disposaient d’un droit de priorité. Une note d’opération, ayant reçu le 8 novembre 1999 le visa n° 99-1381 de la Commission des opérations de bourses (ci-après la C.O.B.), détaillait les modalités de cette émission. Le paragraphe 2.2.8 de la note précisait que : « Les dirigeants fondateurs de Valtech, Jean-Yves A…, Olivier Y…, Eric X…, Frank Z… et Martin Forsling, qui détiennent à ce jour 32,15 % du capital et 32,85 % des droits de vote de la société, ont fait connaître leur intention de ne pas souscrire à la présente augmentation de capital. ».

Malgré cette déclaration, quatre dirigeants de l’entreprise, à savoir MM. A…, Y…, X… et Z…, ont souscrit 102 833 actions Valtech dans le cadre de l’augmentation de capital alors que ce changement, par rapport à leurs intentions initiales, n’a pas été porté à la connaissance du public.

A l’issue de l’enquête, le rapporteur a notifié à MM. A…, Y…,

X… et Z… des griefs sur le fondement du règlement n° 98-07 de la C.O.B. relatif à l’obligation d’information du public.

Par décisions n° 10907, 10909, 10910 et 10908 du 13 novembre 2001, la C.O.B. a prononcé une sanction pécuniaire de 30 000 euros à l’encontre de MM. Z…, X… et Y… et de 40 000 euros à l’encontre de M. A… et a ordonné la publication des décisions au Bulletin mensuel de la C.O.B. et au Journal officiel de la République française.

Le 21 décembre 2001, MM. A…, Y…, X… et Z… ont chacun formé un recours en annulation et, subsidiairement, en réformation contre ces décisions.

LA COUR,

Vu le mémoire déposé le 18 janvier 2002 par lesquels MM. Y…, X… et Z… demandent à la Cour, à titre principal, d’annuler en toutes leurs dispositions les décisions de sanction prononcées par la C.O.B. à leur encontre, à titre subsidiaire, de fixer à une somme symbolique le montant de chaque sanction pécuniaire prononcée contre eux et d’annuler la décision de publication, au motif que :

– le manquement reproché ne peut leur être imputé dès lors qu’ils ne sont pas les auteurs de la note d’information

– la violation de l’article 5 du règlement n° 98-07 ne saurait résulter de l’exercice de leur droit d’actionnaires, en l’occurrence la souscription d’actions à la suite de l’obtention d’un prêt ayant rendu l’opération possible

– le manquement allégué n’a eu aucune incidence sur le marché,

Vu le mémoire déposé le 18 janvier 2002 par lesquels M. A… demande à la Cour, à titre principal, de prononcer l’annulation de la décision de sanction prononcée à son encontre, à titre subsidiaire, de fixer à un montant symbolique le quantum de la sanction pécuniaire

prononcée et d’annuler la décision de publication, au motif que :

– son changement d’intention ne pouvait, compte tenu de sa date, être porté à la connaissance du public

– la C.O.B. a retenu dans sa décision trois griefs qui n’étaient pas visés dans la notification et sur lesquels il n’a pas été à même de répondre et qui, au demeurant, ne sont pas constitutifs d’une violation des articles 5 et 8 du règlement n° 98-07

– le manquement allégué n’a pas eu pour effet de fausser le fonctionnement du marché,

Vu les conclusions de la C.O.B. déposées le 20 février 2002 tendant à la confirmation de la décision déférée,

Vu les mémoires en réponse de MM. A…, Y…, X… et Z…,

Le ministère public ayant été entendu en ses observations orales tendant au rejet des recours,

Les requérants ayant eu la parole en dernier,

SUR CE,

Considérant que l’article 5 du règlement n° 98-07 de la C.O.B. relatif à l’obligation d’information du public énonce que « lorsqu’une personne a été amenée à faire état publiquement de ses intentions et que, par la suite, ces dernières ne sont plus conformes à sa déclaration initiale, elle est tenue de porter immédiatement à la connaissance du public ses nouvelles intentions. » ; que l’article 8 dudit règlement précise que « toute information visée aux articles 4 à 7 doit être portée à la connaissance du public sous la forme d’un communiqué dont l’auteur s’assure de la diffusion effective et intégrale et que la Commission des opérations de bourse doit recevoir au plus tard au moment de sa publication. » ;

Que dans la note d’opération, mise à la disposition du public à

l’occasion de l’augmentation de capital et ayant reçu le visa de la C.O.B., il était expressément mentionné, au paragraphe 2.2.8, dénommé « intentions des principaux actionnaires », que les cinq dirigeants fondateurs de la société Valtech, parmi lesquels figurent les quatre requérants, avaient fait connaître leur intention de ne pas souscrire à l’augmentation de capital et que les autres actionnaires n’avaient pas fait état de leurs intentions ; qu’il est constant que le comportement ultérieur des requérants devait contredire la déclaration d’intention initiale sans qu’une nouvelle information n’ait été portée à la connaissance du public dans les conditions prévues par l’article 8 du règlement n° 98-07 ; qu’en effet, MM. A…, Y…, Z… et X…, après avoir obtenu les trois premiers un prêt de la banque B.N.P. Paribas, le dernier un prêt de M. A…, ont souscrit, le 17 novembre 1999, à l’augmentation de capital pour un total de 102 833 actions Valtech, à raison de 37 278 titres pour M. A…, de 28 600 titres pour M. Y…, de 22 500 titres pour M. X… et de 14 455 titres pour M. Z… ; que les requérants ont vendu ces actions le 24 novembre 1999, par une cession de bloc hors marché, sur la base d’un cours d’environ 70 euros ;

Considérant que la circonstance selon laquelle seul M. A…, en sa qualité de président du conseil d’administration de la société Valtech, a signé la note d’opération visée par la C.O.B. ne pouvait exonérer MM. Y…, Z… et X… de leur obligation d’informer le public de leur changement d’intention dès lors qu’il n’est pas contesté qu’ils ont la qualité de « dirigeants » de la société Valtech au sens de l’article 1er du règlement n° 98-07, qu’ils n’ont pas contredit l’information portée pour leur compte à l’intention du public dans la note d’opération dont ils ne pouvaient ignorer la teneur, et qu’ils doivent, en conséquence, se voir

imputer, en qualité de co-auteurs, le manquement en cause ;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, c’est bien le grief tiré du défaut d’information du public relatif à leur changement d’intention qui a été retenu par la C.O.B. pour sanctionner leurs agissements et ce, en dépit de motifs surabondants que querellent de manière inopérante devant la Cour MM. A…, Y…, Z… et X… à qui il n’a pas été contesté leur droit de participer à la souscription en cause en leur qualité d’actionnaires titulaires d’un droit de priorité ;

Qu’il ressort, en effet, des éléments recueillis au cours de l’enquête que MM. A…, Y…, Z… et X… avaient la possibilité, avant l’expiration du délai de souscription, de faire connaître leur changement d’intention dans les conditions prévues à l’article 8 du règlement 98-07 alors que les prêts consentis par la banque BNP Paribas à trois d’entre eux étaient finalisés les 15 et 16 novembre 1999 ; qu’à cet égard, la circonstance selon laquelle les fonds n’ont été mis à la disposition des emprunteurs que le 17 novembre 1999 est inopérante ; que les requérants ne peuvent donc se prévaloir utilement de l’incertitude dans laquelle ils se trouvaient de pouvoir souscrire à l’augmentation de capital au motif que cette dernière était subordonnée à l’octroi de prêts bancaires dès lors qu’à compter des 15 et 16 novembre 1999, ayant obtenu les prêts sollicités, ils étaient à même de pouvoir y souscrire et de faire connaître leur changement d’intention ;

Considérant que ces manquements ont eu pour effet, au moment de leur commission, ainsi que l’a retenu la C.O.B. dans les décisions querellées, de porter atteinte au principe d’égalité d’information et de traitement des investisseurs énoncé à l’article L. 621-14 du code monétaire et financier ; qu’il importe peu, en conséquence, que les faits relatifs au manquement à la bonne information n’aient provoqué

aucune variation des cours du titre concerné ; que, de surcroît, la C.O.B. a justement relevé que le manquement en cause a également eu pour effet de fausser le fonctionnement du marché dans la mesure où il a donné à penser aux investisseurs institutionnels que la quotité de titres qui était susceptible de leur être attribuée était plus importante que ce qu’elle a finalement été en fonction de la souscription des dirigeants ;

Considérant que, dès lors que MM. A…, Y…, Z… et X… ont commis un manquement aux dispositions des articles 5 et 8 du règlement n° 98-07 et de l’article L. 621-14 du code monétaire et financier, la C.O.B. pouvait leur infliger les sanctions prévues à l’article L. 621-15 dudit code ; qu’au regard de la gravité du manquement à la bonne information du public et des avantages qu’en ont retiré les requérants, la C.O.B. a fait une juste application du principe de proportionnalité en prononçant à l’encontre de MM. Y…, Z… et X… une sanction pécuniaire de 30 000 euros et à l’encontre de M. A… une sanction pécuniaire de 40 000 euros et en ordonnant la publication des décisions au Bulletin mensuel de la C.O.B. et au Journal officiel de la République française ;

Qu’il convient en conséquence de rejeter les recours de MM. A…, Y…, Z… et X… et de condamner in solidum les requérants aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Rejette les recours de MM. A…, Y…, Z… et X… et les condamne in solidum aux dépens.

LE GREFFIER

LE PRESIDENT


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