Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 juillet 2012, 11-23.280, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 juillet 2012, 11-23.280, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que l’assemblée générale de la société L’inédit français, réunie le 30 juin 2006, à laquelle M. X… avait été convoqué sans y avoir assisté, l’a révoqué de son mandat d’administrateur ; qu’estimant que cette révocation était intervenue de manière brutale et sans que soit respecté le principe de la contradiction, M. X… a fait assigner la société ainsi que les autres actionnaires aux fins d’obtenir notamment l’annulation de cette décision ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen, qu’est abusive la révocation d’un administrateur intervenue sans que l’intéressé ait été mis en mesure de présenter préalablement ses observations ; que pour rejeter les demandes de M. X…, l’arrêt énonce que régulièrement convoqué à l’assemblée du 30 juin 2006, il s’est lui-même exclu des débats en décidant de ne pas s’y rendre de sorte qu’il est mal fondé à prétendre que les droits de la défense avaient été méconnus ; qu’en se déterminant ainsi, par un motif inopérant dès lors qu’il est constant que M. X… n’avait pas été préalablement informé du projet de révocation de son mandat et sans rechercher, ainsi qu’elle était invitée à le faire, si celui-ci avait été mis en mesure de présenter ses observations au conseil d’administration de la société, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu’ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que M. X… s’est abstenu de se rendre tant au conseil d’administration ayant précédé l’assemblée générale au cours de laquelle son éviction a été décidée qu’à cette dernière, et qu’il s’est ainsi de lui-même exclu des débats et ne peut dès lors se plaindre d’une violation de ses droits, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l’article 1382 du code civil ;

Attendu que, pour condamner M. X… au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive, l’arrêt retient, par motifs propres, que compte tenu du caractère éminemment familial des conflits décrits par chacune des parties dans leurs écritures respectives, en octroyant à chacun de ses adversaires un euro de dommages-intérêts, le tribunal a fait une juste et pertinente appréciation des faits de la cause, et par motifs adoptés, que les procédures engagées par l’administrateur nuisent tant à la société l’Inédit français qu’à sa présidente, qui s’était abstenue lors du vote relatif à sa révocation ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une faute de M. X… de nature à faire dégénérer en abus son droit de contester en justice la révocation de son mandat d’administrateur, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais en ses seules dispositions ayant condamné M. Jak X… à payer à la société l’Inédit Français, à MM. Alain et Michel X… et à Mme Aurélie X… des dommages-intérêts pour procédure abusive, l’arrêt rendu le 28 avril 2011, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société L’Inédit Français ainsi que MM. Alain et Michel X… et Mme Aurélie X… aux dépens et rejette leur demande ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à M. Jak X… le somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. Jak X….

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté M. X… de l’ensemble de ses demandes et D’AVOIR condamné M. X… à payer à Messieurs Alain et Michel X…, à Mme Aurélie X… et à la société l’Inédit Français des dommages et intérêts pour procédure abusive ;

AUX MOTIFS QUE il résulte de la combinaison des articles L 225-18 et L 225-105 du Code du commerce que l’administrateur est révocable ad nutum, la décision n’ayant pas à être motivée et pouvant être prise par l’assemblée générale même si la révocation de l’administrateur n’a pas été préalablement inscrite à son ordre du jour, sans qu’il y ait à démontrer, en cette dernière hypothèse, une imprévision ou une urgence ; que Monsieur jack X… estime ne pas avoir été mis en mesure de présenter ses observations devant l’assemblée, pour en déduire que sa révocation, survenue hors sa présence, est brutale intempestive et vexatoire ; que le tribunal a relevé sans être démenti par Monsieur Jack X… en cause d’appel que régulièrement convoqué au conseil d’administration du 10 mai 2006 ayant précédé la réunion de l’assemblée générale litigieuse, il ne s’y est pas rendu ; que l’appelant ne conteste pas davantage avoir été régulièrement convoqué au conseil d’administration du 30 juin 2006 et qu’en décidant de ne pas s’y rendre il s’est lui-même exclu des débats, de sorte que comme l’ont pertinemment relevé les premiers juges, il est aujourd’hui mal fondé à prétendre que les droits de sa défense auraient été méconnus ; que Monsieur Jak X… ne rapporte pas davantage la démonstration, qui lui incombe, de l’existence de circonstances portant atteinte à la réputation ou à l’honneur, les intimés faisant valoir à juste raison que les termes du procès-verbal de l’assemblée générale litigieuse ne contiennent aucun propos vexatoire ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU’ il est établi que M. Jak X… avait bien été convoqué par lettre AR du 28 avril 2006 au Conseil d’administration du 10 mai 2006 devant préparer l’assemblée générale et par lettre RAR du 12 juin 2006 à l’assemblée générale du 30 juin 2006 ; qu’il n’est venu à aucune de ces deux réunions ; que la fin du procès-verbal de cette assemblée générale est ainsi rédigé : « l’ordre du jour étant épuisé, M. Michel X… demande la parole. M. Michel X… propose la révocation du mandat d’administrateur de MM. Jak et Jean X…. La présidente pour s’assurer de la recevabilité de cette demande et de la compétence de l’assemblée pour se prononcer sur ce point, demande au bureau de consulter le code de commerce sur ce point. Il est fait lecture des articles L 225-18 et L 225-105 et de la jurisprudence relative à cette question. Il en résulte que les administrateurs sont révocables par décision de l’AGO à toute époque et qu’il n’est pas nécessaire que la révocation figure à l’ordre du jour. En conséquence cette proposition est soumise au vote. Cette proposition est adoptée à la majorité des voix, MM. Alain et Michel X… ayant voté pour et Mme Aurélie X… s’étant abstenue » ; que M. Jak X… ne saurait reprocher à l’Inédit Français, le fait que cette décision ait été prise de façon non contradictoire alors qu’il s’est abstenu de venir à une Assemblée à laquelle il avait été régulièrement convoqué, et alors qu’il venait de délivrer une assignation pour communication de documents ; que la rédaction de cette délibération ne présente aucun propos désobligeant à l’encontre de M. Jak X…, qu’elle n’a pas fait l’objet de communiqué de presse, et qu’elle ne cause aucun préjudice distinct pour M. Jak X… que celui de ne plus faire partie du conseil d’une société qu’il avait contribué à créer mais dont il ne possédait que moins de 10 % du capital ; que l’assemblée générale de l’Inédit Français n’a fait qu’utiliser le droit qu’elle tire de l’article L 225-18 du Code de commerce en révoquant le mandat de M. Jak X…, que cette révocation est régulière et ne saurait engager la responsabilité de l’Inédit Français et/ou de ses actionnaires ;

ALORS QU’est abusive la révocation d’un administrateur intervenue sans que l’intéressé ait été mise en mesure de présenter préalablement ses observations ; que pour rejeter les demandes de M. X…, l’arrêt énonce que régulièrement convoqué à l’assemblée du 30 juin 2006, il s’est lui-même exclu des débats en décidant de ne pas s’y rendre de sorte qu’il est mal fondé à prétendre que les droits de la défense avaient été méconnus ; qu’en se déterminant ainsi, par un motif inopérant dès lors qu’il est constant que M. X… n’avait pas été préalablement informé du projet de révocation de son mandat et sans rechercher, ainsi qu’elle était invitée à le faire, si celui-ci avait été mis en mesure de présenter ses observations au conseil d’administration de la société, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR condamné M. Jak X… à payer à la société l’Inédit Français, à Messieurs Alain et Michel X… et à Mme Aurélie X… des dommages et intérêts pour procédure abusive ;

AUX MOTIFS QUE compte tenu du caractère éminemment familial des conflits décrits par chacune des parties dans leurs écritures respectives, qu’en octroyant à chacun des adversaires de Monsieur Jak X… un euro de dommages et intérêts, le tribunal a fait une juste et pertinente appréciation des faits de la cause ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU’il résulte des pièces communiquées que la présente procédure s’inscrit dans un contexte procédural dont M. Jak X… porte la responsabilité, qu’il ait agi en défense ou en demande ; que ces procédures nuisent tant à la société l’Inédit français qu’à sa présidente, Mme Aurélie X… qui s’était abstenue lors du vote relatif à la révocation de M. Jak X…, et à MM. Alain et Michel X… ;

ALORS QU’en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une faute de M. X… de nature à faire dégénérer en abus son droit de contester en justice la révocation de son mandat d’administrateur, la Cour d’appel a violé l’article 1382 du Code civil.


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