Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 5 mai 2009, 07-44.835, Inédit

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Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 5 mai 2009, 07-44.835, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’engagé à compter du 15 juin 2000 en qualité d’agent  » technico-commercial  » par la société Vibra, M. X… a été licencié le 13 juillet 2004 pour faute grave pour avoir, notamment, d’une part, fin octobre 2003, diffusé des informations commerciales et des documents confidentiels à un actionnaire minoritaire qui les a utilisés dans une procédure judiciaire à l’encontre de la société et du gérant et, d’autre part, s’être absenté sans motif les 17, 20 et 21 novembre 2003 ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 122-40, devenu L. 1331-1, du code du travail et 1134 du code civil ;

Attendu que pour dire la rupture justifiée par une faute grave, l’arrêt retient que, dans ses lettres des 3 et 21 novembre 2003, l’employeur se contentait de demander des explications au salarié et que ces lettres ne sauraient en aucun cas être considérées comme des avertissements ; que n’ayant pas obtenu de réponse satisfaisante de la part de son salarié, l’employeur était en droit de le sanctionner à condition de ne pas évoquer des faits antérieurs au 5 octobre 2003, puisque le salarié avait été convoqué le 5 décembre 2003 à l’entretien préalable au licenciement ;

Attendu cependant que constitue une sanction toute mesure dépassant la simple observation verbale prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ;

Qu’en statuant comme elle l’a fait, alors qu’il résultait de ses constatations que, dans les lettres adressées au salarié les 3 et 21 novembre 2003, l’employeur lui reprochait, en les considérant comme fautifs, les faits ultérieurement invoqués à l’appui de la rupture, en sorte que ces lettres avaient constitué une sanction disciplinaire et que les mêmes faits ne pouvaient être une seconde fois sanctionnés, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu l’article L. 212-1-1, devenu L. 3171-4, du code du travail ;

Attendu que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties et que le juge ne peut rejeter une demande de paiement d’heures de travail en se fondant sur l’insuffisance de preuve d’un salarié dès lors que celui-ci produit des éléments de nature à étayer sa demande ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d’heures supplémentaires, la cour d’appel a retenu que l’intéressé fournissait à l’appui de sa demande un décompte élaboré a posteriori par ses soins et le témoignage d’un ancien salarié de la société en conflit avec celle-ci ; que le caractère unilatéral du récapitulatif et le montant excessif des heures supplémentaires, soit disant effectuées, ôtaient à ce document toute force probante ; que, s’agissant du témoignage de l’ancien salarié, l’absence de précision des jours et heures de travail supplémentaires effectuées par M. X… ne permettait pas d’étayer de manière efficace sa réclamation ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations que la prétention de M. X… était étayée de divers éléments, la cour d’appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 janvier 2007, entre les parties, par la cour d’appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Bordeaux ;

Condamne Mme Y…, ès qualités, et l’AGS-CGEA Midi-Pyrénées aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me ROUVIERE, avocat aux Conseils pour M. X…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement du 9 juin 2005, en ce qu’il a dit que le licenciement pour faute grave était justifié, et d’avoir, en conséquence débouté Monsieur X… de l’ensemble de ses demandes de ce chef

AUX MOTIFS QUE la longue lettre de licenciement pour faute grave adressée le 2 janvier 2004 à Jean-Claude X… développe les griefs suivants :- diffusion d’informations commerciales et de documents confidentiels à un actionnaire minoritaire générant utilisation par ce dernier dans une procédure judiciaire à l’encontre de la société et du gérant ;- absences de travail les 17, 20 et 21 novembre 2003 ;- dégradation alarmante de vos résultats commerciaux ; que si ce dernier grief ne peut justifier un licenciement pour faute grave, tel n’est pas le cas des deux premiers ; que contrairement à ce que soutient Jean-Claude X…, les courriers que lui a adressés le gérant de l’entreprise les 3 et 21 novembre 2003, évoquant les deux premiers griefs, n’étaient pas des avertissements, mais des demandes d’explication ; que n’ayant pas obtenu de réponse satisfaisant de la part de son salarié, l’employeur était en droit de le sanctionner à condition de ne pas évoquer des faits antérieurs au 5 octobre 2003, puisque le salarié a été convoqué le 5 décembre 2003 à l’entretien préalable au licenciement ; que sur le premier grief, la lettre de licenciement fait référence à la communication par Jean-Claude X… d’informations sur les ventes de la société, à Monsieur A…, actionnaire minoritaire en conflit avec le gérant de la SARL VIBRA ; que les courriers échangés entre le 16 et le 31 octobre 2003 par l’appelant et Monsieur A…, versés aux débats confirment que bien qu’étant informé de l’existence d’une instance commerciale initiée par Monsieur A… pour faire désigner un mandataire ad’hoc de la société, l’appelant avait, en toute connaissance de cause de son utilisation devant le Tribunal de commerce, établi et communiqué à Monsieur A… un compte rendu sur les ventes de la société par type de client et par type de marché, alors même qu’il s’était engagé auprès du gérant au mois de juin 2003 de ne pas avoir de contact avec cet actionnaire ; que ce comportement caractérise à lui seul un manque de loyauté à l’encontre de l’employeur justifiant la rupture du lien contractuel et rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis ; que sur le second grief, les absences injustifiées de Jean-Claude X…, dans la période où il est établi qu’il collaborait à déstabiliser la SARL VIBRA et son gérant, constituaient également une faute grave justifiant son licenciement ; que la faute grave prive le salarié de préavis et de toute indemnité liée à la rupture ; qu’en conséquence, les jugements entrepris seront confirmés en ce qu’ils ont débouté l’appelant de l’ensemble de ses demandes ;

ALORS QUE la Cour d’appel dénature les lettres émanant de la SARL VIBRA des 3 et 21 novembre 2003, en affirmant qu’elles ne constituent que des demandes d’explication et ne sont pas des avertissements, là où ces documents comportent des accusations précises contre Monsieur X… lui reprochant de porter un grave préjudice à la société, et lui demandant « un changement d’attitude radical » ; que dès lors, en refusant de considérer qu’il s’agissait d’avertissements ne pouvant servir ultérieurement de fondement au licenciement pour faute grave, la Cour d’appel a violé les articles 1134 du code civil et L 122-40 du code du travail ;

ALORS QUE la faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis, le licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur ait eu connaissance des faits allégués ; qu’en l’espèce, la cour d’appel ne pouvait considérer légalement justifié le licenciement pour faute grave, dès lors que d’une part, et contrairement à ce qu’affirme l’arrêt, la lettre de licenciement évoquait des faits remontant au mois de juin 2003, et que d’autre part, comme le soulignait Monsieur X…, son licenciement était tardif puisque sa faute grave supposée était connue de l’employeur plus de deux mois avant son licenciement ; qu’ainsi l’arrêt est entaché d’une violation des articles L 122-6, L 122-8, L 122-9, L 122 – 40 et L 122 – 41 du code du travail ;

ALORS QUE l’absence contestée du salarié à son poste de travail ne saurait constituer une faute grave justifiant un licenciement sans indemnité ; que dès lors l’arrêt est à nouveau entaché d’une violation de l’article L 122-40 du code du travail ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir débouté Monsieur Jean-Claude X… de sa demande en paiement d’heures supplémentaires.

AUX MOTIFS QU’IL appartient au salarié, qui réclame le bénéfice d’heures supplémentaires, de produire des éléments de nature à étayer sa demande ; qu’en l’espèce, Jean-Claude X… verse aux débats un récapitulatif établi a postériori par ses soins ; que sur la base de ce document l’appelant réclame le paiement de 592 heures supplémentaires pour les années 2002 et 2003, soit l’équivalent de 17 semaines complètes de travail ; qu’eu égard à l’importance de sa réclamation il est surprenant qu’il n’ait formulé aucune demande à ce titre à son employeur pendant le déroulement de la relation contractuelle alors qu’il n’a pas hésité à réclamer à plusieurs reprises et avec succès des rappels de salaire et l’intégration de ses commissions dans son salaire de base ; que le caractère unilatéral de ce récapitulatif et le montant excessif des heures supplémentaires, soit-disant effectuées, ôtent à ce document toute force probante ; que le témoignage de Monsieur Z… Daniel, ancien cadre de la SARL VIBRA, en conflit avec celle-ci qui se contente d’affirmer que Jean-Claude X… effectuait plus de 35 heures de travail par semaine sans précision de jours et d’heures, n’est pas non plus de nature à étayer de manière efficace la réclamation de l’appelant qui en a été débouté à juste titre par le Conseil ;

ALORS QUE selon l’article L 212-1-1 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu’en faisant peser la charge de la preuve uniquement sur le salarié, notamment en écartant sans motif le témoignage de Monsieur Z…, l’arrêt a méconnu les règles de la preuve et violé les articles L 122-1-1 du code du travail et 1315 du code civil ;


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