Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 6 avril 2004), que la société France Télécom a déposé un projet d’offre publique d’échange simplifiée visant les actions de sa filiale, la société Orange, en précisant qu’au cas où elle détiendrait à l’issue de l’opération plus de 95 % du capital et des droits de vote de celle-ci, elle se réservait la possibilité de déposer un projet d’offre publique de retrait suivie d’un retrait obligatoire ;
que cette condition ayant été remplie, la société France Télécom a déposé un projet d’offre aux termes duquel elle s’engageait à acquérir, au prix unitaire de 9,50 euros, la totalité du reliquat des actions de la société Orange et demandait qu’il soit procédé au retrait obligatoire de ces actions dès la clôture de l’offre de retrait ; qu’après que le Conseil des marchés financiers eut déclaré cette offre recevable, la Commission des opérations de bourse (la COB) a, par décision du 17 novembre 2003, apposé son visa sur le projet de note d’information conjointe préparée par les sociétés France Télécom et Orange ; que l’Association pour la défense des actionnaires minoritaires (l’ADAM) ainsi que neuf personnes physiques se présentant comme actionnaires de la société Orange, invoquant l’absence de cohérence et de pertinence de l’information figurant dans cette note, ont demandé l’annulation de la décision de la COB ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. et Mme X…, M. Y… et MM. Z… et A… B… font grief à l’arrêt d’avoir déclaré leur recours irrecevable, alors, selon le moyen :
1 ) que M. et Mme X… versaient aux débats un relevé de compte titres du Crédit agricole mentionnant 230 actions Orange à la date du 31 décembre 2002 ; qu’en retenant que les documents qu’ils produisaient ne faisaient état de la détention de titres Orange que postérieurement au 13 novembre 2003, la cour d’appel a dénaturé les pièces versées aux débats et méconnu les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;
2 ) que MM. Z… et A… B… produisaient deux attestations du Crédit mutuel certifiant que leurs comptes titres, comprenant respectivement 150 et 280 actions Orange, n’avaient pas enregistré d’opérations sur ce titre depuis le 1er octobre 2003, ce qui démontrait la possession d’actions Orange au plus tard à cette date ;
qu’en retenant que les documents qu’ils produisaient ne faisaient état de la détention de titres Orange que postérieurement au 13 novembre 2003, la cour d’appel a de nouveau dénaturé les pièces versées aux débats et méconnu les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;
3 ) que les deux bulletins-réponse du Crédit agricole versés aux débats par M. Laurent Y… mentionnaient la position de son compte titres au 11 septembre et au 19 novembre 2003, indiquant qu’il comportait 1 630 actions Orange ; qu’en retenant que ces bulletins-réponse n’attestaient pas de la détention d’actions Orange au 13 novembre 2003, la cour d’appel a aussi dénaturé ces pièces, et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d’appel a estimé, sans dénaturation, que M. et Mme X…, MM. Z… et A… B… et M. Y… ne démontraient pas qu’ils avaient la qualité d’actionnaires de la société Orange à la date de la décision critiquée ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen :
Attendu que l’ADAM et M. C… font grief à l’arrêt d’avoir rejeté leur demande d’annulation de la décision de la COB, alors, selon le moyen, que l’information donnée au public doit être précise et sincère ;
qu’en l’espèce, les requérants faisaient valoir que les « notes d’analystes » litigieuses émanaient de banques qui étaient toutes en relations d’affaires avec France Télécom et Orange, ce qui était établi par l’avertissement que comportaient ces notes quant à leur manque d’objectivité découlant de ces liens ; qu’ils faisaient encore valoir que la note d’information relative à l’OPR ne mentionnait ni l’identité de ces analystes, ni leurs liens avec les initiateurs de l’offre ; qu’en se bornant à relever, pour refuser d’annuler le visa de la COB, que ces notes étaient couramment utilisées dans le cadre des évaluations et qu’une liste des notes utilisées avait été produite aux débats, sans rechercher si, comme le demandaient les requérants, le silence ainsi gardé par la note d’information elle-même sur le manque d’objectivité des analystes n’avait pas faussé l’information donnée au public, qui n’avait pas bénéficié d’une communication loyale et transparente sur le mode de fixation du prix, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 412-1 et L. 621-8 du Code monétaire et financier, ensemble les articles 2 et 3 du règlement de la COB n° 98-07 ;
Mais attendu que l’arrêt retient que la note d’information expose de manière précise, s’agissant du critère des comparaisons boursières, que le consensus d’analystes a été élaboré « à partir d’une moyenne des agrégats prévisionnels des sociétés comparables, issus des notes d’analystes les plus récentes » et que ce consensus « s’appuie en moyenne sur cinq notes d’analystes pour chaque société comparable » ; que l’arrêt relève encore qu’une liste des notes utilisées en l’espèce a été communiquée par les sociétés France Télécom et Orange et que des extraits en ont été régulièrement produits ; qu’en l’état de ces constatations et énonciations faisant ressortir que le manque d’objectivité allégué n’était pas établi, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l’Association pour la défense des actionnaires minoritaires, M. et Mme X…, M. D…, M. C…, M. E… de F…, M. G…, M. Y… et MM. A… et Z… B… aux dépens ;
Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille six.