Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général GERONIMI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
– Z… Joël,
contre l’arrêt de la cour d’appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 10 juin 1998, qui, pour abus de confiance et infraction à la législation sur les sociétés, l’a condamné à 10 mois d’emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d’amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 433, 4 , de la loi du 24 juillet 1966, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable du délit de majoration frauduleuse d’apport et l’a condamné pénalement et civilement ;
« aux motifs qu’ « il ressort des pièces de la procédure et notamment de l’expertise diligentée au cours de l’information que la valeur du fonds de commerce a été manifestement surévaluée dans le seul but d’éviter le dépôt de bilan des époux X… en mettant à la charge de la société Le Globe le passif de 2 012 000 francs que M. X… aurait été incapable d’honorer compte tenu des pertes importantes réalisées par le fonds de commerce ; (…) il a donc sciemment attribué à cet apport en nature une valeur supérieure à sa valeur réelle à des fins purement personnelles et en toute connaissance de cause ; (…) s’il ressort du rapport de l’expert que l’évaluation de l’apport en nature faite par Bruno Y… n’était pas adaptée aux circonstances économiques particulières de l’entreprise, force est de constater que preuve n’est pas rapportée de ce que Bruno Y… ait agi dans un but frauduleux, le choix de la méthode d’évaluation étant du commissaire aux apports ; la légèreté dont il a fait part en bâclant la mission qui lui avait été donnée et en ne s’en tenant qu’aux documents remis par les futurs associés, sans aller vérifier par lui-même et sur place les allégations de ceux-ci, est insuffisante pour caractériser l’intention frauduleuse… » ;
« alors que le délit de majoration frauduleuse d’apport implique le constat du caractère frauduleux de l’évaluation ; que l’arrêt attaqué, qui écarte ce caractère frauduleux en ce qui concerne le commissaire aux apports qui avait le libre choix de la méthode d’évaluation, et à qui l’ensemble des documents utiles à sa mission avait été remis, ne pouvait retenir la seule culpabilité de l’un des associés au motif qu’il avait sciemment attribué à l’apport une valeur supérieure à sa valeur réelle, sans constater le caractère frauduleux de cette attribution, par voie d’omission, de dissimulation ou de fausseté des documents remis au commissaire aux apports, privant ainsi sa décision de base légale » ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 314-1 du Code pénal, 1998, alinéa 2, du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d’abus de confiance et l’a condamné pénalement et civilement ;
« aux motifs qu’il avait fait effectuer des travaux pour le compte de la SA Le Globe, financés par l’association Maci Loisirs, sans autorisation du conseil d’administration ; qu’il avait garanti sans autorisation des prêts bancaires des époux X…, exploitants du fonds de commerce ; que « l’autorisation donnée par la CA du 22 février 1990, même si elle était générale, ne prévoyait nullement ce genre d’opérations. Quant aux autres autorisations qui ont pu être données par les conseils d’administration des 8 octobre et 6 décembre 1990, elles sont postérieures à ces agissements frauduleux… » ; qu’il avait procédé à des avances de fonds de Maci à Maci Loisirs dans le but de permettre à Maci Loisirs de refinancer à son tour la trésorerie déficitaire de la SA Le Globe ; qu’il ne peut se prévaloir de l’autorisation du conseil d’administration de Maci du 29 mai 1989 qui autorisait une avance de trésorerie à Maci Loisirs limitée à 500 000 francs ; que les avances faites par Maci Loisirs à la société Le Globe n’entraient pas dans le champ des autorisations des conseils d’administration des 8 octobre et 6 décembre 1990 ;
« alors qu’en s’abstenant de préciser les raisons pour lesquelles, selon elle, les mandats en cause excluaient de leur champ d’application les opérations critiquées, et en tout cas, en quoi les autorisations postérieures n’étaient pas de nature à ratifier les actes du mandataire, la cour d’appel a privé sa décision de base légale » ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 1382 du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris ayant condamné Joël Z… à payer à la société Maci Mutuelle la somme de 1 228 000 francs ;
« aux motifs que « Joël Z… ne peut se prévaloir d’une quelconque autorisation de la Maci à effectuer ces opérations au-delà de 500 000 francs » ;
« alors que le montant des réparations ne saurait excéder le préjudice ; que l’arrêt attaqué, qui relève que le mandataire avait été autorisé à effectuer des avances de trésorerie à hauteur de 500 000 francs, se devait de retrancher cette somme du montant des réparations accordées à la partie civile ; faute d’avoir tiré de ses constatations les conséquences légales qui en découlaient, il a privé sa décision de base légale » ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué, partiellement reprises aux moyens, mettent la Cour de Cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu’intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l’allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer les préjudices en découlant ;
D’où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Gomez président, Mme de la Lance conseiller rapporteur, M. Schumacher conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Géronimi ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;